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Thermochronologie multi-méthodes appliquée aux massifs de Mont-Louis et du Canigou: Evaluation du rôle de la faille de la Têt sur leur exhumation

2. Le massif granitique de Mont-Louis!:

2.2 Présentation du massif!:

a) Structure!:

Le granite de Mont-Louis est un pluton composite de grande dimension (environ 660 km2

de superficie) rattaché aux massifs supérieurs selon la classification de Autran et al. (1970). Il est globalement allongé E-W et peut être divisé en trois parties (fig. III.5). La partie Est, la plus ancienne, se présente sous la forme d’un laccolite de 1,5 à 3 km d’épaisseur, reposant sur un plancher de gneiss oeillé (Dôme des Bouillouses) envahi de cheminées d’alimentation, et intrusif dans les séries paléozoïques inférieures du Conflent (Autran et Guitard, 1957). La partie centrale constitue une lame, déversée vers le sud, en prisme ouvert vers le haut de 7 à 8 km d’épaisseur. Elle alimente la partie ouest qui constitue une bulle

déversée vers le sud (appelée également granite d’Andorre) intrusive dans des séries sédimentaires allant jusqu’au Cabonifère inférieur (Soler, 1990). Le découpage du massif s’est réalisé par l’intermédiaire du jeu en décro-chevauchement dextre de couloirs de cisaillement NW-SE activé dans les conditions du faciès schiste vert et accentué par le fonctionnement de failles tardives de direction semblable. L’allongement E-W du massif est dû au fonctionnement de ces failles (Bouchez et Gleizes, 1995). Des bandes cisaillantes de même direction et de même cinématique sont connues dans d’autres massifs granitiques pyrénéens comme Bassiès (Majoor, 1988!; Gleizes et al., 1991), Roses-Cap de Creus (Carreras et Losantos, 1982) et Saint-Laurent (Soliva et al., 1991). L’âge du fonctionnement de ces zones de cisaillement reste mal connu. La possible influence de la tectonique alpine sera abordée en détail dans le chapitre V de ce mémoire.

Une auréole de métamorphisme de contact se développe dans l’encaissant métasédimentaire paléozoïque du granite. Celle-ci est bien caractérisée dans l’encaissant oriental du pluton (Guitard et al., 1998) où elle affecte les terrains épizonaux (métamorphisme régional) Paléozoïque inférieur. L’auréole interne est marquée par des cornéennes à sillimanite-feldspath potassique et cordiérite-feldspath potassique tandis que la partie externe est marquée par des schistes «!tachetés!» à porphyroblastes de cordiérite et de biotite pour les parties les plus externes auxquels s’associent des porphyroblastes d’andalousite. Aucune étude thermobaromètrique n’a été réalisée, mais des températures de l’ordre de 800° C contre le pluton et 400° C à la limite externe de l’auréole paraissent raisonnables (Guitard et al., 1998) au vu des assemblages minéralogiques observés.

b) Age de mise en place!:

D’abord considéré comme un intrusif post-tectonique (Autran et al., 1970) corroboré par une isochrone Rb-Sr composite (Quérigut + Millas + Mont-Louis) donnant un âge de 269 ± 12 Ma (Vitrac-Michard et Allègre, 1975a), il est maintenant admis, suite à plusieurs études structurales (Guitard et al., 1984!; Bouchez et Gleizes, 1995) que sa mise en place s’est opérée durant les phases de déformation hercynienne. Toutefois, deux hypothèses s’opposent. La première postule une mise en place au cours des phases tardives de déformation (D4-7 selon Guitard et al. 1984!; Laumonier et al., 1984). Elle s’appuie principalement sur l’observation des relations avec l’encaissant oriental où les isogrades du métamorphisme de contact associé au granite recoupent les isogrades du métamorphisme régional lui-même synchrone de la première phase de déformation tardive (D4). De plus le granite, à sa périphérie, présente des enclaves schistosées (déformation majeure hercynienne D3) alors que lui-même n’est jamais gneissifié. La deuxième hypothèse rend compte, suite à une étude structurale basée sur la technique d’Anisotropie de Susceptibilité Magnétique (ASM), d’une mise en place lors des phases précoces de déformation (Gleizes et Bouchez, 1989!; Bouchez et Gleizes, 1995!; Gleizes et al., 1997) associée à des cisaillement vers le SW similaires à ceux affectant la nappe du Canigou (Soliva et al., 1989!; Soliva, 1992). Dans cette hypothèse, les zones de cisaillement NW-SE seraient à rattacher à la phase majeure compressive hercynienne (D3 selon Laumonier et al., 1984!; D2 selon Gleizes et Bouchez, 1995) globalement orientée N-S et affecteraient de façon rétrograde les bordures du pluton déjà en partie cristallisé.

Une datation U-Pb sur des sphènes du métamorphisme de contact de la partie occidentale du pluton (Romer et Soler, 1995) a donné un âge de 305 ± 3 Ma. Cet âge est plus en accord avec les données structurales exposées précédemment sans qu’il soit possible de discriminer entre une hypothèse de mise en place lors des phases précoces ou celle lors des phases tardives, du fait que l’ensemble des déformations hercyniennes se déroulent sur un court laps de temps (10-15 Ma). De plus, il s’accorde avec les âges déterminés récemment par la méthode U-Pb sur zircon sur le granite de Bassiès (312 ± 2 Ma, Paquette et al., 1997), sur celui de Quérigut (307 ± 2 Ma, Roberts et al., 2000) et sur divers plutons du sud du Massif Central (306 ± 4 Ma, Brichau, 2000) constituant au même titre que les Pyrénées une zone externe de l’orogène Varisque ouest-européen.

c) Composition!:

Le pluton présente pour sa plus grande partie une composition calco-alcaline potassique avec des faciès pétrographiques évoluant depuis des tonalites à hornblende jusqu’à des granodiorites et des granites monzonitiques à biotite (fig. III.6)(Debon et al., 1996). Des faciès plus alumineux (Autran, 1986) apparaissent à la fois lors des phases précoces de mise en place (granite des Avellans) et lors des phases les plus tardives dans des méga-fentes orientées E-W (granite type Font-Romeu).

d) Echantillonnage!:

Quatre échantillons ont été prélevés dans le lobe oriental du pluton selon une transversale globalement E-W et à altitude croissante vers l’ouest (fig. III.3 et III.5). L’échantillon ML1, à la bordure est du pluton (100 mètres à l’ouest du village de Railleu sur la D4), a été choisi pour mener une étude géochronologique combinant divers systèmes de datation isotopique donnant accès à toute l’histoire thermique du pluton depuis sa cristallisation en profondeur jusqu’à son exhumation vers les niveaux les plus superficiels de la croûte. Il s’agit d’une granodiorite à quartz, biotite (XMg = 0,39-0,42), plagioclase (An 42-60), feldspath potassique, hornblende actinolitique (XFe = 0,41-0,47), zircon, apatite et opaques (cf. Annexe IIIE). Trois autres échantillons de ce granite ont également été analysés lors de ce travail!: ML2 (carrefour des routes D118 et D4 au nord de La Llagone) et ML3 (barrage des Bouillouses) sont des granodiorites du même type que ML1 tandis que ML6 (étang de Casteilla) est une granodiorite plus claire sans hornblende.