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CHAPITRE V : QUEL AVENIR POUR L’ELEVAGE SEMI-SEDENTARISE

Carte 4. Présentation générale de Laïndé Ngobara à partir du levé parcellaire

Source : Enquêtes, Kossoumna Liba’a Natali (2006)

Les premiers éleveurs à s’installer dans les deux territoires viennent du Nigeria. Ils ont fait leur entrée au Cameroun pour la première fois dans le lamidat de Tchéboa en 1969. A cette période, ils ne faisaient que traverser la zone où ils résident actuellement avec leurs animaux pour aller en transhumance au bord du lac de Lagdo. C’est en 1981 que le premier Mbororo s’est fixé sur le site actuel de Ndiam Baba. Les éleveurs de Laïndé Ngobara quant à eux se sont d’abord établis à l’endroit qui abrite actuellement le LANAVET (Laboratoire National Vétérinaire) d’où ils ont été expulsés en 1981 puis ont migré vers l’ouest de Djéfatou après leur expulsion. Quinze ans plus tard, la progression de l’agriculture les a obligés à quitter les lieux pour s’installer dans leur campement actuel en 1996.

Ndiam Baba et Laïndé Ngobara sont peuplés essentiellement d’éleveurs mbororo. L’habitat s’est organisé autour des premiers arrivants qui appartiennent à la même famille. Dans les deux cas, ils ont obtenu la terre auprès du laamii’do de Tchéboa. Ils ont en premier lieu contacté le ar’do de leur zone d’installation respective (ar’do de Djalingo pour les éleveurs de Ndiam Baba et celui de Djola pour ceux de Laïndé Ngobara). Ce dernier les a accompagnés voir le laamii’do de Tchéboa avec chacun deux taureaux (gooro laamii’do). Après l’accord du laamii’do, les ar’do respectifs ont permis aux éleveurs de s’installer sur les sites actuels qu’ils ont eux-mêmes choisis. Les limites de ces territoires sont marquées et connues des ar’do.

Après l’appropriation de ces deux territoires, les premiers venus (bibbe wuro) ont accueilli de nouveaux habitants (jananbe). Ces derniers s’adressent au jawro du nouveau village mbororo avec une somme de 30 000 Fcfa. Ce dernier retient 10 000 Fcfa comme frais

59 d’accueil et transmet le reste de la somme avec la demande d’installation au ar’do qui vient personnellement ou envoie un de ses fils indiquer une parcelle au nouvel arrivant où il peut s’installer et cultiver. Le nouvel arrivant doit s’acquitter régulièrement de la zakkat et de certaines collectes ponctuelles (umroore laamii’do) demandés par le laamii’do. Cependant, depuis plus de 5 ans, il n’y a plus d’espace à défricher ni à octroyer dans les deux territoires. C’est pour cela que les nouveaux arrivants n’obtiennent plus que des terres en prêt même pour y installer une habitation.

En 2006, on dénombrait 29 chefs d’exploitation à Ndiam Baba et 36 à Laïndé Ngobara, installés de manière permanente. La structure par âge montre une population relativement jeune dans les deux territoires (Figure 9).

0 2 4 6 8 10 12 <=25 25-35 35-45 45-55 55-65 65-75 >75 Ndiam Baba Laïndé Ngobara Nombre d’UP Classes d’âge

Figure 9. Structure par âge des chefs d’exploitation à Ndiam Baba et Laïndé Ngobara (2006)

Source : Enquêtes, Kossoumna Liba’a Natali (2005)

L’âge moyen des chefs d’exploitation est de 36 ans. Cependant, les tranches d’âges comprises entre 25-35 ans et 35-45 ans dominent. Les chefs d’exploitation dont l’âge est inférieur à 25 ans sont moins importants à Laïndé Ngobara qu’à Ndiam Baba. Ceci peut s’expliquer par le fait que ce dernier village est plus ancien et que les jeunes ne bougent pratiquement pas au cours de l’année. A Laïndé Ngobara par contre, les jeunes de moins de 20 ans partent en transhumance la moitié de l’année. Ils ne sont donc pas pressés de se marier. Le mariage se fait pour les hommes autour de 30 ans. La taille de la famille varie en fonction de l’âge du chef d’exploitation et selon l’ancienneté dans le village. Les plus anciens ont une famille nombreuse. La plupart des structures familiales pour ces derniers se compose du chef de ménage, de son ou ses épouses, de ses enfants, mais aussi de ses frères célibataires, de ses ascendants (père ou mère), les collatéraux et les descendants. La principale langue parlée est le fulfulde. Aucun chef d’exploitation n’a été scolarisé. Quelques jeunes comprennent quelques mots de la langue française mais ont des difficultés pour s’exprimer. Cette langue est en nette progression chez les plus jeunes avec l’implantation de l’école dans le village de Ndiam Baba.

60 L’organisation politique dans les deux territoires est calquée sur le modèle peul. Les deux territoires ont à leur tête un jawro. Celui de Ndiam Baba est sous le commandement de l’ar’do de Babla alors que celui de Laïndé Ngobara rend compte à l’ar’do de Djéfatou. Le

jawro joue le rôle de collecteur d’impôt, surtout de la zakkat. Il transmet les informations

venant du lamidat ou de l’administration. Il organise les séances de vaccination dans son village. C’est également lui qui sert de relais entre les populations et les résidents des villages voisins en cas de litiges. Le jawro prend donc ses consignes auprès des ar’do ou tout autre représentant du laamii’do comme celui qui est en charge de l’élevage, le sarkin

saanou. L’élevage occupant une place très importante auprès de cette population, ce

dernier fait de fréquentes visites dans le village pour rappeler aux éleveurs le devoir de donner la zakkat ou pour organiser les vaccinations.

Les jawro ne passent pas leurs journées à la maison assis sous un arbre comme les chefs peuls. Ils n’utilisent pas non plus leurs habitants pour des corvées. Ils vaquent à leurs occupations comme tous les autres habitants. C’est ainsi qu’ils font paître les moutons et les veaux. Ils sont de plus en plus confrontés à la désobéissance des jeunes éleveurs qui commencent à s’émanciper et refusent de se soumettre à certaines règles ou ordres venant de la chefferie de Tchéboa.

5.2. Appropriation et exploitation des territoires

A Ndiam Baba, 44% des parcelles ont été défrichées par leurs propriétaires contre 26% acquis par don (Carte 5). Dans l’espace réservé au pâturage délimité, les agriculteurs des villages voisins y détiennent les 30% des parcelles restantes. Ces dernières ont été défrichées avant le bornage du territoire affecté aux Mbororo et les agriculteurs continuent à y cultiver.

A Laïndé Ngobara, 70% des habitants ont acquis leurs parcelles par défrichement lors de leurs installations respectives (Carte 6). Les dons concernent seulement 11% des parcelles. Les agriculteurs des villages voisins y détiennent les 18% des parcelles dans l’espace cultivé du territoire.

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