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La fenêtre spectrale de l’UV lointain est idéale pour comprendre les galaxies à flam-bée d’étoiles. C’est en effet dans ce domaine que la distribution d’énergie spectrale de leur population stellaire typique est maximale. Les étoiles massives y ont des signatures spectrales provenant de leurs photosphères ou de leurs vents, apportant des contraintes fortes sur l’âge, sur la métallicité ou encore la fonction de masse initiale de la popu-lation. D’autre part, les photons de l’UV lointain (6 eV < hν < 13.6 eV) dominent les processus de chauffage du MIS et influencent la chimie des phases neutres et molé-culaires. Enfin, ce domaine de longueur d’onde fournit des diagnostics puissants sur les propriétés physiques, chimiques et dynamiques du MIS, des phases les plus froides (∼ 100 K) jusqu’au gaz coronal (∼ 106K).

1.3.1 Chaîne de détection

Lancé en 1999, le satellite FUSE (Far Ultraviolet Spectroscopic Explorer, PI : H. W. Moos, Moos et al. 2000) observe dans la gamme 905 − 1187 Å (⇐⇒ 10.4-13.7 eV) avec un pouvoir de résolution spectrale λ/∆λ ≈ 20 000. À titre de comparaison, la réso-lution de Copernicus (Rogerson et al. 1973), prédécesseur de FUSE dans le même do-maine spectral, était de 10 000, et la sensibilité 10 000 fois plus faible (voir tableau 1.2). La réflectivité des surfaces optiques est relativement faible dans l’ultraviolet, et les technologies employées consistent le plus souvent à profiter d’une incidence rasante. Cependant, la surface effective diminue avec la longueur d’onde. C’est pourquoi il est apparu nécessaire d’utiliser une nouvelle technologie pour FUSE qui lui permet d’ob-tenir de 20 à 80 cm−2 de surface collectrice effective. FUSE peut être considéré comme

1.3 Présentation de FUSE 15

l’assemblage de 4 télescopes, chacun composé d’un miroir parabolique, d’un réseau dis-persif et d’un détecteur (voir schéma de la figure 1.3). Les miroirs sont ici utilisés en incidence normale, comme en optique. Chaque chaîne d’acquisition est unique : deux miroirs sont recouverts de carbure de silicium (SiC ), les deux autres étant recouverts de fluorure de lithium et d’aluminium (LiF ). Chaque miroir est associé à un réseau de même composition, placé sur un cercle de Rowland de manière à focaliser les rayons dispersés sur le détecteur. Deux détecteurs sont disponibles, chacun constitués d’une galette à micro-canaux. Chaque détecteur est divisé en deux segments indépendants notés A et B. Combinés avec les différents miroirs, on dispose ainsi de huit canaux de détection indépendants, ayant d’une part des domaines spectraux différents, mais aussi des réponses propres en fonction de la longueur d’onde (voir figure 1.4). Une exposition correspond donc à huit spectres différents que l’on note LiF1A, LiF1B, LiF2A, LiF2B,

SiC1A, SiC1B, SiC2A et SiC2B. Les domaines spectraux de chaque canal de détection

se recouvrent, ce qui permet d’identifier les éventuels artefacts présents sur un seul ca-nal, et de couvrir la totalité du domaine même en cas de mauvais fonctionnement d’un des composants. Au foyer, trois fentes différentes sont disponibles : HIRS (1.25" × 20"), MDRS (4"×20") et LWRS (30"×30"). Cette dernière fente est idéale pour l’observation sans perte de flux de galaxies proches, dont l’étendue est & 10 secondes d’angle. 1.3.2 Traitements de base

Les données brutes FUSE se présentent sous la forme d’une image spectrale 2D. En pratique, pour les analyses de spectres de galaxies, étendues ou non par rapport à la taille de la fente d’observation, la résolution spatiale de FUSE n’est pas suffisante pour permettre une étude spatiale du spectre. Le pipeline CALFUSE1 permet de réduire cette image à un spectre 1D. Le traitement nécessite plusieurs étapes préliminaires avant la réduction de l’image spectrale. Le pipeline corrige tout d’abord les erreurs de pointage du satellite, détecte et supprime les bursts, puis soustrait le signal parasite de fond, divise par le courant de champ-plat, extrait le spectre 1D et effectue enfin la calibration en longueur d’onde et en flux.

Une séquence d’observation est divisée en plusieurs expositions. Celles-ci peuvent être moyennées ultérieurement par l’utilisateur de manière à obtenir un spectre unique, correspondant à l’observation entière. Les conditions des détecteurs n’auront pas chan-gées, mais il se peut que la source ne soit pas constamment centrée dans la fente, à cause d’erreurs de pointage ou de dérives thermiques. Le "mouvement" relatif de la source dans la fente résulte en un décalage en longueur d’onde qui requiert un recalage des différentes expositions. D’autre part, des phénomènes d’étirement, dus au fait que les pixels n’ont pas forcément la même taille d’un bout à l’autre du domaine spectral couvert, impliquent également de corriger d’éventuels écarts. La méthode employée est celle proposée par le programme XiPlot2 qui consiste à additionner les spectres pixels par pixels, en translatant les expositions les unes par rapport aux autres. Il est possible de les translater en utilisant une corrélation croisée, ou à l’oeil. Noter que les sources faibles dont les expositions individuelles sont relativement bruitées se montrent par-ticulièrement difficiles à aligner. Dans les pires cas, un mauvais alignement entraîne

1http : //f use.pha.jhu.edu/analysis/pipeline_ref erence.html

2La procédure IDL XiPlot est développée par A. Lecavelier des Étangs et l’équipe française de

16 Spectroscopie des phases gazeuses du Milieu Interstellaire

Fig. 1.3 – Schéma optique. FUSE comprend 4 miroirs paraboliques, qui, associés aux deux segments de chaque détecteur, fournit en tout 8 canaux d’acquisition indépendants. Les do-maines de longueurs d’onde de chaque canal se recouvrent, permettant notamment d’identifier facilement les artefacts.

un élargissement significatif des raies d’absorption dont il faut tenir compte lors de l’analyse proprement dite.

1.3.3 Dans le spectre FUSE d’une cible extragalactique...

Le spectre FUSE d’une cible extragalactique révèle beaucoup d’informations. Outre le continu, dû au spectre combiné des étoiles jeunes suffisamment brillantes pour émettre dans la fenêtre de l’UV lointain, FUSE donne accès à un nombre considé-rable de raies spectrales, interstellaires et stellaires.

Les raies stellaires proviennent des atmosphères, ou des vents pour les étoiles les plus massives. Dans ce dernier cas, on observe un profil P Cygni (c’est notamment le cas des raies de O vi, C iii et P v).

Les raies d’absorption interstellaires proviennent soit du gaz neutre (O i, N i, H i, P ii, Si ii ...), du gaz ionisé (Si ii, Fe iii ...), du gaz coronal (O vi) ou du gaz moléculaire diffus (H2). Dans le cas d’une cible extragalactique, on observe les raies intrinsèques au milieu interstellaire de la cible, les raies des nuages de notre Voie Lactée sur la ligne de

1.3 Présentation de FUSE 17

Fig. 1.4 – Surfaces effectives des différents canaux de détection de FUSE. Les miroirs re-couverts de fluorure de lithium (LiF) sont plus sensibles que ceux rere-couverts de carbure de silicium (SiC), et n’échantillonnent pas les mêmes domaines de longueurs d’onde.

visée, et également dans certains cas des raies provenant de nuages à grandes vitesses dans le halo de Galaxie. Il est possible d’identifier les raies et les différents systèmes d’absorption en utilisant les tables des longueurs d’onde théoriques des transitions (base de données atomiques de Morton 1991; 2003).

Notons également que dans le domaine de FUSE émergent des raies d’émission d’origine géocoronale. Celles-ci sont dues aux espèces de l’atmosphère terrestre excitées par la lumière diffusée du Soleil. L’émission la plus intense est celle de Lyman β. Elle est relativement étroite et ne gêne généralement pas l’ajustement du profil de la raie interstellaire Lyβ correspondante. D’autres émissions beaucoup plus faibles sont dues à O i et N i.

Chapitre 2