• Aucun résultat trouvé

Prérequis à la mise en place d'un traitement

IV- LE SEVRAGE TABAGIQUE

4. Prérequis à la mise en place d'un traitement

La prise en charge du patient fumeur doit être individualisée et repose sur une évaluation initiale de la consommation tabagique et de l'intensité de la dépendance, de la motivation du candidat à l'arrêt, mais également sur la recherche d'autres conduites addictives associées (alcool, cannabis …), et de troubles anxieux et/ou dépressifs [57].

4.1. Evaluation de la consommation et de la dépendance

Afin d'évaluer la dépendance à la nicotine et l'imprégnation tabagique, les cliniciens peuvent s'appuyer sur des tests d'évaluation associés à la mesure de divers marqueurs biologiques du tabagisme.

4.1.1. Tests

Le questionnaire qui tient lieu de référence pour évaluer la consommation et la dépendance physique du fumeur est le test de Fagerström, élaboré en 1978. Il comporte deux questions dans sa version courte ou six questions dans sa version longue (cf. Annexe 1) [4].

Par ailleurs, les praticiens disposent aussi du test de Horn permettant d'évaluer les habitudes tabagiques du fumeur et de déterminer les raisons qui le poussent à fumer (cf. Annexe 2) [6].

4.1.2. Marqueurs biologiques [63] [64] [65]

4.1.2.1. La nicotine

Il s'agit d'un marqueur biologique spécifique de l'intoxication tabagique. Sa demi-vie courte de 40 minutes à 3 heures et les variations pH-dépendantes de son élimination urinaire font qu'elle est peu utilisée en pratique courante.

4.1.2.2. La cotinine

Il s'agit également d'un marqueur biologique spécifique de l'intoxication tabagique. La demi- vie d'élimination de ce métabolite est plus longue, de 13 à 24 heures, permettant de retrouver une imprégnation tabagique des 2-3 jours précédents. Le dosage de la cotinine urinaire permet de mettre en évidence une imprégnation tabagique avec un mode de recueil facile mais son coût, la lenteur du dosage et le manque d'équipement dans les laboratoires expliquent que son utilisation n'est pas systématique en routine lors de consultations de tabacologie. La cotinine peut également être dosée au niveau plasmatique et salivaire.

4.1.2.3. Monoxyde de carbone dans l'air expiré

Il s'agit d'un marqueur non spécifique de l'intoxication tabagique. En effet, il peut également être retrouvé dans l'air en cas de pollution atmosphérique ou en présence d'une combustion

incomplète de matières organiques. Ce gaz va se fixer au niveau des hémoprotéines, notamment l'hémoglobine, de façon réversible. Il est éliminé par voie respiratoire avec une demi-vie de l'ordre de 4 à 6 heures, ce qui permet de le doser dans l'air alvéolaire. Ce dosage permet de mettre en évidence une imprégnation tabagique dans les quelques heures seulement précédant la mesure. Ce test non invasif présente de plus un faible coût et une lecture immédiate facilitant son utilisation en routine. Il est réalisé à l’aide d'un analyseur dans lequel le sujet expire après une inspiration profonde et une apnée de 10 secondes afin de bien évaluer l'air alvéolaire. Le résultat est exprimé en ppm (particules de CO par million de particules d'air). Un taux supérieur à 10 ppm est en général retrouvé chez le fumeur et inférieur à 5 ppm chez le non-fumeur.

Il est également possible de réaliser des dosages de la carboxyhémoglobine sérique HbCO.

4.2. Evaluation des comorbidités

La recherche de comorbidités associées est également une étape nécessaire avant la mise en place d'un traitement. Il s'agit notamment de repérer des pathologies psychiatriques telles que des troubles anxieux et dépressifs ou une psychose. En effet, ces troubles vont conditionner le pronostic du sevrage en diminuant les chances de succès de l'arrêt.

L’échelle HAD est un outil qui permet de mettre en évidence les troubles anxieux et dépressifs chez les patients. Elle se compose de quatorze questions associées à un nombre de points de 0 à 3. Sept questions se rapportent à l’anxiété (total A) et sept autres à la dimension dépressive (total D), permettant ainsi l'obtention de deux scores (cf. Annexe 3) [4].

4.3. Recherche de co-consommations

Il est par ailleurs recommandé de se renseigner sur la consommation éventuelle d'autres substances psychoactives telles que alcool, cannabis, cocaïne, opiacés ou médicaments, ainsi que sur la présence d'addictions comportementales (jeu pathologique, troubles du comportement alimentaire) [6].

4.4. Evaluation de la motivation à l'arrêt

La motivation constitue un élément essentiel dans la réussite du sevrage tabagique. Le dictionnaire Larousse la définit comme « les raisons, intérêts, éléments qui poussent quelqu'un dans son action ». Il s'agit d'une notion subjective, par conséquent difficile à évaluer.

La motivation du patient et le stade où il se situe dans son processus de changement vont conditionner les modalités de la prise en charge à adopter ainsi que le pronostic de l'arrêt. Pour ce fait, il est possible de s'appuyer sur le modèle transthéorique du changement (figure 25) développé par deux psychologues, James Prochaska et Carlo DiClemente, qui supposent que le fumeur passe par une série d'étapes dans son intention d'arrêter de fumer :

– Le stade de pré-intention correspond aux fumeurs qui n'envisagent pas encore d'arrêter de fumer, n'ont aucune intention de changer leur comportement, puisqu'ils n'ont pas conscience d'un problème de consommation.

– Le stade d'intention correspond aux sujets qui pensent à arrêter de fumer, mais n'ont pas encore décidé d'agir et de renoncer aux bénéfices actuels de leur consommation.

– Le stade de préparation correspond aux sujets qui planifient leur sevrage dans un futur proche.

– Le stade d'action correspond à une étape de changement des comportements.

– Le stade de maintien correspond aux sujets qui s'efforcent de prévenir une éventuelle rechute.

Dans ce modèle, le praticien adaptera son intervention selon le stade du patient de façon à permettre un passage au stade suivant, jusqu'à obtenir un arrêt du tabagisme [62] [6].

Par ailleurs, une échelle en quatre questions nommée Q-MAT permet aux praticiens une rapide évaluation de la motivation à l'arrêt du fumeur (cf. Annexe 4) [4].