• Aucun résultat trouvé

La préparation des échantillons est une étape importante de l’acquisition des données relatives aux déséquilibres des séries de l’uranium. En effet, seule une préparation propre permettra de sauvegarder l’intégrité de l’échantillon et d’éviter toute contamination préalable à la chimie (permettant d’éluer les éléments d’intérêt), et aux mesures au spectromètre de masse qui terminent le processus d’acquisition des données. Les échantillons (roches dans le cas de ces études) doivent être nettoyés de l’altération de surface (si celle-ci est présente), avant d’être broyés en fines poudres en vue de la digestion acide. De plus, dans le cas d’études d’isochrones internes, les minéraux doivent être purifiés pour apporter avec eux le plus d’information possible.

Avant tout tri, la roche est sciée en morceaux, en prenant soin de retirer l’altération visible lorsque celle-ci est présente. Dans le cas d’une étude de roche totale celle-ci est débitée en petits morceaux pour permettre le broyage à la différence de la veine de ségrégation (cf. III.A.2) qui est d’abord séparée de son encaissant grossièrement à la scie puis en détail au marteau. Un broyage grossier au broyeur à mâchoires est nécessaire pour obtenir un gravier plus ou moins fin avant l’utilisation du broyeur à anneaux de Carbure de Tungstène. Une partie représentative est conservée pour les mesures sur roche totale puis diverses fractions de différentes tailles de grains (tamisage à diverses largeurs de grilles) sont conservées et triées à la loupe binoculaire pour choisir celle qui sera la plus apte au tri des différents minéraux. A ce stade la roche totale est broyée très finement (<80µm) pour s’affranchir au mieux des problèmes d’hétérogénéité de la poudre due à la présence, en plus ou moins grand nombre, de minéraux accessoires.

Le tri des minéraux s’effectue traditionnellement en utilisant les propriétés physiques des différents minéraux : leur capacité magnétique permettra un tri au Frantz, leur densité aux liqueurs denses et leur rapport de forme à la table à secousses. Le Frantz est un séparateur isodynamique dont le fonctionnement est le suivant : les minéraux circulent sur une règle vibrante et inclinée, séparée en deux domaines. Cette règle est soumise à un champ magnétique réglable, les minéraux sensibles au champ magnétique appliqué vont s’éloigner

Tableau II.1.a : Répartition de minéraux selon l’ampérage du séparateur isodynamique Frantz. L’épaisseur des traits reflète la probabilité d’observation. Pour une revue plus complète voir, par exemple, Rosemblum et Brownfield (2000).

La liqueur dense la plus utilisée est le bromoforme CHBr3 (densité de 2,9 à 20°C) qui permet de trier les plagioclases qui vont flotter, du fait de leur plus faible densité, à la surface du liquide au contraire des autres minéraux, de densité supérieure, qui vont plonger. L’iodure de méthylène a une densité, pour sa part, de 3,325 à 20°C et verra les apatites, normalement, flotter à sa surface. La liqueur de Clerici, quant à elle, avec sa densité de 4,15 va permettre de trier et purifier les minéraux très denses tels que la magnétite.

Dans notre cas (et celui de la veine de ségrégation de Klif (cf. partie III.A.3.2) en particulier) un grand nombre de minéraux pouvaient être séparés : plagioclases, ferro-magnésiens, magnétites, apatites pour les plus abondants. Leurs propriétés très différentes devaient permettre un tri simple à l’aide des outils sus-cités mais il s’est avéré que les apatites, par exemple, étaient incluses dans les plagioclases, ce qui a nécessité un broyage très fin rendant le tri plus ardu. De plus, leurs propriétés magnétiques (les apatites étant normalement amagnétiques (cf. tableau II.1.a)) et leur rapport de forme très grand (baguettes) (qui diminuait considérablement le gain de leur densité « élevée » pour l’utilisation des liqueurs denses) ont nécessité un grand nombre de passages successifs des différentes méthodes, en terminant par la table à secousses pour s’affranchir des derniers plagioclases restant, pour aboutir à une fraction pure de ce minéral très important pour la datation puisqu’il « porte », en très grande partie, le déséquilibre.

Après le tri et la purification de chaque phase minérale à étudier, chaque fraction est broyée très finement (<80µm) toujours dans le but de garantir une homogénéité la plus complète possible. Cependant il s’est avéré que pour certaines fractions un tri minutieux et un broyage fin ne suffisaient pas à rendre une fraction absolument pure. En effet, il s’est avéré impossible de reproduire à l’identique deux mesures de concentrations d’uranium et de thorium de certaines fractions minérales. Cela pose évidemment problème, surtout quand, comme c’est notre cas, le but des analyses sur minéraux est la datation d’une coulée de lave. En effet on ne peut garantir que les teneurs en U et Th sont mesurées sur une fraction minérale identique à celle utilisée pour mesurer le rapport isotopique de Th (voir un exemple dans la figure II.1.b). L’information que l’on tire de ce diagramme est qu’il existe un pôle « pauvre » au Th/U faible et teneurs en Th faibles également (probablement les plagioclases

homogénéité d’échantillonnage lors de la mesure des teneurs et des rapports isotopiques (voir II.2).

Figure II.1.b : Rapport élémentaire Th/U en fonction de la teneur en Th dans des plagioclases de la veine de ségrégation de la coulée Árbæjarhraun (Islande). On remarque que chaque attaque donne un résultat différent, nous faisant penser à un mélange de différents minéraux, ou à la présence d’inclusion dans cette fraction de plagioclases. Les analyses correspondantes se trouvent en annexe.

Mis à part pour quelques minéraux plus rares dans nos échantillons, des quantités assez importantes ont été broyées pour minimiser les risques de contamination au niveau des broyeurs à mâchoires ou à anneaux. De plus, entre chaque broyage d’échantillon, les broyeurs étaient nettoyés à l’alcool après un broyage de quartz, puis pré-contaminés avec une partie de l’échantillon. La contamination due au broyage et à la séparation des minéraux n’a pas été mesurée quantitativement mais différentes fractions du standard A-THO ont été broyées au laboratoire à des époques différentes et les valeurs mesurées sont constantes dans le temps et dans la moyenne des valeurs « certifiées ». Le standard A-THO contenant une teneur élevée en Th il est peu sujet à une contamination éventuelle. Cependant nous ferons l’hypothèse que si la contamination existe elle est très faible et constante pour les éléments que nous avons mesurés (Ra, Ba, Th, U). Pour les minéraux, le broyage final pour obtenir une fraction

inférieure à 80 µm, s’est fait au mortier en agate, lui aussi nettoyé et pré-contaminé avec une partie de l’échantillon.

Dans le cas de l’utilisation de liqueurs denses les minéraux sont nettoyés de nombreuses fois pour s’affranchir des restes de liqueur ayant pu être adsorbée sur les parois des minéraux. La reproductibilité de nos mesures sur des minéraux tels que la magnétite (séparée à l’aimant à main (puis au barreau aimanté dans de l’eau distillée dans une ampoule à décanter), puis une première fois purifiée au bromoforme et enfin purifiée complètement à la liqueur de Clérici à l’aide de la centrifugeuse) et le fait que ces minéraux semblent se comporter comme les minéraux (tels que les plagioclases) ayant subi moins de passages dans des liqueurs denses (alignement dans les isochrones voir chapitre III.A) permettent de penser que la contamination est, là aussi, très faible.