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CHAPITRE 1 REVUE DE LA LITTERATURE

1.2 Revue de littérature

1.2.2 Pouvoir nucléant des poussières minérales

Il a été établi plus haut que les impuretés ayant initié la nucléation font partie de catégories précises physiquement (par simple exclusion gravitationnelle) et chimiquement (minérales, carbonées…). Est-ce que toutes les particules solides (d’une zone définie) ont aidé à la nucléation de glace? Est-ce que 100% des particules minérales sont efficaces face à la nucléation? Était-ce dans les mêmes conditions?... Afin de répondre à ces questions (et ainsi entamer la discussion sur la nucléation et ses mécanismes), est défini un facteur appelé ‘pouvoir nucléant’. Celui-ci est purement qualitatif et comparatif, décrivant les particules et composés favorisant la nucléation de glace suivant les conditions de déposition. Pruppacher & Klett (48) ont ainsi énoncé quatre grands principes pour les particules minérales, tirés des déductions expérimentales et de concepts théoriques, afin de prévoir le pouvoir nucléant des aérosols. L’IN minéral doit être : 1- non soluble dans l’eau, 2- présenter une épitaxie entre la surface exposée et

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celle de la glace (l’importance de ce point est largement débattu dans la littérature (49–52), l’existence de défauts au sein de la maille cristalline du substrat étant l’hypothèse la plus largement acceptée aujourd’hui afin d’initier la cristallisation), 3- posséder des sites actifs et 4- leur diamètre doit être plus grand que 0,1µm (pour une meilleur efficacité car la probabilité de sites de nucléation est grande). Néanmoins, le respect de toutes ces consignes ne statue pas des efficacités présentées dans la littérature, encore moins des vastes écarts pour un même composé (53). D’autres facteurs entrent donc en jeu comme, l’habilité chimique à créer des liaisons hydrogène avec la glace, la quantité de défauts, les impuretés physiques et chimiques sur les IN (pour ne nommer que ceux-là). Le pouvoir nucléant est décrit comme propre au complexe spécifique (impureté-glace dans ce cas) mais beaucoup de conditions influencent la nucléation tel que l’environnement chimique (activation préalable) ou l’ensoleillement (création de nouvelles espèces en surface). Les études de laboratoire sondent cette propriété en immergeant des IN, préalablement caractérisés, dans une atmosphère contrôlée sursaturée de vapeur à des températures variables. Plus la glace est observée tôt dans le processus de déposition, i.e. plus la sursaturation est faible et la température chaude, plus l’IN est qualifié de ‘bon nucléant’. Plusieurs IN sont comparés entre eux (leur capacité nucléante ainsi que leur caractéristiques chimiques et physiques) afin d’essayer de déterminer des règles de prédiction du pouvoir nucléant (tel qu’ont fait Pruppacher & Klett). Les résultats obtenus se présentent comme ci-dessous, où plusieurs IN minéraux ont été étudiés. Les graphes présentent des IN de taille variable (54,55) (Figure 5 a : particules sous-microniques et Figure 5 b : particules sur-microniques) et de composition variables (Figure 5 a, b, c). La courbe noire pleine représente la courbe d’équilibre entre le liquide surfondu et la vapeur alors qu’au-dessus de la ligne horizontale hachurée, c’est le domaine de la glace stable. Les différences de couleurs sont respectives de la composition minéralogique pour les deux premiers graphes: bleu, rouge et jaune représentent respectivement la kaolinite, montmorillonite et l’illite. Le troisième graphe présente, en plus des composés de quartz, calcite et muscovite. Pour rappel, l’efficacité d’une particule à nucléer la glace est meilleure si la sursaturation est faible et à haute température. Les particules minérales semblent globalement être de bon nucléants étant donné les faibles sursaturations nécessaires nucléantes. Cependant, la montmorillonite, kaolinite et muscovite présentent des ratios Si (la

sursaturation) (et RHi, l’humidité relative) inférieurs à 1,1 (110%) (Figure 5 a, b, c) jusque des

températures maximales de 260 K environ (Figure 8 b), et surtout pour des tailles de particules sur- microniques (Figure 5 b) (voir Chapitre 2 pour plus de détails théoriques.

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Figure 5 : Résumé des résultats de nucléation de glace sur des particules minérales.

a) Particules minérales sous-microniques (54) b) Particules minérales sur-microniques (54) c) Particules minérales dont muscovite (56). Les axes sont représentés grâce à la sursaturation Si et l’humidité

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Il est à remarquer les nombreuses disparités de résultats suivant les publications : la nucléation peut se produire à partir d’une sursaturation quasi-nulle jusque sur la courbe de saturation de l’eau et sur une large plage de température, prouvant le manque d’informations face aux mécanismes influençant les efficacités des IN sur la nucléation. Dans les cas présentés au-dessus, les résultats sont majoritairement obtenus grâce à des analyses spectroscopiques (infrarouge principalement, rayons X…). Bien que ces techniques soient très sensibles à la présence de glace, elles ne renseignent pas sur notre capacité à comparer cette glace de laboratoire, non seulement, à la neige naturelle mais aussi aux autres glaces de laboratoires déposées par faisceau moléculaire ou par condensation de la vapeur.

Les glaces de laboratoires diffèrent fondamentalement des glaces naturelles du fait de leur environnement : les mécanismes de croissance (et non de nucléation) qui en résultent sont ceux qui génèrent ou inhibent l’apparition des morphologies complexes. Dans la nature, le développement des flocons se fait par des processus de croissance limités par diffusion de vapeur. Il est cependant extrêmement difficile de recréer ces conditions pour l’étude de réactions chimiques ou pour l’observation des premières étapes de nucléation et croissance. Travailler sous vide et à faible température permet ainsi de ralentir et isoler les processus à étudier et permet l’utilisation de techniques d’analyse plus sensibles et pointues. Quelles sont les caractéristiques des glaces faites en laboratoire? À quel point peut-on simuler ou comparer les glaces de laboratoire et naturelles ? C’est le sujet du prochain paragraphe qui listera les études faites, par microscopie uniquement, entre 80 K et 230 K, essayant de mieux appréhender les mécanismes atomiques de nucléation et croissance sous ces conditions particulières.

Dans un premier temps, seront détaillées les influences des paramètres de déposition sur la morphologie des cristaux individuels (mimant les cristaux naturels) puis celles des substrats utilisés pour les glaces. Le but est d’essayer de relier les observations présentées ci-dessus traitant du pouvoir nucléant aux caractéristiques des substrats afin de déterminer les paramètres critiques de nucléation. Deuxièmement, les mécanismes de croissance seront explorés, entre 80 K et 230 K, sur des substrats métalliques, reflétant les conditions des études spectroscopiques. Pour finir, un court paragraphe sera dédié aux travaux effectués par Cartwrigth (57,58), explorant les morphologies des dépôts sous des conditions de

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déposition interstellaires et associant leur morphologies à celles exhibées dans le diagramme de morphologie (voir Chapitre 2).