Partie 2 : Les plantes médicinales classiquement présentées comme ayant une action B) Pourquoi la phytothérapie des troubles gastro-intestinaux ? Un traitement allopathique restera indispensable pour une réanimation lors d’un arrêt cardiaque, pour des anesthésies, lors d’hormono-substitution avec des organes aplasiés … Cependant, l’augmentation du nombre de bactéries et parasites résistants aux traitements, fait rechercher des solutions alternatives dont la phytothérapie fait partie. Cette dernière pourrait également être utile en prévention, en soutien à l’organisme ou dans les cas où des médicaments allopathiques sont contre-indiqués. Par exemple, que donner à un chien avec une insuffisance rénale chronique lorsqu’il fait une crise d’arthrose ? La phytothérapie semble particulièrement indiquée pour les affections gastro-intestinales. En effet, les étiologies peuvent être très multiples, les symptômes variés et les répercussions sur l’état général importantes. Les cibles à prendre en compte sont donc nombreuses : système immunitaire, inflammation, symptômes, microbiote... et l’étape du diagnostic est fondamentale (Westphal et al., 1996). Chez les carnivores domestiques, les affections gastro-intestinales aiguës sont fréquentes et les symptômes particulièrement dérangeants pour les propriétaires. Ainsi, la gastroentérologie est le deuxième motif de consultation en médecine vétérinaire du chien et du chat après la dermatologie. Les atteintes plus chroniques résultent souvent d’une mauvaise prise en charge à la base et les traitements mis en place par exemple lors de la mise en évidence d’une infiltration cellulaire sont délétères pour le reste de l’organisme puisqu’ils induisent une immunosuppression (Hébert, 2011). Les étiologies sont donc très variables, mais le traitement initial mis en place par les praticiens est souvent symptomatique. Or, l’intestin est actuellement considéré comme le second cerveau de l’organisme, pouvant induire des répercussions sur l’ensemble du corps. Par exemple, une perméabilité intestinale liée à l’inflammation va entraîner le passage d’allergènes pouvant entraîner des conséquences cutanées. C’est ce qui se passe lors d’atopie. Le microbiote intestinale, garant du maintien de l’immunotolérance et de l’inflammation de bas grade est souvent mis à mal lors de la prise en charge de troubles gastro- intestinaux mais aussi lors de l’administration de n’importe quel traitement à cycle entéro-hépatique (avec pour conséquence une modification de la perméabilité intestinale). L’allopathie a en effet, souvent des effets secondaires gastro-intestinaux : ulcères, diarrhée… La phytothérapie pourrait donc également être une option complémentaire suite à l’administration d’un traitement antibiotique per-os, accompagnée d’une cure de probiotiques (Butler et al., 2019). De même, la prise en charge hépatique d’un principe actif n’est pas sans conséquence. Favoriser la détoxification et protéger les organes émonctoires est très important dans la prise en charge de toutes les maladies et devrait être systématique après une prise en charge allopathique (Butel, 2014). Le cheval, quant à lui, est un animal extrêmement fragile. L’anticipation et la prise en charge rapide des troubles gastro-intestinaux sont la garantie d’éviter des coliques aux conséquences souvent désastreuses. Le traitement sans effet dopant des désagréments digestifs permettrait donc d’optimiser les performances et la nutrition (Maurin, 2017). Chez les animaux de production, la phytothérapie est une option qui pourrait se révéler très intéressante. En effet, les maladies gastro-intestinales entraînent des pertes économiques très importantes en élevage avec une morbidité et une mortalité élevée. Les antibiotiques sont souvent le traitement de première intention. Mais leur utilisation entraîne des délais d’attente, doublés en 33 agriculture biologique. De plus, dans le concept global « One-Health », on observe une augmentation des bactéries résistantes aux antibiotiques et des parasites aux antiparasitaires ce qui entraîne des échecs thérapeutiques (Francoz, Couture, 2014). On peut noter l’importance de la notion de « totum » de la plante dans les troubles gastro-intestinaux (Berdonces, 2000). L’ensemble des organes du tractus digestifs sont interdépendants les uns des autres notamment dans la fonction de digestion : elle nécessite un foie, un pancréas, un estomac et des intestins fonctionnels ! En effet, pour réaliser cette dernière, on relève des interrelations entre les organes du tractus digestifs mais également une action du système nerveux orthosympathique et parasympathique et un certain nombre de réflexes qui agissent sur la motricité et la régulation des sécrétions en dehors des contrôles intrinsèques (Hansen, 2003). Il est donc logique d’envisager qu’une pathologie gastroentérologique aura des conséquences sur l‘ensemble du tractus digestif. Ainsi, une atteinte hépatique entraîne souvent de la diarrhée et des vomissements. Les lésions vasculaires du pancréas accompagnent souvent les maladies infectieuses et les entérites hémorragiques. De même, pour une raison inconnue, un repas riche en matière grasse est une cause favorisante de pancréatite aiguë. Diminuer l’absorption intestinale de graisse, la cholestérolémie et la lipémie mais aussi favoriser et stimuler la motricité intestinale sont donc des pistes de prévention d’une pancréatite. Cette pancréatite entraînera également des vomissements et des diarrhées intestinales (Lerch, Gorelick, 2013). Chez le chat, elle peut être à l’origine d’une cholangite (cf. la triade féline). De même, une lipidose peut être secondaire à une pathologie intestinale ou pancréatique (Valtolina, Favier, 2017). Le foie et le pancréas déversant leurs sécrétions dans l’intestin, il est donc logique de considérer qu’une pathologie hépatique ou pancréatique va avoir des conséquences sur l’intestin et sur la digestion (entraînant potentiellement une dysbiose et un cercle vicieux) (Qin et al., 2014). Mais réciproquement, une gastro-entérite sévère peut entraîner une hépatite bactérienne liée à un abcès dit pyléphlébitique dû à une remontée des bactéries en provenance du tube digestif dans le canal cholédoque chez le chien. Chez le chat, on observera plutôt une cholangiohépatite. De même, une gastro-entérite sévère entraînera potentiellement un état de dénutrition pouvant entraîner une atrophie du pancréas. On observera également des conséquences sur le métabolisme et l’état général de l’animal. On va donc, en phytothérapie, chercher à agir sur l’intestin, mais aussi à protéger le pancréas et le foie (et vice-versa). Au-delà du tropisme particulier d’organe, des plantes avec un réel « totum » telles que le curcuma avec des actions sur l’ensemble des organes du tractus digestif seraient donc très intéressantes (Goodman, 2010). 34 III) PROCÉDURES. Nous cherchons à comparer les propriétés des plantes médicinales mises en avant dans la littérature vulgarisée et les propriétés réellement étudiées et correctement prouvées dans la littérature scientifique. Pour cela, nous allons déterminer les cibles physiopathologiques pour les affections gastro-intestinales qui nous intéressent et les standardiser. Nous identifierons les plantes citées dans la littérature vulgarisées avant de sélectionner les plus fréquemment décrites dans le traitement de ces cibles. Nous effectuerons ensuite une recherche bibliographique dans la littérature scientifique. A) Les troubles gastro-intestinaux les plus fréquents chez les carnivores domestiques, les Dans le document Analyse critique des traitements phytothérapiques des troubles gastro-intestinaux selon les critères de l'evidence-based medicine : préludes d'une revue systématique (Page 33-35)