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CHAPITRE I : SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE

IV. TECHNIQUES D’ETUDE DE LA CORROSION DES ACIERS DANS LE BETON

IV.2 M ETHODES TRADITIONNELLES

IV.2.4 Potentiel de corrosion

La façon la plus simple d`évaluer le degré de corrosion de l`acier est de mesurer son potentiel de corrosion. Cette technique est très connue et a fait l`objet d`un procédé dans l`American National Standards sous la référence ANSI/ASTM C876. On mesure la différence de potentiel entre une demi-pile portative ordinaire, normalement constituée d'une électrode de référence placée sur la surface du béton, et l'armature d'acier située en dessous (Figure I. 27).

Figure I. 27. Mesure du potentiel de corrosion

La confiance dans cette méthode de mesure du potentiel de corrosion a été renforcée par les résultats recueillis au fil des ans, lors d'inspections visant à déterminer le degré de corrosion des tabliers des ponts. Au cours des années 70, on a associé au résultat une probabilité relative de corrosion. Cependant, la mesure de potentiel de corrosion ne fournit aucun renseignement sur la vitesse de corrosion.

La recommandation RILEM [95] indique que l’objectif de ces mesures de potentiel est de localiser les armatures corrodées, de déterminer les positions des analyses destructives ultérieures (carottage pour doser les chlorures, etc.), de contrôler l’état de corrosion des armatures après réparation afin d’évaluer l’efficacité de ces travaux et de concevoir et disposer les anodes des installations des techniques électrochimiques comme la protection cathodique, la déchloruration, etc.

Voltmètre à haute impédance

La norme ASTM C876 est fondée sur cette méthode. Celle-ci définit des lignes générales servant à évaluer la corrosion de l'armature des ouvrages en béton (Tableau I. 4).

Tableau I. 4. Probabilité de corrosion d'après les relevés de potentiel [96] Potentiel de corrosion mV vs ECS Potentiel de corrosion mV vs Cu-CuSO4 Probabilité de corrosion > -126 > -200 Faible (< 10%) -126 à -276 -200 à -350 Incertaine (50%) < -276 <-350 Elevée (90%)

La Figure I. 28 nous montre un exemple de la relation entre le taux de corrosion et le potentiel de corrosion. On constate que le taux de corrosion maximal se développe généralement à un potentiel de -600 mV ECS.

Figure I. 28. Relation entre le taux de corrosion et le potentiel de demi-cellule (20°C) [97]

Le Tableau I. 5 montre les intervalles typiques de potentiel de corrosion selon l’état du béton [98].

Tableau I. 5. Intervalles typiques de potentiel de corrosion selon l’état du béton [98] Etat du béton Potentiel de corrosion mV vs ECS

Humide, sans chlorures +100 à -200

Mouillé, contaminé par des chlorures -400 à -600

Saturé d’eau, sans oxygène -900 à -1000

Lorsqu'on interprète les relevés de potentiel, il faut tenir compte de facteurs comme les concentrations d'oxygène et de chlorures ainsi que la résistivité électrique du béton, qui ont un

effet important sur les données obtenues. Normalement, plus le potentiel est négatif, plus la probabilité de corrosion est grande. Or ce n'est pas toujours le cas.

De nombreux facteurs peuvent rendre les relevés plus positifs ou négatifs, sans que ces variations ne soient liées au degré de corrosion :

- la concentration d'oxygène à l'interface armature-béton influe grandement sur les valeurs de potentiel de corrosion. Si la teneur en oxygène est moindre à la surface de l'acier, la valeur de potentiel mesurée sera plus négative, mais cela n'indique pas nécessairement une forte probabilité de corrosion ;

- une augmentation de la concentration en ions chlorure entraîne une importante augmentation de la vitesse de corrosion de l'acier et en résultat le potentiel devient plus négatif ;

- enfin, une grande résistance du béton peut fausser sérieusement les valeurs de potentiel mesurées.

Les résultats obtenus ne peuvent donc pas donner une idée juste du potentiel sauf pour le cas où la résistance intérieure du voltmètre utilisé est plus grande que celle du béton. Il y a donc deux façons d'accroître la précision des mesures effectuées : réduire la résistance du béton en mouillant sa surface ou utiliser un voltmètre d'une plus grande résistance interne (plus de 20 MΩ). On peut aussi diminuer la résistance du béton en plaçant l'électrode de référence juste au dessus de l'armature.

D’autres travaux ont affirmé que la mesure de potentiel d'électrode peut être influencée par l'humidité (Tutti [11] montre qu’une augmentation de la teneur en humidité dans les pores du béton diminue le potentiel vers des valeurs plus négatives), mais qu’il dépend aussi de nombreux facteurs comme la température et le degré d'hydratation du béton [99].

Les progrès technologiques survenus dans le domaine du béton et des méthodes de réparation (protection cathodique, revêtement en matériaux denses et enduit protecteurs, inhibiteurs de corrosion, adjuvants chimiques, etc.) ont aussi beaucoup d'influence sur le potentiel de corrosion.

Les inhibiteurs de corrosion peuvent modifier le potentiel de corrosion de l'armature. La variation du potentiel peut être négative ou positive selon que l'on utilise un inhibiteur cathodique ou anodique. De même, il est clairement indiqué dans la norme ASTM C 876 [96] que le relevé de potentiel par électrode de référence ne convient pas lorsqu'il s'agit d'évaluer la corrosion des armatures revêtues d'époxy ou galvanisées.

Un système de protection cathodique sous tension ou des courants galvaniques peuvent fausser complètement les relevés de potentiel de corrosion par électrode de référence. Avant de procéder à des mesures, il faut donc arrêter le système et laisser au moins 24 heures à l'armature pour se dépolariser. Si les résultats sont instables et présentent de fortes variations cela peut dénoter la présence de courant galvanique.

Le potentiel de corrosion par électrode de référence devrait toujours être validé par d'autres mesures avant d'être interprété sous l'angle de probabilité de corrosion. Les autres méthodes couramment utilisées sont : l’inspection visuelle, la mesure de la teneur en chlorures, la mesure de la résistance du béton, l’établissement du profil de carbonatation, la mesure de la vitesse de corrosion.

Le relevé cartographique du potentiel permet de tracer des courbes équipotentielles qui peuvent être utilisées pour repérer les endroits où il y a présence de corrosion (même si les mesures de potentiel ne sont pas nécessairement représentatives du taux de corrosion) [96]. La RILEM recommande l’installation de cartes de gradient de potentiel qui permettent une représentation en valeurs relatives, beaucoup plus fiables. Cependant, l’interprétation de ces cartes de potentiel reste réservée aux spécialistes.

On trouve au Tableau I.6, page suivante, un résumé des effets des différents facteurs sur la variation du potentiel de corrosion mesuré à l'aide d'une électrode de référence et sur la probabilité de corrosion.