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Posthumain et robot sapiens : l’affranchissement du corps

PARTIE I : RATIONALITÉ TECHNOSCIENTIFIQUE ET VISIONS DE L’HUMAIN

3. Le posthumanisme

3.3. Posthumain et robot sapiens : l’affranchissement du corps

Cette   troisième   version   du   posthumanisme   projette   l’humain   et   son   identité   au- delà du corps biologique soit virtuellement ou réellement :  virtuellement  via  l’internet,  ou   réellement   dans   des   supports   tels   des   disques   durs   d’ordinateur.   Hans   Moravec prévoit « la   cybernétisation   complète   de   l’univers,   sa   conversion   en   données   informatiques,   au   point   où   nous   passons   complètement   dans   l’univers   virtuel »379. Dans ce vouloir de s’affranchir   du   corps   biologique,   le   posthumanisme   croit   possible   et   souhaitable d’innombrables  corps  virtuels  pour  un  même  individu,  permettant  à  celui-ci  d’«  endosser   des identités infinies, selon ses jeux vidéos, ses participations à des univers virtuels, son engagement dans des forums, des clavardages, etc. »380, en évacuant le corps et le monde de   la   condition   humaine.   Sur   le   grand   réseau   de   l’information,   l’internet,   le   corps   biologique devient « un obstacle anachronique qui prive les échanges de données de leur fulgurance ou de leur immédiateté »381.

379 Jean-François ROUSSEL, « Cyborg et Robot Sapiens : deux approches de la corporalité technologisée », op. cit., p. 221.

380 David Le BRETON, « Le transhumanisme ou le monde sans corps », Relations, Dossier : Technoscience, la boîte de Pandore, no 734, août 2009, texte lu sur le site http://cjf.qc.ca/fr/relations/enkiosque.php?idp=53, le 20 avril 2012.

Le corps du posthumain et de son univers numérique est une donnée facultative. Il est  délocalisé  et  perd  sa  présence  sous  l’emprise  des  technologies  de  l’information  dans   un monde « [s]ans intériorité, tout en extériorité, [un monde] réduit à une poignée de signes contrôlables et  manipulables  où  toutes  les  aspérités  […]  sont  anéanties,  les  corps   dissous »382. Ce  corps  virtuel    n’est  plus  soumis  aux  limites  et  contraintes  matérielles,  il   apparaît aux yeux du posthumain comme une perfection : « loin de la maladie, de la mort, du handicap, libéré de la gravité :   réalisation   du   paradis   sur   terre,   d’un   monde   sans   épaisseur  de  chair,  virevoltant  dans  l’espace  et  le  temps  de  manière  angélique  sans  que  la   pesanteur de la matière entrave son avancée »383.

Le  désir  d’affranchissement  du  corps biologique ne se conjugue pas seulement sur le  terrain  de  la  virtualité;;  Kurzweil  croit  que  l’esprit  humain  pourra  s’exprimer  dans  des   supports autres que le biologique. Il affirme que la biologie évolue à un rythme très lent et perdra de sa pertinence comparée  à  l’évolution   technologique.   La  compréhension  du   cerveau, selon Kurzweil, suit une courbe de croissance exponentielle384. Bientôt, l’intelligence   relevant   du   biologique   et   celle   relevant   de   la   machine   pourront   être   fusionnées. « We will surpass our own intelligence by merging with our machines »385. Les  ordinateurs  sont    déjà  partout  comme  extension  de  l’humain.  La  technologie  pourra   bientôt  les  intégrer  dans  l’humain.  «  We’ll  move  it  inside  our  bodies  to  keep  us  healthy,   and inside our brains to provide full immersion virtual reality from within the nervous

382 Ibid.

383 Ibid.

384 Ray KURZWEIL, « Conversation avec Chris Impey », dans Chris IMPEY, Talking about Life:

Conversations on Astrobiology, Cambridge (UK), Cambridge University Press, 2010, p. 328.

system and augment all of our cognitive and emotional capabilities »386. Cela arrive très vite aux yeux des posthumanistes.

We are told that in coming decades, as innovation rates in these domains become exponential and are represented nearly vertically on graphs, there will occur a developmental « Singularity » or « Spike », when there will emerge post-human beings whose power and intelligence will so far surpass our own that they will seem God-like387.

Kurzweil juge la fusion avec la machine un état désirable avec des avantages bien réels.

There are innate advantages of nonbiological intelligence. We can handle about two hundred calculations per second with our interneural connections, and electronics is a million times faster. Our interneural connections communicate inside our brains at a few hundred feet per second using chemical signaling; electronics is a million times faster than language. They can share, communicate, and think about a million times more effectively than biological intelligence.

We can already send blood-cell-sized  devices  into  the  bloodstream.  That’s   today. If we take what can be done today and apply these exponential progressions, they mean a factor of a billion increase in the capabilities of electronics in twenty-five years, a factor of tens thousands smaller in size because   we’re   shrinking   technology   at   a   rate   of   over   a   hundred   per   3D   volume per decade. The nanobots of 2025 will have computers and communication   networks.   We’ll be able to send millions or billions of nanobots   into   our   brain   at   low   cost,   they’ll   be   able   to   communicate   wirelessly   with   our   biological   neurons,   and   we’ll   be   able   to   directly   augment our biological thinking with a nonbiological prosthesis, which augments our memories, our pattern recognition, and our analytical thinking388.

Récapitulant   l’évolution   des   recherches   sur   l’intelligence   artificielle,   Moravec   prédit que « by 2050 robot "brains" based on computers that execute 100 trillion

386 Ibid., p. 331.

387 Michael E. ZIMMERMAN, « The Singularity: A Crucial Phase in Divine Self-Actualization? »,

Cosmos and History: The Journal of Natural and Social Philosophy, volume. 4, 2008, p. 348.

instructions per second will start rivaling human intelligence »389. Il suggère même que les  robots  dépasseront  les  humains  en  matière  d’intelligence390 et  qu’il  sera  opportun  que   les humains fusionnent avec les robots ou les machines dans une réalité de posthumain. En effet les posthumanistes-robots-sapiens croient que la vie, au-delà  de  l’humain  actuel,   offre de meilleures alternatives : « Posthuman life  […]  is  better  than  either  current  human   life, or human life given its best possibilities as human life »391.

C’est   du   côté   des   recherches   sur   l’intelligence   artificielle   que   le   rêve   de   transcendance   du   corps   biologique   du   posthumanisme   est   le   plus   poussé   au   nom   d’une       mutation  ou  plutôt    d’un  dépassement  de  l’humain  actuel  dont  le  soi  pourra  être  transféré   dans des supports plus adaptés que le corps biologique ou organique.

Avec   les   avancées   fulgurantes   sur   le   terrain   de   l’intelligence   artificielle,   les   prophètes de la technoscience prédisent une concurrence féroce entre les nouveaux ordinateurs ultraperformants qui pourraient se poser en « je » et les humains non transformés qui seront tout à fait inadaptés en comparaison de ces superbes machines. Le salut de l'humain serait dans sa mutation et son upgrading via le téléversement du soi vers d'autres supports.

389 Hans MORAVEC, « Rise of the Robots: the Future of Artificial Intelligence », Scientific American, 23 mars 2009, Article lu en ligne : http://www.scientificamerican.com/article.cfm?id=rise-of-the- robots&page=7, le 9 février 2011.

390 Ibid.

391 Asher SEIDEL, Immortal Passage: Philosophical Speculations on Posthuman Evolution, Lanham, Lexington Books, 2010, p. 1.

Quête  infinie    de  performance  et  d’efficacité  oblige!  L’ordinateur  devient  le  lieu   de  prédilection  pour  abriter  l’esprit  compte  tenu  de  l’imperfection  du  corps  physique  et   de ses limites. « Dans  un  monde  néolibéral  de  rendement,  d’efficacité,  de  compétition, de vitesse,   de   communication   […],     l’enracinement   corporel   est   une   pauvreté   qu’il   faut   dépasser »392.

Dans sa vision du posthumain, Moravec est plus que clair.

Bit by bit our failing brain may be replaced by superior electronic equivalents, leaving our personality and thoughts clearer than ever, though, in time, no vestige of our original body or brain remains. The vat, like the harness before it, will have been rendered obsolete, while our thoughts and awareness continue. Our mind will have been transplanted from our original biological brain into artificial hardware.

Like programs and data that can be transfered between computers without disrupting the processes they represent, our essences will become patterns that can migrate the information at will. Time and space will be more flexible. When our mind resides in very fast hardware, one second of real time may provide a subjective year of thinking time, while a thousand years spent on a passive storage medium will seem like no time at all. The very components of our minds will follow our sense of awareness in shifting from place to place at the speed of communication. We might find ourselves distributed over many locations, one piece of our mind here, another piece there, and our sense of awareness yet elsewhere, in what can no longer be called an out-of-body  experience  […]393.

La migration du sujet humain dans un support plus adapté que le corps biologique ou organique se pose comme la voie par excellence et définitive pour se libérer des souffrances, des limitations   liées   au   corps   pour   atteindre   l’immortalité   et   un   état   de  

392 David Le BRETON, « Le transhumanisme ou le monde sans corps », Relations, Dossier : Technoscience, la boîte de Pandore, no 734, août 2009, texte lu sur le site http://cjf.qc.ca/fr/relations/enkiosque.php?idp=53, le 20 avril 2012.

393 Hans MORAVEC, Robot: Mere Machine to Transcendent Mind, New York, Oxford University Press, 1999, p. 170.

béatitude. Dans la pensée posthumaniste de Moravec, à nos esprits les supports informatiques permettront la transcendance des limites humaines.

[Ils  garantiront]  une  libération  à  l’égard  de  maux  de  l’existence  tels  que  le   vieillissement et même la mort. Lorsque le support matériel contenant l’esprit  montre  des  signes  d’usure,  il  n’y  a  qu’à  téléverser  celui-ci vers de nouveaux  hardwares.  D’un  support  à  l’autre,  les  données  sont  transférées rapidement et intégralement. Des avantages incontestables sur les humains corporels   d’antan,  dont   on  ne  pouvait  transférer   la  conscience  elle-même d’un  corps  à  l’autre,  et  entre  lesquels  le  transfert  des  connaissances  n’était   possible   qu’au   prix   de   nombreuses   années   d’école,   et   de   façon   plutôt   approximative394.

On pourra, selon Kurzweil et Moravec, voir des esprits purs se réaliser enfin dans un monde immatériel. Le malaise persiste. « Le robot sapiens est le nouvel avatar du dualisme occidental qui désire surmonter la prison corporelle, pour le plus grand bénéfice de  l’esprit »395,  n’étant  plus  limité  dans  le  temps  et  dans  l’espace.  Le  robot  sapiens  

n’a  plus   d’âge.   Il   jouit   d’une  espérance  de  vie  virtuellement  illimitée : la quincaillerie matérielle qui l’héberge  est  sans  signification  particulière;;  on   en use sans en jouir, pour employer la terminologie augustinienne, et on s’en  défait  sans  regret  lorsqu’elle  se  met  à  connaître  des  ratés.  La  mort  est   vaincue  parce  que  le  corps  a  disparu.  Il  n’y  a  plus  ni homme ni femme, ni juif ni Grec, ni jeune ni vieux396.

Les   problèmes   de   discrimination,   d’exploitation   de   l’autre   deviennent   de   l’histoire.  « Il  n’y  a  plus  que  béatitude  indéfinie,  dans  un  éternel  retour  des  opérations  de   téléchargement et téléversement »397. Le corps dans cette vision est lieu de concentration de  tous  les  maux  de  l’humanité.  

394 J. F. Roussel, « Cyborg et Robot Sapiens : deux approches de la corporalité technologisée », op.cit., p. p. 221.

395 Ibid. 396 Ibid. 397 Ibid.

Dans  ce  posthumanisme  technoscientifique,  le  corps  est    subordonné  à  l’esprit  et  à   la volonté; il est réduit au rang de support obéissant « à une logique strictement fonctionnaliste »398;;   la   conscience,   synonyme   du   moi   ou   de   l’esprit   échappe   « à la contingence et au temps »399;;   elle  est   en  parfait  contrôle  d’elle-même400.  C’est   le  vieux   rêve  d’indépendance  absolue  qui  se  poursuit;;  le  robot  sapiens  s’affranchirait  du  manque   et du désir; il en a triomphé. Il peut se programmer du plaisir, celui dont il voudra se doter  et  qu’il  maîtrisera  en  se  projetant  à  l’infini  dans  une  transcendance  de  l’espace.  

Ce posthumanisme prend le relais des grands récits de la modernité en promettant un  futur  où  l’immortalité  est  souhaitée  selon  une  logique  de  salut.

Les  technologies  de  l’information  et  de  la  communication  sont  érigées  en   accélérateurs   de   l’évolution   et   en   libératrices   de   toutes   les   anciennes   pesanteurs   liées   à   l’humanité.   Ce   discours est, à son insu, profondément religieux. Toutefois, le salut ne vient plus de Dieu mais de la technique, du moins  pour  ceux  qui  auront  les  moyens  d’en  profiter.  Forme  d’intégrisme   technologique, il voue au mépris tout ce qui ne peut se résorber dans sa visée401.

Le posthumanisme emprunte, selon Le Breton, deux « voies en apparence divergentes [et qui] traduisent les visées du monde contemporain sur le corps humain »402.  Il  y  a  celle  qui  cherche  à  s’affranchir  du  corps,  le  corps  ensomatose, le corps faible et encombrant, le corps « part maudite de la condition humaine », il y a la voie opposée qui fait une promotion de « salut     par   le   corps   à   travers   l’exaltation   de   son   ressenti, le façonnement de son apparence, la recherche de la meilleure séduction,

398 Ibid., p. 223.

399 Ibid. 400 Ibid.

401 David LE BRETON, « Le transhumanisme ou le monde sans corps », op. cit. 402 David LE BRETON, La sociologie du corps, op. cit., p. 271.

l’obsession de la forme, du bien-être, le souci de rester jeune »403. « Dans les deux cas, le corps  est  dissocié  de  l’homme  qu’il  incarne  et  envisagé  comme  un  en-soi  […]  une  sorte   de  clivage  anthropologique  oppose  l’individu  à  son  corps  perçu  comme  différent  de  lui ». L’humain  est  mis  « en  position  d’extériorité  face  à  son  propre  corps »404.

Dans  une  vision  de  la  modernité,  le  corps  était  opposé  à  l’âme  ou  l’esprit,  quant  à   une compréhension   de   l’humain;;   pour   la   postmodernité   dans   des   acceptions   du   posthumain, on « oppose   l’homme   à   son   corps   et   non   plus,   comme   autrefois   l’âme   ou   l’esprit  à  un  corps »405. Tout cela se vit dans une ouverture au hasard et à la liberté; une perspective  d’une  identité  en  déplacement et en renouvellement constant; une perspective ludique libérée de la fixité du mandat du sujet dominateur406, un monde sans frontières où tout serait sur le même plan – celui  de  l’information  ou  du  traitement  de  l’information.

L’humain   de   la   culture   posthumaniste,   apparaît   comme   un   être   corporel   dont   l’existence  serait  le  résultat  hypothétique  de  développements  technoscientifiques.

[His body] is a deliberately engineered form, the imagined product of breakthroughs, both fictional and real, in genetic manipulation, reproductive technologies, and virtual reality, and it reveals certain cultural anxieties about embodiment – perhaps most especially when that embodiment is rejected or overcome in the attempt to release a supposedly « pure » cognition. Embodiment always troubles the human « person », and is a highly slippery entity despite its apparently concrete givenness407.

403 Ibid.

404 Ibid., p. 272. 405 Ibid.

406 Yves MICHAUD, op. cit.

407 Myra J. SEAMAN, « Becoming More (than) Human: Affective Posthumanisms, Past and Future »,

Pour les courants posthumanistes, le corps est dans une refonte; il est à repenser pour les courants culturels, il est – pour les deux dernières approches –, soit perfectible ou à dépasser. Dans sa version relevant du transhumanisme, il est essentiellement un corps  transformable,  un  corps  qui  n’est  plus  soumis  à  la  dualité  des  genres;;  il  transcende   aussi les frontières  des  espèces  s’offrant  aux  hybridités  humain/animal,  vivant/machine  et   réel/virtuel via les expériences biotechnologiques et technoscientifiques qui forcent un renouveau  des  questionnements  sur  l’humain : sa nature, son identité, sa constitution, son unicité et sa dignité.

The development of transgenic procedures – the practice of transplanting genetic material from one species into another – creates hybrids whose genetic composition is no longer « born » but « made ». Similarly, discoveries about the nature of the human genome have stressed the amount of shared genetic material common both to homo sapiens and the chimpanzee. We may ask what makes us distinctively human in the face of such information; and what characterizes the boundaries between any one species and another?408

Dans sa version robot-sapiens, le posthumanisme projette une conception du corps « support de la pensée »409. Le corps biologique, organique – dans cette logique – est un support   fragile,   faible,     inadéquat   et   obsolète;;   d’où   sa   supplantation   par   l’ordinateur.     Pour la vision technoscientifique, le corps biologique comme « support pour la pensée et le soi » est à écarter pour de nombreuses raisons : souffrances, limitation de la pensée à un lieu, un temps;;   enfermement   de   l’identité en une individualité en elle-même enfermée410,   alors   que   l’on   pourrait   téléverser   la   pensée,   le   soi   dans   plusieurs   autres   supports   pour   des   entrecroisements   multiples   avec   d’autres   réseaux;;   évolution   lente   (à  

408 Elaine GRAHAM, Post/Human Condition, op. cit., p. 14.

409 Jean-François ROUSSEL, « Cyborg et Robo Sapiens : deux approches de la corporalité technologisée »,

op. cit., p. 222.

l’échelle   de   dizaines   de   milliers   d’années)   et   aléatoire, alors que « la machine se transforme de mois en mois et suivant des objectifs déterminés »411.

Les   rêves   et     idées   du   posthumanisme   qui   peuvent   paraître   farfelus   à   plus   d’un   sont  mis  de  l’avant  par  des  auteurs    dont  les  compétences  en  informatique, robotique et intelligence artificielle412 sont largement reconnues413. Le projet posthumaniste

ne   relève   plus   du   futurisme   ni   du   délire.   […]   il   inspire   dorénavant   des   programmes   de   recherche,   la   création   […]   d’une   multitude   de   groupes   militants. Il   influence   une   frange   non   négligeable   de   l’administration   fédérale  américaine  et,  donc,  le  processus  de  décision  politique  […]  ledit   projet  […]  n’est  plus  cantonné  dans  le  ciel  des  idées.  Il  génère  l’apparition   de  lobbies  puissants.   Les  hypothèses  qu’il   propose  ne  cessent   d’essaimer   dans les différentes disciplines du savoir universitaire414.

Les changements techniques et communicationnels annoncés par les auteurs posthumanistes font leur chemin, introduisant un bouleversement par rapport à la culture humaniste  et  à  l’idée  de  l’humain415 et surtout de son corps.

411 Ibid.

412 IBM   a   annoncé,   le   18   août   2011,   la   réalisation   d’une   percée   extraordinaire   quant   à   la   création   d’un   ordinateur qui se comporterait comme le cerveau humain, i.e.,   capable   d’apprendre   de   ses   propres   expériences, un ordinateur qui serait en mesure de raisonner. « (CNN) -- Making computers behave like humans has taken another step forward. IBM on Thursday announced it has created a chip designed to imitate the human brain's ability to understand its surroundings, act on things that happen around it and make sense of complex data. Instead of requiring the type of programming that computers have needed for the past half-century, the experimental chip will let a new generation of computers, called "cognitive computers," learn through their experiences and form their own theories about what those experiences mean. The chips revealed Thursday are a step in a project called SyNAPSE (Systems of Neuromorphic Adaptive Plastic Scalable Electronics). The two chip prototypes are a step toward letting computers "reason" instead of reacting solely based on data that has been pre-programmed, IBM says » (New IBM computer chip mimics the human brain By Doug Gross, CNN, August 18, 2011 4:44 p.m. EDT | Filed under: Innovation. http://www.cnn.com/2011/TECH/innovation/08/18/ibm.brain.chip/)

413 Jean-François ROUSSEL, op. cit., p. 222.

414 Jean-Claude GUILLEBAUD, La Vie vivante, op. cit., p. 123.

415 Yves  MICHAUD,  «  ‘‘Humanité  pour  le  post-humain’’,  Une  conférence  du  cycle  :  Quels  humanismes   pour quelle humanité aujourd'hui? », La vidéothèque numérique de l'enseignement supérieur, Canal U, Université de tous les savoirs, Les  conférences  de  l’année  2008.  

Conclusion

La technoscience, la cybernétique et le posthumanisme sont des domaines de réflexion qui remettent en question des définitions classiques judéochrétiennes de l’humain,  écartant  du  revers  de  la  main  les  prémisses  judéo-chrétiennes qui ont nourri la culture occidentale depuis deux mille ans. Avec la technoscience, est prônée la question de  la  mutation  de  l’humain; sa matrice cybernétique permet de concevoir un humain sans intérieur,  sans  frontière  avec  la  machine  et  l’animal,  un  humain  qui  serait  un  point  sur  le   grand flux informationnel; le posthumanisme serait la maturation du fruit qui poussait dans le sol de la technoscience et de la cybernétique.

Ces domaines ont plusieurs éléments en commun : un rapport à la raison qui plaide   pour   un   développement   le   plus   illimité   possible   sur   l’humain   et   son   environnement, un rapport à la machine qui gomme toutes les frontières et un rapport au corps qui prêche son dépassement, sa mutation et son affranchissement.

Ces éléments soulèvent plusieurs enjeux pour une anthropologie théologique