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Position V 1 , lexèmes monosyllabiques à initiale consonantique

Phonétique et Phonologie

1 Inventaire phonétique général

2.2.2 Position V 1 , lexèmes monosyllabiques à initiale consonantique

Lorsque le lexème est monosyllabique (structure -CV), on obtient l'inventaire phonétique suivant :

Tableau 15 : Inventaire phonétique en position V1 (lexèmes monosyllabiques à initiale

brèves longues brèves longues brèves longues

oral

Son statut phonologique ressort des rapprochements suivants : i/u

i/a

bì ‘’ tenir, obtenir’’ / bà ‘’tailler, sculpter, dépecer’’

ʃwì ‘’mort’’ / ʃwà ‘’sexe (général)’’

wî ‘’(le)pleur’’ / wâ ‘’jumeau’’

(ǹ)ʃǐ ‘’chemin’’ / ʃǎ ‘’plume’’

/i/ est réalisé comme une voyelle antérieure, étirée, brève, fermée, orale [i].

Devant les fricatives sifflantes et les affriquées sifflantes, il est réalisé comme une voyelle centrale, étirée, brève, orale et fermée [ɨ]30. Cette réalisation est aussi bien valable pour les unités monosyllabiques que dissyllabiques.

Exemple : tsíndí est réalisé [tsɨ́ndí] ‘’rivage, terre ferme’’

dzî est réalisé [dzɨ̂] ‘’œil’’

sí est réalisé [sɨ́] ‘’sol, bas, base’’

/a/

Son statut phonologique découle des rapprochements effectués au sujet de /i/, et des rapprochements suivants :

a/ə

bà ‘’dépecer’’ / bə̀ ‘’planter’’

ʃǎ ‘’plume’’ / ʃə̌ ‘’cachette’’

ʃâ ‘’chose’’ / ʃə̂ ‘’sable’’

a/ɔ

30 Medjo Mvé relève un comportement similaire en fang de Medouneu. Il note cependant ce phénomène ‘’uniquement dans les syllabes fermées par les consonnes non voisées’’ (Medjo Mvé, 1993, p. 143) ;

(ǹ)tà ‘’petit fils’’ / tɔ̀ ‘’chèvre’’

yâ ‘’mettre’’ / yɔ̂ ‘’être froid’’

/a/ est réalisé comme une voyelle antérieure, brève, ouverte, orale [a].

/ə/

Son statut phonologique découle des rapprochements effectués au sujet de /i/, de /a/ et du rapprochement suivant :

ə/ɔ

(ŋ̀)kə̀ ‘’champ’’ / kɔ̀ ‘’part’’

/ə/ est réalisé comme une voyelle centrale, médiane, brève et orale [ə].

[ə] est réalisé [e] ou [ɛ] lorsque C1 est une occlusive labiale sonore /b/ ou une vélaire sourde /k/. Cette variation libre est observée aussi bien en structure CV qu’en structure CVCV.

Exemples :

[ŋ̀kɛ̀] = [ŋ̀kə̀] = [ŋ̀kè] ‘’champ’’

[bɛ̀] = [ bè] = [bə̀] ‘’planter’’

[kə̀:] = [kɛ̀:] ‘’donner’’

[bə́lì] = [bélì] = [bɛ́lì] ‘’sein’’

[kə́lì] = [kélì] = [kɛ́lì] ‘’voix’’

[kə̀ndì] = [kèndì] = [kɛ̀ndì] ‘’aller’’

/u/

Son statut phonologique découle des rapprochements effectués au sujet de /i/ et du rapprochement suivant :

u/ɔ

lû ‘’tête’’ / lɔ̂ ‘’branche’’

/u/ est réalisé comme une voyelle antérieure, fermée, étirée, orale [u].

Devant les fricatives sifflantes et les affriquées sifflantes, /u/ est réalisé comme une voyelle, orale, centrale, arrondie, brève, orale et fermée [ʉ]. Cette réalisation est aussi bien valable pour les unités monosyllabiques que dissyllabiques. Elle rappelle celle décrite au sujet de /i/

Exemple : ǹtsùgù est réalisé [ǹtsʉ̀ɣù] ‘’prison, variété de sardine’’

tsúŋ est réalisé [tsʉ́ŋ] ‘’cou’’

/ɔ/

Son statut phonologique découle des rapprochements effectués au sujet de /a/, /ə/

et /u/.

/ɔ/ est réalisé comme une voyelle postérieure, orale, brève, mi ouverte [ɔ]. [ɔ] et [o] sont en variante libre lorsque C1 est une occlusive vélaire sourde /k/.

[kɔ̀] = [kò] ‘’part’’

[ŋ̀kɔ̀] = [ŋ̀kò] ‘’réserve de nourriture [kɔ́là] = [kólà] ‘’tourbillon’’

2.2.2.2 Discussions

a. À propos des voyelles longues

Dougère (2007) identifie trois voyelles longues, toutes attestées en ‘’première position syllabique’’ : [ə:], [ã:] et [õ:]. Elle n’accorde de statut de phonème à aucune des voyelles longues identifiées.

Les données lexicales en annexe présentent un inventaire phonétique en position V1, structure monosyllabique, de cinq voyelles longues : [i:], [ɛ:], [ə:], [u:] et [ɔ:].

Il a été possible de trouver des paires minimales entre /i/ et [i:], comme l’atteste les exemples ci-dessous :

bí ‘’mauvais, méchant’’ / bí: ‘’force’’

kí ‘’ne pas’’ / kí: ‘’œuf’’

On peut relever deux paires minimales entre voyelles longues : kú: ‘’rat de Gambie’’ / kí: ‘’œuf’’’

yɛ́: ‘’soif’’ / yí: ‘’bois de chauffage’’

Il a par contre été impossible d’opposer [ɛ:] et [u:] à leurs corrélaires brèves /ɛ/

et /u/. Ce qui ne permet pas d’établir leur statut de phonèmes. En les établissant comme phonèmes à partir de leur commutation avec [i:], ils auraient en effet été définis par un seul trait : postérieur pour [u:] et antérieure pour [ɛ:]. [ɛ:] et [u:] ne jouissant pas d’un statut de phonèmes, la définition des traits pertinents de [i:] (dont la pertinence semble bien établie) se résumerait elle aussi à un seul trait : la longueur.

Les données sur lesquelles se fonde mon analyse, ainsi que le niveau de connaissance actuel de la langue, ne permettent donc pas d’établir de manière convaincante la pertinence de la longueur vocalique dans cette position.

b. À propos du classement de /a/

Le phonème /a/ a été défini phonétiquement comme une voyelle antérieure. Les commutations effectuées à son sujet montrent qu’il peut s’opposer à la fois aux voyelles antérieures et à la centrale /ə/. Je le classerai donc comme centrale et non comme antérieure afin d’obtenir un système beaucoup plus équilibré.

c. À propos des voyelles nasales

Puech (1989) identifie trois voyelles nasales ayant toutes un statut de phonème : /ũ/, /õ/, et /ã/. Je reviendrai sur l’interprétation syllabique (ou plus exactement suprasyllabique) qu’il donne des voyelles nasales lors du traitement de la syllabe. On se limitera ici à la présentation des faits.

Dougère (2007) identifie pour sa part phonétiquement cinq voyelles nasales en

‘’première position syllabique’’ : æ̃, ã, ã:, ə̃, ũ, õ, õ:. Elle en identifie quatre : ũ, õ, ĩ et ã

en ‘’deuxième position syllabique’’. Dans les deux positions concernées elle établit, en se basant en grande partie sur les commutations proposée par Puech, le statut phonologique de /õ/ et de /ã/

Le lexique présente une forte occurrence de voyelles ayant une réalisation nasale en structure monosyllabique. En soumettant ces données à l’épreuve de la commutation, les paires suivantes sont attestées :

a/a̰

(m̀)pá ‘’animal sp’’ / (m̀)pá ‘’fang’’

(ǹ)tà ‘’petit fils’’ / (ǹ)tà ‘’traversée’’

ʃǎ ‘’plume’’ / (ǹ)ʃǎ ‘’lieu sacré sp (consacré à la bénédiction des jumeaux)’’

wâ ‘’jumeau’’ / wâ ‘’jeu’’

u/ṵ

bù ‘’fer’’ / bù ‘’miel’’

(m̀)bú ‘’année’’ / bú ‘’genou’’

kǔ ‘’pied’’ / kǔ ‘’chenille sp (comestible)’’

bù ‘’fer’’ / (m̀)bù ‘’roseau sp’’

a̰/ṵ

pyá ‘’sauce’’ / pyú ‘’plaie’’

lá ‘’anus’’ / lú ‘’liane’’

bà ‘’banane sp’’ / bù ‘’miel (général)’’

(ŋ̀)kà ‘’devin guérisseur’’ / kù ‘’dos’’

a̰/ɔ̰

(ǹ)tà ‘’traversée’’ / (ǹ)tɔ ‘’caoutchouc’’

(ǹ)dà ‘’rat’’ / dɔ ̀ ‘’rivière’’

wâ ‘’jeu’’ / wɔ ̂ ‘’graisse’’

ɔ̰ /ṵ

tsú ‘’cou’’ / (ǹ)tsɔ ́ ‘’route’’

kyù ‘’rouge’’ / kyɔ ̀ ‘’antilope’’

bú ‘’genou’’ / (m̀)bɔ́ ‘’joue’’

La nasalité des voyelles est pertinente si d’une part on peut opposer les voyelles orales aux voyelles nasales, et si d’autre part on peut opposer des voyelles nasales entre elles. Les commutations présentées ci-dessus peuvent donc permettre d’identifier /ṵ/ et /a /, ce sont les seules à commuter non seulement avec leurs corrélaires orales /a/ et /u/, mais également entre elles.

La commutation vise à identifier les traits pertinents. Ceux-ci se dégagent des unités présentant une ‘’opposition corrélative’’. Le trait pertinent est donc celui qui oppose les deux éléments commutés et la définition de phonèmes se fait à partir d’un minimum de deux traits. Les ‘’nasales’’ dont l’identité phonologique peut être établi (/ṵ/

et /a /) n’entrent dans aucun type de corrélation, l’opposition ṵ / a ne permettant pas de dégager un trait pertinent unique. En les traitant comme des phonèmes ils n’auraient été définis que par un trait : celui de la nasalité.

La commutation ɔ /ṵ laisse pour sa part entrevoir la possibilité d’avoir une paire corrélative dans l’ordre postérieur. Cette paire aurait été pertinente si [ɔ] jouissait du statut de phonème. L’établissement partiel de la pertinence de la nasalité m’a conduit, à ce niveau de l’analyse, à ne pas analyser ces réalisations nasales comme phonologiques.

Je reviendrai, lors du traitement de la structure syllabique, sur l’interprétation que l’on peut donner à cette ‘’phonologisation partielle’’ de la nasalité vocalique.

d. À propos de [ɛ]

Il a été dit plus haut que [ɛ] représentait, au même titre que [e], une réalisation de /ə/ lorsque C1 est /k/ ou /b/. Cette alternance est confirmée par l’impossibilité totale d’opposer [ɛ] à /ə/ dans ce contexte.

Dans les autres cas (C1 différent de /k/ et /b/) l’alternance cesse d’être opérante.

lɛ̂ ‘’raconter’’ n’est jamais réalisé *lə̂

mvɛ̀ ‘’peigne’’ n’est jamais réalisé *mvə̀

ǹdzɛ̀ ‘’pont sp’’ n’est jamais réalisé *ǹdzə̀

Dans ce même contexte, C1 différent de /k/ et /b/, il a également été impossible de faire commuter [ɛ] avec une quelconque autre voyelle. Les seules commutations possibles au sujet de [ɛ] ne concernent que les termes dans lesquelles il alterne librement avec /ə/. Le statut de [ɛ] lorsque C1 est différent de /k/ et /b/ reste donc indéterminé. C’est pourquoi je le présenterai entre parenthèses dans l’inventaire final.

2.2.2.3 Définition et classement des phonèmes en position V1 monosyllabique

/i/ est défini par les traits suivants : - antérieur : i/u

- premier degré : i/a /a/ est défini par les traits suivants :

- central: a/ɔ

- quatrième degré : a/ə /ə/ est défini par les traits suivants :

- central : ə/ɔ

- troisième degré : ə/a

/u/ est défini par les traits suivants : - postérieur : u/i

- premier degré : u/ɔ /ɔ/ est défini par les traits suivants :

- postérieur : ɔ/ə - deuxième degré : ɔ/u

On peut classer les phonèmes vocaliques en position V1 monosyllabiques de la manière suivante :

Tableau 16 : Tableau phonologique des voyelles en position V1 (Lexèmes monosyllabiques)

antérieure centrales postérieures

premier degré i u

deuxième degré (ɛ) ə ɔ

troisième degré a