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Portraits de femmes: des exemples d’agency dans les années 1980

Chapitre II-Politique de promotion de la femme sous le président Thomas Sankara:

A. Entre autoritarisme, intégration économique des femmes et dynamisme féminin dans la

2. Portraits de femmes: des exemples d’agency dans les années 1980

À partir des années 1980, c’est à cause de la politique autoritaire du président Thomas Sankara et de l’accroissement des charges qui incombaient aux femmes face à la crise écono- mique que ces dernières sont devenues plus dynamiques dans le secteur informel et dans les asso- ciations, dans le but de trouver des solutions à leurs problèmes. Leur dynamisme associatif a permis la naissance d’une forme de pouvoir d’action qui s’est vu grandir au fur et à mesure de la politique de promotion de la femme.

À la lumière de ces éléments, nous souhaitons présenter différentes formes d’action de la part de femmes pour montrer à quel point cela s’apparente à de l’agency. Ceci nous permettra de montrer les logiques qui animent certaines femmes et d’entrevoir leurs aspirations en termes de rapports de genre, leurs visions de leur rôle dans leurs familles et de leur statut social ou encore de leur rôle face au Politique comme simple courroie de transmission d’une politique ou non. Pour cela, nous présenterons plusieurs itinéraires de femmes. Commençons tout d’abord parMa- dame Lucie Kaboré, « PaagNaaba »261.

258Entretien avec Adama, homme de 57 ans, au Ministère de la Promotion de la Femme, à Ouagadougou, 30 juillet 2013. 259David Gakunzi, op. cit, 1991, p. 235-236.

260Richard Banegas, Insoumissions populaires et révolution au Burkina Faso, Bordeaux, CEAN, 1993, p. 102.

261Entretiens avec Lucie PaagNaaba, femme de 64 ans, présidente association Tell Taaba, à Ouagadougou (Pissy), les 2 et 16 juin

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Je suis née en 1966 à Ouagadougou, d’une mère ouagalaise et d’un père Ivoiro- Burkinabé. Après mes études primaires à Bobo-Dioulasso, la capitale économique du Burkina Faso, j’ai obtenu mon Certificat d’Études primaires (CEP) et je figure comme l’une des premières femmes burkinabé à avoir obtenu ce certificat. La majo- rité des filles était donnée en mariage peu après l’âge de 17 ans, mais moi je poursuivis mes études supérieures à Bingerville en Côte d’Ivoire et à Rufisque au Sénégal. En 1949, je me suis mariée et j’eus huit enfants. En 1958, de retour à Ouagadougou, je me suis enrôlée dans une association regroupant que des femmes dénommées Ben-Kadi.

Notre rôle était de rendre visite aux femmes des quartiers dans le but de les sensiliser sur leurs valeurs, telles que la lutte contre l’excision, le divorce etla récupération de leur héritage.Notre regroupement nous a permis de découvrir une solidarité, à partir des liens entre notre vécu personnel et l’oppression commune, et parfois d'agir indi- viduellement ou collectivement contre cette oppression262.

Notre but en tant que membres de l’Association Ben-Kadi était de permettre à ses femmes de se responsabiliser dans le but de remédier à cette ignorance légendaire. L’idéologie sankariste de la femme était déjà ancrée dans nos habitudes. Plusieurs femmes parmi nous comme moi étaient victimes de pesanteurs sociales. Pour nous c’était une nouvelle occasion de se faire valoir. Les femmes sont toujours confrontées à des problèmes liés à la sortie des rôles stéréotypés, car des rapports sexistes sont nés.C’est-à-dire de se rabaisser face à l’homme. La contestation de la thérapie traditionnelle a mené à l'élaboration du modèle d'intervention féministe qui vise à libérer les femmes des rôles qui les empêchent de réaliser leur potentiel263.

Après ma première expérience dans le milieu associatif, j’ai décidé de créer, en 1974, une nouvelle association dénommée l’association des veuves et Orphelins du Burkina (AVOB) dans le but de venir en aide aux femmes seules en difficulté et reçoit le récépissé de reconnaissance officielle n°5 en 1975. Mon engagement se justifiait par la situation peu enviable des femmes du Burkina Faso. Selon mon expérience ivoirienne264, où les femmes avaient une ouverture d’esprit par aux

femmes moosé, toujours confrontées aux diktats des hommes et la religion265, je me

suis rendu compte que les seules les femmes du Burkina Faso ne connaissaient pas leurs droits et devoirs. Aussi, elles sont malheureuses parce qu’elles attendent tout de leur mari. La libération de la femme ne serait être effective que par leur libération financière, c’est-à-dire la richesse. La femme qui travaille ardemment jusqu’à ce que son activité génère des revenus considérables a un prestige et une dignité. C’est pour cela que j’ai décidé de leur transmettre mon expérience des connaissances techniques.

Mon expérience scolaire et mes multiples voyages dans les pays comme la Côte d’Ivoire et le Sénégal m’ont permis d’acquérir plusieurs connaissances pratiques. J’ai décidé de les aider à développer leurs activités génératrices de revenus. Dans ce sens, j’ai mis en place des programmes de formation adaptés aux femmes pour la production des biscuits (une sorte de protéines consommables pour les enfants), du beurre du karité et du savon. Puis je les aide à écouler leurs produits lors des foires

262Alice M. Home, « « Les groupes de femmes : outils de changement personnel et de développement », Service social, vol. 37, n° 1-2,

1988, p. 61-85.

263Ibidem.

264La loi ivoirienne sur la polygamie est la plus « révolutionnaire » et la Côte d’Ivoire le premier pays d’Afrique francophone à adopter

une mesure aussi radicale. Pour ce faire, la loi reprend dans l'article 2 alinéa 1, la formule de l'article 147 du Code civil français « Nul ne peut contracter un nouveau mariage avant la dissolution du précédent ». Chantal Vléï-Yoroba, « Droit de la famille et réalités familiales : le cas de la Côte d'Ivoire depuis l'indépendance », Clio. Histoire‚ femmes et sociétés [En ligne], 6 | 1997.

265Maud Saint-Lary, « Quand le droit des femmes se dit à la mosquée : ethnographie des voies islamiques d'émancipation au Burkina

55 commerciales. À travers mes programmes de formation, les femmes de mon association arrivent à générer des revenus pour lutter contre la pauvreté dans leurs familles.

En 1978, mon mari mourut et me laissa avec les huit enfants. Selon la coutume, je devais me remarier avec un des frères du mari. En 1982, ma belle famille me proposa de me remarier, parce que le père de mon défunt mari me reprochait entre autres d’inciter les autres femmes à se rebeller. Pour ne pas être considérée comme une femme rebelle, c’est ainsi que j’ai usé d’une astuce pour contourner mon remariage. J’ai décidé, en toute légalité, de choisir le plus jeune frère de la famille de mon mari, un enfant âgé de 5 ans. Dans ce contexte, les sages devaient attendre que cet enfant atteigne l’âge de se marier pour procéder officiellement à l’union. C’est ainsi que j’ai échappé à mon nouveau mariage. Depuis ma pleine implication dans mon association, aucune personne n’est venue me reparler de cette situation.

Voici l’itinéraire de Khadidja, surnommée Tantie Hôtel de France266.

Je suis née en 1960 à Tanghin Dassouri, village d’une quarantaine de kilomètres de Ouagadougou. Je suis bien connue des habitants du quartier Gounghin qui me surnomment Tantie Hôtel de France. Je me suis mariée en 1969. Comme toutes les jeunes filles mariées de sa génération, je m’occupais des tâches ménagères et des soins de ma famille.

En 1983, à 23 ans, mon mari prit une 5e femme et me répudia parce que selon la

religion musulmane un homme ne doit pas avoir plus de quatre femmes, mais il peut néanmoins répudier une et se remarier une nouvelle. Les raisons qui étaient à la base de ma répudiation furent la jalousie de mes coépouses. J’étais la favorite des quatre femmes. Je me suis intéressée au commerce très jeune et j’ai continué à exercer ce métier dans le foyer de mon mari. Mon activité commerciale ne plaisait pas à mes coépouses. En plus de cela, les membres de ma belle famille ne supportaient pas mon esprit d’entrepreneuriat. Selon mes détracteurs, je passais plus de temps au marché dans le but de faire fonctionner son commerce. Mes coépouses me traitaient de femme paresseuse, que je ne m’adonnais pas à mes tâches familiales. Ensuite elles décidèrent que je devais plier mes bagages, c’est-à-dire quitter la maison. Finalement, je ne pouvais pas supporter leurs insultes et les bagarres répétées, notre mari décida de mon départ.

J’ai alors quitté la maison de mon mari pour rejoindre celle de mes parents. Ma vie était devenue très difficile parce qu’était la risée de la famille et mes parents essuyaient des insultes et des salutations moqueuses de la part du voisinage. Vous comprendrez qu’une femme répudiée est mal vue dans la société moaga. J’ai décidé en suivant les conseils d’une amie commerçante de même âge, de me rendre en ville pour poursuivre son activité commerciale. Depuis mon départ du village, j’ai entretenu de bonnes relations avec ma mère qui m’avaitinitiée au commerce et mon mari, car il était responsable de mes enfants. Néanmoins, je venais racheter les fruits et légumes au village que j’allais revendre en gros aux femmes en ville. Mon arrivée en ville a changé ma vie du moment que j’ai appris que j’avais le droit de travailler et que mon mari n’avait pas le droit de me répudier à cause des commérages de mes coépouses. Je fus accueillie dans le groupe de l’association des commerçantes dénommée « Yiki Toume » (lève-toi et travaille) en 1985. Elles m’ont incitée en 1986

266Entretien avec Kadidja (Hôtel de France), femme de 56 ans, vendeuse de riz à Ouagadougou, le 30 mai 2013. Elle doit son nom au

célèbre hôtel de France, réputé être un des plus beaux hôtels dont la restauration est digne de dégustation et où on mange à satiété. Elle doit son nom à ses multiples talents de cordon bleu.

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à mener des procédures judiciaires dans le but de retrouver mon foyer. Finalement, j’abandonnai ce projet, car, mes activités fluctuaient et j’arrivais à m’occuper de mes responsabilités familiales. J’envoyais régulièrement de l’argent et des vivres à mes enfants restés au village. Ces biens que j’envoyais profitaient à tous les membres de la famille de mon mari, même mes coépouses s’en servaient.

Voici celui de Florence Dan Fani267.

Je m’appelle Florence, mais les gens me surnomment Florence Dan Fani à cause de mon implication dans la valorisation du Faso Dan Fani, pagne traditionnel tissé au Burkina Faso. J’ai cinquante-trois ans. Je suis mère de quatre enfants. Je suis née en 1960 à Tanghin-Dassouri et me suis installée à Pissy avec mon mari. Je n’ai pas eu la chance d’aller à l’école comme les autres filles en tout cas. Au village, je travaillais dans le moulin de son père et j’aidais sa mère à tisser des pagnes de temps à temps. C’est en 1978 que je me suis mariée et j’ai alors commencé à intensifier mon activité de tisseuse. En 1981, mon mari qui travaillait dans la maçonnerie eut un nouveau poste à Ouagadougou. Il partit pour 6 mois. Vu qu’il n’arrivait pas à nous envoyer de l’argent, mes parents m’ont dit de le rejoindre que sûrement c’est parce qu’il s’occupe d’une nouvelle femme qu’il n’arrive pas à s’occuper de nous. De ce fait, il accepta de nous recevoir, moi et notre premier enfant dans le quartier Pissy. Arrivée en ville, j’ai compris réellement que mon mari vivait une situation très difficile et qu’il avait raison de ne pas nous envoyer de l’argent. Ses promesses d’emploi n’ont rien donné finalement. Il travaillait, mais à la fin du mois, il ne percevait aucun salaire. Le propriétaire de l’entreprise ne les payait pas. Notre arrivée a compliqué la situation de vie : loyer, électricité et eau courante.

De ce fait, dans un Burkina Faso où le Faso Dan Fani avait de l’importance, je me suis lancé dans la confection des pagnes Faso Dan Fani. J’avais une solide expérience dans la confection des pagnes, mais je n’ai pas pris de chance, je me suis inscrite dans un centre de formation en tissage dans la mission catholique du secteur n°1 dans le but d’améliorer ses qualités.

En 1982, je deviens une référence dans le domaine de la confection et la vente du

Faso Dan Fani, car il n’y avait pas vraiment une différence entre ce que je

connaissais et ce qu’on m’enseignait dans le centre de formation. En 1983, avec la prise du pouvoir du président Thomas Sankara, le pagne traditionnel tissé au Burkina Faso a acquis de l’importance. Le nouveau président du Burkina Faso avait mis en place une politique de valorisation du Faso Dan Fani. Je peux dire que c’était une chance pour nous taiseuse, car on était sûr qu’on allait faire de bonnes affaires. Ma renommée dans le domaine du tissage s’est accrue à tel enseigne que j’ai embauché trois autres femmes tisseuses pour m’aider à finaliser mes multiples commandes. En 1986, je fondais un institut informel de formation des tisseuses, dénommé Centre de Formation « Yaa Neeré » (c’est beau), dans le but de former de nouvelles tisseuses. J’embauchais mes premières diplômées de la première promotion à mon centre de formation pour finaliser certaines commandes des fonctionnaires.

Et enfin, voici l’itinéraire de Samiratou268.

267Entretiens avec Florence, tisseuse et présidente du centre de formation Tissage Laafi, à Pissy (Ouagadougou), les 12, 15 et 20 juin

2013.

268Entretiens avec Samiratou, femme de 38 ans, entrepreneure (laveuse d’habits), à Gounghin (Ouagadougou), les 17, 21 et 25 juin

57 Je m’appelle Samira, née en 1961, mais les gens m’appellent Samira Fanico. Au dé- but j’étais gênée, mais aujourd’hui je suis très fière de moi. Il n’y a pas de sous- métier surtout s’il te permet de bien vivre et d’aider d’autres personnes. Je vis dans un foyer composé de trois enfants et mon mari. Il travaillait dans la compagnie d’État « Faso Yaar » comme cadre. Ma famille de naissance est très riche. Mon père était un grand opérateur économique et ma mère faisait le commerce international. C’est elle qui m’a initiée au commerce international que je faisais. J’ai laissé l’école en 1975 (à 14 ans) au CM1 (Cours Élémentaire 1re année) parce que je n’avais pas de

bonnes notes. J’ai passé huit ans à l’école sans le certificat pourtant les autres élèves l’avaient en cinq ou sixans. D’ailleurs, il me restait deux ans pour arriver au CM2 (Cours élémentaire 2e année). Je peux dire que mes parents m’ont encouragée à lais-

ser l’école. En plus du fait qu’ils m’insistaient à compter leur argent les soirs et les tâches que j’accomplissais pour ma mère, c’était difficile pour moi d’avoir du temps pour étudier les soirs. Mon père me disait d’ailleurs que la valeur de l’école pour une femme c’était de savoir juste compter, lire les lettres pour signer les chèques et faire la cuisine. C’est ainsi que j’ai laissé l’école pour me lancer très tôt dans le com- merce. J’ai su que sans l’école on peut aussi réussir. Au début c’était très facile pour moi, car les parents étaient très connus. Ils avaient des hangars un partout dans les marchés de Pissy, de Gounghin, de Larlé et même dans les villages. Très vite, je me suis initié au commerce international sous l’œil bienveillant de ma mère. Elle était la grande commerçante et moi la comptable. C’est ici que j’ai pris conscience de la va- leur de l’école pour une personne. Le peu de cours accomplis à l’école me permettait de converser dans un anglais boiteux et à compter et convertir l’argent pour ma mère. Nous allions au Ghana, au Mali, au Sénégal, en Côte d’Ivoire, au Niger, au Togo et au Bénin. Avec moi, une autre forme de commerce est née : c’était le com- merce de prestige inspiré des Nana Benz togolais et béninois.

En 1985, j’ai commencé à investir dans l’immobilier de luxe. C’est au soir du 10 mars 1985 que mon malheur débuta. J’ai assisté à la cérémonie du 8 mars 1985 et je me suis fait remarquer par mon style de vie inspiré des Nana Benz (bijoux en or, pagnes hautement riches). C’est ainsi que des militaires CDR (Conseil de la Défense de la Révolution) sont arrivés chez moi deux jours après et ont commencé à fouiller de fond en comble ma demeure. C’est quelques jours que j’ai appris de sources sûres que ce sont des femmes qui m’ont dénoncée auprès des CDR que j’avais beaucoup d’argent. Cette descente musclée des CDR a marqué ma vie, car je perdis beaucoup de mes biens. Je n’ai jamais pu me relever de cette perte, raison pour laquelle j’ai ar- rêté le commerce international. Entre autres la politique de valorisation du Faso Dan

Fania été à la base de l’arrêt de mon commerce. Les CDR m’ont reproché aussi de

vendre des pagnes étrangers pourtant le Burkina Faso produisait de bons pagnes. Par la suite, mes problèmes ont précipité le licenciement de mon mari de Faso Yaar en janvier 1987.

La prise du pouvoir par le président Thomas Sankara a été un soulagement pour des femmes comme Madame Lucie Kaboré, PaagNaaba, Florence Dan Fani et KadidjaHôtel de

France. Le pouvoir de Thomas Sankara a permis de légitimer les femmes au plan politique,

économique et social. Madame Lucie Kaboré a pu retrouver son esprit entreprenarial grâce à l’appel lancé par le président Thomas Sankara de la part des femmes, à s’auto-développer leurs talents et à produire burkinabé. Madame Kaboré Lucie a acquis du respect auprès des autres

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femmes. Par exemple, en 1982, lorsqu’elle s’opposa à son remariage, plusieurs femmes de son entourage furent surprises par sa réaction. Elle fut qualifiée de « femme réactionnaire, femme révolutionnaire ». Ses multiples conseils concernant l’émancipation de la femme par sa quête de la liberté financière furent considérés comme des signes de rébellion. Elle a pu tirer son espoir et sa détermination des discours de Thomas Sankara. Les femmes reconnurent par la suite son esprit de combativité et vinrent la consulter pour les aider à prendre des décisions dans leurs matrimoniales conflictuelles.

La société dans laquelle vit ces femmes est une société majoritairement patriarcale et gérontocratique, où la domination des aînés sur les cadets passe par le contrôle des moyens de production, des savoirs rituels, et de la circulation des femmes269. L’itinéraire scolaire de Madame

Lucie Kaborésort de la norme dans un pays où le taux de scolarisation des jeunes filles est bas et que la tendance lourde est de voir les jeunes filles être enlevées de l’école par manque de moyens270.Dans ce sens, les femmes tendent à être présentées comme de simples objets des

stratégies des hommes, et comme des victimes passives de la domination masculine, stigmatisés par le jeu de la dot, de l’excision et du mariage forcé271. L’abnégation de madame Lucie Kaboré

témoigne alors de sa capacité d’agency272. Par ailleurs, son discours est résolument féministe dans

la mesure où elle montre une volonté indéfectible de sortir les femmes de leur situation de soumission et de les amener à prendre conscience de leur situation pour mieux s’en extraire. Le milieu associatif est un lieu privilégié par les femmes pour échanger des expériences et discuter de leur quotidien dans leurs foyers et d'échanger des idées pour améliorer leurs conditions de vie273. Victime du mariage forcé et de la confiscation imminente de l’héritage de son mari, à

cause de ses idées révolutionnaires, madame Lucie Kaboré a montré sa capacité d’action par son intégration (membre de l’association Ben-Kadi) et sa responsabilisation dans le milieu associatif (fondatrice et présidente de l’AVOB). Les différents voyages en Côte d’Ivoire et du Sénégal ont eu aussi un impact positif sur l’ouverture d’esprit de Madame Kaboré Lucie. Sa capacité à agir,

269Marc Éric Gruenais, « Aînés, aînées ; cadets, cadettes. Les relations aînés/cadets chez les Mossi du centre (Burkina Faso) », Marc