• Aucun résultat trouvé

Technologie de fabrication de dispositifs polyéthylène/PDMS

S. pombe : sa vie, son histoire et son cytosquelette

C.2 S.pombe, une levure modèle

Schizosaccharomyces Pombe (S.pombe) est une levure à fission utilisée comme organisme modèle en biologie cellulaire et moléculaire. « Pombe », qui veut dire bière en swahili, a été isolée en 1890 à partir d’un échantillon de bière de millet provenant de Zanzibar (Figure C.1-2). [Lindner 1893]

174

Figure C.1 : Dessin original de la première description de S.pombe [ Lindner 1893]

Figure C.2 : Photographie de S.pombe [Tran 2006]

Elle se présente sous la forme d’un organisme eucaryote unicellulaire, cylindrique, de 3 à 4 µm de longueur. S.pombe est sans danger et peut être cultivée facilement. Les cellules grandissent par leurs extrémités et se divisent par fission médiane, produisant ainsi deux cellules filles cylindriques, de tailles égales. S.pombe est devenue avec le temps un organisme modèle pour l’étude des mécanismes de contrôle de cycle cellulaire. Elle a donné lieu à des découvertes essentielles dans la caractérisation et la mise en évidence du caractère universel de molécules contrôlant le cycle cellulaire. Ces recherches ont d’ailleurs été récompensées par un prix Nobel de médecine et de physiologie en 2001.

Le génome de S.pombe a été séquencé et publié en 2002 [Wood 2002] ce qui en fait ainsi le sixième organisme eucaryote à avoir été séquencé. Ce séquençage a révélé qu’un quart des gènes de S.pombe était déjà présents dans le génome d’autres espèces et que 50 gènes identifiés chez S.pombe sont impliqués dans des maladies humaines dont la moitié sont des cancers.

C.3 Le cytosquelette de S.pombe

Le cytosquelette de S.pombe a de multiples fonctions : il joue un rôle important dans la forme de la cellule pendant l’interphase et dans la ségrégation du matériel génétique pendant la mitose. Dans le cas des levures S.pombe, pendant l’interphase, le cytosquelette est constitué de 3 ou 4 fuseaux de microtubules repartis autour du grand axe de la cellule (Figure C.3).

175

Figure C.3 : Cytosquelette de S.pombe [Tran 2006] Image reconstituée prise au microscope confocal d’un Pombe mutant exprimant de la GFP_tubuline (en blanc).

Les microtubules sont constitués d’un assemblage ordonné de molécules de α-tubuline et de molécules β-tubuline (Figure C.4). Les molécules de tubulines s’ajoutent et se détachent constamment à l’extrémité libre du filament de tubuline (extrémité +). Cet équilibre dynamique provoque, en fonction des conditions, la croissance ou la dépolymérisation des microtubules.

Figure C.4 : Schéma représentant un microtubule. Les microtubules sont constitués de molécules de tubuline assemblées sous forme de tubes. [ Alberts 2005]

Lors de l’addition d’une nouvelle molécule de tubuline à l’extrémité + d’un microtubule, ce dernier est lié à une molécule de GTP. Au bout d’un certain laps de temps la molécule de GTP perd un phosphate et se transforme en GDP. Un microtubule en phase de croissance est ainsi constitué d’un assemblage de GDP-tubuline sur toute sa longueur avec une épaisseur de GTP-tubuline à son extrémité +. Les molécules de GTP-tubuline sont associées de manière plus stable aux microtubules que les molécules de GDP-tubuline. Si les molécules de tubuline s’ajoutent suffisamment rapidement, le microtubule grandit et une capsule de GTP-tubuline se forme à l’extrémité + du microtubule le protégeant ainsi de la dépolymérisation. En revanche, si ce processus de polymérisation ralentit, la protection de GTP-tubuline disparaît et provoque généralement une dépolymérisation soudaine et très rapide du microtubule (Figure C.5).

176

Figure C.5 : Illustration de la création de la capsule de GTP par polymérisation de nouvelles molécules de tubulines. Lorsque la vitesse de polymérisation de la tubuline est trop faible, la

protection de GTP disparaît et le microtubule se dépolymérise. [Jordan, 2004]

La température influe de manière importante sur la vitesse de polymérisation de la tubuline à l’extrémité + des microtubules (Figure C.6).

Figure C.6 : Expérience « in vitro » montrant la dépendance de la vitesse de croissance des microtubules avec la température et la concentration de tubuline. L’expérience, menée

pour 3 concentrations de tubuline différentes, montre également que la vitesse de polymérisation augmente avec la concentration de tubuline du milieu. [modifié Fygenson

1994]

A faible température, l’ajout de nouvelles molécules de tubuline sur le microtubule ralentit, la capsule de GTP disparaît et les microtubules dépolymérisent. Ainsi, pour des températures inférieures à 10°C, la plupart des microtubules de S.pombe disparaissent en quelques minutes. [Fygenson 1994] A température ambiante, la vitesse de polymérisation des microtubules augmente, la capsule de GTP se reforme et les microtubules retrouvent leur

177

taille normale. Les processus de polymérisation et de dépolymérisation des microtubules ont lieu sur des échelles de temps de quelques minutes. Lorsque les microtubules dépolymérisent à basse température, toutes les molécules de tubuline sont libérées dans le cytoplasme. Cette forte concentration de tubuline dans le cytoplasme permet une re-polymérisation rapide des microtubules lors du retour à la température ambiante. Il est ainsi possible de contrôler l’état du cytosquelette de la cellule en contrôlant la température.

La vitesse de croissance des microtubules peut être modélisée comme le produit entre le rythme R auxquels les dimères de tubuline rencontre l’extrémité du microtubule et la

probabilité de collage de ces derniers. Le rythme des rencontres peut être calculé à l’aide des équation de transport diffusif. Ce calcul consiste à intégré le nombre de dimères situés à une distance r du microtubule divisé par le temps nécessaire au dimère pour diffuser sur cette

distance t(r) multiplié par la probabilité du dimère de diffuser dans la direction du

microtubule p(r). L’équation (C,1) exprime le rythme de rencontre entre le microtubule et les

dimères de tubuline [ Fygenson 1994] :

a DC b dr r b D r C r dr r p r t r n R a a 2 2 2 2 2 4 4 ) ( ) ( ) ( π π π π = = =

(C.1) Avec,

a : Taille d’un dimère de tubuline (m)

b : Diamètre effectif d’une extrémité de microtubule (m)

D : Coefficient de diffusion (m2/s)

C : Concentration des dimères (dimère/m3)

Le coefficient de diffusion D est décrit par l’équation (C.2),

a kT D πη 6 = (C.2)

Le Rythme de rencontre entre les dimères de tubuline et les microtubules est donc proportionnel à la température et à la concentration des dimères. La probabilité de collage entre ces derniers, qui n’est pas décrite ici, varie également avec la température. La vitesse de collage étant limitée par le rythme des rencontres entre le dimère et le microtubule, la vitesse de polymérisation augmente presque linéairement avec la température (Figure C.6).

Le cytosquelette joue un rôle important dans la croissance de S.pombe. Pendant l’interphase, les microtubules déposent sur la membrane cellulaire les molécules nécessaires à la formation d’un complexe protéinique permettant la croissance de la membrane cellulaire (Figure C.7).

178

Figure C.7 : Les microtubules participent à la déposition d’un complexe protéinique nécessaire pour la fixation future d’actine et la croissance membranaire. [Tran 2006]

Un défaut dans l’organisation de la structure des microtubules provoque généralement une modification de la forme de la cellule. Une mutation du gène mto2 de S.pombe a la particularité de produire des levures courbées. Cette forme anormale provient d’un défaut d’organisation des microtubules. La structure en microtubule de ce mutant n’est pas symétrique et la majorité des microtubules se situent du même coté de la cellule. La répartition des microtubules de ce mutant provoque une accumulation du complexe protéinique nécessaire à la croissance cellulaire sur un coté donné de la levure. La levure grandit donc plus vite d’un coté que de l’autre ce qui provoque une courbure de la cellule (Figure C.8).

Figure C.8 : L’organisation asymétrique des microtubules (en vert) chez le mutant mto2Δ génère un dépôt d’actine (en rouge) asymétrique et provoque une croissance cellulaire qui

mène à une cellule courbée. [Tran 2006 modifié]