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Prolongement 1. La langue, ressort et enjeu de la force symbolique de l’État

2. Une politique sous surveillance

En raison des liens historiques entre la formation de la langue à celle de l’État, du fait des transformations socio-historiques intervenues depuis les années 1960 (dans les relations internationales, la définition des rôles de l’État, la place du capital culturel et linguistique, etc.), suite aux multiples prises de position et mobilisations imposant la représentation d’une langue en danger « justifiant » l’intervention l’État, la « défense de la langue française » a été constituée en une mission d’État, progressivement spécifiée et institutionnalisée.

Tout au long de son affirmation cette politique de la langue fait cependant l’objet d’euphémisations : l’État intervient mais ne régente pas ; met en garde mais ne proscrit pas ; propose mais ne prescrit pas. Et, dans le même temps que cette intervention s’impose comme « nécessaire », elle est l’objet d’oppositions qui remettent en cause ses fondements mêmes. Les appels à l’État se muent en dénonciations du dirigisme linguistique ; les mobilisations pour une politique de la langue laissent place à des conflits pour l’autorité linguistique au sein desquels les agents et institutions qui représentent l’État n’ont pas toujours, loin s’en faut, le dernier mot — on l’a vu avec l’échec de la réforme de l’orthographe. Or ces conflits pour les mots ne sont pas que des conflits de mots. De leur issue dépendent en effet les chances de faire triompher au sein d’une relation sociale la « volonté linguistique de l’État », même contre des résistances, pour paraphraser Max Weber. C’est autrement dit aussi là que se mesure la « puissance » de l’État en matière de langue et que s’accusent ses limites.

Affirmation de l’autorité étatique vs enrobage euphémique de l’intervention, « demande d’État » vs oppositions à ses réformes et remise en cause de sa légitimité à intervenir :

ces contradictions, en partie comparables à celles précédemment mises en évidence à propos des politiques culturelles, ne sont qu’apparentes. Elles apparaissent en effet inévitablement liées aux modalités du traitement étatique des formes symboliques dans les sociétés pluralistes contemporaines. Dans ces sociétés que Raymond Aron appelait « démocratico-libérales », l’État doit à la fois garantir des « droits » (ici culturels) qui impliquent son intervention et des « libertés » (en l’occurrence, de pensée, de communication) qui en marquent les limites. Dans ces sociétés différenciées, l’autonomisation d’espaces sociaux consacrés à la production des biens symboliques a partie liée avec l’instauration de nouvelles formes de division du travail étatique (la spécification des fonctions culturelles de l’État) et conduit dans le même temps à borner l’étendue de son intervention possible.

C’est dans cet équilibre difficile et ce modus vivendi que se déterminent les formes et le

modus operandi euphémiques des politiques de la langue française, et que se jouent les

conditions de possibilités de leurs effets sociaux. En revenant sur les modalités d’intervention et les pratiques d’euphémisation et de déni dont elles sont l’objet, puis en montrant comment les oppositions à l’action publique peuvent en contrarier l’existence même et bien souvent les effets, on pourra mieux saisir les difficultés d’une intervention étatique sur la langue.

Modus operandi et déni de la contrainte

L’analyse des modalités et instruments de l’intervention linguistique publique révèle l’impératif d’euphémisation auquel cette intervention est soumise. Cet impératif s’impose tout particulièrement dans la période récente, quand les politiques de la langue ont acquis une visibilité inédite. S’inventent alors de nouvelles définitions des problèmes, moins exclusives et plus ouvertes, ainsi que de nouvelles manières de faire, moins contraignantes et plus incitatives.

La langue, objet routinier de l’intervention étatique ? Peut-être si l’on considère l’intervention sur la langue de l’État. Depuis l’édit de Villers-Cotterêts, une foule de textes est venue imposer l’usage du français dans la justice et l’administration381.

Au-381 La loi du 2 thermidor an II et l’arrêté consulaire du 24 prairial an XI imposent le français pour les actes de justice et d’administration ; l’arrêté du Président du conseil du 2 février 1919 déclare que le français est la langue judiciaire des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ; le décret du 2 mai 1953 prévoit que les recours devant l’Office français des réfugiés et apatrides doivent être déposés en français. Plus récemment, la jurisprudence du Conseil d’État rappelle qu’une requête n’est pas recevable si elle n’est pas rédigée en français (22 novembre 1985), et celle de la Cour de cassation que

delà de son emploi, c’est aussi de la qualité de la langue engageant l’État qu’il s’agit. Donnons-en quelques exemples. Des qualités de clarté et le respect des normes grammaticales doivent présider à l’élaboration des projets de loi et des textes publiés au

Journal officiel382. Les fonctionnaires de l’État doivent éviter l’usage des sigles383, veiller à la qualité de leur français384 et peuvent être notés selon « l’intérêt et le zèle que chacun met au respect de la langue française »385. Un garde des Sceaux a appelé à une langue de la justice moins « désuète » et empreinte de formules latines (circulaire du 15 septembre 1977).

Si cette gestion étatique de la langue de l’État peut ne pas poser de problèmes majeurs386, il en va tout autrement lorsque l’intervention publique porte plus généralement sur les usages sociaux de la langue. On le voit bien à propos de la production étatique de néologismes réalisée dans les commissions de terminologie : elle n’a guère fait l’objet d’oppositions tant qu’il s’est agi d’imposer l’usage de ces substituts d’anglicismes dans l’administration. Leur passage dans l’usage qu’étaient censées permettre les lois de 1994 et, dans une moindre mesure, de 1975, s’est en revanche avéré beaucoup plus problématique. La politique de la langue française est alors apparue comme une entreprise d’imposition de pratiques langagières administrativement normées.

Il a donc fallu déployer des stratégies de légitimation multiformes pour tenter d’éviter, autant que possible — avec un succès limité, comme on le verra — des oppositions à l’intervention publique susceptibles d’en réduire la portée. De ces stratégies de légitimation multiformes, la présentation de la loi Toubon fournit trois modalités typiques qui, si elles ne sont guère spécifiques en elles mêmes, n’en sont pas moins

tout jugement doit être motivé en français (11 janvier 1989). Cf. plus récemment la circulaire du Premier ministre du 7 octobre 1999 qui précise les obligations des sites Internet des services et établissements publics de l’État en matière d’usage du français. Sur ces questions, voir les ouvrages juridiques cités plus haut.

382 Circulaires des 31 juillet 1974 et 14 juin 1983.

383 Circulaires du ministre délégué à l’Aménagement du territoire, 23 février 1965, et du ministre de l’Équipement, 15 novembre 1976.

384 Circulaire du Secrétariat général du gouvernement, 2 janvier 1993.

385 Circulaire du 20 avril 1994 sur l’emploi de la langue française par les agents de l’administration. Ces questions renvoient directement aux relations entre l’administration et ses usagers, abordées dans la seconde partie de ce texte. L’on pourrait ainsi lire l’histoire des tentatives pour transformer ces relations au travers des transformations de la langue administrative qui, comme dans les formulaires, laisse de plus en plus de place à des termes usuels, contre l’effet de déréalisation du langage bureaucratique technique de l’administration. Il y aurait là une recherche à faire, à la croisée de nos travaux sur le rapport à l’administration et de ceux sur les politiques de la langue.

386 Au moins tant qu’elle ne renvoie pas directement à l’accès à des positions sociales, comme avec les concours administratifs.

remarquables par l’intensité des efforts dont elles ont été l’occasion387. Ses promoteurs mobilisent en premier lieu une rhétorique de l’évidence propre à accréditer la thèse d’une intervention « naturelle », qui se manifeste sous un double aspect. Celui de la référence à une tradition séculaire, héritée de François 1er : « Depuis toujours en France, la langue est une affaire d’État », affirme Jacques Legendre, rapporteur de la loi au Sénat388. Celui également de la dilution de la loi dans un ensemble d’autres mesures censées être coordonnées les unes aux autres et dont la « nécessité » est constituée en évidence : le ministre de la Culture Jacques Toubon répète à l’envi que la loi s’inscrit « naturellement » dans la logique des mesures prises par le ministre de l’Éducation nationale pour améliorer l’apprentissage du français à l’école primaire.

C’est, en second lieu, une rhétorique de la dénégation qui est employée, reprenant la dialectique traditionnelle des rapports entre la loi et l’usage. Le gouvernement n’« entrave » pas la langue et ne la « régit » pas plus. Il ne profère ni interdictions ni obligations dans l’usage courant de la langue. « Le gouvernement n’a pas la prétention de régir la langue française », rassure le Premier ministre Édouard Balladur lors de l’ouverture de la session de travail du Conseil supérieur de la langue française. En outre, ce gouvernement met en scène le respect des autorités linguistiques, comme lorsque le Premier ministre, rendant visite à l’Académie française en février 1994, réaffirme l’exclusivité académique dans la fixation de l’usage de la langue.

La référence à l’ « opinion publique » forme une troisième stratégie de légitimation. C’est de fait sans doute moins pour connaître les conditions d’acceptabilité que pour mettre en scène l’acceptation que le ministère de la Culture fait procéder, avant la discussion parlementaire du texte, à un sondage réalisé par la SOFRES sur « les Français et leur langue ». À la responsabilité « naturelle » de l’État envers la langue s’ajouterait ainsi une « demande » des citoyens-locuteurs. L’agrégation successive de chiffres réalisée dans les documents officiels du ministère389 et répétée dans les propos du ministre permet de se recommander de « l’écrasante majorité des français (près de 90 % selon un sondage de la SOFRES) » qui aurait « approuvé la loi »390.

387 Qu’il faudra bien sûr analyser plus complètement et comparer avec d’autres temps forts de l’histoire de ces politiques.

388 Jacques Legendre, sénateur RPR né en 1941, ancien maire de Cambrai, Secrétaire général de l’association internationale des parlementaires de langue française de 1986 à 1988, secrétaire national du RPR chargé de la francophonie depuis 1988.

389 Lettre d’information du Ministère de la Culture et de la Francophonie du 10 mars 1994, 363, supplément « Le projet de loi relatif à l’emploi de la langue française ».

390 Jacques Toubon, Le Monde, 4 août 1994. Cette tribune fait directement suite à la décision du Conseil constitutionnel invalidant une partie importante de la loi.

Le sondage, réalisé avant l’approbation de la loi en conseil des ministres, ne fait pas directement référence au texte ni à ses dispositions. Lorsqu’on leur demande si c’est à l’Académie française ou au gouvernement que l’« on peut faire le plus confiance pour défendre la langue », seulement 10 % des répondants optent pour le second choix. Si le chiffre de 90 % est bien mentionné par les analystes de la SOFRES, il s’agit de la proportion des répondants qui « estiment que la défense de la langue française est un objectif important pour le gouvernement ». Encore ce chiffre résulte-t-il de l’addition — contestable — des réponses selon lesquelles « la défense de la langue française doit être pour le gouvernement un objectif » : prioritaire (8 %) ; très important (31 %) ; important mais sans plus (51 %)391.

De ces stratégies de légitimation multiformes, on trouve bien d’autres exemples et d’autres modes d’agencement tout au long de la constitution de la politique du français depuis le milieu des années 1960 : l’analyse de la composition des instances consultatives esquissée plus haut en a fourni une illustration. Ce qui apparaît plus spécifique à la période récente, au moins depuis l’échec relatif de la loi de 1994, tient moins aux modes de légitimation qu’à l’intégration des difficultés de sa légitimation dans les formes mêmes de l’intervention publique.

On le voit tout d’abord avec l’évolution des représentations officielles des problèmes linguistiques, telles qu’elles apparaissent dans les rapports et discours ministériels. Comme pour en atténuer les enjeux proprement sociaux, les questions linguistiques sont de plus en plus construites comme des problèmes d’ordre économique et-ou technologique. Cette orientation, dessinée dans les années 1980, semble s’être récemment renforcée. En 1989, le Conseil économique et social publie un rapport sur « Les utilités commerciales du français ». En 1985, Bernard Cassen remet au ministre de la Recherche un rapport sur « les enjeux des industries de la langue », à la suite duquel un important colloque est organisé. Depuis, l’aide à l’ « ingénierie » et l’informatique linguistiques, pour l’aide à la traduction ou l’usage du français sur l’Internet forment un axe important de l’intervention gouvernementale392.

Ce sont également les représentations et, pour une part, les orientations de l’action gouvernementale qui se sont transformées. La « défense du français » se mue de plus en plus en « promotion du plurilinguisme ». C’est le cas au niveau européen (apprentissage des langues étrangères, définition des langues de travail de l’Union européenne) et dans les organisations internationales. C’est le cas également au plan intérieur : depuis 1997,

391 Les autres réponses se répartissent entre « pas important » (9 %) et « sans opinion » (1 %).

392 Voir par exemple Danzin André, Le français soumis au choc des technologies de l’information :

propositions pour une politique offensive, mars 1994. Rapport aux ministres de la Culture, de l’Industrie

les discours officiels font de plus en plus souvent référence aux « langues de France » et non plus à la seule langue française. Le rapport de Bernard Poignant au Premier ministre sur les Langues et cultures régionales du 1er juillet 1998, la préparation de la ratification de la charte européenne des langues régionales en 1999 ont en particulier marqué cette inflexion.

Le discours du « droit à la différence » culturelle et linguistique avait déjà donné lieu à quelques initiatives au début des années 1980393. Elles n’avaient fait jusqu’alors que l’objet d’une reconnaissance limitée : la loi Deixonne du 11 janvier 1951 prévoit la possibilité d’utiliser des parlers locaux dans les écoles, l’enseignement facultatif des langues régionales et la possibilité de passer une langue régionale au baccalauréat, ainsi que la création de chaires d’études régionales dans l’enseignement supérieur. Ces mesures sont complétées par la loi du 11 juillet 1975 relative à l’éducation, et par une série de circulaires. Toutes ces dispositions reposent sur la notion de volontariat des élèves et des enseignants, et laisse aux recteurs et inspecteurs d’Académie le soin d’organiser cet apprentissage. Dans la logique du rapport Giordan de 1982, certaines propositions, émanant de parlementaires socialistes pour la plupart, vont plus loin, qui tendent à la promotion de ces langues394. Les réalisations restent toutefois modestes : seul un Conseil national des langues et cultures régionales, composé de 30 à 40 membres nommés par le premier ministre, est créé (décret le 23 septembre 1985).

Avec les « problèmes » et les « orientations » constitutifs de la politique linguistique, ce sont aussi les pratiques d’intervention qui se sont transformées et, en l’occurrence, « adoucies ». Les réformes, textes de loi et possibles sanctions ont le mérite de rendre visibles la « volonté gouvernementale » ; ils objectivent en même temps les velléités étatiques d’encadrement des pratiques langagières et, à ce titre, suscitent d’importantes résistances et oppositions, en provenance comme on le verra de régions variées de l’espace social. Les campagnes de sensibilisation, d’information, et autres formes « douces » d’intervention satisfont moins aux exigences politiques de visibilité, mais elles présentent en même temps l’avantage de moins cristalliser les refus auxquels le volontarisme linguistique s’expose.

Sans doute le volet répressif de la loi de 1994 donne-t-il lieu à des contrôles pour la « protection du consommateur »395, et à des poursuites judiciaires396. Mais des

393 On se permet sur ce point de renvoyer à La politique culturelle, op. cit., p. 280 et suivantes. La référence officielle en la matière à l’époque est le rapport au ministre de la Culture de Giordan Henri,

Démocratie culturelle et droit à la différence, Paris, La Documentation Française, 1982.

394 C’est le cas des propositions nº 2157 du 24 mai 1984 sur la promotion des langues et cultures de France de M. Destrade et des députés socialistes ; nº 3221 relative aux langues et cultures régionales déposée le 31 juillet par M. Brunhes et d’autres députés ; du 23 mai 1985 déposée par M. Briane relative au statut et à la promotion des langues et cultures régionales.

395 De la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, pour l’étiquetage des produits.

dispositions qui pouvaient apparaître contraignantes, comme celles relatives à l’usage du français dans les colloques et publications scientifiques, ont laissé place à des aides — comme le soutien à la traduction simultanée. Dans le cadre de la politique linguistique formé par cette loi, ce sont en fait surtout des pratiques de « sensibilisation » qui ont été développées. Déjà, au milieu des années 1980, des courts-métrages diffusés à la télévision montraient des scènes de la vie quotidienne tournant en ridicule l’usage du franglais. Depuis 1994, le concours « Les mots en fête » tend à inciter « les jeunes » à « jouer avec les mots » et à les « sensibiliser aux enjeux linguistiques »397. Depuis 1996, une semaine de sensibilisation, « Le français comme on l’aime », est organisée en France et à l’étranger autour de la journée internationale de la francophonie, qui a lieu tous les 20 mars depuis 1986. La politique de la langue reprend alors les formules éprouvées des politiques culturelles (comme « Livres en fête », « Les journées du patrimoine » ou encore « Le printemps des poètes »).

Ces évolutions sont appelées par les réactions négatives aux formes plus « dures » de la politique linguistique, dont la loi Toubon forme l’exemple le plus récent. On le voit bien dans les tentatives gouvernementales pour retourner les critiques et oppositions à cette loi en éléments positifs d’un « grand débat sur la langue » : en ce qu’elles fourniraient les signes d’une « prise de conscience par les Français » — les termes sont ceux du ministre — des problèmes liés à l’avenir de leur langue, ces critiques formeraient en fin de compte la preuve d’une « réussite » de cette entreprise législative398.

396 D’après les rapports de la DGLF, depuis 1994 le nombre de contrôles aurait régulièrement augmenté et le nombre d’infractions constatées régulièrement diminué.

397 Les brèves, lettre du conseil supérieur et de la délégation générale à la langue française, nouvelle série, 1, 2ème trimestre 1995 et 2, 3ème trimestre 1995.

398 En pleine polémique, le ministère de la Culture fait organiser un débat sur la langue dans l’émission « Bouillon de culture » animée par Bernard Pivot le 25 mars 1994. Des extraits de cette émission sont ensuite utilisés dans des annonces publicitaires télévisées appelant les français à « débattre de leur langue », grâce notamment à un service télématique prévu spécialement à cet effet par le ministère de la Culture, le 36 15 Paroles.

Oppositions et remises en cause

L’intensité des polémiques, où s’expriment visions générales du monde social et grands principes (la liberté, la cohésion sociale, etc.), forme un trait largement partagé des réformes linguistiques impulsées par l’État. On l’a vu à l’occasion des trois derniers projets en date, féminisation, réforme de l’orthographe, loi de 1994399. La faiblesse de l’application et de la portée de ces réformes constitue une autre constante. C’était le cas de la loi de 1975. La réforme de l’orthographe a eu fort peu de suites, et l’écart est grand entre les intentions initiales du projet de loi Toubon et ce qui en est résulté.

Des polémiques intenses, une « efficacité » réduite : ces deux caractéristiques ne sont sans doute pas sans liens. L’objet même de l’intervention rend les instruments classiques de la contrainte étatique difficilement utilisables, au moins dans la période récente — la perspective d’une « police de la langue » sert à la fois d’anathème aux contempteurs des politiques linguistiques et de repoussoir à leurs promoteurs. La portée de cette intervention est dès lors tout particulièrement fonction de l’assentiment des administrés-locuteurs. On peut alors faire l’hypothèse que les polémiques, oppositions