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Chapitre II : Etude bibliographique de l’interaction laser matière en régime confiné

II.1 Les plasmas confinés

II.1.1 Modélisation de l’interaction confinée

Malgré les nombreux travaux entrepris jusque là pour étudier l’interaction en régime confiné, aucune modélisation complète n’a encore été réalisée à ce jour. En effet, ce mode d’interaction particulier met à la fois en jeu l’hydrodynamique classique utilisée pour décrire l’interaction laser-matière en régime direct, mais aussi l’interaction entre le plasma confiné et le milieu diélectrique de confinement (eau ou verre). Dans les paragraphes suivants, nous présentons les différentes approches théoriques qui ont été utilisées afin de modéliser ce mode d’interaction, en soulignant les avantages et les limites de chacune d’entre-elles.

II.1.1.1 Modèles numériques

Fairand et Clauer [II-1] ont été les premiers à simuler le comportement thermique et hydrodynamique d’un matériau soumis à une irradiation laser en régime confiné, à l’aide d’un code numérique mono-dimentionnel, basé sur la méthode des différences finies. Leur code, prénommé LILA, tient compte à la fois de l’absorption de l’énergie laser par le métal, mais aussi de l’absorption collisionnelle par bremsstrahlung inverse dans le plasma. Une équation d’état analytique permet de décrire séparément les contributions du métal froid (à température nulle), des ions, et des électrons. La résolution des équations hydrodynamiques couplées aux équations électromagnétiques associées à l’absorption de l’onde laser, permet alors d’obtenir l’évolution temporelle de la pression à la surface du métal. Bien que la pression ainsi obtenue soit en bon accord avec les mesures expérimentales, les auteurs ne précisent pas comment ils tiennent compte de la présence du milieu de confinement dans leur code, et aucune donnée concernant les paramètres microscopiques (température et densité électroniques) du plasma confiné n’est publiée.

Romashko et al. [II-2] se sont plus particulièrement intéressés à la propagation de l’onde d’ionisation engendrée par le plasma confinée, et à son interaction avec l’onde laser. Ils ont ainsi développé un modèle numérique pour simuler la propagation d’une onde d’ionisation créée dans l’eau par interaction d’une impulsion laser ns ayant une intensité de l’ordre de I ~1010-1011 W/cm2 avec une surface solide immergée. Ces auteurs considèrent que lorsque l’impulsion laser est absorbée au niveau de la cible solide, le plasma créé induit une onde de détonation entretenue par laser qui va se propager dans l’eau. Lors de sa propagation,

des électrons libres vont être créés par ionisation thermique mais surtout par un effet de pression. En effet, la compression du liquide dans le front de l’onde de choc augmente de façon locale la dissociation de H2O en H+ et OH-, et l’ionisation à deux photons de OH- se produit alors de façon quasi-immédiate. La densité d’électrons libres créés par ce processus est donc fortement liée au degré de compression. Pour une intensité de 34 GW/cm2, la pression maximale de l’onde de choc atteint presque 13 GPa, ce qui correspond à un degré de compression de l’eau égal à 1,72. Pour une telle valeur, la densité électronique générée par effet de pression est de l’ordre de 1020 cm-3, ce qui se traduit par une très forte absorption dans cette zone. L’absorption de l’énergie laser se trouve ainsi délocalisée au niveau du front de choc, et on observe donc une onde d’ionisation qui se propage dans l’eau en amont du front de l’onde de choc. Ceci montre clairement que pour de fortes intensités laser, l’onde de choc engendrée par le plasma confiné peut favoriser l’ionisation du milieu de confinement.

Devaux et Virmont [II-3][II-4] ont modifié le code d’interaction laser-matière FILM développé dans le cadre des études sur la fusion par confinement inertiel, afin d’y incorporer l’absorption de l’énergie laser par le milieu diélectrique de confinement. Dans sa forme originelle, ce code hydrodynamique lagrangien 1D décrit le comportement de 75 cellules en utilisant les tables d’équation d’état SESAME de Los Alamos. Comme l’ionisation du milieu diélectrique varie rapidement avec la température, Devaux suppose que la transition transparent/opaque du diélectrique se produit pour une température donnée. Cette température inconnue (TEABS), doit être ajustée de façon arbitraire afin de rendre compte des résultats expérimentaux. Dans la pratique, l'énergie laser est d’abord déposée dans la première cellule de métal à l’interface cible-diélectrique, puis est absorbée partiellement dans la première cellule du diélectrique lorsque sa température atteint la valeur TEABS. Le processus recommence pour chaque cellule de diélectrique chauffée par le laser jusqu’à TEABS, et il se traduit par la propagation d’une onde d’ionisation dans le milieu diélectrique. Pour une température TEABS donnée, 2000 K par exemple, la température du plasma confiné atteint environ le double, soit 4000 K. Suivant la valeur de l’intensité laser, le modèle met en évidence deux structures de propagation différentes qui sont représentées sur la Figure II-2. A faible intensité (a), le front d’ionisation se propage sous la forme d’une onde de combustion ou LSC (Laser Supported Combustion). Dans ce cas, le plasma n’a que quelques microns d’épaisseur, et le front de température reste collé à l’interface alors que l’onde de pression s’en détache. Pour des intensités élevées (b), le front d’ionisation se propage sous la forme d’une onde de détonation ou LSD (Laser Supported Detonation) conformément aux prédictions de Romashko et al. [II-2]. Le front de température se détache de la surface de

quelques dizaines de microns, et sa vitesse devient supérieure à celle de l’onde de choc. La vitesse du front de choc est alors imposée par la vitesse du front de température. Lorsque TEABS augmente, le passage de la structure LSC à LSD se fait pour des intensités plus élevées.

La description du processus de confinement faite dans ce code numérique permet de rendre compte des mesures expérimentales, qui sont essentiellement des mesures de pression et de vitesse de propagation du front de choc. Toutefois, le modèle est très sensible au choix de la température d’absorption TEABS, qui influe peu sur la pression induite dans le métal, mais beaucoup sur les caractéristiques du plasma (température et densité électroniques, degré d’ionisation). Or, à l’heure actuelle, les mesures expérimentales de ces paramètres sont trop peu nombreuses pour permettre de déterminer de façon certaine le paramètre TEABS, ce qui limite fortement la validité du modèle.

(a) (b)

Figure II-2 : Structure de propagation de l’onde d’ionisation créée par interaction d’une impulsion gaussienne de 30 ns à 1064 nm avec une cible

d’aluminium confinée par eau pour deux intensités laser différentes : 1 GW/cm2

(a) et 30 GW/cm2 (b). Instantané pris 10 ns après le début de l’impulsion laser.

II.1.1.2 Modèle analytique

Les bases théoriques d’un modèle analytique décrivant l’interaction confinée ont été introduites au début de années 70 par O’Keefe et al. [II-5] et Anderholm [II-6]. En se basant sur les travaux de Griffin et al. [II-7], Fabbro [II-8] et Fournier [II-9] l’ont développé afin de calculer les pressions induites en fonction de l’intensité de l’impulsion laser, et décrire la chronologie de la mise sous pression des matériaux. Ces premières études, limitées à des

impulsions présentant un profil temporel carré, ont été étendues par Devaux [II-4] et Darquey [II-10] à des impulsions triangulaires et à front de montée bref. La Figure II-3 présente la géométrie de l’interaction confinée utilisée par ces auteurs qui considèrent trois phases dans le processus.

Figure II-3 : Géométrie de l’interaction confinée.

A chaque étape, le plasma est considéré comme un gaz parfait et ses échanges de chaleur avec les matériaux froids sont négligés.