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Planification et politique environnementale

Dans le document Les faiseurs de pluie (Page 90-100)

Politiques publiques et domaines d’expertises

2.2 Planification et politique environnementale

2.2.1 Agriculture et conservation dans l’économie

Les premières années de la présidence de Franklin Roosevelt furent bal- ancées entre deux attitudes. D’un côté une position extrême visait une intégration sociale et une planification totale, avec à la clé, un déman- tèlement des trusts. D’un autre côté, conservateur, cette fois, persistait la croyance en l’équilibre budgétaire généré par une économie du laisser- faire. Ces deux positions n’en étaient pas moins libérales et ce qui était en jeu, c’était l’autorité gouvernementale : comment asseoir cette autorité autrement que sur la base de l’intérêt commun ?

En somme, le fossé se creusait de plus en plus entre une attitude pro- gressiste (faite de réformes sociales et institutionnelles) et une attitude 1. À titre d’exemple, nous pouvons citer : R. TUGWELL, « The Principle of Planning and the Institution of Laissez-Faire », dans : The American Economic Review 22 (1932), page(s): 75–92.

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conservatrice. Les historiens eux-mêmes ne s’accordent pas sur la nature du New Deal, ainsi que le remarque l’économiste Price V. Fishback :

« Les historiens soutiennent des opinions variées au sujet de la nature du New Deal. Schlesinger (1958), Degler (1959), et Freidel (1971) soutiennent que le New Deal a évolué autant que possible à travers les réformes sociales que suscitait le climat de la Grande Dépression. Dans les années 1960, une position révisionniste, soutenue par des gens comme Leucht- enburg (1963), Zinn (1966), Conkin (1967), et Bernstein (1990), soutenait que le New Deal était une politique fon- damentalement conservatrice. La controverse était certaine- ment aussi abondante dans les années 1930 : les détracteurs du New Deal accusaient l’administration Roosevelt d’utiliser la distribution des fonds pour augmenter sa propre puissance politique. »1

Et nous pourrions ajouter que c’était pourtant bien là le but recher- ché que d’augmenter l’autorité gouvernementale en utilisant les richesses publiques au nom de l’intérêt commun. C’est sur ce principe que se fondait la politique agricole de l’administration Roosevelt. L’hiver 1932 fut scandé par plusieurs manifestations importantes dues au mécontente- ment des agriculteurs (piquets de grève bloquant le ravitaillement des villes, manifestations organisées par les syndicats agricoles). Mais ce ne fut pas la seule raison de la priorité donnée à l’agriculture. Le tandem Wallace et Tugwell à la tête du Département de l’agriculture, représentait en même temps l’idéologie réformatrice de toute l’administration Roo- sevelt. Économiquement, le but de l’Agricultural Adjustment Administra- tion(AAA), créé en 1933 au sein du département de l’Agriculture, s’ex- plique assez facilement : il s’agissait d’augmenter les prix des produits agricoles pour corriger le déséquilibre entre industrie et agriculture, et régulariser du même coup le marché américain. Mais l’idée sous-jacente à la création de cet organisme (et, donc, à la loi qui en garantissait l’exis- 1. P. V. FISCHBACK, S. KANTORet J. J. WALLIS, « Can the New Deal’s Three Rs Be Rehabilitated ? a Program-by-Program, County-by-County Analysis », dans : Explorations in Economic History40 (2003), page(s): 278–307. Voir aussi sur ce point : SCHLESINGER,

op. cit.; et B. BERNSTEIN, « The New Deal : the Conservative Achievements of Liberal Reform », dans : The Great Depression and the New Deal, sous la dir. de M. DUBOFSKYet S. BURWOOD, New York : Garland Publishing, 1990, page(s): 64–89.

tence légale, l’Agricultural Adjustment Act) était fondamentalement con- servationniste. Il s’agissait, en effet, de créer des critères d’accords de subvention pour les agriculteurs. Même si ces critères n’étaient pas tou- jours équitables, surtout concernant les petites exploitations, il était exigé que les fermiers utilisent leurs terres selon les objectifs de la conservation des ressources et les normes nécessaires à la réhabilitation des terres (dans le cas des régions touchées par le Dust Bowl).

Aussi, Wallace créa en 1934 un département de planification à l’in- térieur de l’AAA, dont le but était de promouvoir la gestion agricole et une meilleure utilisation de la terre. Ce service fit quelque temps office de clone du SCS, notamment à cause des tensions internes à l’administration Roosevelt1, ainsi qu’avec les tâches attribuées à la Resettlement Admin- istration. En revanche, il préfigurait l’importance de l’effort politique en faveur de l’agriculture et de la gestion des terres durant la présidence Roo- sevelt. Effort considérable, d’ailleurs, au vu des dépenses, ce qui était là le principal argument contre la politique de Roosevelt. Les subventions et les emprunts concernant l’agriculture prenaient une place de prépondérante dans le budget national, ainsi que le montrent Fishback et al.2.

Le tableau2.1 - Total des prêts et subventions. . . représente une bonne vision d’ensemble des postes budgétaires sur la décennie des années trente. Les subventions consacrées à l’agriculture (AAA, FSA) représen- tent 12,7% du total des postes de subventionnement de l’administration F. Roosevelt, et 18,3% des prêts (FCA, FSA, REA). Ajoutons à cela deux re- marques. D’une part, une partie importante du budget de la Work Progress 1. En effet, ne concluons pas hâtivement que l’entente entre les acteurs politiques que nous citons était parfaite et harmonieuse. H. Ickes, par exemple, prenant le flambeau de G. Pinchot, voulait à tout prix intégrer un service de lutte contre l’érosion au Département de l’intérieur, et faire de l’Intérieur une vaste organisation omnipotente, capable de gérer de la meilleure manière emploi et conservation. H. Bennett était favorable à l’intégration d’un tel service au département de l’Agriculture, et Wallace de même, faisant de l’agriculture la force économique vive de la nation, capable de gérer la conservation pour le bien de tous. Quand à R. Tugwell, il plaidait pour une organisation transversale (ce que sera la FSA), capable de dynamiser et d’harmoniser des organisations quel que soit leur Département d’origine. Tout cela était lié à des enjeux de pouvoir, et la conservation des ressources devint finalement, à l’intérieur même de la « sphère » politique le fondement du pouvoir : qui détenait celui-ci détenait en même temps les grâces populaires de l’emploi et du redressement économique. F. Roosevelt a su lui-même temporiser ces luttes en prenant soin de distribuer le pouvoir équitablement afin d’éviter tout risque d’omnipotence de la part d’un seul.

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Non-repayable grants Grant dollars % of Grants Agric. Adjustment Admin. (AAA) $ 1,981,801,905 12.1 Farm Security Admin. (FSA) 93,408,281 0.6 US Housing Authority (USHA) 127,206,671 0.8 Public Buildings Admin. (PBA) 174,228,825 1.1 (federal buildings)

Public Roads Admin. (PRA) 1,556,290,368 9.5 Public Works Admin (PWA) 798,501,411 4.9 (federal projects)

Public Works Admin. (PWA) 1,367,347,520 8.4 (non-federal projects)

Civil Works Admin. (CWA) 757,172,702 4.6 Fed. Emergency Relief Admin. (FERA) 2,654,860,349 16.3 Social Security Admin. 596,010,054 3.6 Public Assistance (SSAPA)

Works Progress Admin. (WPA) 6,222,385,662 38.1

Total grants 16,329,213,748 100.0

Loans Loan dollars % of Loans

Farm Credit Admin. (FCA) loans $ 1,257,491,136 12.0 Farm Security Admin. (FSA) loans 427,932,675 4.1 Rural Electrification Admin. 226,247,292 2.2 (REA) loans

Home Owners Loan Corp. (HOLC) 3,077,258,287 29.5 US Housing Authority (USHA) loans 449,854,991 4.3 Disaster Loan Corporation (DLC) 10,504,466 0.1 Reconstruction Finance Corp. (RFC) 4,425,940,596 42.4 Public Works Admin. (PWA) 567,616,807 5.4 non-federal program loans

Total loans 10,442,846,250 100.0

Insurance

Federal Housing Administration (FHA) $ 2,707,560,412 insurance : value of loans insured

Note :

the RFC loans began in February 1932

FIGURE 2.1 - Total des prêts et subventions, mars 1933 - juin 1939, selon les programmes. Source : US Office of Government Reports (1940), FISHBACKet al.

Administrationet de la Public Work Administration était consacrée à l’em- ploi en zones rurales, ce qui ne les éloignait pas de la question agricole. D’autre part, le « bloc agriculture » regroupe trois postes différents (AAA, FSA, REA) et la place qu’il occupait ainsi représentait, en plus d’une im- portante occupation financière, une très grande mobilisation organisation- nelle de l’administration gouvernementale.

C’est justement ce qui nous permet d’établir le pont, auparavant diffi- cilement franchissable, entre l’administration de l’agriculture et la con- servation des ressources. Conserver ne signifiait pas seulement créer des agences ou des excroissances administratives consacrées à l’un ou l’autre aspect particulier de l’agriculture (l’érosion, la gestion, la production). Il s’agissait de rassembler l’ensemble de l’administration sous une même bannière conservationniste.

L’érosion des sols progressant jour après jour dans le Midwest, la presse s’en faisait l’écho. Wallace, lui-même ancien journaliste et directeur de son propre journal, le Wallace Farmer’s, avait gardé des contacts précieux avec la presse. Il fut l’un des premiers à sentir non seulement l’importance de signifier aux fermiers du Midwest que le gouvernement ne les oubliait pas (alors que c’était là le principal discours de la presse conservatrice), mais aussi l’urgence de démontrer que l’effort de la politique agricole avait toujours été dépendant d’une monopolisation de l’ensemble du gou- vernement et pas seulement de l’USDA. Rappelons que le Great Plains Committee1fut fondé en 1936 et regroupait les dirigeants des principales

administrations (en termes budgétaires) : la WPA, l’AAA (via l’USDA), le SCS, la FSA et la REA. L’idée était de rédiger un moratoire sur l’é- tat des ressources du Midwest, mais aussi rendre visite à ces agriculteurs et mettre en place un ensemble de dispositifs spéciaux de conservation des ressources (plus adaptés à l’agriculture des Grandes Plaines que les dispositifs menés à l’échelle nationale).

Le cas des Grandes Plaines était l’illustration même, et quasiment l’aboutissement, du mouvement politique de conservation. Sous la ban- nière de Tugwell, Bennett et Wallace, le gouvernement Roosevelt pra- tiquait une politique environnementale à l’échelle nationale : il s’agis- sait d’impliquer l’ensemble des administrations sous un même chapitre,

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l’environnement, et plus exactement la conservation des ressources, dont toutes étaient, au moins en partie, tributaires. On s’apercevait que l’en- vironnement avait un coût social et économique qu’il fallait d’urgence prendre en compte : si Bennett déclarait que l’érosion des sols détrui- sait les terres arables, il s’agissait surtout d’estimer la perte financière na- tionale à plus de 400 millions de dollars par an1, y compris la baisse des

revenus agricoles qui s’en suivait et la détresse sociale qu’on ne pouvait financièrement estimer.

2.2.2 La priorité du bien-être social sur l’usage des ressources na- turelles

En définitive, si nous parlons de politique environnementale concer- nant l’administration Roosevelt, nous devons la rapprocher des con- cepts actuels. Ce qui définit une politique environnementale est l’élabo- ration d’un système de gestion de l’environnement2intégrant des niveaux de complexité naturels (l’écologie), sociaux (rapport homme / nature), économiques (exploitation des ressources et production), et esthétiques (paysages, monuments naturels). La diversité de ces niveaux rend compte de la difficulté de la décision politique à intégrer la question de l’envi- ronnement sans pour autant se défaire des autres principes de gestion économique (production, marché, vente, achat, rentabilité)3. En fait, si c’est au nom de l’intérêt commun et du bien-être social que les ressources doivent être conservées, le dualisme production / conservation n’est pas radical. Au contraire, l’utilitarisme politique de l’administration Roo- sevelt fit de la conservation la source même d’une conception raisonnée du bien-être social, et, donc, de la rentabilité économique. La politique de Roosevelt fit ainsi appel à des compétences adaptées à sa politique 1. H. H. Bennett, « The Importance of Soil Conservation », discours delivré devant l’Annual Session of the Carolina Farmer’s and Farm Women’s Convention at Raleigh, 29th Session, 29 juillet, 1931.

2. Comme nous appelons aujourd’hui les SME (systèmes de management environ- nementaux), adaptés aux entreprises ayant une politique environnementale à mener. Il s’agit d’élaborer un éco-audit, permettant la mise en place de normes ISO, à partir desquelles l’en- treprise peut développer un management prenant en compte les impacts sur l’environnement de son propre développement. Les pays européens ont créé de même un système de normes européennes, faisant partie des conditions à l’intégration européenne.

environnementale, tant concernant l’agriculture ou la gestion de l’envi- ronnement que concernant la recherche économique (dont l’exemple le plus frappant est Tugwell), ou la recherche en sciences environnemen- tales telles que l’écologie, la géographie ou encore la géologie, dont les acteurs s’impliqueront à échelles variées dans la dynamique générée par le New Deal (voir chapitres suivants).

Néanmoins, la différence par rapport à ce que nous nommons aujour- d’hui politique environnementale est de taille. La défense de l’environ- nement, la protection des ressources ou de la « Nature », la limitation des « impacts » des activités humaines, sont autant d’objets politiques, soumis à des règles décisionnelles. Des États sont aujourd’hui dotés d’un min- istère de l’environnement, embrassant autant d’objets que constituent les problématiques environnementales. C’est là que se situe la différence de fond avec le mouvement conservationniste de la fin du XIXe siècle aux

années 1940, qui constitue en soi un programme d’action d’intérêt public et non une unité administrative de l’État.

La valeur de l’environnement aujourd’hui correspond au question- nement lié à son usage destructif : quelles valeurs pourrait-on lui attribuer pour éviter que la part utilitaire des biens naturels ne sacrifie pas à l’in- tégrité et à la renouvelabilité des ressources d’où ces biens proviennent ? L’idée principale fut, durant les vingt dernières années1, d’attribuer à la

nature des valeurs non-économiques. Nous pouvons ainsi exprimer ces valeurs à la fois en remplaçant la nature par un ensemble de notions heuristiques et en en exprimant le motif qui guide l’action. Par exem- ple, l’équilibre naturel et son existence sur le mode de la stabilité per- pétuelle des écosystèmes actuels, le paysage et ses valeurs esthétiques et culturelles, l’environnement et sa valeur économique dans les stratégies de développement durable, l’avenir de planète terre et la responsabilité vis- à-vis des générations futures comme valeur de choix politique dans les luttes contre les pollutions et leurs conséquences globales, etc. L’ensem- ble de ces valeurs sont prises en compte dans les processus de décisions politiques et économiques et, ramenées à l’économie de l’environnement, sont réparties suivant les valeurs d’utilité, d’incertitude, de risques et d’op-

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timalité qui sont autant d’outils de prise de décision1. Un usage destructif de la nature correspond donc à l’inadéquation entre la décision et son coût, ce qui revient à dire que l’usage relève non seulement des capac- ités à établir un équilibre entre les différentes valeurs mais aussi le coût financier et/ou social de la décision. Un coût trop élevé pour la société im- plique un usage destructif : une politique du moindre mal est établie afin, non plus d’optimiser la décision, mais le coût d’un usage non destructif.

Le programme conservationniste américain, tel qu’il fut développé par le gouvernement Roosevelt dans les années trente (et sur la base de l’héritage de T. Roosevelt), ne consistait pas à définir les valeurs optimales des ressources sur la base des choix optimaux de la décision publique. Il ne s’agissait donc pas de déterminer l’usage économique des biens na- turels au regard de l’équilibre du marché entre coût financier / social et valeur utilitaire de ces biens, surtout en pleine récession économique et surproduction agricole.

C’est justement l’inversion du problème qui est aujourd’hui difficile à comprendre, surtout si l’on considère qu’il existe une linéarité idéologique entre le conservationnisme de la première moitié du XXesiècle et l’en-

vironnementalisme actuel. Les conservationnistes posaient le bien-être social au fondement de l’usage des ressources. De ce principe découle que la règle décisionnelle susceptible de garantir la renouvelabilité des ressources n’est pas une règle de choix rationnels individuels (la valeur de l’environnement). Au contraire, optimiser l’économie pour conserver les ressources consistait à attribuer à État le rôle de garant des ressources et guider les choix individuels par la loi (par exemple, l’AAA), le crédit d’impôt (par exemple, les subventions accordées aux agriculteurs), et l’- expertise scientifique (afin de créer des formes d’apprentissage – notam- 1. Tel est le sujet du politologue Steven Bernstein lorsqu’il analyse l’évolution des out- ils de prise de décision et les orientations de la politique environnementale internationale depuis les années 1980. Dans le troisième chapitre de son livre, The Compromise of Liberal Environmentalism, il analyse l’évolution des normes environnementales adoptées par les conventions internationales depuis le Sommet de Rio, et montre l’ambiguïté de la notion de développement durable selon les intérêts et les acteurs en jeu : il s’agit bien des différentes valeurs non économiques dont nous parlons plus haut. La définition et l’adoption ou non de ces valeurs dépendent non seulement des cultures et des pays, mais surtout des enjeux financiers pris en compte lorsqu’une politique environnementale doit être adoptée par les pays. En outre, l’ambigüité et la relativité des valeurs non économiques attribuées à l’envi- ronnement font qu’il est fort difficile d’y asseoir une politique internationale cohérente. Cf. BERNSTEIN,op. cit.(pp. 70–121).

ment les fermes expérimentales – pour changer le système d’exploitation des biens naturels en système conservationniste).

En 1958, Samuel T. Dana1remarque fort bien cette différence : dès lors

que le programme de conservation devient un programme d’action poli- tique, la dualité n’est pas conservation versus production, mais conserva- tion versus exploitation. C’est-à-dire que le problème principal devient un problème de gestion et de changement de pratiques d’exploitation et non une rivalité entre une défense de l’environnement et le principe de dégra- dation de la nature, déclaré au fondement de la production des biens2. Il est donc nécessaire de bien distinguer le conservationnisme d’un envi- ronnementalisme, ce dernier pouvant fort bien composer un programme politique mais fondé sur le principe de préservation et de choix d’équili- bre optimal du marché, et dont les résonances actuelles opposent espace industriel et espace naturel3.

À titre d’exemple très illustratif, Dana cite une lettre d’instruction à Pin- chot, écrite par James Wilson, Secrétaire de l’USDA, en 1905, et dont la teneur relate fort bien l’objectif initial de la conservation :

« Toutes les ressources des réserves sont destinées à l’usage [en italique dans le texte], et cet usage doit être traité de manière absolument prompte et commerciale, mais seulement à la condition d’assurer la permanence de ces ressources. Dans un proche avenir, par la progression 1. S. T. DANA, « Pioneers and Principles », dans : Perspectives on Conservation, sous la dir. de H. JARRETT, Baltimore : Johns Hopkins Press, 1968, page(s): 24–33 (1958).

2. M. Serres parle de l’origine « stercoraire » des activités humaines, en particulier au sujet de la notion de propriété (au sens libéral du terme). Voir M. SERRES, Le parasite, Paris : Grasset, 1980 (pp. 183–193).

3. J. B. Callicott analyse pertinemment l’idée de crise environnementale à travers un changement de paradigme. La crise environnementale est une crise du paradigme (clas- sique) industriel où la place du progrès technique des cinquante dernières années provoque un changement de conception, quasi rétroactif, des activités humaines désormais post- industrielles (ou postmodernes), qui construisent un environnement artificiel en harmonie avec l’environnement naturel. La dualité entre ces deux « environnements » reste de mise, or, il ne s’agit plus d’une dualité conceptuelle mais d’une complémentarité dans notre con- ception de nos rapports à la nature. Voir J. B. CALLICOTT, « Après le paradigme industriel », dans : La crise environnementale, sous la dir. de C. LARRÈREet R. LARRÈRE, Paris : INRA, 1997, page(s): 205–219.

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régulière et continue du règlement et du développement, l’im- portance vitale des réserves forestières pour les grandes in- dustries des États de l’Ouest s’en trouvera largement accrue. La permanence des ressources dans ces réserves est donc nécessaire à une prospérité stable, et la politique de ce dé- partement pour leur protection et leur usage sera invariable- ment guidée par cette affirmation, considérant toujours que l’usage conservateur de ces ressources n’est nullement en conflit avec leur valeur durable.

Vous vous assurerez que l’eau, le bois, et le fourrage des réserves sont conservés et sagement employés au profit des pionniers tout d’abord, desquels dépend de même la meilleure utilisation permanente des terres et des ressources. Le développement continu des intérêts de l’agriculture, de l’élevage, des exploitations forestières et de la valorisation agraire dépendent directement d’un approvisionnement per- manent et accessible en eau, bois, et fourrage, aussi bien que de l’utilisation présente et future de leurs ressources aux termes des règlements commerciaux, imposés avec prompti- tude, efficacité, et bon sens. »1

La coordination et la planification devaient se donner des moyens d’ac-

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