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La place de l’environnement selon un regroupement de la diaspora

1 CONTEXTE HAÏTIEN ET REGARD SUR L’ENVIRONNEMENT AVANT ET APRÈS LE

1.2 Haïti après le séisme

1.2.3 La place de l’environnement selon un regroupement de la diaspora

Au lendemain du séisme, la diaspora s’est mobilisée pour apporter sa contribution de solidarité à l’effort international de secours d’urgence. Elle a aussi participé, de pair avec le gouvernement haïtien, à de nombreuses rencontres, séminaires et forums qui ont eu lieu aux États-Unis, au Canada et en Europe. Lors du Forum des Nations Unies tenu en mars 2010, la diaspora a d’ailleurs reconnu et appuyé les efforts du gouvernement et du secteur privé pour le relèvement et la reconstruction d’Haïti. Le Forum d’affaires Québec- Haïti d’octobre 2010 a misé sur l’importance des investissements du secteur privé pour la

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reconstruction. La diaspora était présente à cette rencontre et une introduction à l’ouvrage Construction d'une Haïti nouvelle : Vision et contribution du GRAHN a été présentée. Ce rapport stratégique d’environ 700 pages se veut une contribution du Groupe d’action et de réflexion pour une Haïti nouvelle (GRAHN) à l’effort de réflexion pour la naissance d’une nouvelle Haïti. Le GRAHN est une organisation mondiale citoyenne privilégiant une approche participative pour articuler un cadre de reconstruction à Haïti, allant au-delà de la reconstruction d’infrastructures. Dans cet ouvrage, les problématiques d’Haïti ont été classées en dix volets principaux constituant des champs d’intervention à considérer dans les projets de reconstruction. Parmi ceux-ci, un chapitre entier a été consacré à l’aménagement du territoire et à l’environnement.

Dans le chapitre consacré à l’environnement, le GRAHN critique d’abord les documents officiels produits après le séisme, qui traitent d’aménagement du territoire et d’environnement. Le regroupement mentionne que ces ouvrages publics manquent de vision transversale et d’explication de mécanismes de mise en œuvre des solutions proposées. Il critique particulièrement le plan de relèvement national, le PARDNH, en spécifiant que la conservation des ressources naturelles n’y est pas une priorité à part entière et qu’on ne considère pas la potentialité de l’environnement comme un outil de démarrage du moteur économique. Le GRAHN indique que les biens et services environnementaux que les écosystèmes sains et restaurés peuvent offrir aux populations locales ne sont aucunement pris en compte dans cet ouvrage (GRAHN, 2010).

Les membres du GRAHN s’identifient davantage avec la vision du CIAT transmise à travers le document Haïti Demain. Une de ces raisons s’explique par le fait que le CIAT priorise l’obligation de freiner le processus de dégradation environnementale pour sortir le pays de son extrême vulnérabilité. Le GRAHN considère toutefois aller plus loin que le CIAT « en considérant une meilleure gouvernance environnementale et territoriale comme élément incontournable et un instrument nécessaire à l’atteinte des priorités relevées » (GRAHN, 2010, p. 252). Le regroupement prône la mise en place de politiques efficaces d’aménagement du territoire, la gestion intégrée des bassins versants, la définition d’une politique énergétique pour résoudre les conflits portant sur le bois de chauffage et l’intégration du développement durable dans les processus de reconstruction. Par rapport à l’aménagement du territoire, la vision stratégique du GRAHN est guidée par des objectifs

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à très court (2010-2011), court (2010-2012), moyen (2013-2020) et long terme (2021- 2030). Les objectifs à très court terme se concentrent sur la révision totale du schéma national d’aménagement du territoire, en tenant compte de la gestion des risques et des désastres. Les objectifs à court terme se définissent dans la restructuration du cadre légal d’aménagement du territoire. À moyen terme, l’objectif est de favoriser les retombées économiques, créer des zones d’aires protégées, faire de l’éducation environnementale et élaborer une nouvelle politique énergétique ou l’établissement d’un chantier national agroforestier. Finalement, l’objectif à long terme est de concrétiser la gestion intégrée des bassins versants, tout en améliorant les zones boisées et le secteur agricole (GRAHN, 2010).

À la lumière du processus de réflexion du GRAHN, le séisme est perçu comme un élément déclencheur à la décentralisation organisée du pays, en raison des grands mouvements spontanés des populations locales à travers le pays. La miséreuse catastrophe est également considérée comme une opportunité pour régénérer les ressources naturelles et engendrer une croissance économique. Le GRAHN formule ses recommandations environnementales sous quatre volets : (1) le rééquilibrage et la dynamisation du territoire; (2) la gestion intégrée par bassin versant (agriculture, reboisement, production énergétique et gestion des risques et désastres); (3) l’aménagement du milieu de vie; et (4) la gestion de la gouvernance territoriale. Les recommandations spécifiques du GRAHN sous ces quatre volets sont articulées en mentionnant l’urgence temporelle (sous quel horizon temporel est-il préférable d’agir) et la responsabilité de l’action (gouvernement, GRAHN ou autres). Contrairement aux autres documents semblables, les recommandations du groupe de la diaspora sont élaborées sous forme d’approches explicites et détaillées, afin de faciliter leur mise en œuvre et l’atteinte des objectifs visés (GRAHN, 2010). L’annexe 1 présente le tableau des recommandations environnementales du regroupement.

Le GRAHN offre donc un document innovateur et inspirant pour tout organisme ou institution intéressé à la cause haïtienne et désirant agir. Des stratégies concrètes sont proposées sous un angle intégrateur et transversal. On ne parle pas d’actions ponctuelles peu adaptées au milieu. Il est plutôt question d’effectuer un ensemble d’actions de grande envergure dans les zones jugées les plus vulnérables ou les plus potentielles pour un futur

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développement. Le document du GRAHN fait beaucoup le lien entre l’environnement et la pauvreté et considère les actions à entreprendre comme étant encourageantes du point de vue économique, autant pour les communautés locales que pour le gouvernement en place. Par exemple, un système de reboisement agroforestier demande une forte quantité de main-d’œuvre. Ainsi, les populations locales auront accès à plusieurs emplois dans le bien commun du redressement de leur pays. À la suite de ce reboisement effectué à grande échelle, l’État et le secteur agricole limiteront plusieurs pertes associées au mauvais état des ressources naturelles.

Tous conviennent que la diaspora a un rôle important à jouer dans la reconstruction du pays. Comme le mentionne le PARDNH, il faut trouver les moyens pour mettre les compétences des haïtiens et haïtiennes vivant à l’étranger au service de ce devoir de refondation. En plus de ce document clé du GRAHN, la réflexion doit se poursuivre et le dialogue amorcé depuis le séisme doit se transformer en une recherche de solutions actives et de mécanismes précis d’actions à entreprendre rapidement.

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