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Petite histoire d’un eugénisme qui peut rapporter gros

I. Le courant de pensée transhumaniste : mythe ou réalité ?

1.1. Petite histoire d’un eugénisme qui peut rapporter gros

1957 : NAISSANCE DU TRANSHUMANISME

Le terme de transhumanisme a été créé en 1957 par Julian Huxley, biologiste anglais, frère d’Aldous Huxley, auteur du célèbre Meilleur des Mondes, et petit-fils de Thomas Henry Huxley, collègue de Darwin et par ailleurs adhérent inconditionnel des théories de ce dernier. Julian Huxley quant à lui, ne cachait pas son adhésion aux théories eugénistes, comme en témoigne en 1939 sa participation au Manifeste des généticiens1, et ce même s’il prônait un eugénisme dit de gauche, censé déboucher sur une amélioration des conditions sociales. L’appellation transhumanisme se serait dans un premier temps simplement substituée à celle d’eugénisme, devenue trop sulfureuse après la Seconde Guerre Mondiale. L’eugénisme, terme inventé par Galton en 1883, définit la volonté d’améliorer l’espèce humaine, la dégénérescence de l’espèce étant par ailleurs une des préoccupations principales du XIX° siècle. C’est dans À vin nouveau, nouvelles bouteilles2

, en 1957, qu’apparait le terme de transhumanisme accompagné d’un programme qui pourrait tenir en quelques lignes et dont nous pouvons dire qu’à quelques détails près, il n’a pas changé :

« C’est comme si l’homme venait d’être subitement nommé directeur général de la plus grande entreprise de toutes, celle de l’évolution – nommé sans lui demander son avis et sans délai de réflexion et de préparation. Qui plus est, il ne peut pas refuser cette tâche. Qu’il le veuille ou non, qu’il sache ou non ce qu’il fait, c’est en fait lui qui détermine l’orientation future de l’évolution sur cette terre. C’est son destin inéluctable, et plus tôt il s’en rendra compte et commencera à y croire, mieux ce sera pour tout le monde »3.

Selon Julian Huxley, on en aurait terminé avec l’explication scientifique du monde naturel, et il s’agirait maintenant de s’attaquer à l’exploration de la nature de l’homme lui-même, et surtout d’apprendre à réveiller ses possibilités latentes. Mais nous trouvons également un point qui témoigne déjà des espoirs mis dans les avancées scientifiques et des demandes qu’elles créent en retour : « les gens sont décidés à ne plus tolérer des conditions de vie et un

état de santé subnormaux depuis que la science leur a révélé qu’il est possible de les améliorer »4.

1 Ludd, N. (2016). La critique du Transhumanisme. L’évolution selon les transhumanistes. 1957-2016. Récupéré de : https://archive.org/details/DossierCritiqueDuTranshumanisme 2 Ibid. 3 Ibid. 4 Ibid.

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Nous pouvons d’ores et déjà constater qu’en 1957, tous les ingrédients du discours transhumaniste sont là : éloge de l’homme comme merveilleux aboutissement de la création, confiance inébranlable dans la science et le progrès, droit de tous à l’épanouissement, au bonheur, à la justice sociale, etc. Il manque cependant encore à cette époque les moyens de parvenir à de tels objectifs même si déjà il semble clair que tout ceci ne pourra s’accomplir sans « quelques effets déplaisants »5, indispensables toutefois si l’on veut atteindre l’épanouissement de l’humanité. Vingt-six ans plus tard, Nick Bostrom (transhumaniste, philosophe et directeur du FHI, Future of Humanity Institute, à l’Université d’Oxford) déclarera : « il y a peut-être des conséquences négatives de l’ingénierie de la lignée germinale

humaine que nous ne devancerons pas, bien que la simple existence d’effets négatifs ne soit pas une raison décisive de ne pas aller de l’avant »6. À un quart de siècle d’intervalle, nous retrouvons la même prise de risque assumée face à des conséquences potentiellement négatives d’une durée non précisée, signant définitivement une constante du mouvement transhumaniste, à savoir que l’avancée technoscientifique ne se laisse pas arrêter par des considérations éthiques. La suite de ce texte fondateur nous livrera une description de notre vie actuelle comme pitoyable, ainsi que l’idéalisation d’une évolution prochaine permettant enfin à tous de profiter de la beauté, qualité jugée indispensable, de l’entendement et de la jouissance authentiques comme fins en soi, la nécessité de techniques efficaces d’éducation, sans oublier les indispensables techniques de développement spirituel censées aller de pair. En résumé, le destin de l’espèce humaine est de se transcender en tant qu’espèce, et c’est le mot transhumanisme qui sera désormais chargé de porter ce nouveau programme. Et Julian Huxley de conclure : « "Je crois en le transhumanisme" : sitôt que cette conviction sera

suffisamment partagée, l’espèce humaine se tiendra au seuil d’une nouvelle existence, aussi dissemblable de la nôtre que la nôtre l’est de celle de l’homme de Pékin. Elle accomplira enfin consciemment son véritable destin »7. Les bases idéologiques du transhumanisme sont dès lors posées, et elles n’évolueront pratiquement plus. Ce n’est plus qu’une question de moyens, des moyens qui vont peu à peu devenir en partie réalité, mais aussi en partie promesses utopiques, comme nous allons le voir.

5

Ibid.

6

«There may well be some negative consequences of human germ-line engineering that we will not forestall, though of course the mere existence of negative effects is not a decisive reason not to proceed ». Bostrom, N. (2003). Human Genetic Enhancements : A Transhumanist Perspective. Dans : Journal of Value Inquiry, vol. 37,

n°4, 2003, pp. 493-506.

7 Ludd, N. (2016). La critique du Transhumanisme. L’évolution selon les transhumanistes. 1957-2016. Récupéré de : https://archive.org/details/DossierCritiqueDuTranshumanisme

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C’est probablement ce manque de moyens qui explique que le courant de pensée transhumaniste n’ait pas émergé tout de suite. On le retrouvera dans les années 1970, moment où la technologie informatique est en plein essor, juste avant que la convergence NBIC ne permette à la science des espoirs jusque là inédits. Il est alors étroitement lié à la contre-culture de l’époque, et le restera jusqu’en 1990. Cette période, entre 1970 et 1990, correspond à ce que Sussan8 appelle période underground, au cours de laquelle il s’agit essentiellement de tester toutes sortes de modifications de conscience par les drogues, essentiellement le LSD, dans la mouvance hippie vaguement inspirée des religions orientales. Timothy Leary et John Cunningham Lilly sont les deux figures paradigmatiques de ce début du mouvement transhumaniste9 : Leary est à l’origine psychologue, Lilly est un médecin neuroscientifique connu pour ses explorations des états de conscience induits par la drogue, mais aussi pour ses expériences sur le caisson d’isolation sensorielle ou encore ses expériences de communication avec les dauphins. Fait qui ne manquera pas de nous intéresser, ces personnages sont en lien avec le mouvement cybernétique naissant, essentiellement avec Bateson, Lilly ayant même été membre du National Institute of Mental Health ainsi que du Center for the Advanced

Study of Behavior à Palo Alto en Californie. Nous verrons que ces liens s’avèreront fructueux,

mais pour le moment il ne s’agit encore que d’expériences de dépassement de soi, de tentatives de fusion dans une forme de Grand Tout, des phénomènes que nous retrouverons dans l’exaltation de la fusion dans le Net telle que décrite par Levy10, l’adhésion au bouddhisme d’un certain nombre de transhumanistes, le fait qu’ils restent de fervents partisans de l’usage des drogues devenues médicaments pour agir sur les états de conscience et les comportements qui en découlent.

Le transhumanisme s’avère donc bien dans ses débuts avoir été un mouvement de contre-culture comme un autre, dont on n’aurait peut-être plus vraiment entendu parler par la suite, s’il ne s’était constitué en idéologie à partir des années 1988, soit environ une dizaine d’années avant sa reprise par les milieux intellectuels, ce que Sussan appelle sa

« mainstreamisation »11 ; c’est également dans les années 2000 que paraît le premier rapport

8

Sussan, R. (2013). À quoi peut servir le transhumanisme ? Vidéo de la conférence de Rémi Sussan du 11 novembre 2013 à l’Association Française Transhumaniste. Récupéré de :

https://transhumanistes.com/technoxlr8-1-video-de-la-conference-de-remi-sussan-du-11112013/

9

Ibid.

10 Lévy, P. (2000). World Philosophie. Le marché, le cyberespace, la conscience. Paris : Odile Jacob. [Version Kindle]

11

Sussan, R. (2013). À quoi peut servir le transhumanisme ? Vidéo de la conférence de Rémi Sussan du 11 novembre 2013 à l’Association Française Transhumaniste. Récupéré de :

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officiel américain sur la convergence NBIC suivi de l’entrée en jeu de Google, sans lequel a

priori il n’était pas évident que ce courant puisse aller bien loin. Ceci s’accompagne d’un

changement dans le discours, qui devient beaucoup plus modéré, s’ouvre au dialogue, à des considérations éthiques, à l’encontre de ce qu’il était dans les années 1970.

1973 :ESFANDIARY : PROGRÈS TECHNOSCIENTIFIQUES ET RÉVOLUTION SOCIÉTALE

En effet, lorsque l’adjectif transhumaniste réapparaît, une dizaine d’années après sa création, c’est en 1966, chez le futuriste Esfandiary lors de ses cours à la New School of Social

Research ou encore dans son Upwinger’s Manifesto publié en 197312. Le terme upwinger, selon le site français H+ signifie Ceux du Haut, par opposition à Ceux de droite ou Ceux de

gauche (left-right wingers)13, soit la transcendance par rapport à une opposition binaire, une transcendance attendue bien sûr des technosciences. Esfandiary, qui prendra bientôt le pseudonyme de FM-2030 – date qui alors correspondait à l’advenue de la Singularité – s’attaque à plusieurs piliers de notre société, et en premier lieu à la famille : il s’agit de remplacer les liens parents-enfants, jugés « toxiques et incitant à la dépendance

psychologique »14 par des « mobilias »15, soit des unités de vie temporaires accueillant n’importe qui pour un temps relativement court afin de lutter contre la stagnation due au besoin de stabilité de l’être humain. Or, ces Centres d’enfants sont en fait des fabriques d’enfants dans lesquelles il s’agit de sélectionner les embryons les plus prometteurs pour les implanter dans « des femmes volontaires ou, plus tard, dans des utérus artificiels »16. Le sperme nécessaire à la fécondation doit par ailleurs provenir d’hommes décédés ou âgés de plus de quatre-vingt ans pour éviter toute tentative de recherches ultérieures : il s’agit de créer ouvertement des enfants sans parents qu’ils pourraient éventuellement retrouver, en particulier sans père identifiable. Un projet apparemment abandonné, mais qui a laissé des traces sous la forme des Fertility Institute17, soit des centres de PMA implantés aux États-Unis, en Inde et au Mexique, dans lesquels il est permis, moyennant 18 000 dollars (hors période de soldes) de choisir le sexe de son enfant, tout comme d’effectuer le test génétique de détection d’environ quatre-cent maladies héréditaires. Dans le même ordre d’idées, nous pouvons citer le projet

12

Jousset-Couturier, B. (2016). Le transhumanisme. Faut-il avoir peur de l’avenir ? Paris : Eyrolles. [Version Kindle]

13

Emmanuel (2017). FM-2030 ou l’individu contrarié. Récupéré de : https://www.transhumanistes.com/6391-2/ 14 Ibid. 15 Ibid. 16 Ibid.

17 Testart, J. & Rousseaux, A. (2018). Au péril de l’humain. Les promesses suicidaires des transhumanistes. Paris : Le Seuil. [Version Kindle]

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chinois de séquencer génétiquement les individus les plus doués afin de sélectionner les gènes favorables18, tout ceci bien sûr dans l’optique de pouvoir créer à terme un bébé sur

commande. Le comble réside peut-être dans un projet américain de 2016 de synthétiser

artificiellement un génome humain, c’est-à-dire de créer un enfant sans parents biologiques ; il est heureux qu’un tel génome s’avère difficile à implanter sur un quelconque support vivant19.

Après la famille, pour FM-2030, la seconde aliénation est la société, qui induit également un état de dépendance : il n’est plus question de tolérer un quelconque pouvoir d’un individu sur un autre, même au titre de parent ou d’enseignant ; il s’agit dès lors d’abolir l’école et d’assurer la formation des élèves par des systèmes informatiques. Dans la foulée, ceci devrait conduire à l’abolition de tout système de notes, examens ou diplômes, devenus inutiles dans un monde où la compétition n’a plus lieu d’être face à un contexte « d’abondance et de liberté

potentiellement totale »20. Le programme de FM-2030 prévoit également de privilégier les villes qui « adhèrent aux nouvelles technologies plus rapidement »21, diminuer significativement le temps de travail par l’automatisation, mais aussi diminuer fortement le rôle des politiques, en créant des Conseils Technologiques dans chaque pays, centralisés en un Conseil Technologique Universel résidant aux Nations-Unies, donc passer doucement d’un gouvernement politique à un gouvernement technocratique chargé de donner les principales orientations, tout en laissant au référendum instantané universel le soin de régler les décisions jugées moins importantes. Il s’agit également d’augmenter la vitesse des transports et, de manière générale, de « communiquer davantage »22, ceci grâce à tout un dispositif de smartphones, caméras instantanées et autres appareillages permettant quasiment d’être à tout moment et en temps réel en contact direct avec la personne que l’on désire, sorte de « vidéo

surveillance en accès libre »23. Et ceci dans un objectif avoué, que FM-2030 exprime ainsi :

« La famille, le mariage, l’école, le travail à temps plein, le gouvernement bureaucratique, la ville, la nation [...] sont des systèmes féodaux et industriels. Ils n’étaient valables que tant que nous avions des technologies féodales et industrielles. Ces systèmes ne survivront pas à l’émergence des télétechnologies. Ils sont trop structurés, trop fragmentés, trop lents, trop

18

Ibid.

19

Ibid.

20 Emmanuel (2017). FM-2030 ou l’individu contrarié. Récupéré de : https://www.transhumanistes.com/6391-2/ 21 Ibid. 22 Ibid. 23 Ibid.

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enracinés. La télétechnologie générera ses propres styles de vie, redessinera tous les aspects de la vie »24.

Le projet de FM-2030 en rappelle un autre qui est celui de la dystopie behavioriste skinnérienne Walden 225 parue en 1948, au point que nous serions presque en droit de nous demander si FM-2030 ne s’en est pas directement inspiré. Même si ce n’est pas le cas, comme c’est probable, nous ne pouvons que noter la similitude profonde dans la vision de l’humain entre le transhumanisme et le béhaviorisme. Quant à la suite du programme de FM-2030, elle relève plus ouvertement de l’utopie : construction de vastes bulles dans lesquelles la météo peut être modifiée sur demande, automatisation totale de l’agriculture et des transports, baisse radicale du coût de l’énergie... En résumé, il s’agit de créer des « communautés de

l’instant »26

ou chacun circulerait à sa guise, transformant la planète en « village global où

l’on fait plusieurs milliers de kilomètres par jour sans problème »27. Il est question d’éliminer toute frontière nationale au profit d’une communauté planétaire et universelle dans laquelle le droit d’ingérence devient évident, dans la mesure où tout ce qui arrive sur terre concerne tout le monde.

Mais FM-2030 va également faire un constat plus personnel, mais très instructif : « Je

n’aime pas mon corps. Je suis laid, maladroit, faible. Que puis-je contre cela ? Je suis pris au piège de mon corps »28. Ceci n’est pas sans gêner quelque peu le mouvement transhumaniste français actuel qui veut se présenter sous un jour plus modéré, ce qui amène Emmanuel, auteur de l’éloge de FM-2030 sur le site H+, à déplorer ce qu’il qualifie de « constat

sévère [...] fidèle aux caricatures que peuvent faire les bioconservateurs »29. Pour FM-2030, nous ne serions ainsi que des « marionnettes manipulées par les structures sociales, par nos

corps façonnés par l’évolution, et enfin par la météo »30

. Effectivement, voir un pique-nique contrarié parce qu’il pleut est absolument insupportable pour lui, tout comme être prisonnier de l’espace et du temps, ce qui serait une injustice profonde. Les solutions à cette injustice sont à trouver dans le génie génétique, les organes artificiels, les modifications corporelles, les voyages interplanétaires, la cyborgisation, le droit à l’auto-détermination biologique ou

24

Ibid.

25 Skinner, B. F. (1948). Walden 2. Communauté expérimentale. (Gonthier-Werren, A., Gonthier-Werren, R.-M. & Lemaire, F., Trad.). Paris : In Press (2012).

26

Emmanuel (2017). FM-2030 ou l’individu contrarié. Récupéré de : https://www.transhumanistes.com/6391-2/ 27 Ibid. 28 Ibid. 29 Ibid. 30 Ibid.

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encore l’acquisition de différentes qualités supra-humaines comme pouvoir vivre sous l’eau, se nourrir d’énergie solaire, etc. Emmanuel garde une distance critique par rapport aux propos de FM-2030, qu’il juge naïfs, se contentant de retenir comme particulièrement pertinents certains critères, parmi lesquels l’absence de liberté due aux déterminismes sociaux.

Il est intéressant de s’attarder sur les discours des pionniers du transhumanisme, dans lesquels nous pouvons trouver, de manière très directe, un grand nombre de points qui seront ultérieurement masqués, voire déniés par leurs successeurs, soucieux de leur image auprès du grand public. Nous avons ainsi vu le lien direct avec l’eugénisme chez Julian Huxley, nous venons de voir avec FM-2030 un modèle sociétal et politique entièrement dominé par la technologie, une forme de fabrication technique et comportementale de l’humain au détriment de structures traditionnelles comme la famille ou l’école, l’objectif d’amélioration de l’espèce humaine, mais aussi plus insidieusement, avec la vidéo surveillance en accès libre, la perte totale de l’intimité, et surtout ce cri du cœur de FM-2030 : Je n’aime pas mon corps, refus de l’insuffisance, de la finitude, et au-delà, de toutes les limites naturelles imposées à l’espèce humaine et qu’il s’agit dès lors de dépasser. Nous sommes ici au cœur de la réalité du transhumanisme, mais aussi nous le verrons, du mouvement transgenre issu de cette même contre-culture des années 1970. En effet, il s’agit ici moins de science-fiction, même si cet aspect est omniprésent, que de profondes et radicales transformations de nos conditions de vie et des structures qui les sous-tendent par les technosciences et l’omniprésence d’une information qui se doit avant tout de circuler sans l’obstacle que constitue la densité de l’humain tel que conçu jusque là.

NATASHA VITA-MORE :IL PRIMO POSTHUMAN, LE « CORPS EN KIT »

Une autre pionnière du mouvement est Nancy Clark, dessinatrice passionnée de bodybuilding, connue désormais sous le nom de Natasha Vita-More. C’est en effet sous l’impulsion d’Esfandiary et de Vita-More que le mouvement transhumaniste a réellement émergé et s’est structuré à partir des années 1980, avec tout d’abord l’apparition des premiers cercles à l’UCLA (Université de Californie de Los Angeles), puis l’organisation d’un certain nombre de grands rassemblements jusqu’en 1988, année à partir de laquelle a vu le jour une émission télévisée dédiée au transhumanisme, Transcentury Update, animée par Vita-More. Cette dernière est généralement présentée dans la presse comme « professeur, artiste,

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designer, culturiste, théoriste et présidente de l’organisation transhumaniste Humanity+ »31. Elle est également l’épouse de Max More, philosophe, autre pionnier du transhumanisme, qui enseigne à l’Université des Technologies Avancées d’Arizona, ainsi qu’à l’Université de la Singularité de Californie. Tous les ans, elle co-préside une session plénière sur le transhumanisme lors de l’International Spatial Development Conference (ISDC), à laquelle participe la NASA ainsi que d’autres organisations spatiales du monde entier. L’organisation H+ travaille également, selon ses propres dires, avec Google, ainsi que de nombreuses autres organisations de la Silicon Valley, également membres d’H+

. Son travail de designer se focalise sur l’amélioration humaine et l’extension de la vie. C’est ainsi qu’elle a conçu Il

Primo Posthuman [Annexe I]32, concept futuriste du corps humain, corps alternatif pour des personnes souffrant de diverses maladies. Ce corps comporte entre autres un système de mémoire nanotechnologique, un cœur artificiel, des terminaisons nerveuses en fibres optiques, un certain nombre d’organes de remplacement ainsi que l’hybridation avec des systèmes d’amélioration de différentes perceptions sensorielles. Il Primo Posthuman pourrait donc être le modèle du futur transhumain, fidèle en tout point au projet transhumaniste, ou plutôt aux promesses de ce dernier.

Toutefois dans la vraie vie, Vita-More se contente de suivre scrupuleusement selon ses propres dires, « sous un angle plus scientifique »33 les conseils en vogue à notre époque : manger équilibré, faire du sport, bien dormir, stimuler sa mémoire quotidiennement par des exercices de base, mais également pour s’assurer d’une longévité optimale, faire séquencer ses gènes par un laboratoire comme 23AndMe – laboratoire de séquençage génétique lié à

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