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La th´eorie du conflit pr´edit donc que, si effectivement les microARN de ce locus r´epriment la croissance, une pression de s´election tendrait `a renforcer leur expression, par exemple, par la multiplication de leurs g`enes ; cette pression de s´election aurait donc pu contribuer `a la multi- plication des g`enes de microARN dans le locus 14q32.

Il est int´eressant de remarquer que la r´epression traductionnelle par un microARN n’est jamais efficace `a 100 % ; il faut probablement consid´erer que de multiples interactions entre un ARNm et des microARN contribuent chacune partiellement `a la r´epression globale (Bartel et Chen, 2004 ; Hobert, 2004) : ajouter ou retrancher une de ces interactions n’aurait alors qu’un effet limit´e sur l’expression du g`ene-cible. Or, la th´eorie du conflit propose que les effets des g`enes soumis `a l’empreinte g´enomique parentale sur la sant´e de l’embryon soient subtils : il ne faudrait pas s’attendre `a ce qu’un embryon avec une disomie uniparentale paternelle soit n´ecessairement plus gros et plus sain qu’un embryon sauvage, parce que l’avantage s´electif d’un g`ene qui favorise la croissance n’est pas le mˆeme dans un contexte sauvage (o`u il est oppos´e `a des r´epresseurs `a expression maternelle), et dans le contexte de la disomie uniparentale (Wilkins et Haig, 2003). Promouvoir la croissance peut ˆetre b´en´efique dans un contexte o`u sont exprim´es des r´epresseurs de la croissance, mais d´etrimental dans un contexte de croissance d´ebrid´ee4; les

effets des g`enes soumis `a l’empreinte ne sont donc probablement que de petites impulsions en faveur ou en d´efaveur de la croissance, autour d’une valeur d’´equilibre. Les microARN seraient donc des effecteurs de choix, en r´egulant finement l’expression de leurs g`enes-cibles.

3.3

Perspectives

Les quelques indices dont nous disposons quant `a la fonction de ces nombreux g`enes non- codants du locus 14q32 humain, et distal 12 murin, n’apportent ´evidemment aucune preuve formelle, mais nous incitent `a orienter les recherches futures dans quelques directions privil´egi´ees. La d´el´etion des g`enes d’ARN C/D, et de microARN, devrait apporter des informations concr`etes quant `a leurs fonctions. ´Etant donn´e que plusieurs sont apparent´es en s´equence, ils pourraient avoir des rˆoles redondants, et la m´ethode la plus efficace consiste probablement `a tous les d´el´eter. Notre laboratoire a ainsi entam´e un partenariat avec la Clinique de la Souris, `a Illkirch, pour ins´erer des sites de recombinaison lox en amont des g`enes d’ARN C/D, entre les g`enes d’ARN C/D et le cluster R (o`u se trouvent la plupart des g`enes de microARN), et en aval du cluster R. Le croisement de souris dont les g`enes d’ARN C/D, ou dont les g`enes de microARN, sont flanqu´es de sites lox, avec des souris exprimant la recombinase Cre, permettra de d´el´eter sp´ecifiquement l’une ou l’autre des deux familles de g`enes. Il sera ´egalement possible de d´el´eter les g`enes d’ARN C/D et les g`enes de microARN dans une mˆeme souris. La d´el´etion du cluster R ne supprimera pas tous les g`enes de microARN, puisque quelques-uns (dont miR- 127 et miR-136, par exemple) se trouvent en-dehors du cluster R ; il faut donc esp´erer qu’ils ne corrigeront pas l’absence des g`enes de microARN du cluster R (desquels ils sont assez diff´erents, par leur s´equence nucl´eotidique).

L’´etude de ces souris d´el´et´ees pour les uns ou les autres des g`enes non-codants devrait ˆetre tr`es informative. En particulier, il sera int´eressant de suivre l’empreinte g´enomique parentale du locus distal 12 chez les descendants de femelles d´el´et´ees : si les ARN C/D ou les microARN participent `a l’extinction de l’all`ele maternel de Dlk1, Rtl1 ou Dio3, ces embryons devraient exprimer les deux all`eles du (ou : des) g`ene(s) habituellement r´eprim´e(s) par les petits ARN.

De plus, le croisement des souris portant les insertions de sites lox, avec une souche exprimant la recombinase Cre dans le cerveau uniquement, devrait donner des indications sur le rˆole de

4Ainsi, dans une situation extrˆeme, si les g`enes `a expression paternelle favorisent trop l’embryon au d´etriment

de la m`ere, la vuln´erabilit´e de la m`ere pourra faire ´echouer la gestation, donc la transmission des all`eles paternels, par la mort de la m`ere ; r´eciproquement, si les g`enes `a expression maternelle r´epriment trop la croissance des embryons au point de compromettre leur survie, les all`eles maternels auront peu de chances de se transmettre.

ces petits ARN dans le cerveau adulte, en s’affranchissant de la l´etalit´e embryonnaire ´eventuelle de la d´el´etion des g`enes de petits ARN. La comparaison de diff´erentes caract´eristiques de la traduction dans le cerveau (par l’analyse du profil des gradients de polyribosomes, ou de la localisation subcellulaire de la traduction dans les neurones) pourrait mettre en ´evidence un rˆole des ARN C/D du locus 14q32 dans un aspect particulier du fonctionnement des ribosomes.

La nature pr´ecise des pr´ecurseurs de ces petits ARN m´erite aussi une analyse plus appro- fondie. La d´etermination des bornes des s´equences transcrites, dans le locus, pourrait r´ev´eler les extr´emit´es du (ou : des) ARN pr´ecurseur(s) de ces petits ARN. Si tous ces ARN d´erivaient d’un unique pr´ecurseur commun, le contrˆole de l’´epissage de ce long ARN affecterait la production des ARN C/D et des microARN, or il est connu que l’ARN Gtl2 subit des ´epissages alternatifs, contrˆol´es au cours du d´eveloppement (Croteau et al., 2003).

D’autre part, la longue s´equence (plus de 530 kb chez la Souris) qui s´epare le g`ene de mi- croARN le plus distal, miR-410/miR-A24, du g`ene Dio3, est encore mal caract´eris´ee, et pourrait rec´eler de nouveaux g`enes, ou de nouvelles s´equences r´egulatrices. L’analyse de la transcription et de la structure chromatinienne de cette s´equence pourrait ouvrir de nouvelles perspectives.

Enfin, ces petits ARN semblent propres aux Mammif`eres placentaires ; la comparaison de la s´equence g´enomique de ce locus entre Mammif`eres placentaires et Marsupiaux5pourrait apporter

de nouvelles indications quant `a la fonction des g`enes de ces petits ARN (si, par exemple, il ´etait d´ecouvert que ce locus n’est pas soumis `a l’empreinte chez les Marsupiaux6, la corr´elation entre

l’expression de ces petits ARN, et l’empreinte de leur locus, serait prolong´ee), et quant `a leur origine ´evolutive. Ces g`enes sont visiblement d’origine r´ecente (ils sont absents du g´enome du Poulet et du Poisson Fugu rubripes), et se sont donc multipli´es tr`es rapidement. Si le g´enome du dernier ancˆetre commun aux Mammif`eres placentaires et aux Marsupiaux repr´esentait une ´etape particuli`ere de cette ´evolution (il pouvait contenir un nombre limit´e de ces g`enes, ou bien pas du tout, ou encore, un nombre voisin de celui observ´e chez les Mammif`eres placentaires actuels), la confrontation des g´enomes de Mammif`eres placentaires et de Marsupiaux pourrait permettre de reconstruire ce g´enome fossile, et de pr´eciser ainsi la chronologie de l’´evolution du locus.

5Les g´enomes de deux Marsupiaux, un Kangourou et un Opossum, sont en cours de s´equen¸cage.

6L’empreinte g´enomique parentale est encore mal caract´eris´ee chez les Marsupiaux : on ne connaˆıt que deux

g`enes soumis `a l’empreinte dans ce phylum, Igf2 (O’Neill et al., 2000) et Igf2r (Killian et al., 2000), et il semble que personne n’ait ´etudi´e l’orthologue du locus 14q32 humain chez les Marsupiaux.

Chapitre 4

Annexe 1

Chapitre 5

Annexe 2

5.1

Probl´ematique

Apr`es la d´ecouverte d’ARN C/D dont les g`enes sont soumis `a l’empreinte g´enomique paren- tale (Cavaill´e et al., 2000 ; Runte et al., 2001 ; Cavaill´e et al., 2001 ; Cavaill´e et al., 2002), la question se pose de savoir s’ils participent eux aussi `a la biogen`ese des ARN ribosomiques. La pr´esente ´etude donne les r´esultats des recherches de compl´ementarit´es entre plusieurs de ces ARN C/D et le pr´ecurseur de 45S de l’ARN ribosomique humain, et les compare aux compl´ementarit´es attendues entre le pr´ecurseur de 45S et une s´equence al´eatoire de mˆeme composition en bases que l’´el´ement antisens de l’ARN C/D consid´er´e.

Les compl´ementarit´es recherch´ees sont parfaites (i.e. : sans m´esappariement), sans apparie- ment G-U, et se trouvent imm´ediatement en amont de la boˆıte D (ou D´), ou 1 nucl´eotide en amont de la boˆıte (voir figure 5.2). Ces caract´eristiques sont celles de la plupart des compl´emen- tarit´es fonctionnelles (connues pour guider une m´ethylation sur le pr´ecurseur de l’ARN riboso- mique).

... CCUAGUGACCUGANNNNN ...

... GGAUCACUG ...

méthylé sur le 2’-O du ribose

snoRNA :

ARN cible :

5’

3’ 5’

3’

nucléotide apparié au cinquième nucléotide

boîte D ou D’

en amont de la boîte D : ce nucléotide sera

Fig. 5.1 – Guidage de la m´ethylation du 2´-O du ribose par les ARN C/D.

... CCUAGUGACCUGANNNNN ...

snoRNA :

ARN cible :

5’ 3’ 5’ 3’ boîte D ou D’

... GGAUCACUA ...

Fig. 5.2 – Compl´ementarit´e ne faisant pas intervenir le nucl´eotide imm´ediatement en amont de la boˆıte.

Le mod`ele math´ematique utilis´e est une simplification : il n´eglige les biais de r´epartition des dinucl´eotides dans les s´equences g´enomiques humaines, et il utilise quelques approximations, pour all´eger les calculs (voir section 5.2).

5.1.1 Donn´ees pr´esent´ees

Cette annexe rassemble les statistiques sur les compl´ementarit´es d’ARN C/D humains dont les g`enes sont soumis `a l’empreinte g´enomique parentale, sur le pr´ecurseur de 45S des ARN ribosomiques humains. Les analyses de tous les ARN C/D dont les g`enes sont soumis `a l’em- preinte ne sont pas pr´esent´ees ici, seules celles de quelques exemples repr´esentatifs, choisis pour la similarit´e de leur ´el´ement antisens `a celui du consensus de leur famille (voir figures 5.3, 5.4 et 5.5 ; les alignements ont ´et´e r´ealis´es avec le programme Multalin1 : Corpet, 1988). Six snoRNA

dont les g`enes ne sont pas soumis `a l’empreinte, et dont les compl´ementarit´es `a l’ARNpr´e-r sont connues (Kiss-L´aszl´o et al., 1996) ont ´et´e inclus dans cette analyse.

5.1. PROBL ´EMATIQUE 175

Fig. 5.3 – Alignement des ´el´ements antisens des copies de l’ARN C/D 14q32(II). Les nucl´eotides repr´esent´es en rouge sont ceux qui sont conserv´es dans plus de 90 % des s´equences align´ees, pond´er´ees par le programme Multalin ; en bleu, ceux qui sont conserv´es dans plus de 50 % des s´equences, mais strictement moins que 90 % ; en noir, ceux qui sont conserv´es dans strictement moins que 50 % des s´equences.

Fig. 5.4 – Alignement des ´el´ements antisens des copies de l’ARN C/D HBII-52. Convention de couleurs : voir figure 5.3.

5.1. PROBL ´EMATIQUE 177

Fig. 5.5 – Alignement des ´el´ements antisens des copies de l’ARN C/D HBII-85. Convention de couleurs : voir figure 5.3.

5.1.2 S´equences utilis´ees

Les s´equences utilis´ees dans cette analyse sont les s´equences de GenBank de num´eros d’ac- cession :

– ARNpr´e-r de 45S : U13369, nt 1 `a 13350 – U14 : D88010, snoRNA U14-S13-3 – U20 : Z34290 – U21 : NR 000006 – U24 : Z48764 – U45b : X96645 – U47 : X96647 – HBII-13 : NR 001294

– HBII-52, copie n°1 : AF250841

– HBII-85, copie n°2 : NG 002690, nt 289522 `a 289618 – HBII-85, copie n°15 : NG 002690, nt 301858 `a 301951 – HBII-436 : AY055806

– HBII-437 : AY055807 – HBII-438 : AY055808.

Ainsi que les s´equences suivantes : – 14q32(0)

– 14q32(I), copie n°3 – 14q32(II), copie n°21, d´ecrites dans Cavaill´e et al., 2002.