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La perception des victimes d’agressions indirectes de leur climat scolaire

CHAPITRE 4: DISCUSSION

4.3 La perception des victimes d’agressions indirectes de leur climat scolaire

Le dernier sous-objectif de cette recherche vise à déterminer s’il existe une différence entre la perception du climat scolaire chez l’ensemble de la population versus la population de victimes seulement. Le but est d’établir si la mesure de la perception du groupe de victimes est plus importante à évaluer que celle de l’ensemble de la population tout dépendant des objectifs de la recherche. Selon plusieurs auteurs, les facteurs personnels influencent grandement la perception des élèves sur les problèmes de violence dans leur milieu (Archambault et al., 2009; Attar-Scwartz et Khoussy-Kassabri, 2008; Goldstein, Young et Boyd, 2008). Dans le modèle de Benbenishty et Astor (2005), bien que plusieurs facteurs influencent le taux de victimisation dans un milieu scolaire, les caractéristiques personnelles de l’élève sont au premier plan devant l’environnement dans lequel il évolue.

Les résultats de la présente recherche témoignent d’une différence entre les deux groupes : le climat scolaire et ses sous-aspects est perçu plus négativement par la population de victimes.

Du côté de la population totale, la victimisation indirecte affecte davantage la perception des sous-aspects sécurité et collaboration du climat scolaire. Les résultats

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démontrent que 31,9 % de ce même échantillon a été victime de violence indirecte au cours des quatre semaines précédant l’enquête. Bien que ce pourcentage semble élevé, Attar-Schwartz et Khoury-Kassabri (2008) dans leur recherche nationale israélienne effectuée en 2005 ont obtenu un taux de victimisation indirecte près de deux fois plus élevé que celui de la présente étude (62,1 %). Cet écart peut être expliqué par la façon dont ces auteurs ont défini les actes de violence indirecte dans leur questionnaire. Par exemple, la première question sur laquelle les élèves devaient se prononcer inclut « (being) gossiped about ». Bien que le commérage ou « gossip » ait une connotation généralement négative, les causes et conséquences de cette activité restent ambigües. Plusieurs chercheurs ayant étudié le commérage s’entendent pour dire que ce genre d’échange social n’est pas toujours de nature agressive ou méprisante. Le « gossip » peut également servir à l’expression d’évaluation positive chez les jeunes (Baumeister, Zhang et Vohs, 2004; Eder et Enke, 1991; Foster, 2004; Levin et Arluke, 1985). Par conséquent, le commérage ne fait pas partie des manifestations de la violence indirecte dans la présente étude.

Les analyses confirment que des différences existent entre la variance de la perception du climat scolaire chez la population générale et la population de victimes seulement. L’impact négatif significatif de l’agression indirecte sur la perception du climat scolaire et de ses sous- aspects chez la population de victimes seulement appuie l’hypothèse qu’il existe bien une différence significative entre la population de victimes et la population générale en ce qui a trait à la perception du climat scolaire et de ses sous-aspects (Attar-Schwartz et Khoury- Kassabri, 2008).

Chez la population de victimes, aucune différence n’a été décelée entre le sexe et la perception du climat scolaire et de ses sous-aspects, excepté pour le climat relationnel. Un écart significatif en faveur des garçons a été observé, c’est-à-dire que les garçons victimes de violence indirecte ont une perception plus négative du climat relationnel. Selon Paskewich (2008), les garçons impliqués dans des agressions sociales (dont l’agression indirecte représente un moyen) sont plus à risque de développer des problèmes d’adaptation sociale que les filles vivant la même situation. Ces problèmes d’adaptation sociale résultant de la victimisation indirecte pourraient expliquer partiellement pourquoi les garçons perçoivent plus négativement le climat relationnel que les filles. En parallèle, il serait possible que chez les

71 victimes de sexe masculin, l’étape II de la théorie du traitement de l’information de Huesmann (1988), « the interpretation of cues », soit déficitaire ou le devienne après avoir été indirectement victimisées. Si les victimes d’agressions indirectes, comme les auteurs, perçoivent des intentions hostiles dans leurs échanges sociaux, cela pourrait expliquer (outre que pour la sécurité) la perception plus négative du climat relationnel chez les victimes. Enfin, Cillessen et Mayeux (2004) ont démontré, lors de leur étude longitudinale, que chez les garçons, les affiliations sociales ou « boys’ social preference » étaient plus stables au cours des cinq années que celles des filles. Ces auteurs ont aussi suggéré que « there might be higher

group consensus regarding who is liked and disliked for boys than for girls, possibly because boys tend to affiliate with larger social networks than do girls » (Cillessen et Mayeux, 2004, p.

158). Cette possibilité devrait être explorée dans les recherches futures dans le but de déterminer si ce consensus empêche davantage les garçons de réintégrer un groupe et affecte ainsi plus négativement leur perception du climat relationnel.

En somme, les différences entre la population de victimes et la population générale en ce qui a trait à la perception du climat scolaire et de ses sous-aspects et de la perception des deux sexes, font apparaître plus que jamais l’importance de viser les groupes auprès desquels on veut intervenir plus précisément si l’on souhaite en connaître davantage sur un phénomène. En se basant sur les observations de Neal (2010), ceux qui pratiquent ce genre d’agression tendent à s’associer à leurs semblables produisant ainsi des groupes, dans une même école, chez qui la violence indirecte est présente et d’autres pour qui ce type de violence est inexistant. Ces résultats marquent l’importance de la précision dans le choix des groupes à étudier. Les chercheurs devraient prendre soin de sous-catégoriser la population afin de se rapprocher le plus possible de la perception personnelle d’un individu face aux aspects pouvant influencer son comportement.

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