• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE I : ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE

1. Les ligaments et tendons

1.3. Pathologies et traitements

Les tendons et ligaments peuvent être touchés par diverses pathologies de gravités très variables. On considère aujourd’hui qu’il y a une augmentation globale du nombre de traumatismes de ces tissus qui serait notamment liée à une pratique sportive croissante d’une partie de la population d’une part et, à l’amélioration des conditions de cette pratique du sport (matériel de meilleure qualité qui permet une diminution du nombre de fractures mais provoque un transfert des traumatismes vers les tendons et ligaments) d’autre part. Parmi les lésions les plus fréquentes de ces tissus, on trouve notamment les tendinites et les entorses.

Les tendinites (terme parfois employé par abus de langage pour désigner toute tendinopathie) sont des pathologies touchant les tendons et faisant intervenir un mécanisme inflammatoire. On peut les classer en trois catégories selon leur origine :

- les tendinites mécaniques dues à des contraintes répétées et excessives exercées sur le tendon, il s’agit par exemple des tendinites de traction (souvent associées à la pratique sportive ou à des tâches répétitives), tendinites par frottement (associées à une inflammation de la gaine synoviale) ou des tendinites par choc ;

- les tendinites d’origine infectieuse, par exemple suite à une migration bactérienne chez une personne victime d’une carie ou d’un abcès des gencives ;

- les tendinites dues à une consommation médicamenteuse (essentiellement des antibiotiques de la famille des fluoroquinolones) ou à certaines habitudes alimentaires (hydratation insuffisante, taux élevé d’acide urique, abus de sucre…).

Les entorses (ou foulures) sont, quant à elles, des blessures traumatiques des ligaments qui surviennent lors d’une sollicitation forcée et excessive d’une articulation. Selon sa gravité, la blessure consiste en une élongation temporaire ou permanente du ligament (éventuellement accompagnée d’un arrachement osseux) voire en une déchirure partielle ou totale de celui-ci.

Si le tissu possède une capacité de cicatrisation suffisante, ce qui est par exemple le cas du ligament collatéral tibial (Figure I–8), un processus de guérison spontanée pourra survenir après lésion [9, 45]. Ce processus est découpé en trois phases successives : l’inflammation du tissu endommagé (intervention des cellules du système immunitaire), la phase de réparation (prolifération des fibroblastes et production de MEC, en particulier de collagène de type III) et enfin la phase de remodelage (maturation de la MEC et des tissus, alignement des fibres de collagène) (Figure I–11).

Figure I–11 : Les trois phases de la cicatrisation des ligaments et tendons (adapté de [45, 46])

En fonction de la localisation et de la gravité de la blessure, la cicatrisation des tissus lésés et la récupération des patients peuvent être favorisés par différents traitements : immobilisation de l’articulation ou au contraire exercices physiques, cryothérapie, application d’anti-inflammatoire ou encore thérapies aux ultrasons ou au laser [45, 46].

1.3.2. Rupture et réparation du LCA

Comme expliqué précédemment, les cas les plus graves de blessure d’un ligament conduisent à une rupture partielle voire totale de celui-ci. Dans le cas du LCA, ligament auquel nous avons choisi de nous consacrer, quatre mécanismes de rupture sont actuellement recensés (Figure I–12) :

- hypertorsion (varus rotation interne ou valgus rotation externe) du tibia par rapport au fémur vers l’intérieur ou l’extérieur, blessure souvent liée à la pratique d’un sport de pivot (changement brutal de direction) ou de ski et éventuellement associée à une blessure d’un ligament collatéral ;

- hyperextension suite à la contraction du quadriceps, blessure typique du shoot dans le vide au football ;

- hyperflexion, par exemple suite à une retombée sur la jambe fléchie ou à une violente contraction du quadriceps pour se relever chez le skieur ;

- choc latéral sur l’articulation, en particulier de l’extérieur vers l’intérieur.

Figure I–12 : Modes de rupture du LCA [39]:hypertorsion (A), hyperextension (B), hyperflexion (C),

choc latéral (D)

Dans le cas d’une rupture d’un ligament tel que le LCA qui est constitué de zones peu ou pas vascularisées, le tissu n’a pas la capacité de cicatriser, la blessure ne peut donc pas guérir spontanément. C’est pourquoi aujourd’hui, lorsqu’un médecin juge la reconstruction du LCA nécessaire chez un patient, il lui faut intervenir chirurgicalement. Au fil des années et des progrès de la médecine, plusieurs stratégies chirurgicales ont été développées et pratiquées.

Si les premières tentatives de réparation du LCA ont consisté en de simples sutures du ligament lésé, les techniques opératoires ont rapidement été orientées vers l’utilisation de greffes biologiques [2]. Les xénogreffes et allogreffes (respectivement greffes d’origine animale et d’origine humaine) ne sont aujourd’hui presque plus utilisées en raison des risques d’infection, de réaction immunitaire et de transmission de maladie qu’elles impliquent. Malgré les bons résultats obtenus avec les allogreffes [2, 47], celles-ci présentent une difficulté supplémentaire liée au manque de donneurs et sont essentiellement pratiquées en seconde intention chez des patients ayant déjà subi au moins une greffe autologue.

Les greffes autologues (ou autogreffes) constituent justement le gold standard actuel. Elles sont aujourd’hui de loin les plus pratiquées pour la réparation du LCA. Elles consistent à prélever chez le patient blessé, un tendon ou une portion de tendon dans une autre localisation anatomique et de l’utiliser comme greffon pour remplacer le LCA rompu. Ce greffon est mis en place au travers de tunnels osseux préalablement percés dans le fémur et le tibia et fixé à l’aide de vis d’interférence (le plus souvent dégradables) et éventuellement d’autres systèmes, agrafe ou endo-bouton par exemple. Le tiers moyen du tendon rotulien (TR), les tendons de la patte d’oie (ou tendons du droit-interne et du demi-tendineux, DIDT) et plus rarement le fascia lata (portion épaisse de l’aponévrose entourant les muscles de la cuisse) sont les tissus les plus couramment employés dans ce sens. Ces techniques opératoires qui donnent d’excellents résultats et portent les noms de Kenneth - Jones (éventuellement Mac Intosh au TR), DIDT et Mac Intosh au fascia lata permettent évidemment de s’affranchir des contraintes des autres procédures citées précédemment et présentent l’avantage d’être peu invasives puisque l’implantation du greffon se fait par voie arthroscopique. Néanmoins, elles peuvent induire une morbidité du site donneur et engendrer des douleurs résiduelles sur ces mêmes sites, en particulier lors de l’utilisation du TR. Il faut également savoir que même après les 6 à 12 mois nécessaires à la cicatrisation et à la rééducation, le greffon ne remplacera jamais parfaitement le LCA, notamment en raison d’une diminution de ses propriétés mécaniques juste après l’implantation (cette baisse est atténuée par la suite grâce à la rééducation du patient) et d’une absence de régénération nerveuse (pas de restauration de la proprioception).

Au cours des années 1970-80, on a également pu assister à un fort développement des prothèses synthétiques définitives (Tableau I–3) principalement à base de fibres de polytétrafluoroéthylène (PTFE), de poly(téréphtalate d’éthylène) (PET), de polypropylène (PP) ou encore de fibres de carbone [48]. Ayant pour objectif de pouvoir pratiquer des

remplacements du LCA permettant une remobilisation immédiate de l’articulation, par exemple dans le cas des sportifs de haut niveau souhaitant un retour rapide à la compétition, la communauté scientifique orthopédique (chercheurs et médecins) a mis au point des prothèses dotées des propriétés mécaniques suffisantes dès l’implantation [47]. A l’époque, rapidement plébiscités par les chirurgiens, ces ligaments artificiels ont tout d’abord permis d’obtenir de très bons résultats mais n’ont malheureusement pas fait l’objet d’études à long terme suffisamment rigoureuses et approfondies [1]. Quelques années après implantation, de très nombreux cas de ruptures souvent accompagnées de complications (synovites) sont en effet survenus. La plupart de ces prothèses ont été confrontées à des problèmes d’érosion provoquant la libération dans la cavité synoviale de particules du ligament artificiel, de fatigue du matériau à long terme, de mauvaise intégration tissulaire, d’infection, etc. Leur utilisation a finalement été quasiment abandonnée. Quelques prothèses implantées comme tuteur de régénération (Ligament Augmentation Device LAD) sont encore employées et différentes études sont menées (notamment sur le LARS) dans le but d’améliorer la biocompatibilité et la biointégration du matériau afin de provoquer une recolonisation cellulaire et une régénération tissulaire après implantation [49].

Prothèse Matériau Structure

textile

Force de rupture

(N)

Raideur

(N / mm)

Dacron Stryker PET tissé 3045 420

Leeds-Keio PET tissé 2000 180

Gore-Tex PTFE tressé 5300 322

Proflex PET tressé 4500 280

LARS PET tricoté 2500 - 5000 x

LCA humain x x 739 - 2300 111 - 397

Tableau I–3 : Propriétés du LCA humain et de ligaments artificiels [1, 47, 48]