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Particularités de notre série

III. Matériels et méthodes

V. 2. Particularités de notre série

1. Cas N° 1

Notre patiente a présenté un carcinome du plexus choroïde à l’âge de 11 mois, 2 mois plus tard un corticosurrénalome a été diagnostiqué.

 Carcinome du plexus choroïde

Les tumeurs du plexus choroïde représentent 0,4 à 1 % de l’ensemble des tumeurs du système nerveux central et 2 à 4 % des tumeurs du système nerveux central de l’enfant [13] [14]; leur incidence annuelle est de 0,3 pour un million d’habitants [13] et le taux de survie à 5 ans est de 26 à 50%. Ces tumeurs surviennent essentiellement chez l’enfant et dérivent de l’épithélium des plexus choroïdes [22], prenant naissance à partir du neuro-ectoderme [24].

Contrairement au carcinome du plexus choroïde (CPC) de l’adulte qui survient fréquemment au niveau du quatrième ventricule, celui de l’enfant se localise essentiellement au niveau des ventricules latéraux [14] [16] [24], se répand souvent à travers le liquide céphalo-rachidien [30] [31] avec des métastases extra-neurales [20]. Il est parfois diagnostiqué avant la naissance par échographie, et peut être associé à un syndrome poly-malformatif [32]. Ces carcinomes sont extrêmement rares, ils peuvent être observés dans le cadre du syndrome de Li-Fraumeni [21].

Le diagnostic de ces tumeurs est souvent tardif puisqu’elles se développent à l’intérieur des cavités ventriculaires et elles restent donc longtemps méconnues; elles sont assez souvent volumineuses au moment du diagnostic avec une importante angiogénèse et des shunts intra-tumoraux, ce qui explique leur caractère très hémorragique [26].

La principale manifestation clinique est essentiellement une hydrocéphalie, parfois suraiguë secondaire à une hypersécrétion et/ou obstruction des voies d’écoulement du liquide céphalo-rachidien [26] [29]. Une révélation par une hémorragie intra-ventriculaire est possible mais exceptionnelle [14] [29].

La TDM permet de mettre en évidence une masse intra-ventriculaire, hyperdense, prenant le contraste, généralement associée à une hydrocéphalie [13].

Le diagnostic de certitude est anatomopathologique ; les critères de malignité des tumeurs du plexus choroïde varient selon les auteurs. Russell et Rubinstein (1971), Baskaya (1994) et Chow (1999) suggèrent que l’existence d’une invasion du tissu nerveux de voisinage, d’une prolifération d’architecture mal définie, de mitoses nombreuses avec anisocaryose, pléomorphisme cellulaire et absence de structures papillaires est en faveur de la malignité alors que selon Shuangshoti et al. (1971) [25], tous ces critères peuvent être absents, et seule la présence de métastases à distance est considérée comme critère de malignité.

À l’étude immuno-histochimique, le CPC exprime de façon constante la pancytokératine AE1/AE3, ce qui permet d’éliminer le diagnostic d’un épendymome ou d’un méningiome ; la protéine S-100 est plutôt exprimée par les papillomes du plexus choroïde, elle est rarement positive dans les carcinomes; la GFAP est positive dans uniquement 20 % des cas [13]. Les CPC expriment fréquemment l’ACE [23]; récemment, il a été décrit l’intérêt de la synaptophysine pour différencier les CPC des métastases d’un autre carcinome papillaire [19].

Le traitement est avant tout chirurgical visant une exérèse tumorale la plus complète que possible [29]. La résection chirurgicale maximale offre la meilleure chance de survie à long terme. L’abord chirurgical de la tumeur peut se faire soit par voie trans-corticale trans-ventriculaire (facilitée par l’hydrocéphalie) ou trans-calleuse quand le prolongement tumoral se fait vers le corps ventriculaire. L’élargissement par un abord inter thalamo-trigonal est parfois nécessaire [29]. Cette chirurgie est souvent compliquée d’hémorragies très importantes, parfois incontrôlables, vu le caractère hyper vasculaire de la tumeur et l’existence de pédicules vasculaires situés le long du toit du troisième ventricule. Cette chirurgie est donc souvent grevée d’une mortalité per opératoire ou postopératoire importante [28]. Chez notre patiente, l’exérèse de la tumeur a été faite par morcellement avec mise en place d’une dérivation péritonéo-ventriculaire et la TDM cérébrale postopératoire ne montrait pas de tumeur.

Le rôle de la chimiothérapie adjuvante est controversé ; plusieurs protocoles ont été proposés avec une réponse relativement bonne [16]. Kim et al. [20] rapportent un cas de CPC récidivant traité par BCNU (Carmustine) et

5-Fluoro-Uracil (FU) avec une amélioration clinique et radiologique durant 10 mois après traitement [20]. Le groupe de Torongo a utilisé la chimiothérapie préopératoire pour réduire la vascularisation et faciliter l’acte chirurgical [26]. Dans notre observation, l’enfant n’a pas subit une chimiothérapie postopératoire pour le CPC mais plutôt pour le corticosurrénalome associé (3 cures ICE).

La radiothérapie postopératoire est, d’une part, peu efficace et, d’autre part, limitée par le jeune âge des patients vu les conséquences intellectuelles et endocrinologiques ; elle peut cependant être indiquée en cas de tumeur progressive sous chimiothérapie, en présence de métastases, en cas d’association avec le syndrome de Li-Fraumeni [16] et pour réduire la vascularisation et le volume des CPC [33] [34]. Vinchon et Dhellemmes en 2000, Griffin et al. [18], et Valladares [28] (Griffin et al., 1988; Valladares et al., 1980) considèrent que la chimiothérapie est probablement préférable à la radiothérapie chez l’enfant.

Le CPC a une réputation extrêmement péjorative dans la littérature ancienne soulignée par la série de Dohrmann et Collias qui a rassemblé 22 cas de CPC de l’enfant et de l’adulte et a trouvé une survie moyenne de 1,4 an [14] [16]. Ellenbogen et al., en 1989 [17] rapportent un taux de survie à cinq ans de 50 % des CPC pédiatriques, ce taux de survie paraît être amélioré par les nouvelles techniques de neurochirurgie [14] [16].

Cohen et Duffner rapportent un taux de guérison de 58 % chez des enfants bénéficiant d’une résection tumorale complète avec ou sans thérapie adjuvante [27].

 Corticosurrénalome

Le corticosurrénalome CCS est une tumeur primitive de la surrénale développée à partir de la couche externe de la glande surrénale (le cortex). Elle peut donc être responsable, dans presque la moitié des cas, d’hypersécrétion d’hormones corticostéroïdes [38].

Les corticosurrénalomes sont des tumeurs rares agressives (0,02 % de tous les cancers) [39] et leur incidence est estimée à 2 cas par million [40]. Elle se caractérise par un risque élevé de récidive locorégionale et un taux de survie à cinq ans de 35 %. Selon le registre pédiatrique international des corticosurrénalomes, ils sont généralement présents au cours des premières années de vie avec prédominance féminine.

Plusieurs auteurs ont montré l’importante différence du profil moléculaire entre les CCS de l’adulte et de l’enfant ainsi que la grande différence de valeur pronostique de ces marqueurs moléculaires [58] [59]. L’IGF1-R (Insulin-Growth Factor1-Receptor) est surexprimé dans les CCS pédiatriques, il est le principal marqueur moléculaire ayant un rôle pronostique reconnu dans ces tumeurs pédiatriques [60]. Ce rôle pronostique péjoratif a une importance en clinique, l’IGF1-R pouvant être ciblé par des anticorps monoclonaux anti-IGF1-R.

L’association à un syndrome génétique prédisposant était confirmée dans près de 30% des cas. Il s’agissait de syndromes de Li-Frauméni et de Wiedemann-Beckwith qui sont les deux syndromes les plus fréquemment décrits dans la littérature [61] [62].

Le syndrome de Li-Fraumeni est associé dans 70% des cas à une mutation germinale du gène suppresseur de tumeur TP53 [63].

Comme le décrit la littérature, les principaux cas de mutation du gène TP53 étaient retrouvés chez les patients les plus jeunes [64] [65]. Suite à la découverte de la mutation spécifique R337H du gène TP53 au Brésil, Ribeiro avait soulevé l’hypothèse que le potentiel de malignité de la protéine P53 mutante pourrait être dépendant du tissu dans lequel elle s’exprimerait [66].

Ainsi, Michalkiewicz a émis l’hypothèse que la présence de cette mutation favoriserait la survenue de CCS sur le tissu surrénalien embryonnaire et pas sur le tissu mature [64], ce qui renforce l’idée d’une grande différence entre les CCS pédiatriques et de l’adulte où les marqueurs moléculaires ne semblent pas avoir le même rôle dans la carcinogénèse ni la même valeur pronostique [60].

Le CCS pédiatrique étant une maladie rare, il existe peu de séries européennes publiées. Il s’agit principalement d’études brésiliennes où l’incidence des CCS est exceptionnellement élevée à cause de la mutation germinale spécifique R337H du gène TP53 retrouvée chez les patients [66].

La revue de la littérature effectuée sur le moteur de recherche PubMed a permis de retrouver trois séries pédiatriques Françaises publiées depuis 1970 [67] [68] [69]. Ainsi, l’équipe de Teinturier avait décrit 54 cas de CCS pris en charge dans des centres parisiens de 1973 à 1993 [67]. Cette étude avait montré une distribution bimodale des âges des patients au diagnostic avec deux pics de fréquence de la maladie : avant l’âge de 4 ans et à l’adolescence.

Chez notre patiente le CCS a été diagnostiqué avant l’âge de 4 ans. Ce diagnostic dans la petite enfance est retrouvé de manière cohérente dans les autres séries avec un âge médian de diagnostic à 3 ans selon la revue de la littérature réalisée par Ribeiro et son équipe [61].

Dans notre cas, l’âge inférieur à 4 ans était associé au pronostic de la patiente, indépendamment des autres facteurs, avec une meilleure survie et sans rechute. L’âge est un des facteurs de bon pronostic les plus fréquemment décrit dans la littérature [64] [70] [71].

L’hyperproduction hormonale du CCS est presque universelle et la plupart des patients (84.2 %) présentent une virilisation [41]. Le syndrome de virilisation (hirsutisme, pilosité pubienne, hypertrophie clitoridienne, accélération de la vitesse de croissance, modification de la voix et l’augmentation de la taille du pénis [72]) était retrouvé dans 62,5% des cas, Teinturier et Michalkiewicz en décrivaient respectivement 76% et 84%. Ces résultats sont similaires pour notre patiente chez qui la tumeur était sécrétante.

Par contre, elle n’avait pas un syndrome de Cushing, qui est retrouvé plus fréquemment chez les adolescents dans les autres séries [67] [64].

Ces symptômes sont la conséquence d’une hypersécrétion hormonale qui est très fréquente. Il est donc important de réaliser les dosages hormonaux des trois axes : glucocorticoïdes, androgènes/œstrogènes et minéralocorticoïdes devant toute suspicion de CCS à visée diagnostique.

Le dépistage systématique de mutation du gène TP53 est actuellement recommandé lors du diagnostic d’un corticosurrénalome pédiatrique quels que soient les antécédents familiaux.

Ce dépistage a un impact sur la prise en charge thérapeutique des patients porteurs d’une mutation chez qui il est déconseillé de faire la radiothérapie devant l’augmentation du risque d’un 2ème cancer radio-induit. De même, l’impact du dépistage sur le suivi radiologique des patients est important.

La réalisation d’IRM est préférable plutôt que des examens d’imagerie avec émission de radiations ionisantes comme le scanner ou la Tomographie par émission de positons (TEP) [60] [73].

L’intérêt des traitements adjuvants n’est pas encore clairement établi dans la prise en charge des CCS pédiatriques [74].

La chirurgie d’exérèse est le traitement de référence et doit être la plus complète possible [74]. Elle est classiquement réalisée par laparotomie. La voie coelioscopique est déconseillée en raison de la grande fragilité de ces tumeurs et du risque de rupture tumorale peropératoire. Il est décrit dans les séries pédiatriques, une incidence de rupture tumorale peropératoire de 20% lors du

premier geste chirurgical et dépassant 40% lors des reprises chirurgicales [64] [75]. Chez notre patiente, l’exérèse chirurgicale était complète.

La présence d’une rupture tumorale peropératoire augmente le risque de récidive loco-régionale selon Sandrini et Michalkiewicz [64] [75]. Ce traitement semble donc avoir un intérêt dans le contrôle local de la maladie. Il n’y a actuellement pas de données concernant son efficacité spécifiquement dans les formes de l’enfant.

Son utilisation est par ailleurs controversée compte tenu du nombre important de mutation du gène TP53 associées au CCS pédiatriques et du risque de tumeurs radio-induites. Les progrès effectués dans le domaine des techniques d’analyses génomiques et la meilleure connaissance des acteurs moléculaires impliqués dans la pathogénie des CCS de l’adulte mais aussi de l’enfant ont permis d’envisager l’utilisation de thérapies dites ciblées. Le rôle clé de la voie de signalisation de l’IGF1-R (Insulin-Growth Factor1-Receptor) qui est surexprimé dans les CCS pédiatriques a été démontré [76].

Les anticorps monoclonaux anti IGF1-R ont montré des résultats encourageants chez l’adulte. Dans une étude de tolérance menée chez 14 patients atteints d’un CCS réfractaire aux traitements conventionnels, ils permettent d’obtenir une stabilité tumorale [77].

La surveillance hormonale a un rôle important dans le suivi et le dépistage des rechutes de la maladie. De nombreuses études ont montré que l’on pouvait séparer les patients pédiatriques en deux groupes d’évolution très différente. Un premier groupe correspondrait aux patients les plus jeunes, diagnostiqués avant l’âge de 4 ans, ayant le plus souvent des signes cliniques en rapport avec une hypersécrétion hormonale, et ayant généralement une évolution favorable après

chirurgie seule [78]. Ceci s’accorde avec l’évolution chez notre patiente qui a été favorable.

Le score AFIP proposé par Wienecke est basé sur des critères microscopiques mais aussi cliniques comme le poids (> 400g) et la taille (> 10,5cm) et un score supérieur ou égal à 3 est en faveur de la malignité [79]. Une étude Italienne sur 58 cas, a montré une bonne corrélation entre le score de Wienecke et l’évolution des patients [80].

Devant l’absence de marqueurs pronostiques anatomopathologiques réellement discriminants, de nombreuses études ont montré l’importance de facteurs cliniques, comme la taille et le poids tumoral, cependant, les seuils fixés varient d’une étude à l’autre [79] [81] [82].

 Syndrome de Li-Fraumeni

Sandrini et al. ont mentionné un cas pédiatrique d’association entre le carcinome du plexus choroïde (CPC) et corticosurrénalome (CCS) sur une série de 58 cas de corticosurrénalome [43]. Vital et al. ont rapporté un cas qui avait un corticosurrénalome à l’âge de 4 ans, et un papillome atypique du plexus choroïde plus tard à l’âge de 6 ans, avec mutation p53 dans les deux tumeurs [44]. De plus, Wang et al. ont décrit un garçon de 18 mois qui avait une association synchrone entre CPC et CCS avec expression élevée de la protéine p53 à l’immuno-histochimie dans les deux tumeurs [45].

Plus récemment, Russell-Swetek et al. ont rapporté un jeune garçon sans antécédents familiaux de néoplasie, qui a porté l’association du carcinome du plexus choroïde et corticosurrénalome et qui a hébergé une nouvelle mutation p53 (dite de novo) dans les deux tumeurs [46]. Cette constatation est conforme à

d’autres études sur le corticosurrénalome de l'enfance où de novo mutations TP53 de la ligne germinale pénétrante ont été signalées [47] [48].

Ces différentes études ont montré l’intérêt de déterminer la mutation TP53 à l’étude immuno-histochimie des deux tumeurs pour avoir un facteur pronostique et pour expliquer la résistance de certaines de ces tumeurs aux thérapeutiques usuelles appliquées.

Nous n’avons pas montré la mutation de la lignée germinale TP53 chez notre patiente [49]. Cependant elle présente une association de deux tumeurs primitives du spectre du syndrome de Li-Frauméni, qui est un syndrome de prédisposition génétique aux cancers. Les tumeurs les plus caractéristiques sont les cancers du sein, les ostéosarcomes, les sarcomes des tissus mous, les leucémies/lymphomes, les tumeurs cérébrales et les corticosurrénalomes.

Selon les critères diagnostiques du syndrome de Li-Frauméni retenus par l’équipe du Pr Thierry Frébourg (tableau VII), on peut parler d’une forme isolée du syndrome de Li-Frauméni chez elle.

Tableau VII : Critères diagnostiques du syndrome de Li-Fraumeni [163] Critères diagnostiques du syndrome de Li-Frauméni

I : Formes familiales : 2 cancers ou plus

Au moins 2 patients avec une tumeur du spectre du SLF, diagnostiqués l’un < 46 ans et l’autre < 56 ans

Sarcomes des tissus mous (rhabdomyosarcome, liposarcome, fibrosarcome, léiomysarcome)

Sarcomes osseux

Tumeur cérébrale (glioblastome, médulloblastome, épendymome, cancer des plexus choroïdes)

Corticosurrénalome

Cancer du sein pré-ménopausique II : Formes isolées : cancers multiples

Au moins 2 cancers du spectre du SLF, dont au moins un diagnostiqué < 46 ans

III : Formes isolées : cancers rares Corticosurrénalome

Tumeur des plexus choroïdes Rhabdomyosarcome embryonnaire

Cancer du sein < 31 ans, BRCA1/BRCA2 négatif

Le syndrome de Li-Fraumemi a été identifié à partir de familles d’enfants avec des rhabdomyosarcomes.

Il s’agit d’un syndrome rare de prédisposition aux cancers de l’enfant et de l’adulte, dû aux mutations constitutionnelles délétères du gène TP53, localisé sur le chromosome 17 (17q13.1). Ces mutations se transmettent selon un mode autosomique dominant. Le taux de mutations de novo du gène TP53 varie entre 7 et 20 %.

Il existe une hétérogénéité clinique (sarcomes des tissus mous et osseux, tumeur cérébrale, corticosurrénalome, cancer du sein préménopausique) avec des formes pédiatriques, d’autres formes essentiellement adultes et des présentations mixtes adultes et pédiatriques.

L’analyse moléculaire du gène TP53 chez 1 730 patients de 214 familles a permis à l’équipe du Pr Thierry Frébourg de proposer une extension des critères diagnostiques de Chompret (Tableau VII).

Le spectre tumoral dans l’enfance est réparti de la façon suivante : ostéosarcome : 30 % ; corticosurrénalome : 27 % ; tumeurs cérébrales : 26 % ; sarcomes des tissus mous : 23 %.

Il existe par ailleurs une radiosensibilité chez les personnes porteuses d’une mutation délétère de TP53, avec un risque de seconde tumeur dans le champ d’irradiation de 30 %.

Il est également probable que certaines chimiothérapies soient plus génotoxiques en présence d’une mutation à effet trans-dominant négatif (la protéine mutée piège la protéine sauvage, ce qui majore l’effet cellulaire et conduit à un diagnostic précoce). Il existerait donc un gradient de sévérité clinique qui pourrait orienter la prise en charge des patients.

Actuellement, en France, il n’existe aucun consensus de recommandation de surveillance. Le projet de recherche « Lifscreen » ayant pour but d’évaluer la place de l’IRM corps entier (versus IRM cérébrale et mammaire plus échographie abdominopelvienne) dans la détection précoce des cancers chez les porteurs de mutation TP53 devrait permettre de proposer des recommandations de surveillance [163].

2. Cas N° 2

Notre patient a présenté un tératome cérébral à l’âge de 2 ans et, 3 mois plus tard, il a présenté une deuxième tumeur rénale. L’examen anatomopathologique de la pièce opératoire rénale était en faveur d’un tératome immature.

Figure 18 : Arbre décisionnel expliquant l’étiopathogénie du tératome [83]

Les tératomes sont les tumeurs congénitales les plus fréquentes (25 à 35 %) [83]. Ils sont observés dans 1/4000 naissances [50] [51] [52]. Ils se développent généralement au niveau de la région sacro-coccygienne et gonadique dans 60% des cas [52]. Les tératomes cervico-faciaux constituent 5 à 15 % des localisations, avec une prédominance cervicale et nasopharyngée. La localisation oropharyngée est exceptionnelle (2 %) [84].

Aucune prédominance de sexe n’a été notée pour l’ensemble des tératomes de la tête et du cou [52] [53] [54]. Il n’y a pas d’hérédité familiale, aucune association avec un gène ou une famille de gène n’a été mise en évidence [52]. Le tératome fait partie des choristomes (du grec choristos : séparé ; ome: tumeur), dans le groupe des hétérotopies tissulaires.

Macroscopiquement, un tératome peut être kystique, solide ou mixte.

Figure 19: Aspect macroscopique d’un tératome immature [175]

Il comporte des tissus étrangers à la région qui l’abrite, ressemblant à ceux qui se succèdent au cours du développement à partir des trois feuillets embryonnaires : l’ectoblaste, le mésoblaste et l’endoblaste.

Les tératomes matures ne comprennent que des tissus adultes de même âge que celui du sujet, à la différence des tératomes immatures et mixtes [52].

La répartition des tératomes dans l’organisme se fait selon trois variantes [43] :

 Le tératome axial externe : le plus rare, toujours mature. Il se voit généralement à la naissance (tératomes sacro-coccygiens, cervicaux, …)

 Le tératome axial interne : peut être mature, immature ou mixte (région périnéale, le médiastin antérieur…)

 Le tératome para-axial: peut être mature, immature ou mixte. Il est le plus fréquent (tératome des gonades, gastrique ou hépatique).

L’étiopathogénie des tératomes est controversée, plusieurs théories ont été proposées [42]. Batsakis et al. s’accordent que la plupart des tératomes cervicaux dérivent des cellules souches pluripotentes séquestrées durant l’embryogénèse [55]. D’autres stipulent que les tératomes constituent des vestiges des structures embryonnaires normales ayant présenté un défaut de migration [55].

Cliniquement, Rothschild et al. ont rapporté que l’hydramnios est un mode de révélation habituel chez environ 20 à 30 % des patients ayant un tératome congénital cervico-facial [53].

A l’histologie, le tératome bénin est mature dans 55% des cas. A l’inverse, le tératome immature se définit comme une forme potentiellement maligne pour la plupart des auteurs. Pour certains, l’immaturité n’est pas un signe de malignité pour les tératomes congénitaux [52] [53]. Que ce soit pour les tératomes bénins ou les tératomes malins, une surveillance clinique est indispensable à la recherche de récidives ou de métastases [52].

Les tératomes cérébraux se voient surtout dans la région pinéale, mais aussi au niveau de la fosse postérieure. Ils peuvent être congénitaux et parfois très volumineux. Bénins ou malins, selon leur degré de différenciation, ils sont

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