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La participation des personnes âgées sur le marché du travail

Chapitre 2: Causes économique du faible taux de natalité

2.3. La participation des personnes âgées sur le marché du travail

Selon certains auteurs, l’une des solutions concernant le déficit de la caisse de la sécurité sociale et la trop lourde charge imposée aux travailleurs serait d’inciter les personnes âgées de 65 ans et plus à continuer de travailler plutôt que de dépendre entièrement de leur retraite (Raut, 2006) (Sokai & Asooka, 2007). La principale cause avancée est qu’aujourd’hui, l’espérance de vie moyenne est plus élevée et que les Japonais restent en bonne santé plus longtemps que par le passé. Déjà, en 2001, le taux d’activité des hommes de 65 ans et plus était de 32,9 % et de 13,8 % pour les femmes. Ce taux est bien supérieur à celui des pays occidentaux et pourrait sans doute l’être encore plus (Mouer & Kawanishi, 2005) (Sokai & Asooka, 2007).

En principe, en 2000, toutes les entreprises ont fixé l’âge de la retraite à 60 ans et plus et près de 70 % d’entre elles permettent à certains de leurs employés de continuer de travailler plus longtemps ou, idéalement, de les réengager à un salaire plus modeste37. Par la suite, le

gouvernement a adopté certaines mesures visant à augmenter graduellement l’âge de la retraite à 65 ans et à pénaliser ceux qui décident de la prendre plus jeune et, pour pallier le manque de main-d’œuvre, il tente d’augmenter la période utile des personnes âgées en leur facilitant la

37 En moyenne, un homme qui travaille 5 ans après l’âge de la retraite à un salaire de 20 à 40 % en dessous de son

revenu de préretraite. C’est cette réduction de salaire qui rend intéressante l’idée de garder les employés plus âgés, d’autant plus qu’ils sont déjà formés à bon nombre de tâches (MacKellar, Ermolieva, Horlacher, & Mayhew, 2004).

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tâche pour ce qui est de la recherche d’emploi (Mitani, 2007). Toutefois, ceux qui ne veulent pas travailler acceptent tout simplement d’avoir une retraite plus faible (MacKellar, Ermolieva, Horlacher, & Mayhew, 2004).

Malgré tout, les Japonais, pour un grand nombre d’entre eux, sont des gens qui préféreraient, dans l’idéal, travailler le plus longtemps possible. En effet, selon un sondage fait en 2001 et se basant sur 1017 participations valides, environ 5 % des répondants affirment vouloir arrêter de travailler après 55 ans, 18 % après 60 ans, 56 % après 65 ans, 16 % après 70 ans et 3 % veulent arrêter de travailler à 75 ans et plus. Nous voyons ici que plus de la majorité des répondants affirment vouloir travailler après 65 ans (plus particulièrement entre 65 et 70 ans). De plus, environ 40 % d’entre eux souhaiteraient travailler 30 heures par semaine étalées sur 4 jours, 30 % voudraient travailler 20 h sur 3 jours par semaine et 30 % souhaiteraient continuer à travailler à temps plein. Ceci est remarquable, car dans les sociétés occidentales, la population souhaite au contraire, le plus souvent, partir à la retraite le plus tôt possible (Sokai & Asooka, 2007).

Les principales raisons invoquées par les répondants pour expliquer cette volonté de travailler plus longtemps sont le désir de continuer à apprendre de nouvelles choses et de continuer d’être indépendant de la caisse retraite. Il y a ici une volonté claire de rester autosuffisant par rapport à l’aide sociale, et ce même s’ils ont cotisé toute leur vie. Ceci n’est d’ailleurs pas si étonnant quand on sait qu’il était courant, par le passé, dans certaines régions rurales, que les personnes âgées ne pouvant plus participer à l’effort de travail familial partaient dans la forêt dans le but d’y mourir et ainsi ne pas être un fardeau pour leur famille (Hamada & Koto, Introduction, 2007). De même, aujourd’hui, un certain nombre de personnes âgées se suicident, car elles n’ont pas de pension suffisante et craignent d’être un fardeau pour leur famille (Coulmas, 2007).

Nous voyons ici qu’il y a clairement un désir de prolonger la période de travail, mais aussi une volonté, non seulement de continuer leur apprentissage, mais aussi d’obtenir des conditions de travail plus adaptées à leurs situations, notamment à leur état de santé. Cet état d’esprit est quelque chose qui devrait être mis à profit pour alléger le fardeau pesant sur la population active et ainsi contribuer à la relance de la natalité. Toutefois, les raisons pour lesquelles les personnes

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âgées souhaitent continuer à travailler ne sont pas forcément compatibles avec la réalité du marché de travail.

En effet, pour ce qui est de l’apprentissage, la situation est problématique. Comme nous l’avons vu, les entreprises japonaises forment leurs employés à un certain nombre de tâches pour les rendre polyvalents. Toutefois, en fin de carrière, il peut être difficile de leur procurer de nouvelles choses à apprendre qui soient utiles à l’entreprise. Ainsi, le coût des formations reviendrait trop cher par rapport au gain potentiel. À ce moment-là, il devient plus rentable de former des jeunes aux tâches nécessaires à l’entreprise et de se défaire des travailleurs plus âgés. Il y a donc une certaine frontière où l’avantage de garder une personne âgée s’efface devant celui d’engager un jeune sans formation (Sokai & Asooka, 2007).

D’autre part, l’ajustement des conditions de travail peut, aussi, s’avérer difficile. Au Japon, nous l’avons dit, il y a les employés réguliers qui travaillent de nombreuses heures sous pression, mais avec certains avantages liés à l’emploi à vie, et d’autres, travailleurs irréguliers, qui sans avoir cette pression ont non seulement un salaire considérablement plus bas, mais aussi des conditions d’emplois précaires. Ainsi, il peut être difficile de positionner les personnes âgées dans ce cadre et il s’en suit que peu d’emplois flexibles tant au niveau des horaires que de la difficulté du travail sont disponibles pour les personnes âgées. En bref, les entreprises n’offrent pas, pour le moment, les conditions nécessaires pour permettre à ces personnes, du moins en grand nombre, de continuer à travailler après un certain âge (Sokai & Asooka, 2007).

Enfin, même si les salariés plus âgés ont l’avantage d’avoir une bonne expérience ainsi qu’une bonne réputation, ils ont pourtant de grandes difficultés à conserver leur emploi, d’autant plus que, pour beaucoup d’entre eux, l’âge de 60 ans correspond au moment où les employés doivent obligatoirement prendre leur retraite. En effet, comme nous l’avons vu précédemment, à un certain âge, les primes d’ancienneté accumulées deviennent considérables et il devient ainsi difficile pour les entreprises, même si le salaire tend à diminuer après 60 ans, voir même 55 ans (pour un même emploi), de garder leurs employés après 60 ans. De plus, les compagnies japonaises fonctionnent plus ou moins avec un système d’avancement basé en grande partie sur l’ancienneté. Ainsi, pour qu’un groupe d’employés puisse avoir une promotion, il faut que les précédents en aient une aussi ou partent à la retraite. En bref, les entreprises, vont prioritairement combler leurs postes vacants à l’interne, c'est-à-dire qu’ils vont promouvoir un employé déjà

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présent. Les personnes âgées peuvent donc être employées pour certaines tâches, mais elles seront difficilement réengagées comme travailleurs réguliers (Hutchens, 2007).

Ainsi, même si des efforts sont faits à ce niveau, il reste difficile pour le gouvernement de poser des actions obligeant les entreprises à conserver plus longtemps les employés plus âgés pour la raison que la structure même du système de l’emploi ne s’y prête pas. En outre, le fait pour les personnes âgées de continuer à travailler ne fera qu’accentuer le problème majeur qu’est le chômage des jeunes. Ainsi, d’autres solutions ont été envisagées pur pallier au déficit de main d’œuvre et d’argent dans la caisse des retraites.