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4.3 Mesures azimutales avec les null-arrays

4.3.1 Paradoxe anisotropique

Une mesure azimutale est une mesure effectuée en faisant tourner le dispositif utilisé autour de son centre. Les différents signaux mesurés sont alors représentés sur un diagramme polaire, où la valeur du rayon représente l’intensité du signal (donc la résistivité apparente mesurée). Le paradoxe anisotropique est le fait que lorsqu’une mesure azimutale est effectuée sur un terrain fracturé, ou multi fracturé comme c’est souvent le cas dans les situations de terrain, l’orientation de l’ellipse obtenue ne peut pas être prédite. Autrement dit, en fonction de la taille du dispositif utilisé et de sa position par rapport à la structure étudiée, l’ellipse obtenue aura son grand axe soit parallèle soit perpendiculaire à la structure. C’est cette "inconnue" qui sera ici nommée "paradoxe anisotropique".

Ce paradoxe anisotropique a été abordé par Taylor et Fleming (1988). D’après ces auteurs et pour un dispositif géoélectrique classique, le grand axe de l’ellipse mesurée sur un réseau régulier de failles est parallèle aux failles. Mais la vraie résistivité du milieu environnant est donnée par la mesure de la résistivité perpendiculaire au failles ρK. Ainsi, le petit axe de

l’ellipse, et non pas celle parallèle aux failles ρ{{, donne la résistivité "vraie" du milieu. Ceci

est valable que la mesure se fasse entre les fractures ou sur une fracture. Ce phénomène a été nommé "paradoxe anisotropique" (Keller et Frischknecht, 1966). Il faut donc rappeler que cette définition est valable pour un sol multi-fracturé, donc composé d’un nombre infini de fractures parallèles toutes espacées d’une même distance. La distance entre les fractures doit être petite par rapport à la taille du dispositif utilisé, ce qui veut dire que le courant électrique doit obligatoirement traverser plusieurs fractures. Le rapport entre le grand et petit axe de l’ellipse donne le coefficient d’anisotropie λ, défini dans l’équation 4.1.

λ cρ

{{

4.3. Mesures azimutales avec les null-arrays

Les termes de résistivité de cette équation ne sont pas des résistivités vraies, mais des termes de résistivités apparentes.

D’un point de vue théorique, ce phénomène découle de l’utilisation du courant électrique au lieu de la densité de courant dans le calcul de la résistivité apparente. Le fait que ce paradoxe ait lieu est lié au nombre de fractures traversées par le dispositif et à sa position par rapport à ces fractures. (Szalai et al., 2010a)

Bien que ce phénomène ne soit ni précisément connu ni expliqué, un des paramètres expliquant le fait que ce paradoxe se produise ou non est donc la position du dispositif par rapport aux structures, plus précisément les positions des électrodes de courant.

Ce paradoxe ne joue pas toujours un rôle important en géoélectrique classique, puisque les valeurs mesurées ne varient pas forcément énormément. Il devient par contre très important pour les null-arrays, puisque le diagramme azimutal mesuré va être interprété en terme d’orien- tation.

Dorénavant, dans ce travail, le terme de "paradoxe anisotropique" décrit le fait que la direc- tion de l’axe majeur de l’ellipse peut changer en fonction de la distance entre le dispositif et la structure étudiée.

Certains null-arrays ne produisent pas un diagramme en forme d’ellipse lorsqu’une mesure azimutale est effectuée, mais un diagramme composé de plusieurs lobes, typiquement quatre, comme c’est le cas du Sna. La direction du grand axe de l’ellipse doit alors être imaginée à partir de l’ellipse circonscrite au diagramme, comme illustré sur la Fig. 4.15.

(a)Diagramme standard (b)Ellipse circonscrite

Figure 4.15 – a) Sna sur la structure à deux zones et b) ellipse circonscrite au diagramme en fleur.

4.3. Mesures azimutales avec les null-arrays Le cas particulier du MAN

En situation de terrain, les électrodes ne peuvent pas être plantées de manière rigoureuse- ment précise. Si ces erreurs de positionnement ne sont pas trop importantes dans la plupart des cas, elles jouent un rôle très important dans le cas du MAN. En effet, dans ce cas, un paradoxe anisotropique se produit. Ce dernier n’est ici pas lié à la position du dispositif par rapport à la structure, mais à l’erreur de distance entre les électrodes. (Szalai et al., 2010a) Ce MAN utilisé sur le terrain, ayant donc un espacement M A légèrement différent de AN, est appelé le MAN-modifié, noté mMAN. Cette différence de comportement est due au fait qu’une électrode B doit être placée "à l’infini", typiquement quelques centaines de mètres par rapport au dispositif. Comme mentionné précédemment, le fait que le paradoxe anisotropique se produise ou non dépend notamment des structures se trouvant entre les deux électrodes de courant A et B. Ainsi, à cette distance et en situation de terrain, un sol a dans presque tous les cas une anisotropie directionnelle claire. Cette dernière peut être due à un nombre "infini" de fractures entre A et B (donc un sol multi-fracturé) ou à anisotropie liée à la structure du sol.

Afin de s’approcher de cette situation, une simulation a alors été effectuée en prenant une structure avec une anisotropie directionnelle claire : la structure a une valeur de résisitivé dans la direction de l’axe y (qui correspond à un N0 sur le diagramme polaire) étant 20% supé-

rieure à la valeur de résistivité dans la direction de l’axe x (qui correspond à un N90 sur le

diagramme polaire). Une électrode B a été utilisée, à plus de 100 m de la position de mesure. 1

(a)MAN

20

(b)mMAN

Figure 4.16 – Simulations numériques du paradoxe anisotropique pour le mMAN sur une structure anisotropique. La structure est 20% plus résistive dans la direction N0 (ligne grise)

que perpendiculairement. Les signaux sont simulés en Ωm. La valeur donnée à côté du dia- gramme est la valeur sur le cercle extérieur, l’échelle étant linéaire.

Il est alors possible d’observer que le MAN "théorique" et le mMAN (donc le MAN qui est utilisé sur le terrain) ont leurs grands axes tournés de 90 l’un de l’autre.

La légère distorsion observée sur la Fig. 4.16a est liée à la distance de l’électrode B, trop proche dans le modèle numérique.

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Ces simulations montrent alors qu’en situation de terrain, à cause de l’erreur, inévitable, de positionnement des électrodes, le paradoxe anisotropique se produit toujours pour le MAN, qui se comporte alors comme le mMAN avec son ellipse pivotée de 90.

Bien que ces simulations justifient ce résultat, qui a été observé et vérifié sur les mesures de terrain, comme par exemple aux Breuleux (voir la section 5.2), aucune explication théorique satisfaisante n’a été trouvée à ce jour à ce phénomène.

Dans les sections 4.3.2 - 4.3.6, les simulations ont été effectuées pour le MAN, sans électrode B. Toutes ces simulations ont donné comme résultat que la structure était parallèle au petit axe de l’ellipse. C’est pourquoi, pour les mesures de terrain, où le MAN utilisé est en fait un mMAN, la structure sera interprétée selon le grand axe de l’ellipse puisque les simulations avec le MAN montreront le petit axe.

Il faut noter qu’un essai a été effectué avec un sol homogène composé de seulement trois failles. Dans ce cas, l’occurrence de ce paradoxe pour le mMAN par rapport au MAN n’a pas été ob- servé à tous les coups, puisque ce paradoxe se produit ici seulement dans le cas où le mMAN ne traverse pas une des failles. Ceci peut peut-être s’expliquer par le fait que le nombre de failles est ici trop faible pour pouvoir assimiler cette structure à un sol multi-fracturé. La Fig. 4.17 montre ces simulations pour le MAN et le mMAN, localisé à trois mètres de le première faille, la distance entre les failles étant de 5 m. Cette simulation a été effectuée pour deux tailles de dispositif : LD  4 m et LD  10 m avec une erreur de 5 % sur l’espacement des électrodes. Une électrode B a été placée à plus de 100 m de la position de mesure.

10000 90° 270° 180° 0° (a)MAN, LD  4 m 10000 (b)mMAN, LD 4 m 20000 (c)MAN, LD  10 m 20000 (d)mMAN, LD 10 m

Figure 4.17 – Simulations numériques du paradoxe anisotropique pour le mMAN sur une structure composée de trois failles. L’orientation des failles est de 0 (lignes grises) et le dis-

positif se trouve à 3 m des failles. La valeur donnée à côté du diagramme est la valeur sur le cercle extérieur, l’échelle étant linéaire.

Une incertitude est donc toujours présente sur ces résultats lorsque le milieu n’est pas suffi- samment fracturé, ne pouvant alors pas être assimilé à un milieu anisotrope.

4.3. Mesures azimutales avec les null-arrays