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Chapitre 1 : Synthèse d’énamides

2. Synthèse d’énamides tertiaires

2.5. Par couplage métallo-catalysé sur des amides

Les énamides peuvent également être obtenus par des réactions de couplage métallo-catalysés d’alcynes ou d’alcènes sur des amides secondaires. Ces réactions ont fait l’objet de nombreux travaux et d’une revue.36 Par souci de simplicité et de concision, nous ne présenterons dans cette partie que les grandes

Schéma 35 a) Par hydroamidation d’alcynes

Alors qu’il existe un grand nombre de réactions permettant de réaliser l’hydroamination d’alcyne donnant accès à des énamines, les réactions d’hydroamidation formant des énamides sont beaucoup moins nombreuses. Le premier exemple a été décrit par l’équipe de Watanabe en 1995 en utilisant une catalyse au ruthénium.37 La réaction permet d’obtenir les énamides de stéréochimie E substitués en position β et ce avec de bons rendements. La réaction est cependant limitée au N-aryle énamides et aux alcynes terminaux et requiert des températures élevées (Schéma 36).

Schéma 36

Des énamides de stéréochimie Z ont été formés par hydroamidation anti-Markovnikov réalisée par l’équipe de Gooßen en utilisant également une catalyse au ruthénium. La stéréochimie Z est obtenue grâce à l’emploi d’un ligand plus riche en électrons et plus chélatant tel que le 1,4- bis(dicyclohexylphosphino)butane (dcypb). La réaction a lieu à une température modérée de 60°C et donne de meilleurs rendements en présence de triflate d’ytterbium comme acide de Lewis. En effet, l’acide de Lewis permet d’augmenter l’acidité du NH et de diminuer la nucléophilie de l’amide (Schéma 37).38

Schéma 37

Des travaux ultérieurs ont permis de développer des conditions permettant d’accéder sélectivement aux énamides de stéréochimie E ou Z. En effet, si la présence d’eau permet de favoriser l’isomère Z, réaliser la réaction en milieu anhydre et en présence de triéthylamine permet une isomérisation conduisant à l’isomère E. Cette stratégie a été appliquée à la synthèse de produits naturels : le Lansamide I et le Lansiumamide B.39

Schéma 38 b) Par couplage croisé entre amides et halogénures vinyliques

Les énamides tertiaires peuvent également être obtenus à partir d’amides secondaires par couplage de type Ullmann avec des halogénures vinyliques. Cette voie a été étudiée pour la première fois par Ogawa en couplant des amides ou des amidures potassiques avec des bromures vinyliques en présence d’une quantité stœchiométrique d’iodure de cuivre dans le HMPA au reflux (Schéma 39).40

Schéma 39

En 2003, Buchwald a rapporté l’utilisation de ligands 1,2-diamine comme la DMEDA pour permettre de réaliser les réactions de couplages entre des amides et des vinyles halogénés en présence d’une quantité catalytique d’iodure de cuivre (Schéma 40).41

Schéma 40

Ces conditions ont constitué une avancée majeure dans le domaine et sont toujours parmi les plus utilisées. La réaction est peu sensible à la taille et au nombre de substituants portés par les vinyles halogénés. Cette étude est cependant limitée aux substrats de type lactames.

Une des limitations à cette stratégie de couplage est l’accès aux halogénures de vinyle. Pour pallier cette limitation, une méthode alternative intéressante utilisant des tosylates d’énol a été proposée par Klapars.42 Les tosylates d’énols sont facilement accessibles à partir de cétones en une étape. La réaction de couplage pallado-catalysé de ces composés avec des amides donne accès aux énamides correspondants avec de bons rendements (Schéma 41).

Schéma 41

Cette méthode souffre cependant de deux limitations importantes :

- Les tosylates d’énols doivent porter un groupement aryle ou un groupement électroattracteur en position β de la double liaison C=C.

- La réaction est limitée aux amides primaires ou aux lactames. c) Par amidation oxydante d’alcènes

Une autre manière de contourner la difficulté d’accès aux vinyles halogénés est de réaliser un couplage oxydant entre un amide et une liaison C-H d’alcène. Cette réaction est possible grâce à une catalyse au palladium dans une réaction de type aza-Wacker (Schéma 42).

Schéma 42 : réaction aza-Wacker

La première étape est la coordination de la source de palladium (II) sur l’alcène. Cette espèce coordinée A voit sa densité en électrons π diminuée, ce qui permet l’attaque nucléophile de l’amide conduisant à la formation de l’espèce B. Une élimination syn β-H permet de former l’énamide et libère une espèce de palladium (0) qui est ensuite oxydée par un oxydant externe pour régénérer l’espèce palladium (II).

Le premier exemple de formation d’énamide par couplage oxydant intermoléculaire a été décrit par Murahashi en 1992 grâce à un système catalytique Pd(II)/Cu(II) sous atmosphère d’oxygène.43 La réaction permet d’obtenir les énamides de configuration E avec de bons rendements et une régiosélectivité anti- Markovnikov à partir d’amides et de carbamates cycliques ou acycliques (Schéma 43). La réaction est cependant limitée aux acrylates, énones ou styrènes comme partenaires de couplage.

Schéma 43

Il a ensuite été montré qu’en utilisant des conditions similaires et en ajoutant une base comme la triéthylamine, la réaction permet la formation d’énamides avec une régiosélectivité Markovnikov et de bons rendements (Schéma 44).

Cette régiosélectivité différente s’explique par le mécanisme présenté ci-dessous.44 Le palladium vient se coordiner au styrène pour former l’intermédiaire A. Celui-ci est en équilibre avec deux formes : le produit cinétique B et le produit thermodynamique B’.

En absence de base, la déprotonation est lente. L’équilibre avec l’espèce A favorise la formation du produit thermodynamique B’. En présence de base, la déprotonation rapide et irréversible de l’espèce zwitterionique B cinétiquement favorisée forme l’intermédiaire C qui mène au produit de régiosélectivité Markovnikov après élimination β-H syn. En absence de base, la déprotonation est lente. L’équilibre entre les formes B et B’ se déplace donc en faveur du produit thermodynamique B’. Celui-ci donne l’espèce C’ après déprotonation et l’élimination β-H syn conduit au produit thermodynamique de régiosélectivité anti- Markovnikov.

Schéma 45