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B. Les Alpes Occidentales

3. Paléogéographie au Mésozoïque: rifting et océanisation

Les séries sédimentaires mésozoïques varient depuis les bordures du Massif Central jusqu’à la ligne Insubrienne. Ces variations ont permises d’individualiser des domaines paléogéographiques mésozoïques, avec d’Ouest en Est : le domaine Extra-Alpin, Dauphinois ou Helvétique, Valaisan, Briançonnais et Piémontais.

a) Le domaine Extra-Alpin

Ce domaine désigne la chaine du Jura et la zone molassique périalpine. b) Le domaine Dauphinois

Le domaine Dauphinois (équivalent de l’Helvétique des Alpes Centrales) correspond à un environnement mésozoïque marin dû à une subsidence Jurassique du socle Hercynien (subsidence tectonique durant le rifting puis majoritairement thermique durant l’océanisation). L’épaisseur des séries Liasiques, contrôlée par la mise en place de demi-graben, est fortement variable. On reconnait différentes zones au sein de ce domaine :

(1) Les Massifs Subalpins. Caractérisé par d’épaisses séries (Fig. II-9), pouvant atteindre plus de 6km [Philippe et al., 1998]. On y retrouve fréquemment deux barres calcaires qui structurent le paysage: le Tithonique (Malm) et l’Urgonien (Barrémo-Aptien) (la barre Urgonienne est absente du Bassin Vocontien et du Dévoluy). Il y a les massifs des Bornes, des Bauges, de la Chartreuse, du Vercors, du Diois, des Baronnies, du Dévoluy… Ces zones sont déformées par une série de plis et chevauchments affectant la couverture, décollé au niveau de Trias évaporitique ou du Lias schisteux, parfois dans les Terres Noires (série pélitique carbonée callovo-oxfordienne) [Agard and Lemoine, 2003; Michard et al., 2010].

(2) La zone dauphinoise. Elle correspond à la couverture des massifs cristallins externes (socle antétriasique), dont une grande partie des séries postérieures au Jurassique Moyen ont été érodées. Dans sa partie orientale, les séries sont décollées, notamment au niveau du Roselend Thrust [Beach, 1981c; Ceriani et al., 2001]. On appelle encore zone ultra-dauphinoise ou

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unité des Aiguilles d’Arves les séries transportées par le Roselend Thrust. Elles sont recouvertes par des séries détritiques Priaboniennes : le flysch des Aiguilles d’Arves.

c) Le domaine Valaisan

Petit océan ouvert au crétacé inférieur, il se referme dès le crétacé supérieur [Stampfli, 1993]. Il conduit à l’individualisation du Briançonnais vis-à-vis de la marge européenne. Les incertitudes concernant cet océan résident notamment sur sa poursuite plus au sud, où les affleurements de cette unité disparaissent. Certains sont partisans de sa poursuite [Ceriani et al., 2001], voire de sa présence tout le long de l’arc des Alpes Occidentales [Fügenschuh et al., 1999], d’autres le suppose limité par une zone transformante [Agard and Lemoine, 2003]. Ceci influe sur l’origine du Briançonnais (dans un cas il se soude à la marge européenne dans les Alpes Occidentales, dans l’autre il appartient à la plaque Ibérique).

d) Le domaine Briançonnais

Il s’agit d’un bloc plus ou moins solidaire de la marge européenne, dont les faciès montrent une paléogéographie contrastée, qui se distingue néanmoins de la paléogéographie du domaine Dauphinois. En effet, le Trias Briançonnais y est bien plus développé (sur parfois plus d’un kilomètre) et présente un faciès dit Alpin3, tandis qu’il dépasse rarement plus de quelques centaines de mètre dans le domaine Dauphinois et y présente un faciès dit Germanique4. De plus, la couverture Jurassique-Crétacé du Briançonnais y est très peu épaisse et d’un environnement peu profond, parfois émergé.

(1) La zone Subbriançonnaise. Cette série peu épaisse (< 200m) se reconnait dans les Préalpes, dans les nappes de l’Embrunais-Ubaye et se poursuit depuis le Col du Petit Saint Bernard au Nord jusqu’en méditerranée. Il forme une bande de quelques kilomètres seulement, chevauchant le domaine Dauphinois et chevauché par le Briançonnais. Il est décollé de son substratum le long d’un niveau de gypse dans les couches du Trias supérieur ce qui ne permet pas de reconstituer clairement

3 Dépôt de calcaires et dolomies marines avec intercalations de niveaux gypseux. 4 Dépôt détritiques principalement continentaux (Bundsandstein: Conglomérats et grès de base, puis Muschelkalk : calcaires et dolomies marines puis argiles continentales du Keuper).

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sa pile stratigraphique de base. On n’y observe des séries du Lias, du Dogger, du Malm ainsi que des calcschistes ou des schistes argilo-gréseux Crétacé-Eocène (Fig. II-9).

(2) La zone Briançonnaise. A la base de ces séries, on trouve fréquemment une semelle de Houiller5, décollé de son substrat. Solidaire au dessus de celle-ci, le Permien, caractérisé par une série schisto-gréseuse pouvant être associé à des coulées volcaniques (c'est le cas de la série du Guil par exemple). Toujours solidaire, vient ensuite le Permo-Trias quartzitique, qui termine cette suite essentiellement siliceuse. Au dessus, une suite Triasique carbonatée épaisse avec divers niveaux gypseux forme des horizons de décollement préférentiels. On reconnait deux niveaux gypseux principaux, formant la base de nombreuses nappes: (1) un niveau à la base des calcaires et dolomies Aniso-Ladinienne (interface avec les quartzites), (2) un niveau à la base de dolomies Carnienne. Au dessus, les séries Jurassico-Crétacé sont, comparativement au Trias, très fines, et marquées par des lacunes6 d'extension spatio-temporelle variable selon les endroits. Les calcaires pélagique en plaquette Crétacé supérieur (qui peuvent reposer sur les Quartzites), riche en foraminifères, témoigne d'un environnement marin profond. Finalement, le Briançonnais se termine par une formation de Flysch (dit Flysch Noir) reconnu comme Eocène, dont le toit présente par endroit des olistolithes qui semble syn-tectonique [Barféty et al., 1995]. Les nappes briançonnaises ont été reconnu comme étant chacune le remplissage d'un demi-graben [de Graciansky et al., 1989]. Excepté ces critères communs, les séries sont très différentes selon les nappes. Par endroit, les formations mésozoïques sont ultra-réduites (quelques dizaines de mètres tout au plus, comme dans la zone d'Acceglio), on parle alors de séries ultra-briançonnaises.

e) Le domaine Piémontais

Les Schistes Lustrés, calcschistes et métapélites Crétacé peu fossilifère, caractérise ce domaine. On peut diviser celui-ci en deux ensembles, dont l'un serait la partie orientale du Briançonnais (zone

5 Séries Carbonifères schisto-gréseuses à niveau de charbon 6 Surface d'érosion et hardgrounds.

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II-9 (page suivante): Dynamique sédimentaire, évolution bathymétrique et paléogéographie des Alpes Occidentales. Haut-droite: Logs stratigraphiques localisés sur la figure de gauche. 1-2 [Philippe et al., 1998], 3, 5-6, 9 [Rudkiewicz, 1988], 7-8 [Dumont et al., 2012]. Bas-Gauche: Reconstruction paléogéographique supposée du Subbriançonnais à l’océan Liguro-Piémontais [Agard and Lemoine, 2003]. Bas-droite : Evolution bathymétrique de l’Ardèche au Piémontais du Sinémurien à l’Oxfordien [Roux

Piémontaise) et l'autre reposerait sur de la croûte océanique (zone Liguro-Piémontaise) (Fig. II-9).

(1) La zone Piémontaise. Ces formations, localisées à l'Est du Briançonnais, correspondent à la marge Européenne distale. A la base de cette nappe, des dolomies Noriennes sur lesquelles reposent des séries syn-rift bien développées.

(2) La zone Liguro-Piémontaise. Cette zone est caractérisé par des Schistes Lustrés et des marbres Jurassique supérieur reposant sur des Radiolarites Callovienne à Kimmeridgienne reposant elles-mêmes sur des ophiolites [De Wever and Caby, 1981; De Wever et al., 1987].

Un critère majeur distingue les Alpes Centrales des Alpes Occidentales : outre quelques variations paléogéographiques au sein de la couverture Mésozoïque, les affleurements du Valaisan et de l’Austro-Alpins disparaissent respectivement au niveau de Moûtiers et de Dora Maira. Rien n’indique que les unités Austro-Alpine aient été charriées un jour sur les Alpes Occidentales. A contrario, le Valaisan pourrait se poursuivre plus au Sud [Fügenschuh et al., 1999]. Ainsi, le flysch des Aiguilles d’Arves et le flysch du Cheval noir (le second chevauchant le premier) ont été interprétés comme des séries détritiques de la fosse de subduction de l’océan Valaisan [Ceriani et al., 2001].

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4. Structure actuelle: un empilement de nappes