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Témoins de la tectonique anté-nummulitique20

Les structures au sud du Pelvoux sont clairement anté-nummulitiques et semblent postérieures aux plissements du Dévoluy [Ford, 1996]; elles sont donc probablement associé à la phase Pyrénéo-Provençale. Les autres structures rapportées à cette phase sont moins consensuelles.

[Barbier, 1956; Bravard and Gidon, 1979; Gidon, 1979; Ford, 1996] décrivent une importante phase de raccourcissement N-S à NO-SE antérieur au nummulitique et postérieur aux plissement du Dévoluy, i.e. une phase Pyrénéo-Provençale probablement Lutétienne. C'est l'apparition de galets de socle dans les conglomérats de base du nummulitique qui a permis à [Barbier, 1956] d'associer les plis de la chaîne Arvinche à un soulèvement du socle du massif des Ecrins. L'observation d'une série nummulitique qui semble en discordance sur quelques structures de socle fait dire à [Bravard and Gidon, 1979] que la mise en place des nappes de socle à l'Est du Pelvoux est anté-nummulitique. Ainsi, les nappes de socle de la Meije, du Combeynot et des Grangettes auraient été mises en place durant cette période (Fig. II-68). Par extension, l'ensemble des chevauchements E-W et a pendage sud21 ont été associé à cette phase [Barféty and Gidon, 1990; Pêcher et al., 1992; Sue et al., 1997; Gidon, 1999].

Remise en question de la structuration anté-nummulitique du massif des Ecrins

Néanmoins cette vision des structures est discutée. Ainsi Beach (1981c) et Butler (1992) ont décrit une mise en place de ces nappes lors d'une phase de raccourcissement post-nummulitique. Plus récemment, Dumont et al. (2008, 2011, 2012) ont attribués ces structures à une phase de raccourcissement intermédiaire qui aurait lieu entre le Priabonien et le Rupélien.

Ces derniers travaux semblent en accord avec les travaux de

[Bravard, 1982; Ceriani et al., 2001; Ceriani and Schmid, 2004] qui décrivent des structures chevauchantes à vergence NO syn- à post-nummulitique antérieur aux mouvements vers l'O à SO.

20 Le Nummulitique se dépose du Lutétien au Priabonien (d'Est en Ouest); voir figure I-23.

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Par ailleurs, la base du nummulitique est interprétée comme discordante par certains auteurs [Barbier, 1956] et comme chevauchante par d'autres [Ceriani et al., 2001], pour un même endroit. Cette divergence des points de vue est représentative de la difficulté d'utiliser la base du nummulitique comme marqueur temporel sur la bordure Est du massif des Ecrins.

II-68: Interprétation d'une structuration anté-nummulitique du massif des Ecrins d'après [Bravard et Gidon, 1979]

(c) Cinématique

Un autre moyen de contraindre l'histoire du raccourcissement et d'analyser l'histoire cinématique du massif des Ecrins. Néanmoins, l'hétérogénéité spatiale d'une même phase de raccourcissement ainsi que les difficultés liées aux transferts d'échelles ont conduit là encore à des interprétations divergentes (Fig. II-69).

Lorsque l'on regarde la synthèse de la chronologie des directions de raccourcissement (Fig. II-69), on constate la présence de différents points de divergence.

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II-69: Déformations: chronologie du raccourcissement dans la zone externe autour du massif des Ecrins selon différents auteurs.

Par exemple, le début des déformations dans la zone externe est incertain: certains auteurs proposent qu'elles débutent dès le Crétacé tandis que d'autres font débuter les premières déformations vers la limite Eocène-Oligocène (Fig. II-69).

Par ailleur, alors que la direction de raccourcissement antérieure à l'Oligocène semble globalement N-S, la direction de raccourcissement de la zone externe post-nummulitique semble bien plus incertaine (Fig. II-69).

Ces différences dépendent notamment de l'hétérogénéité des directions de raccourcissement lors d'une même phase de déformation (raccourcissement NO-SE au nord et NE-SO au sud), mais pas seulement. Ainsi la zone sud de l'ultra dauphinois a été décrite comme résultant d'une direction de transport NO-SE par certains et NE-SO par d'autres (Fig. II-69).

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Une déformation par étape ou continue ?

Classiquement, les déformations à vergence N, S et SO ont été associées à une phase Pyrénéo-Provençale et les déformations à vergence NO, O et SO à une phase Alpine (Fig. II-69). Ces deux phases étaient classiquement séparé par une période de sédimentation nummulitique où les déformations étaient tout au plus extensive [Lami, 1988].

Néanmoins, il a été plus récemment décrit une phase de déformation à vergence N à NO affectant les séries nummulitiques [Bravard, 1982; Ceriani et al., 2001, 2003; Dumont et al., 2008, 2011, 2012]. Cette phase de déformation a été décrite comme la continuité entre le raccourcissement Pyrénéo-Provençale et Alpin et refléterait une rotation antihoraire de la plaque Apulienne [Dumont et al., 2011, 2012].

Cependant, les datations de [Simon-Labric et al., 2009] sur des décrochements -censé représenter un raccourcissement E-W- fournissent une plage chronologique (34-27Ma) qui est la même que pour le raccourcissement NO-SE post-nummulitique décrit précédemment (34-32Ma).

Il est donc nécessaire d'établir la chronologie de ces deux directions de raccourcissement. Nous allons pour cela dater par des mesures radiochronologies des structures inverses à vergence NO et O. Si leur synchronicité apparente est avérée, cela témoignera d'un fort partitionnement au sein de l'orogène et il sera nécessaire de revoir les modèles cinématiques pré-existants.

Une déformation en séquence ?

Alors que les déformations autour du front pennique sont datées du Rupélien [Sinclair, 1997b; Simon-Labric et al., 2009], les déformations du Vercors et de la Chartreuse datent du Langhien [Clauzon, 1990]. Les déformations sont-elles continues et en séquence d'Est en Ouest ? Les déformations miocènes du Mont Blanc et de l'Aar laissent penser qu'il en va de même pour Belledonne Sud, ce qui serait en accord avec une telle hypothèse. Néanmoins la nappe de Digne ne montre pas de déformations significatives entre 25 et 13Ma.

Il est donc nécessaire de contraindre la répartition chronologique des déformations. Nous allons pour cela dater les déformations le long d'une

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coupe E-W. L'objectif est de définir une éventuelle propagation continue des déformations d'Est en Ouest.

Quel âge pour les structures E-W ?

Les structures (de socle ou de couverture) orientées E-W ont donc été supposée Crétacé, Eocène ou Oligocène et témoignant d'un raccourcissement à vergence N, NO ou O (composante décrochante). Ces structures semblent (au moins en partie) être héritées de l'extension liasique [Sue et al., 1997].

Il est donc nécessaire de contraindre l'histoire de ces plans de faille. Une analyse approfondie des critères cinématiques dans l'environnement de ces structures devrait nous aider à contraindre leur histoire. L'objectif étant de savoir si l'orientation E-W de ces structures est réellement due à un raccourcissement N-S à NO-SE où si il s'agit d'une réactivation de failles héritées du rifting Liasique lors du raccourcissement principal du massif des Ecrins.

Quelle direction de raccourcissement pour la déformation post-nummulitique ?

Enfin, il existe de grosses incertitudes sur la distribution des directions de raccourcissement dans le massif des Ecrins lors de la phase post-nummulitique. Un raccourcissement E-W, NO-SE, NE-SO ont été invoqué, parfois sur de mêmes structures (cas de l'ultradauphinois, [Gamond, 1980; Beach, 1981; Bravard et al., 1982]. Une des raisons est que la plupart des données cinématiques proviennent de la couverture. Hors, la couverture s'est déformée de manière ductile ce qui peut rendre plus complexe l'identification des directions de raccourcissement et de transport régional. Par ailleurs, il semble que la bordure Est du massif des Ecrins présente une part importante de transpression.

Il est donc nécessaire de bien comprendre la répartition de la déformation à des échelles incrémentales. Nous allons pour cela réaliser une analyse cinématique sur l'ensemble du socle du massif des Ecrins. L'objectif sera de contraindre la distribution des directions de raccourcissement local pour permettre un transfert vers la chronologie des directions de transport régional.

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c) Condition du métamorphisme

(a) Chemin P-T-t-d

Il serait intéressant de déterminer les conditions métamorphiques de la déformation, et éventuellement de confirmer sa nature prograde (ce que semble confirmer les datation de [Simon-Labric et al., 2009]) ou rétrograde (ce qui est le cas pour l'ensemble des autres massifs cristallins externes). Néanmoins, les paragenèses alpines des zones de déformation sont pauvres (chlorite, phengite majoritairement).

Il faut estimer les conditions métamorphiques de la déformation. Nous allons pour cela utiliser le couple chlorite-phengite, reconnu pour être un couple témoignant des conditions géothermobarométriques. De plus, la phengite est un minéral qui peut-être daté à l'aide de la méthode Ar/Ar, méthode que nous allons utiliser. L'objectif est de déterminé le trajet P-T-t-d P-T-t-des unités P-T-t-de socle.