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2c) Pénétration du champ électrique et flux d’ions et d’ENA précipitant sur Mars

Chapitre 2 Modélisation de l’exosphère et son interaction avec le vent solaire en période

II. 2c) Pénétration du champ électrique et flux d’ions et d’ENA précipitant sur Mars

Comme nous l’avons vu le rôle du champ électrique convecté par le vent solaire (équation 1.11) est crucial dans l’interaction du vent solaire avec Mars. Les trajectoires et l’accélération des ions O+ sont fortement influencées par ce champ électrique. La pénétration du champ électrique aux basses altitudes (là où la production ionique est la plus importante) va donc jouer un rôle primordial dans le criblage de l’atmosphère de Mars par les ions et ENA réimpactant l’exobase et dans l’échappement ionique. La figure 2.6 représente l’amplitude du champ électrique de convection dans le plan équatorial de Mars, obtenu en utilisant les couronnes d’oxygène et d’hydrogène présentées sur la figure 2.2 en période de minimum (2.6a) et de maximum d’activité solaire (2.6b). Un pixel représente 300 km. Nous constatons sur cette figure que le champ électrique pénètre moins profondément (d’environ 300 km) en maximum d’activité solaire qu’en minimum d’activité solaire. Cet effet peut s’expliquer par une plus grande production d’ions en maximum solaire (Tableau 2.5) et donc un effet de mass-loading (alourdissement) du vent solaire plus important. Le mass-loading entraîne par conservation de la quantité de mouvement un ralentissement plus important et donc une pénétration moins grande du vent solaire dans l’atmosphère de Mars. La conséquence de ce résultat est que les rayons de giration des ions O+, proportionnels à leur énergie et donc au champ électrique ressenti, seront plus faibles, au voisinage de la planète, en maximum d’activité solaire qu’en minimum d’activité solaire. C’est ce qu’illustrent les trajectoires d’ions O+ représentées à la figure 2.6.

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IG. 2.6 – Amplitude du champ électrique de convection au voisinage de Mars, en minimum d’activité solaire (a) et en maximum d’activité solaire (b). Le cercle orange représente l’altitude 300 km au-dessus de Mars. En blanc sont représentés des exemples de trajectoire d’ions O+. On constate que la région de pénétration du champ

électrique (coté jour à gauche) est repoussée de 300 km (1 pixel) en période de maximum d’activité solaire par rapport au minimum d’activité solaire. (Chaufray et al. 2007a)

Par conséquent, la proportion d’ions O+ créés, impactant la planète sera plus faible en maximum d’activité solaire qu’en minimum d’activité solaire comme le montre le tableau 2.6

dans laquelle est indiquée les flux d’ions O+ et d’ENA réimpactant l’atmosphère à 300 km, ainsi que le rapport entre le flux précipitant et la production d’ions O+ et d’ENA.

Ces résultats confirment l’hypothèse déjà suggérée par Johnson et Luhmann (1998) qu’une augmentation de la densité exosphérique va augmenter l’altitude minimale au-dessus de laquelle, les ions qui peuvent réimpacter l’atmosphère avec suffisamment d’énergie, sont produits. Pour résumer la densité d’oxygène a deux effets opposés sur les flux d’ions (et d’ENA) réimpactant l’atmosphère :

- Elle augmente la quantité d’ions O+ exosphériques produits donc susceptibles de réimpacter la planète.

- Elle protège l’atmosphère en ralentissant le vent solaire à des altitudes plus hautes et donc réduira le flux de particules énergétiques réimpactant l’atmosphère.

Minimum d’activité solaire Maximum d’activité solaire

O+ 1.6x1024 5.2x1024

% de la production totale 84 57

ENA 1.1x1022 3.6x1023

% de la production totale 64 60

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AB. 2.6 – Flux d’ions O+ et d’ENA impactant l’atmosphère de Mars à 300 km et rapport entre la quantité de particules (O+ ou ENA) impactant et la production totale.

Cette étude est une première étape dans la compréhension de la dépendance des flux d’ions et d’ENA réimpactant l’atmosphère en fonction de l’activité solaire. Cependant plusieurs améliorations et études supplémentaires pourraient être réalisées pour approfondir ce résultat. Cette étude a été réalisée dans le cas d’un vent solaire « standard », un vent solaire plus rapide augmenterait la pression dynamique du vent solaire (ρVSWρ est la densité de masse du vent solaire) et donc pénétrerait plus profondément dans l’atmosphère de Mars, comme cela a été observé par l’instrument ASPERA-3 sur Mars Express (Dubinin et al. 2006 ; Lundin et al. 2006). Ma et al. (2007) ont simulé l’effet d’un sursaut solaire et montré que l’échappement ionique était fortement influencé par la pression dynamique du vent solaire. D’autre part, comme je l’ai déjà écrit, la résolution spatiale du code hybride est de 300 km, ce qui correspond à la différence d’altitude observée de la région de pénétration du champ électrique entre la période de maximum d’activité solaire et la période de minimum d’activité solaire. Une résolution spatiale de 150 km envisageable avant la fin de l’année 2007 pourrait améliorer cette étude. L’utilisation d’une grille sphérique ou d’une grille cartésienne non uniforme dans le code hybride nécessite un travail lourd sur l’algorithme, en particulier dans le calcul du terme rot(B), intervenant dans les équations de Maxwell, qui nécessite de modifier l’algorithme (en sphérique) et/ou les conditions aux interfaces (en sphérique et avec une grille cartésienne non uniforme). Une telle modification est actuellement non envisageable (R. Modolo, communication personnelle).

Les flux globaux (O ENA et ions O+) réimpactant l’atmosphère sont donnés dans le tableau 2.7

2.2 Résultats du modèle Particules de basse énergie (< 500 eV) Particules de hautes énergies (> 500 eV) Minimum solaire 1.6×1024 3.6×1022 Maximum solaire 5.3×1024 1.4×1023

T

AB. 2.7 – Flux d’oxygène réimpactant l’atmosphère de Mars en minimum et maximum solaire. Les flux sont donnés en s-1

Dans la suite, je ne ferai plus la distinction entre ions O+ et O ENA car notre modèle ne permet pas de décrire correctement la trajectoire des ions au-dessous de 300 km. Je fais donc l’hypothèse que tous les ions O+ sont neutralisés à 300 km par échange de charge. Cette hypothèse ne devrait pas avoir une influence importante sur les résultats présentés ci dessous car la densité en oxygène froid augmentant rapidement lorsqu’on descend dans l’atmosphère, on s’attend à ce que la forme neutre des particules précipitant domine effectivement vers 200 km (Barabash et al. 2002). Entre 300 et 200 km la trajectoire des ions peut alors être assimilée à une droite.

La distribution spatiale des flux impactant n’est pas uniforme. On s’attend à une forte asymétrie à cause du champ électrique convectif comme le montre l’allure des trajectoires représentées sur la figure 2.6. La figure 2.7 représente la distribution spatiale du flux précipitant en fonction de la latitude et du temps local. Dans cette étude, nous avons négligé l’obliquité du champ magnétique, la seule asymétrie induite par le champ électrique est donc celle dirigée selon l’axe matin/soir c’est pourquoi, pour chaque latitude, le flux moyen entre l’hémisphère nord et l’hémisphère sud à été utilisé, ce qui explique la symétrie parfaite par rapport au plan équatorial. J’ai distingué deux groupes de particules, les particules de faible énergie ( < 500 eV) (Figure 2 .7a, 2.7b) et les particules de haute énergie (> 500 eV). (Figure 2.7c , 2.7d).

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IG. 2.7 – Distribution spatiale des flux de particules (O+ et O) précipitant à 300 km d’énergie comprise entre 0 et 500 eV (a, b) et entre 500 et 20 keV (c,d), en minimum d’activité solaire (a,c) et en maximum d’activité solaire (b,d). Le point subsolaire se trouve au centre de la figure. (Chaufray et al. 2007a). La distribution du flux des particules de faible énergie est peu influencée par le champ électrique convectif, tandis que la forte asymétrie

matin/soir observée dans la distribution du flux des particules énergétiques résulte de la direction du champ électrique convectif. (Voir aussi les trajectoires des particules représentées sur la figure 2.6)

On constate que la position du pic diffère selon le groupe considéré. Pour les particules de basse énergie, le pic du flux de particules précipitant se trouve au voisinage du point subsolaire. Il est dominé par les particules d’énergie comprise entre 0 et 30 eV, comme le montre la distribution en énergie représentée sur la figure 2.8. Les pics de production d’ions O+ par photoionisation et par échange de charge avec les protons planétaires se trouvent à basse altitude. Les ions produits au voisinage du point subsolaire, à basse altitude n’ont pas le temps d’acquérir suffisamment d’énergie pour éviter l’obstacle martien ce qui explique ce pic au point subsolaire. Pour les particules de haute énergie (Figure 2.7c et 2.7d), le pic du flux précipitant se trouve du côté après midi vers 18 h. Ce pic est dû à l’asymétrie du champ électrique, qui, du côté matin a tendance à entraîner l’échappement des particules, tandis que du côté soir, il entraîne les particules vers l’atmosphère (Figure 2.6a).

Les distributions en énergie des flux réimpactant l’atmosphère, pour les particules de faible énergie et les particules de hautes énergies, représentées sur la figure 2.8, montrent que la forme des distributions est similaire en minimum et en maximum d’activité solaire. Pour les particules de haute énergie, j’ai aussi représenté la distribution obtenue par Luhmann et al. (1992) à partir des résultats de Zhang et al. (1993a) déjà évoqué en minimum d’activité solaire. La forme est identique, par contre l’amplitude du flux incident est plus faible dans notre modèle quelle que soit l’activité solaire (facteur 3 en maximum solaire) que celui de Luhmann et al., mais s’étend plus loin en énergie. Pour les particules à haute énergie, on a

2.2 Résultats du modèle

environ un facteur 4 en amplitude entre la période de minimum d’activité solaire et la période de maximum d’activité solaire.

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IG. 2.8 – Distribution en énergie des flux de particules (O+ et O) précipitant à 300 km d’énergie comprise entre 0 et 500 eV (à gauche) et entre 500 et 20 keV (à droite). Les courbes en traits continus représentent les flux en minimum d’activité solaire et les courbes en traits discontinus. A droite, la courbe supérieure représente le profil

en énergie obtenu par Luhmann et al. (1992) en période de faible activité solaire. (Chaufray et al. 2007a)