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Plusieurs mécanismes ont été identifiés comme susceptibles de provoquer une érosion de l’atmosphère. Ces processus peuvent être classés en deux groupes: les mécanismes d’échappement thermique et les mécanismes d’échappement non-thermiques (Chassefière et Leblanc 2004).

Les mécanismes d’échappement

- Les mécanismes d’échappement thermique o L’échappement de Jeans

Deux types de mécanismes d’échappement thermique existent ou ont pu exister sur Mars, l’échappement de Jeans et l’échappement hydrodynamique.

A très haute altitude (au-dessus de l’exobase à 200 km d’altitude), les particules ne subissent plus de collision du fait de la raréfaction du milieu (ce point sera approfondi dans le chapitre 1). Elles ont donc des trajectoires balistiques. Les particules à l’exobase ayant une vitesse supérieure à la vitesse d’échappement et dirigée vers le haut s’échappent vers le milieu interplanétaire : c’est l’échappement de Jeans (Jeans 1916). La queue de la distribution des vitesses à l’exobase se vide lentement des particules les plus énergétiques et se repeuple via les collisions.

La formule de Jeans qui peut se retrouver à partir de la théorie de Chamberlain (Annexe A) permet d’estimer le flux d’échappement à l’exobase.

) exp( ) 1 ( 2 exo exo th exo Jeans u n F λ λ π + = (0.1)

λexo est le paramètre d’échappement donné par :

exo exo exo r kT GMm = λ (0.2)

nexo la densité de l’espèce considérée à l’exobase, uth la vitesse la plus probable donnée par :

m kT u exo th 2 = (0.3)

m la masse de l’espèce considérée (1.67x10-27 kg pour l’hydrogène), M la masse de la planète

considérée (6.4x1023 kg pour Mars), Texo la température à l’exobase (~200-300 K sur Mars),

rexo = Rp + zexo, la distance de l’exobase par rapport au centre de la planète (Rp est le rayon de la planète ~3400 km pour Mars et zexo l’altitude de l’exobase ~200 km sur Mars).

λexo est proportionnel à la masse. Appliqué à Mars, ce mécanisme est important uniquement pour les espèces légères (H, H2, D). Typiquement pour l’hydrogène, pour une densité nexo= 2.7x104 cm-3 et une température de 350±100 K (ce sont les valeurs estimées par les missions Mariner 6 et 7 ; voir chapitres 3 et 6), on trouve un flux d’échappement de 1.6x108 cm-2.s-1, si l’on suppose le flux d’échappement uniforme à l’exobase, on obtient un taux d’échappement total de 2.6x1026 s-1 (avec une exobase située à 250 km).

A titre de comparaison pour l’oxygène, pour une densité à l’exobase de 1x107 cm-3 et une température de 350 K, on aurait un flux d’échappement de 6.6x10-16 cm-2.s-1 !!

L’échappement de Jeans est très sensible à la température à l’exobase. Nous reviendrons sur ce point dans le chapitre 6.

o L’échappement hydrodynamique

La théorie de l’échappement hydrodynamique de l’hydrogène entraînant les espèces plus lourdes a été développée par Hunten (1973) et appliquée au fractionnement isotopique par Zahnle et Kasting (1986) et Hunten et al. (1987). Cet échappement correspond au cas limite

de l’échappement thermique lorsque le paramètre d’échappement devient proche de 1. (< 1.5 pour une espèce atomique ; Watson et al. 1981). La distribution des vitesses à l’exobase se dépeuple rapidement et n’a pas le temps de se repeupler par collision sur des échelles de temps courtes. Cet échappement a pu être important au tout début de l’histoire de Mars lorsque son atmosphère primitive était riche en hydrogène (Chassefière et Leblanc 2004).

- Les mécanismes d’échappement non thermique o Bombardement météoritique

Le bombardement qu’a connu Mars pourrait avoir provoqué un échappement important de l’atmosphère martienne (Melosh et Vickery 1989). Les grands impacts de cratère à la surface de Mars montrent que ce mécanisme a été important durant le Noachien.

Actuellement le taux d’impact est beaucoup plus faible que durant le Noachien et ce mécanisme n’a plus d’influence majeure sur l’atmosphère de Mars.

On note que dans ce processus il n’y a pas de fractionnement selon la masse. C’est donc un bon candidat pour expliquer la perte du CO2 de Mars.

Plusieurs mécanismes actuels sont à l’origine d’un échappement non-thermique (échappement des populations chaudes qui ne sont pas en équilibre avec le milieu ambiant). Ces mécanismes seront décrits en détails dans les chapitres suivants en voici cependant une description rapide :

o L’ échappement chimique

Certaines réactions chimiques exothermiques produisent des atomes avec un excès d’énergie cinétique allant peupler l’exosphère. Une partie des atomes chauds créés a une énergie suffisante pour s’échapper dans le milieu interplanétaire. C’est le cas, en particulier, pour les réactions se produisant au voisinage de l’exobase où les densités ioniques restent suffisamment abondantes pour créer des particules chaudes et où le nombre de collisions est suffisamment faible pour que cette population chaude créée ne soit pas thermalisée par des collisions avec l’atmosphère environnante. Ces réactions chimiques sont les principales sources d’échappement actuels pour les espèces lourdes comme C, N, O. Ces mécanismes sont importants sur Mars à cause de sa faible gravité.

Les trois mécanismes d’érosion suivant pourraient être particulièrement important sur Mars à cause de l’absence d’une magnétosphère permanente de type terrestre.

o L’échappement ionique

On distingue généralement deux types d’échappement ionique (Chassefière et Leblanc 2004). L’échappement d’ions exosphérique : Ces ions (principalement H+ et O+) sont formés à partir de la composante neutre exosphérique, sont accélérés par le vent solaire et acquièrent une énergie suffisante pour s’échapper dans le milieu interplanétaire.

L’échappement ionosphérique. Dans ce cas, ce sont les ions produits dans la basse ionosphère (au-dessous de l’exobase) qui atteignent l’exobase par diffusion, sont accélérés par le vent solaire (principalement : O2+, CO2+ et O+) et s’échappent dans le milieu interplanétaire. Ce mécanisme sera brièvement évoqué dans le chapitre 1 mais il n’est pas l’objet de ce travail de thèse.

Seul l’échappement d’ions a été mesuré actuellement (Lundin et al. 1989 ; Verigin et al. 1991 ; Barabash et al. 2007)

Les mécanismes d’échappement

o Le criblage

C’est le dernier mécanisme d’érosion important de l’atmosphère de Mars (Haff et al. 1978). Une partie des ions accélérés par le vent solaire ne s’échappe pas mais, à cause de leur rayon de giration proche du rayon de Mars, réimpacte l’atmosphère de Mars. Ils transfèrent alors une partie de leur énergie aux espèces présentes au voisinage de l’exobase et provoquent la dissociation des espèces moléculaires et un échappement sous forme atomique (C, N O, Ar) (Johnson 1990 ; 1994). Ce mécanisme sera décrit en détail dans le chapitre 1.

Nous voyons, à travers ces mécanismes d’échappement le rôle clef de l’exosphère. Sa température et sa densité donnent des informations essentielles pour évaluer l’échappement d’hydrogène dans le milieu interplanétaire. Sa formation en composants lourds non-thermiques permet d’évaluer l’importance de l’échappement non-thermique dû aux processus photochimiques, enfin son rôle majeur dans l’interaction directe avec le vent solaire permet d’évaluer la formation du choc planétaire, le rôle des champs crustaux et surtout l’échappement non-thermique ionique et de l’échappement résultant du criblage.

Dans le premier chapitre, je donnerai une présentation générale de la structure de la haute atmosphère de Mars et de son interaction avec le vent solaire. Dans le second chapitre, je présenterai les résultats théoriques de cette thèse sur la formation de la couronne d’oxygène, de son interaction avec le vent solaire et de l’échappement d’oxygène (effectué en collaboration avec R. Modolo et G.M. Chanteur du CETP). Dans le chapitre trois, les observations des émissions UV de la haute atmosphère, dont l’étude permet d’extraire des informations sur la densité et la température exosphérique, seront décrites ainsi que l’instrument SPICAM-UV à bord de Mars-Express qui effectue de telles observations. Dans le chapitre 4, je décrirai le transfert de rayonnement et les modèles utilisés pour étudier les raies exosphériques. Enfin les deux derniers chapitres présentent les résultats obtenus grâce à l’étude de la raie Lyman-α de l’hydrogène (chapitre 5) et le triplet à 130.4 nm de l’oxygène (chapitre 6).

Chapitre 1 : La haute atmosphère martienne et