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Chapitre 1: Etat des connaissances et Problématique

1.2. Fer dans les sols

1.2.2. Oxydes et oxyhydroxydes du fer, leurs places et leurs réactivités dans les sols

1.2.2.1.Différents types d’oxydes et oxyhydroxydes

Parmi les différents oxyhydroxydes et oxydes de fer présents dans l’environnement terrestre, six sont plus fréquents : l’hématite, la goethite, la lépidocrocite, la ferrihydrite, la maghémite, la magnétite. L’hématite, la magnétite et la maghémite font partie du groupe des oxydes, alors que la goethite, la lépidocrocite, la ferrihydrite sont des oxyhydroxydes et hydroxydes de fer.

Dans les sols, les oxyhydroxydes et oxydes de fer peuvent être soit sous forme bien cristallisée comme la goethite (λ-FeOOH) ou l’hématite (λFe2O3), soit sous forme peu cristallisée comme la ferrihydrite (5Fe2O3, 9H2O), la lépidocrocite (γ-FeOOH), soit sous forme mal cristallisée comme la magnétite (Fe3O4) ou la maghémite (γFe2O3). Leur degré de cristallinité dépend de leur condition de formation et de stabilité (Cornell & Schwertmann, 1996).

La lépidocrocite et la ferrihydrite ont des produits de solubilité plus élevés que ceux de la goethite et de l’hématite et sont donc moins stables dans le sol (Tableau 1.2).

La goethite et l’hématite sont l’oxyhydroxyde et l’oxyde de fer dominants des sols étudiés dans cette thèse.

Tableau 1.2 : Propriétés générales des principaux oxydes et oxyhydroxydes de fer d’après Cornell &

Schwertmann, (1996) avec pFe=-log[Fe].

Hématite λ-Fe2O3 42-43 Trigonal

Maghémite γ-Fe2O3 40 Cubique ou Tétragonal

Magnétite Fe3O4 - Cubique

Goethite λ-FeOOH 40-44 orthorhombique

Lépidocrocite γ-FeOOH ~42 orthorhombique

Ferrihydrite 5Fe2O3, 9H2O 38-39 hexagonal

Nom de l'oyde Formule Produit de solubilité (Kso) = pFe+3OH

Système Cristallographique

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Goethite (λ-FeOOH)

La goethite, de couleur brun jaunâtre, est l’oxyde le plus représentatif des sols. C’est pourquoi elle est synthétisée et plus utilisée dans les expériences en laboratoire (Schwertmann & Cornell, 2000). Elle cristallise dans le système orthorhombique et participe à la coloration des sols. On la rencontre sous tous les climats et dans tous les sols, mais surtout dans les sols de bas versant. Elle résulte d’une hydrolyse lente aux dépens d’ions ferriques et en présence de matières organiques complexantes. Si l’hydrolyse se fait rapidement, on assiste à la formation de ferrihydrite ou d’hématite (Herbillon, 1994). Elle se présente sous forme de cristaux généralement aciculaires et allongés.

Hématite (λ-Fe2O3)

Comme la goethite, l’hématite est très répandue, surtout dans les sols de plateau. De couleur rouge vive, elle cristallise dans le système Triclinique. On la trouve dans les milieux neutres à saisons contrastées et chaudes. Contrairement, à la goethite, l’hématite résulte d’une cristallisation rapide des oxydes de fer altérés par l’eau ou par l’eau riche en matières organiques. Néanmoins, le passage d’une forme à l’autre s’observe surtout dans les sols ferralsols (FAO, 1998) ou ferrugineux résultant soit de la déshydratation de la goethite, soit de la déferrification de l’hématite (Cornell &

Schwertmann, 1996).

Lépidocrocite (γ-FeOOH)

La lépidocrocite, de couleur orangée, est présente fréquemment dans les sols hydromorphes et provient de l’oxydation d’hydroxydes ferreux. Elle est plus soluble que la goethite et peut aussi se transformer en goethite (Schwertmann & Cornell, 2000).

Ferrihydrite (5Fe2O3, 9H2O)

Quant à la ferrihydrite, de couleur brun rougeâtre, elle se trouve surtout dans les eaux de drainage des sols hydromorphes acides et riches en matières organiques.

La lépidocrocite et la ferrihydrite ont été fréquemment observées dans les sols de bas-fonds (Schwertmann & Cornell, 2000).

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Magnétite (Fe3O4) et Maghémite (γ-Fe2O3)

Ce sont deux oxydes ferromagnétiques non observés (magnétite) ou plus rarement (maghémite) dans ces travaux.

La magnétite, de couleur noire, provient de l’altération des roches volcaniques ou basiques. On la trouve dans les andosols, les ferralsols (FAO, 1998); mais, elle se transforme très souvent en goethite par dissolution.

La maghémite, de couleur brun rougeâtre, fréquente sous les climats tempérés, cristallise dans le système cubique et provient soit des roches ignées basiques, soit de l’oxydation de la magnétite en condition aérée, soit de la déshydratation de la lépidocrocite, soit enfin de la transformation de certains oxydes en présence de matières organiques (Schwertmann & Cornell, 2000).

1.2.2.2.Propriétés de surface

Dans les sols, les oxydes, hydroxydes et oxyhydroxydes de fer sont en général plus abondants que les oxydes d’aluminium, et jouent un rôle très actif dans la pédogénèse en participant à l’assemblage des argiles en agrégats. Ils peuvent se comporter comme des colloïdes à charges électropositives et assurer un rôle de support d’adsorption ou de ponts entre la matière organique et les argiles. Par leur nature chimique et leurs propriétés de surface, les oxydes de fer influencent la structure et la formation des sols (Herbillon, 1994).

A l’état amorphe, quand ils sont fixés sur les argiles, ils jouent un rôle spécifique dans l’insolubilisation de la matière organique et la formation de l’humine. A l’état ionique, ils interviennent dans le comportement physico-chimique du complexe d’altération et, peuvent, dans certain cas, influencer la capacité d’échange.

Dans les profils de sols tropicaux, la distribution des oxydes de fer (en particulier de la goethite et de l’hématite) se fait selon la topographie et l’hydromorphie du milieu. Ainsi, l’hématite, de couleur rouge vive, abonde plus dans les sols de plateau, bien drainants, que dans les sols de bas de versant où domine la goethite. L’hématite peut se dissoudre en priorité, contribuant au jaunissement des sols. Elle va pouvoir reprécipiter dans les horizons plus profonds, à proximité des nappes, participant à la formation d’horizon d’accumulation (plinthite) (Tardy, 1993; Quantin et al., 1997).

Par les différentes couleurs de leurs pigments, les oxydes de fer sont responsables de la coloration des sols, surtout dans les milieux pauvres en matières organiques. Les variations de couleurs liées à la nature, à la répartition des oxydes dans les horizons des sols sont indicatrices de l’origine, de

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l’évolution des sols, et jouent un rôle important dans leur dénomination et classification (Schwertmann & Taylor, 1977).

Les oxydes de fer sont des minéraux de très petites tailles, pouvant atteindre quelques centaines d’Angström. Ils présentent une grande surface spécifique de 60 à 600 m2g-1 (Herbillon, 1994). La substitution isomorphique du fer est l’une des raisons de la stabilité des oxydes.

Ainsi, comparativement à une goethite pure, une diminution de la quantité du fer libéré est observée dans la goethite substituée (par Mn-; Co- ; Al-) (Jeanroy et al., 1991; Bousserrhine et al., 1999). Tout comme les oxydes d’aluminium, les oxydes de fer sont amphotères, c'est-à-dire capables de porter une charge positive jusqu’à leur point isoélectrique (pH 7 ou 8) et une charge négative au delà de pH 8 ou 9.

Ce sont des colloïdes à charges variables impliquées dans les phénomènes d’adsorption spécifique de cations (Cu2+, Zn2+, Cr3+, Cd2+, Co2+,…), d’anions (phosphates, sulfates, anions organiques,…) ou de molécules neutres (Figure 1.2). Ces charges sont liées aux paramètres de la solution (pH, nature et concentration en électrolytes) avec laquelle ils s’équilibrent. Les réactions d’échanges, et surtout d’adsorption spécifique à la surface des oxydes de fer, jouent un rôle important dans la nutrition minérale des plantes et dans la dépollution. Ce qui fait des oxydes de fer des épurateurs efficaces des solutions de sols.

Figure 1.2 : Schéma réactionnel des oxydes de fer, états et propriétés d’échange. Les traits verticaux

représentent la surface d’un oxyde de fer avec des charges : positives (+) en milieu acide (a), neutres (O) au point isoélectrique à pH 8-9 (b) et négatives (-) en milieu alcalin (c) d’après Herbillon, (1994), Berthelin et al., (2005)