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3.3 Autres Substrats

3.3.2 Oxyde de magnésium

MgO est souvent considéré dans la littérature comme un substrat idéal pour l’épitaxie du NbN [3, 99, 100]. Leurs paramètres de maille sont proches : 7 % de désaccord de paramètre de maille théorique. La structure cubique de MgO permet de s’affranchir de la problématique des variants des substrats hexagonaux. Malheureusement, la très forte hygroscopie de MgO demande des précautions drastiques quant à son utilisation. Les substrats doivent se trouver constamment sous atmosphère protectrice : une enceinte sous vide comme un dessiccateur avec des sels déshydratants pour absorber l’humi-dité, par exemple. Même après dépôt, la face arrière des échantillons n’est pas protégée. Ces contraintes se retrouvent elles aussi pour l’intégration des films dans des dispositifs. Durant les opérations de lithographie par exemple, les portions de matériaux de nouveau à nu après érosion retrouvent leurs pro-priétés hygroscopiques. Malgré ces problèmes, de nombreuses études portent sur les dépôt de NbN sur MgO par la technique PVD, la structure cubique de MgO permettant de stabiliser la phase δ-NbN [99, 140, 88]. Par conséquent, MgO peut être utilisé en tant que matériau modèle pour l’épitaxie de NbN

sur substrat cubique.

Caractéristiques des dépôts

Les substrats utilisés ici sont des substrats monocristallins de MgO orien-tés (100). Ils ont une épaisseur de 800 µm et sont polis sur une seule face.

Figure3.37 – Diffractogrammeθ/2θd’une couche de NbN déposée sur MgO. La figure 3.37 montre le diffractogrammeθ/2θd’un film de NbN de 70 nm d’épaisseur réalisé à 1000°C. Le diffractogramme ne montre aucune autre orientation que δ-NbN (200), (400) et MgO (200), (400). Par conséquent, le NbN adopte la direction cristalline du substrat MgO et il n’y a pas de polycristal. Le paramètre de maille du NbN est 4,355 Å, celui de MgO 4,21 Å, soit 4,4% de désaccord de paramètre de maille.

La figure 3.38 montre que le film élaboré est granulaire. Il est constitué d’une multitude de grains à faces carrées de 80 à 100 nm de coté. Tous les carrés ne sont pas bien orientés les uns par rapport aux autres. Malheureu-sement, aucune analyse hors plan n’a été effectuée. L’architecture granulaire suppose que les joints de grains ne sont pas très denses. La désorientation dans le plan des grains est visible et conséquente. Ceci est peut être du à de mauvaises conditions de stockage des substrats ou bien à une instabilité entre le substrat et l’atmosphère réactionnelle. Par exemple, à des températures supérieures à 500°C, le MgO commence à former MgCl2 (s) + H2O (g) en présence d’HCl (g).

Figure 3.38 – Image MEB de la surface d’une couche de NbN déposée sur MgO.

Préparation MET atypique

La forte hygroscopie de MgO est très utile pour la préparation d’échan-tillons MET. Cette préparation ne semble pas avoir été répertoriée dans la littérature. Elle ne demande pas beaucoup de matériel et présente un gain de temps considérable comparé aux préparations classiques comme la tripode ou la lame FIB.

Il est possible de réaliser des échantillons MET en décollant tout sim-plement le NbN du MgO. Cette préparation s’appuie sur la dissociation du MgO en milieu acide :

2 acCOOH + MgO 2 acCOO + Mg2+ + 2 H2O

Mode opératoire : il faut utiliser un bain d’acide acétique glacial 99,7%, porté à ébullition. Une fois l’échantillon trempé dans le bain, en moins d’une minute, le film de NbN se détache de la surface du MgO. Il faut alors récu-pérer avec précision le film flottant à l’aide d’une grille de MET (espacement 500 µm) avant qu’il ne se replie sur lui même (une à deux minutes). L’opacité du NbN permet de le repérer facilement. Pour rappel, le film de NbN a une épaisseur de 70 nm, il est donc transparent aux électrons.

L’acide acétique a été sélectionné car c’est un acide faible qui suffit à dissoudre le MgO. Cela permet de préserver le cuivre de la grille et le NbN. En fait, le substrat de MgO se dissout très peu. La dissolution de l’interface MgO/NbN suffit à libérer le film. Il est important de prévoir un masque à gaz en plus des EPI habituels car les vapeurs d’acide acétique sont irritantes et rendent l’air à proximité de la sorbonne rapidement irrespirable.

Figure 3.39 – Images MEB de la préparation TEM, avec en rouge la surface du film et en bleu l’interface MgO NbN.

La figure 3.39 montre que la couche libre, une fois repêchée, s’est arrangée par empilement. La surface du NbN (rouge) est légèrement encrassée. Pour une analyse MET, la zone exploitable est amplement suffisante. Par contre l’interface MgO/NbN (bleu) est rugueuse. L’interface est de très mauvaise qualité, mais aucune trace de magnésium n’a été détectée en analyse dis-persive en énergie. L’aspect de l’interface a été imputé soit aux mauvaises conditions de stockage des substrats, soit à l’atmosphère réactionnelle. Les orientations cristallines de cette couche libre ont été cartographiées par la technique ASTAR.

Les clichés de MET montre que l’échantillon se présente sous la forme d’une feuille avec des plis d’épaisseurs inégales sur l’ensemble de la surface. La figure 3.40 montre que l’orientation est située entre (101) et (111). La DRX montre que le film est orienté (100). La section analysée est donc située sur un pli de la couche libre.

Quelques grains cubiques désorientés par rapport au reste du film sont observés. Ils représentent à peu prés 2,3% de la cartographie. Les quelques grains épars désorientés sont soit des traces de polycristal, soit des grains qui se sont décrochés/pliés durant l’extraction de la couche.

Figure 3.40 – Cartographie ASTAR de la couche de NbN. Les zones noires sont les zones ou les clichés de diffractions ne sont pas exploitables.

Cette préparation demande peu de temps et de matériel. Elle est idéale pour les cartographies d’orientation cristalline ou pour observer l’interface entre le substrat et le film. Il n’est par contre pas possible d’évaluer les contraintes ou les réseaux de dislocations de la même façon. Les films d’une épaisseur supérieure à 100 nm sont trop épais pour l’analyse de TEM, dans ce cas un amincissement ionique sera envisageable si il est unidirectionnel.

3.4 Conclusion

Dans ce chapitre, l’étude s’est focalisé sur le matériau δ-NbN. Sa struc-ture, son mode de croissance sur saphir et les relations d’épitaxie avec le sa-phir, l’AlN et le MgO ont été décrites. Il ressort de ce chapitre que le δ-NbN, lorsqu’il germe sur le saphir, peut prendre deux orientations de même éner-gie. A basse température (1000°C) la répartition des orientations est statis-tique et la croissance est colonnaire. A plus haute température (1150-1250°C) le NbN n’a plus un aspect granulaire mais ramifié. Il est alors composé de grains allongés dans une des directions du plan du substrat. Les grains corres-pondent alors à la structure de marche et terrasse du substrat. La croissance du NbN est alors soit colonnaire soit par avancée de marche. Un phénomène de sélection des orientations cristallines apparait à ces températures. Ce phé-nomène a été associé à l’anisotropie des plans du saphir. Deux axes ont été décrits, tous les deux associés à une croissance colonnaire ou une croissance par avancée de marche. L’observation des faces cristallines des grains de NbN a montré qu’à 1000°C les conditions utilisées sont des conditions typiques de forte sursaturation. Au contraire à haute température, le système semble se déporter vers des conditions de faible sursaturation. L’étude s’est conclue sur une étude paramétrique. Il a été montré que la préparation de la surface des

saphirs en atmosphère réductrice avant le dépôt permet de créer les condi-tions favorables à la sélection des variants. Toutefois, la température de dépôt est le point clef de leur apparition. L’observation des vitesses de croissance moyennes a montré que dans les conditions de dépôt utilisées la réaction glo-bale de croissance de NbN suit une loi d’Arrhenius. L’énergie d’activation de cette réaction est de 57 kJ.mol−1. Le traitement thermique post-dépôt des films permet de modifier la composition chimique des films et donc de les rapprocher de la stœchiométrie <N b

N >=1. Les recuits à hautes températures réduisent les quantités d’azote. Les gaz à faible pouvoir nitrurant comme N2 ne suffisent pas à augmenter la quantité d’azote. Par contre, l’utilisation de basses températures et d’ammoniac permet d’insérer de l’azote dans le film bien au-dessus de la stœchiométrie <N b

N»1.

Une ouverture à l’utilisation de substrats alternatifs a été faite. Elle a montré que l’utilisation du nitrure l’aluminium recèle un grand potentiel pour l’élaboration de films de haute qualité cristalline. Les substrats utilisés doivent par contre subir un polissage mécanochimique pour faire apparaitre les structures de marche et terrasse et donc être en capacité de sélectionner les variants. Les substrats d’oxyde magnésium n’ont pas la même stabilité que les substrats de saphir. La structure cubique du MgO simplifie les relations d’épitaxie avec NbN cubique. Il est possible d’élaborer des films avec diffé-rentes orientations cristallines par le choix de l’orientation du substrat. L’in-stabilité de l’oxyde magnésium permet par contre la préparation de couches libres pour l’analyse MET.

Chapitre 4

Corrélation entre la structure

et les propriétés de NbN

Ce chapitre traite des propriétés supraconductrices des films de NbN. Il a pour but de relier ces propriétés aux caractéristiques structurales des films. Tout d’abord, le protocole utilisé pour l’extraction des propriétés supracon-ductrices des films est décrit. Puis les relations générales entre la structure et les propriétés électriques et supraconductrices des films sont exposées. Le chapitre se conclut par des études de cas sur la température d’élaboration, les traitements thermiques et la durabilité des films de NbN .

4.1 Méthodologie de la mesure de la

tempé-rature de transition supraconductrice

Les mesures sont effectuées dans un dispositifPhysical Property Measure-ment System PPMS. Les mesures de résistance sont effectuées entre 300 K et 5 K. Le dispositif a été utilisé dans le cadre de la collaboration avec l’Institut Nanosciences et Cryogénie (INAC) dans l’enceinte du CEA de Grenoble. Le détail du dispositif est décrit dans le chapitre 2 section (2.2.6). La méthode présentée dans cette section sera celle utilisée pour caractériser les propriétés supraconductrices de la totalité des films.

La figure 4.1 présente un bon exemple d’une transition supraconductrice d’un film de NbN. La résistance enregistrée est normalisée par la valeur de résistance à 20 K : ρnormalis(T) é= ρ réel (T) ρréel (20K) (4.1)

avec T en K.

De cette façon, il est possible de comparer tous les enregistrements dans une échelle commune. Le Ratio de Résistivité Résiduelle RRR = ρr(300éelK)

ρréel

(20K) est donc égal à : ρnormalis(300K) é.

Figure 4.1 – Exemple d’extraction des paramètres : RRR, Tc, ∆Tcà partir du comportement électrique en fonction de la température d’un film de NbN. Deux paramètres caractérisent une transition supraconductrice : la tem-pérature de transition supraconductrice Tc, et l’étendue de cette transition ∆Tc. La figure 4.1 montre comment ces paramètres sont extraits du compor-tement électrique enregistré. La température de transition supraconductrice est évaluée à mi-hauteur de la portion de courbe comprise entre 1% et 90% de la résistance normalisée à 20 K (ligne verte). La taille de la transition est évaluée par la différence de température entre 1% et 90% de la résistivité normalisée à 20 K (ligne rouge). Cette méthode est celle adoptée dans la littérature [11, 22, 98].

Une seule transition est observée à la figure 4.1, elle est bien définie avec un ∆Tc de 330 mK. Certains films au contraire, présentent des transitions plus larges, et parfois plusieurs transitions.

La figure 4.2 présente un film où deux transitions sont observées. Dans ce cas, il est compliqué d’évaluer les paramètres des deux transitions. Une méthode d’extraction de leurs valeurs est présentée. La première transition débute au sommet de la variation. La valeur de sa Tc se situe à mi-hauteur de la portion située entre 1 et 90% de la résistivité normalisée à 20 K. La seconde transition débute au changement de pente. La valeur de sa Tc se situe donc à 45% de sa hauteur. Concernant l’amplitude des transitions, il est raisonnable d’extraire la première de l’ordonnée à l’origine de la tangente de la variation. La seconde est mesurée à partir du changement de pente.

Figure 4.2 – Cas particulier d’une transition supraconductrice multiple. Dans la mesure du possible, les films aux transitions multiples ne seront pas pris en compte. Ils dénotent d’une inhomogénéité du matériau et la pré-sence de plusieurs sections du film avec des transitions supraconductrices différentes.