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Enjeux et parti-pris méthodologiques

3.2. Outils méthodologiques

3.2.Outils méthodologiques

3.2.1.Anthropologie du très proche et construction narrative de soi

L’articulation des deux outils classiques de l’enquête de terrain que sont l’observation et l’entretien a constitué le socle méthodologique de la recherche dont il est essentiel, dès à présent, de dessiner les principaux contours de ces deux outils et préciser les apports qu’ils constituent pour cette recherche103.

L’observation est le premier outil méthodologique central sur lequel s’est fondée l’enquête de terrain. Les spécificités du sujet d’étude et la volonté de suivre, dès le début de la période de rééducation post-opératoire, l’apprentissage du corps et de la corporéité amputés et l’expérience de la prothèse et du handicap, puis leur évolution dans le temps m’imposaient irrémédiablement d’être en face-à-face (Augé, 2006) et au plus près des personnes amputées pour observer et saisir ce que cela signifie de vivre amputé et appareillé, à court, moyen et long terme. Ma démarche ethnographique a porté une attention particulière, en adéquation avec Jean-Pierre Olivier de Sardan (1995 : 85) à ce que « l’anthropologue se frotte en chair et en os à la réalité qu’il entend étudier [afin d]’observer, sinon "de l’intérieur" au sens strict, du moins au plus près de ceux qui la vivent, et en interaction permanente avec eux ». En paraphrasant une partie de cette affirmation, si mon statut d’ethnologue-valide ne m’a pas permis de vivre et d’analyser les expériences et situations de handicap de « l’intérieur » comme il l’a été souligné précédemment, j’ai cherché, par une immersion prolongée, sur chacun des trois terrains d’enquête, à être toujours au plus proche des personnes amputées et des autres acteurs de terrain (soignants et orthoprothésistes) qui les accompagnent. Cette proximité recherchée et suscitée

102 Pour François Laplantine (1992 : 338), « c’est lorsque l’anthropologue prétend à la neutralité absolue, lorsqu’il croit pouvoir éliminer des résultats de sa recherche tout ce qui a contribué à y accéder (y compris ses convictions subjectives, ses préjugés) et qu’il gomme soigneusement les traces de son implication personnelle par rapport à l’objet de son étude, qu’il a le plus de chances de s’écarter du type d’objectivité (nécessairement approchée) et du mode de connaissance qui nous parait spécifique aux sciences humaines ».

103 Il est à souligner que ces éléments de cadrage vis-à-vis de ces deux outils sont essentiels pour préciser la démarche méthodologique d’ordre général ; néanmoins les observations et les entretiens ne se sont pas transposés à l’identique sur les trois terrains d’enquête. Ils se sont déclinés avec diverses adaptations et ajustements selon les particularités propres à chaque terrain et à ses différents acteurs. Les spécificités de ces approches, terrain par terrain, seront être abordées en détail par la suite dans la sous-partie suivante (Cf. 3.2).

par l’observation s’est particulièrement appuyée sur l’anthropologie du très proche développée par Charles Gardou (2009 : 203), approche essentielle à l’anthropologie du handicap, qu’il définit au prisme d’une suite de questionnements :

« L’intérêt d’une anthropologie du très proche [...] suppose d’aller voir au cœur problématique des situations de handicap comment "ça fonctionne". Que vit la personne, en considérant un ensemble de contingences : âge, sexe, type et degré de déficience, moment et conditions d’apparition, culture d’appartenance, religion, niveau socio-économique ? En quoi sa condition spécifique modèle le rapport qu’elle entretient avec le monde ? Quelle est sa manière de se projeter dans l’avenir ? La prétention n’est pas bien sûr de dessiner la condition type d’une personne en situation de handicap à la manière de Ralph Linton et Margaret Mead, empruntant à la psychologie pour tracer le profil type des personnalités correspondant à une culture particulière. Que se joue-t-il réellement (et non ce que l’on imagine, ou que l’on voudrait qu’il se joue) pour son entourage immédiat ? Que se dissimule-t-il sous la façade de nos stéréotypes, évitements, indifférence, non-dits ? Que se réfracte-t-il dans la littérature, les discours, les textes, les images, les activités et productions des associations, les pratiques sociales, les témoignages, souvent d’une rare finesse, des personnes en situation de handicap ou de leur entourage ? Quelles sont les répercussions du handicap sur le statut de celui qui en est affecté ? Quelles sont les stratégies de ce dernier pour s’adapter à la réalité de ce qui apparaît comme un mal pluriel, ou simplement pour parvenir à survivre ? En quoi le handicap est-il à la fois un état de soi et un aspect de l’identité sociale ? Dans quelle mesure l’affectation du corps ou de l’esprit est-elle en même temps une affectation des relations sociales, aussi réelle que la réalité objective de la déficience ? En quoi le handicap met-il en lumière les traits saillants d’une culture ? ».

L’anthropologie du très proche est une boussole tout autant théorique et réflexive que méthodologique. La notion et la nécessité du « très proche », au plus près des personnes concernées, s’avèrent fondamentales à ce travail en ce sens que ce partis-pris constitue un fil d’Ariane qui invite à questionner, à travers l’exigence de proximité, la réalité du quotidien et des situations de handicap vécues post-amputation, et ce à plusieurs niveaux.

En opérant la jonction entre l’anthropologie du très proche et le sujet/problématique de recherche définis lors des chapitres précédents, c’est tout un ensemble de regards, de questionnements et d’éléments à porter en rapport au handicap, et plus globalement sur les différents objets d’étude de la thèse, qui ont été pensés en amont (suite aux premiers terrains exploratoires), puis nécessairement ajustés en fonction du terrain (Glaser et Strauss, 1967) en rapport aux différents éléments ethnographiques rencontrés et non envisagés initialement.

En lien avec le handicap, différents points d’observation ont en particulier retenu mon regard et mon attention lors de mon immersion sur les terrains. Ainsi ces principaux thèmes qui ont constitué une trame et permis de poser des bases utiles à l’observation sont-ils : la diversité des confrontations au handicap dès l’IDR jusqu’en société, les retentissements que suscitent les situations de handicap et comment individuellement les personnes y font face, les stratégies d’adaptation et de remédiation, les interactions et l’accompagnement post-amputation pour faire face à ces situations par les soignants, orthoprothésistes, pairs, proches… La liste est non-exhaustive.

Au-delà des situations de handicap, la revendication d’une anthropologie du « très proche

» fait également résonance pour l’ethnologue à la nécessité d’être au plus près des personnes concernées pour observer les transformations du corps post-amputation, la matérialité de l’objet prothétique, l’agencement et le rapport qui s’établit entre organique et artificiel. Ce devoir de proximité, à considérer dans sa dimension physique (être proche physiquement de la personne) et spatiale (être à côté d’elle), a représenté une caractéristique essentielle dans le cadre de mes observations. L’intérêt fut de pouvoir observer, au croisement d’une approche ethnographique et quasi clinique, l’évolution du corps amputé lors des différentes étapes et périodes de vie post-amputation. Mon regard s’est porté sur les différents états corporels post-amputation : en premier lieu, les conséquences corporelles post-opératoire lors des premières semaines suite à l’acte chirurgical d’amputer ; dans un second temps, comment la jambe amputée, ou plus précisément le moignon, cicatrise, se transforme et se modèle dans l’optique du port de la prothèse ; et enfin, l’adaptation du moignon avec le port de la prothèse et son évolution au quotidien sur le moyen et long terme.

Le suivi du moignon a représenté une focale relativement importante de l’observation du corps amputé ; néanmoins, telle la loupe d’un microscope que l’on modifie, rétrécie/agrandit, le regard et l’étude ne se sont pas limités à cette partie spécifique du corps amputé. D’un regard centré sur le moignon vers un regard plus élargi sur le corps amputé dans son ensemble, les observations se sont également portées sur la manière dont le corps, et plus globalement la personne amputée, se redresse, se remet en mouvement, apprend la marche appareillée et développe de nouvelles conduites motrices avec la prothèse.

Cette revendication du très proche a fait aussi écho à la démarche de la culture matérielle et a constitué un angle particulièrement opportun dans l’optique d’observer au plus près l’objet prothétique. Cette proximité vis-à-vis de la prothèse au sens premier et matériel du terme, c’ est-à-dire pouvoir observer de près et toucher les matériaux, m’a donné l’opportunité, plus précisément dans le cadre de l’ethnographie menée au sein de la SCO, d’observer sa fabrication et ses mécanismes. Lors des observations, j’ai pu porter une attention toute particulière aux réglages et ajustements effectués par les orthoprothésistes en rapport à la singularité de chaque corps, ainsi qu’aux manières dont les personnes amputées utilisent les prothèses et souhaitent qu’elles soient réglées.

L’anthropologie du très proche a constitué un prisme conséquent sur lequel s’est agencé l’observation du triptyque handicap-corps-prothèse ; néanmoins, son influence ne se limite pas aux observations du terrain. Elle s’entrelace également à l’usage de l’entretien ethnographique.

L’intérêt méthodologique est de recueillir, toujours dans ce devoir de proximité au plus proche

du vécu de la personne amputée, les discours vis-à-vis des expériences subjectives de l’amputation, de l’appareillage prothétique et du handicap ; ce qui fait de l’entretien le second outil méthodologique éminemment central au sein de la recherche et complémentaire aux observations.

Préciser les enjeux et apports spécifiques de l’entretien invite d’emblée à différencier les deux principaux types de discours qui ont été recueillis sur le terrain et analysés. Corollaires à l’observation, ce sont en premier lieu les discours du quotidien, lors de contextes et d’échanges d’informels (à l’inverse de ceux qualifiés de « formels » lors d’entretiens préparés et sollicités par l’ethnologue), entre les différents acteurs de terrain qui ont pu être récoltés. En premier lieu, ces discours collectés par l’intermédiaire de la prise de notes renvoient par exemple aux échanges entre personne amputée/soignant ou entre patients amputés au sein de l’unité hospitalière, personne amputée/orthoprothésiste lors d’une consultation au sein de la SCO, ou entre membres de l’ADEPA. En second lieu, ce sont les discours et récits, lors d’échanges formels liés à une situation d’entretien individuel auprès des personnes amputées, c’est-à-dire au cours d’« interactions discursives délibérément suscitées par le chercheur » (Olivier De Sardan, 1995 : 76), qui ont été récoltés et qui ont constitué un corpus important de données ethnographiques.

Le parti-pris méthodologique a été de circonscrire la réalisation des entretiens uniquement aux personnes amputées. Ce choix méthodologique se justifie en rapport à la problématique de recherche qui se concentre sur les expériences post-amputation vécues par les personnes amputées faisant de ces individus l’objet central de la recherche. Par la mise au premier plan de discours et récits des personnes concernées, l’entretien donne l’opportunité de saisir, étudier et analyser en profondeur le sujet de recherche telle qu’évoqué par Lynda Sifer-Rivière (2016 : 87) :

« L’instrument de l’exploration des faits dont la parole est le "vecteur principal" (Blanchet et Gotman, 2015), permet de produire des données à base de discours pour rendre compte du point de vue de l’acteur, de son expérience, de son vécu, ses savoirs, ses savoir-faire, ses croyances sans porter sur ces discours de jugement de valeur ni d’appréciation normative quant à leur qualité ou leur niveau ».

La démarche méthodologique et longitudinale de suivre, au fil du temps, la diversité des cheminements lors des différentes séquences de vie (post-opératoire, en rééducation à l’IDR, un an après l’IDR, puis plusieurs années après l’amputation) et de recueillir les expériences post-amputation des personnes concernées a conduit à la réalisation d’un nombre d’entretiens conséquents (50 personnes interviewées) auprès des personnes amputées sur les différents terrains d’enquête. Ce choix méthodologique a permis la constitution d’un panel d’entretiens de personnes amputées des membres inférieurs de tout âge (hors enfants et adolescents car

mineurs) et de tout type d’amputation (vasculaire, traumatique, tumorale…). C’est ainsi que quinze personnes ont été suivies longitudinalement au sein de l’IDR (avec pour chacune : un entretien lors du séjour à l’IDR et un second un an et demi après leur sortie), trente entretiens ont été menées au sein de la SCO (avec des personnes amputées au moins depuis cinq ans) et cinq membres de l’ADEPA ont été interviewés (en lien avec le projet audiovisuel mené au sein de l’association).

La question s’est inévitablement posée, lors de l’élaboration du projet de recherche et de la méthodologie à adopter, d’élargir (ou non) les entretiens ethnographiques aux autres acteurs de terrain. Le choix méthodologique opéré de circonscrire les entretiens aux personnes amputées s’est justifié par le risque pressenti d’un éparpillement de la recherche que pourrait susciter une accumulation d’entretiens avec d’autres acteurs de terrain (soignants, orthoprothésistes, proches) qui gravitent autour de la personne amputée ; et qui plus est, répartis sur trois terrains d’enquête. Comme tout choix méthodologique, des critiques peuvent être émises (perte d’autres points de vue que ceux des personnes concernées, ethnographie partielle du terrain) ; cependant ce choix est assumé car il offre la possibilité d’analyser le sujet central de cette recherche dans une approche intensive et dans une prise en compte de la pluralité de profils de personnes amputées.

Les entretiens réalisés auprès des personnes amputées104 sur les différents terrains d’enquête ont été de type semi-directifs et articulés à partir d’un canevas d’entretien105 basé sur différents items. D’un point de vue méthodologique, ils se situent à la croisée de l’entretien biographique (Peneff, 1996) et de l’entretien compréhensif (Kaufman, 2016, Ramos, 2015). Ils oscillent entre les deux pôles définis par Jean-Pierre Olivier De Sardan (2013 : 55) que sont l’expérience et la consultation. Ces entretiens se sont articulés sur un triple objectif ethnographique. Le premier objectif était tout d’abord de recueillir, avec des variantes selon les terrains d’enquête et les personnes amputées interviewées, les récits et parcours biographiques, découpés en trois séquences de vie (S) : récits avant-amputation (S1 : causes de l’amputation, évolution, complications, prise de décision d’amputer, etc.), récit du vécu post-opératoire et en

104 Comme il va l’être abordé dans la sous-partie suivante, certains agencements ont été effectués selon les terrains et les personnes amputées interviewées en lien avec leur vécu dans le temps de l’amputation (les entretiens pouvaient légèrement différés en fonction de la durée post-amputation).

105 Le terme « canevas d’entretien » renvoie à la définition que donne Jean-Pierre Olivier de Sardan (2013 : 60) où il considère que le canevas d’entretien « relève du "pense-bête" personnel, il ne se consulte qu’en cas de besoin, et permet simplement, tout en respectant la dynamique propre d’une discussion, de ne pas oublier les termes importants […] Alors qu’un guide d’entretien implique que l’interview parcoure l’ensemble des questions successives qui y figurent, un canevas d’entretien laisse toute liberté au chercheur pour s’adapter à l’interlocuteur : en fonction de ses centres d’intérêt, de ses compétences ou de la tournure de la conversation ».

rééducation (S2) et le récit du retour et cheminement en société (S3). Le second objectif des entretiens, basés sur une approche de type « compréhensif » et « expérientiel », était de recueillir les récits des expériences corporelles, des prothèses et des situations de handicap vécues. Enfin le troisième et dernier objectif était d’obtenir un certain nombre d’éléments, d’informations et de récits en rapport au terrain d’enquête auprès des personnes amputées (appréhendées comme acteurs et informateurs-consultants ethnographiques), de les recouper et de les compléter avec les données ethnographiques récoltées lors d’observations.

Dans la continuité des apports théoriques de l’anthropologie médicale et du handicap106, l’utilisation de l’entretien a permis de recueillir et d’analyser les contenus narratifs (Good, 1998 ; Del Volgo, 1997) subjectifs des personnes amputées afin d’étudier les récits, mots, métaphores et explications utilisés pour dire les expériences post-amputation. La récolte de ces données permet à l’ethnologue de comprendre comment les personnes amputées ont vécu et perçoivent la transformation de leurs corps, pensent leurs états corporels et ressentent concrètement leurs corporéités post-amputation. Elle offre la possibilité de questionner et de tenter de saisir l’expérience quotidienne de la prothèse, ainsi que leur rapport sensible (Laplantine, 2005, 2007) et représentations vis-à-vis de l’objet prothétique. Enfin, elle permet d’avoir accès à l’expérience des situations de handicap rencontrées au cours du parcours de vie suite à l’amputation et aux stratégies développées pour y faire face.

Le recueil de ces récits et l’exigence de variation (Bertaux, 2016) en lien avec la grande diversité des personnes amputées interviewées (au niveau des causes, types, âges de l’amputation et vécus post-amputation) invite, au sein de la construction de ce cadre méthodologique, à définir et préciser la manière dont ces récits de soi sont entendus, appréhendés et analysés ethnologiquement. En effet, la mise en récit et la construction narrative de soi questionne le rapport subjectivité/objectivité du récit de soi et de l’expérience vécue (aussi bien dans le passé qu’au présent) narrée à l’ethnologue. Christophe Niewiadomski (2013 : 37) souligne l’ambivalence que porte intrinsèquement le récit de soi et son propos permet de poser des bases réflexives essentielles vis-à-vis des discours des personnes enquêtées :

« Nul n’a jamais véritablement accès la "réalité" au sens strict du terme et chacun se trouve contraint de construire une représentation de celle-ci en fonction de son univers cognitif, affectif, imaginaire, symbolique, social et culturel. Dès lors cette variabilité des réalités subjectives, consubstantielle au fonctionnement de l’être humain et à ses catégories de pensée, requiert de se montrer attentif à cette dimension subjective en tant qu’elle participe d’une part à la construction du réel et qu’elle est d’autre part toujours agissante dans ses conséquences pratiques. Dès lors, si le point de vue d’un individu donné est

106 Abordée et détaillée lors de la construction du cadre théorique de cette recherche (Cf. chapitre n°2).

inévitablement teinté de subjectivité, parfois incomplet, difficilement vérifiable, il reste qu’il renvoie à une expérience singulière qui s’inscrit toujours dans un contexte historico-social et culturel qui convoque inévitablement la dimension de l’intersubjectivité en tant qu’il s’agit d’un discours adressé et donc soumis à la validation d’autrui ».

Cette particularité, inhérente au récit de soi qui voit se mettre sous forme de narration l’expérience vécue par l’enquêté et son recueil par l’enquêteur, soulève des tensions au sein des différents couples et pôles de références que sont subjectivité/objectivité et réalité/part de fictionnel du récit. Il est capital de préciser ici que ce caractère singulier de chaque expérience et de sa narration dans un cadre intersubjectif ne prétend pas à une réalité totalement objectivée et objectivable du récit. Les travaux de Paul Ricoeur (1979, 1986, 1990) sur la narration comme la conception diachronique de soi-même107 servent de point d’appui théorique comme le souligne François Laplantine (2007 : 81) dans ses réflexions sur cette notion en anthropologie : « tout l’intérêt de la réflexion de Paul Ricoeur est d’introduire non seulement cette dimension [narative], mais encore cet horizon de temporalité et d’historicité dans la pensée du sujet ». Le récit de soi et la narration biographique des séquences de vie sont inévitablement (re)constructions partielles de l’histoire de vie, empreints d’une certaine subjectivité où ils sont racontés à partir de « la complexité aveugle du présent tel qu’il est vécu » (Ricoeur, 1979 : 214).

En ce sens, ce travail, dans son approche et conception du récit, s’appuie sur la distinction effectuée par Daniel Bertaux (1997) entre l’histoire de vie (une réalité factuelle avec une suite d’évènements) et le récit de vie (une reconstruction des évènements subjectifs narrée par l’enquêté). Le recours et l’usage par l’ethnologue à l’entretien pour récolter les récits n’a pas la prétention théorique et la gageure méthodologique de considérer le récit de vie et des

En ce sens, ce travail, dans son approche et conception du récit, s’appuie sur la distinction effectuée par Daniel Bertaux (1997) entre l’histoire de vie (une réalité factuelle avec une suite d’évènements) et le récit de vie (une reconstruction des évènements subjectifs narrée par l’enquêté). Le recours et l’usage par l’ethnologue à l’entretien pour récolter les récits n’a pas la prétention théorique et la gageure méthodologique de considérer le récit de vie et des