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Outils de génomique fonctionnelle disponibles chez M. truncatula

Gene expression profiling of M. truncatula transcription factors identifies putative regulators of grain legume seed filling

4. ISOLEMENT DE MUTANTS POUR LES GENES CANDIDATS SELECTIONNES

4.1 Outils de génomique fonctionnelle disponibles chez M. truncatula

Plusieurs méthodes ont été développées chez les plantes pour générer des mutants "perte de fonction". On peut cependant distinguer deux grandes approches : la transgenèse et la mutagenèse. Les différentes méthodes, détaillées ci-dessous, sont comparées dans le tableau 2.1 (Li et al. 2002 ; Tadege et al. 2005).

4.1.1 La mutagenèse

Cette méthode est adaptée à toutes les espèces de plantes et est basée sur l’action de mutagènes chimiques (de type Ethyl Méthane Sulfonate) ou physiques (rayons ϒ, rayons X, Fast Neutron, …). Ces méthodes sont couramment utilisées pour introduire des mutations dans des génomes animaux ou végétaux.

4.1.1.1 Population EMS/TILLING

L’Ethyl Méthane Sulfonate (EMS) est un mutagène chimique capable d’induire de nombreuses mutations ponctuelles de type changement d’un C/G en T/A dans un génome. Cette technique peut être utilisable pour des approches de génétique "forward" (observation d’un phénotype précis et identification du gène responsable du phénotype, approche allant du phénotype vers le gène) et de génétique "reverse" (recherche d’une mutation dans un gène choisi pour étudier son phénotype, approche partant du gène vers le phénotype). Cependant, lors de la démarche en génétique "forward", l’isolement du gène muté peut être difficile et nécessite de réaliser un clonage positionnel qui peut être long et fastideux. Parmi les méthodes de génétique "reverse", la méthode de criblage TILLING (Targeting Induced Local Lesions IN Genomes) est utilisée (Figure 2.3) (Mc Callum et al. 2000). Cette technique permet l’identification d’une mutation dans une séquence nucléotidique connue. L’identification de la mutation repose sur la formation d’un hétéroduplex entre les fragments PCR de la séquence mutée et de la séquence sauvage, hétéroduplex qui sera clivé par une endonucléase spécifique des mésappariements. Ces populations existent déjà chez de nombreuses espèces végétales (arabidopsis, Greene et al. 2003 ; blé, Slade et

al. 2005 ; maïs, Till et al. 2004 ; lotier, Perry et al. 2003 ; pois, Dalmais et al. 2008). Chez M. truncatula, deux

populations EMS/TILLING sont actuellement disponibles : l’une à l’Université de Californie (Davis, USA) et l’autre à l’INRA UMRLEG (Dijon, FR).

4.1.1.2 Population Fast-Neutron et rayons ϒ

La mutagenèse physique est l’autre mutagène classique pour obtenir une population de mutants. Contrairement à l’EMS, elle ne génère pas un changement de base ponctuel mais des délétions de régions d’ADN (de quelques bases à plusieurs kb, Li et al. 2002) ou des réarrangements chromosomiques. C’est également un outil préférentiellement utilisé pour des approches de génétique "reverse". L’identification des plantes mutées pour un gène se fait par comparaison de taille des fragments PCR du gène d’intérêt (Figure 2.4). Chez M. truncatula, deux populations de Fast Neutron sont disponibles : l’une à la Noble Foundation (Ardmore, USA) et l’autre au

Figure 2.4 : (a) Principe du criblage d’une population de mutants « Fast Neutron » et (b) comparaison de la méthode avec le TILLING et les T-DNA/transposon (extrait de Li et Zhang, 2002).

(a)

(b)

Transgène

RdRP

RdRP

Figure 2.5 : Principe de l’ARN interférence (PTGS) (extrait de Chicas et al. 2001).

Le double brin ARN est produit par le transgène (dsRNA), puis ce double brin va être utilisé comme matrice par une ARN polymérase ARN dépendante (RdRP). Les fragments ARN double brin sont clivés en petits ARN double brin (siRNA) par Dicer, une RNAse de type III. Ces petits ARN (siRNA) vont guider un complexe dont une nucléase vers les molécules ARNm endogènes qui vont être dégradés. Cette dégradation va générer de nouveaux siRNA qui vont nourrir ce mécanisme d’inhibition de l’expression. Ce mécanisme est également accompagné de l’inhibition de l’expression du gène par méthylation de son promoteur (non représenté sur cette figure).

John Innes Center (Norwich, UK). Une population rayons ϒ est également disponible à l’INRA UMR-LEG (Dijon, FR) (Sagan et al. 2005).

4.1.2 La transgenèse

On peut distinguer différentes méthodes d’inactivation de gène par transgenèse disponibles chez M. truncatula : par interférence (RNAi, gene silencing ou Post-Transcriptional Gene Silencing, PTGS), par mutagenèse insertionnelle (T-DNA tagging) et par l’utilisation d’éléments transposables (transposon tagging). Ces méthodes sont couramment utilisées chez les végétaux mais nécessitent que la plante puisse être transformée et surtout régénérée in vitro. De plus, la régénération in vitro des plantes est connue pour induire de multiples mutations dans le génome des régénérants (Larkin et al. 1981). D’autres méthodes récentes existent également, telles que la transformation du gène d'intérêt couplé à un domaine répresseur (Hiratsu et al. 2003), cependant cette méthode encore peu utilisée chez les plantes ne sera pas traitée.

4.1.2.1 RNA interférence (ou PTGS)

Le RNAi est un mécanisme cellulaire de régulation de l’expression des gènes. Ce mécanisme repose sur la synthèse d’un petit ARN d’une vingtaine de bases qui va se fixer sur une séquence complémentaire d’ARNm et ainsi entrainer la formation d’un double brin d’ARN. Ce complexe double brin d’ARN sera dégradé par le complexe RISC (RNA induced silencing complex) entrainant la dégradation des ARNm, le blocage de la traduction et l’arrêt de la transcription par méthylation de tous les ARNm correspondants (Figure 2.5 et pour revue Hannon et al. 2002). Ce mécanisme naturel peut être détourné pour inhiber l’expression d’un gène spécifique ou l'expression d’une famille entière de gènes. Il consiste à transformer la plante avec un vecteur contenant un fragment du/des gène(s) à éteindre, en construction sens et antisens. Cette méthode puissante de génétique "reverse" permet d’obtenir une variété de phénotypes allant d’une faible extinction à une extinction quasiment complète du gène. Il existe également depuis peu de temps des vecteurs permettant de réaliser ce type de transformation à haut débit conduisant à des populations de transformants (Helliwell and Waterhouse, 2003).

4.1.2.2 Mutagenèse insertionnelle

Cette technique permet de muter mais également de "marquer" le génome, elle est donc employée dans des approches "forward" et "reverse". Elle consiste en l’utilisation d’une séquence d’ADN (T-DNA) qui va s’insérer aléatoirement dans le génome et donc parfois dans des gènes. L’identification des régions d’insertion peut être réalisée par PCR et/ou séquençage des régions bordantes du T-DNA. Cette technique est très largement utilisée et a fait ses preuves chez A. thaliana, où de nombreuses validations fonctionnelles ont été réalisées à partir de ce type de mutation. Cette ressource est disponible chez M. truncatula à l’Institut des Sciences du Végétal (ISV-CNRS) (Gif/Yvette, FR) (Scholte et al. 2002).

Figure 2.6 : Principe du criblage d’une population de mutants contenant le rétrotransposon Tnt1 (extrait de Tadège et al., 2005)

4.1.2.3 Utilisation d’éléments transposables

Cette technique est en partie basée sur la précédente et permet de générer une grande population de mutants. Elle consiste en l’introduction dans le génome de la plante d’un transposon soit de type I : rétrotransposon qui copie son ARN et s’insère ailleurs dans le génome (transposition de type copier-coller), soit de type II : transposon à ADN qui "saute" dans le génome (transposition de type couper-coller). Ces éléments mobiles sont donc capables de s’insérer dans un nouvel endroit du génome, par exemple à chaque étape de régénération in vitro de la plante dans le cas spécifique du transposon Tnt1. De la même manière que précédemment, ces populations de mutants sont utilisées en génétique "forward" et "reverse" et l’identification des régions mutées se fait par PCR et/ou séquençage des bordures du transposon. Chez M. truncatula, des populations de ce type ont été réalisées grâce au rétrotransposon Tnt1 du tabac sur des génotypes R108 à l’ISV-CNRS (Figure 2.6) (d’Erfurth et al. 2003) et plus récemment sur le génotype A17 dans le cadre d’une collaboration entre l’ISV-CNRS (Gif/Yvette, FR) et la Noble Foundation (Ardmore, USA).