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CHAPITRE 1 : ETUDE BIBLIOGRAPHIQUE

B. Outils technologiques et statistiques

1. Outils analytiques

Afin de ne pas entraver la possibilité de détecter une différence liée au traitement, les outils analytiques utilisés doivent permettre de générer des profils métaboliques avec une variabilité analytique inférieure à la variabilité naturellement présente dans la population d’intérêt (variabilité inter-individuelle) 265. Par ailleurs, en métabolomique non ciblée, ils doivent en théorie permettre de

détecter et quantifier un très grand nombre de métabolites sans avoir à sélectionner au préalable les analytes recherchés. Néanmoins, en raison de la diversité physicochimique des métabolites, aucun système n’est capable en pratique de caractériser tous les métabolites présents dans un système biologique 263. Ainsi, le choix de l’instrument est très important car il définit le champ des métabolites

possiblement détectables 264. Deux techniques sont principalement utilisées en métabolomique : la

spectroscopie de résonance magnétique nucléaire et la spectrométrie de masse.

a) La spectroscopie de résonance magnétique nucléaire (RMN)

La RMN est basée sur l’absorption puis le relâchement d’énergie par des noyaux atomiques en réponse à une impulsion radiofréquence en présence d’un champ magnétique directeur. Ces atomes entrent en résonance avec une fréquence dépendante du champ magnétique et de leur environnement nucléaire. Cette propriété n’est accessible qu’aux noyaux atomiques possédant un spin nucléaire non nul (1H, 13C, 19F, 31P) 278,279. La RMN renseigne sur la structure chimique des composés puisque les pics

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(ou multiplets) et la fréquence de résonance (ou le déplacement chimique) sont fonction de l’environnement chimique (Figure 30) 266,280. Elle permet de distinguer des isomères et d’obtenir des

informations sur la conformation d’un composé. La 1H-RMN apporte également des informations

quantitatives puisque l’aire sous le pic est directement proportionnelle à la concentration du composé dans le mélange. Il est donc possible d’effectuer une quantification relative (par exemple par rapport à un autre signal ou par rapport à l’intensité totale du spectre) ou même absolue via l’ajout d’un standard interne dans l’échantillon 265,268,270.

Figure 30 : spectre typique de résonance magnétique nucléaire du proton. Chaque signal représente un proton dans un environnement chimique différent. Les protons appartenant à certaines fonctions chimiques présentent des déplacements chimiques caractéristiques. Le TSP (1,1,2,2-d4-triméthylsilylpropionate) représente un standard interne

permettant d’obtenir un déplacement chimique de référence 266

En raison du grand nombre d’atomes d’hydrogène constituant les molécules biologiques et compte- tenu que le proton est le noyau le plus sensible pour les molécules organiques, les études de métabolomique reposent généralement sur la spectroscopie RMN du proton (1H-RMN). Toutefois,

pour faciliter l’identification de certains composés, celle-ci peut être combinée à de la RMN 13C, 31P ou 15N lors d’analyses RMN en 2 dimensions 265,268,280. La RMN haute résolution est bien adaptée à la

détection de modifications métaboliques puisqu’un grand nombre de métabolites peut être quantifié simultanément. Par ailleurs, cette méthode est robuste et reproductible 270 et l’analyse est

relativement rapide (de l’ordre de 30 min) et automatisable 266. De plus, cette méthode est adaptable

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possibilité de réutiliser les échantillons pour d’autres analyses (à condition que ces dernières soient compatibles avec l’eau deutérée utilisée pour reprendre les échantillons en RMN). Cette propriété est particulièrement appréciée pour l’étude de tissus précieux tels que les biopsies, d’autant que la technique de MAS (magic angle spinning) permet désormais d’acquérir un signal RMN haute résolution directement à partir de tissus de petite taille (pas de pré-traitement) 269,270,281.

En revanche, la RMN n’est pas réputée pour sa sensibilité analytique 262,279. En effet, bien que celle-ci

varie en fonction de la classe biochimique des molécules, la sensibilité est estimée en moyenne à 10-6 M 266. Par conséquent, la RMN ne permet pas d’obtenir des informations sur des métabolites

faiblement exprimés tels que certains neuromédiateurs dans le cerveau. De plus, elle nécessite une quantité importante de tissus 265.

b) La spectrométrie de masse (MS)

La spectrométrie de masse est une technique analytique qui permet l’identification de composés grâce au rapport masse / charge (m/z) de molécules chargées (ions) 268. Elle est généralement couplée à une

technique séparative telle que la chromatographie liquide (couplage LC-MS) ou gazeuse (couplage GC- MS) 269,272. Ces dernières sont basées sur l’interaction des métabolites avec les matériaux adsorbants

contenus dans la colonne et permettent de séparer les composés selon un premier facteur, le temps de rétention. On obtient alors un spectre à 3 dimensions correspondant au temps de rétention, au rapport m/z et à l’intensité du signal 270. La Figure 31 présente un spectre typique obtenu par LC-MS.

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Figure 31 : spectres typiques obtenus par analyse en chromatographie liquide couplée à de la spectrométrie de masse. Le graphe supérieur montre le spectre obtenu par chromatographie liquide. Les fractions sont séparées en fonction du temps de rétention. Le graphe inférieur est un spectre MS spécifique d’une fraction HPLC et fournit des informations sur

la masse des composés 266

La spectrométrie de masse bénéficie d’une meilleure sensibilité que la RMN (10-12M) 266. La

spectrométrie de masse haute résolution permet d’obtenir la masse exacte d’un composé et donc d’avoir des informations sur sa formule chimique brute. Le couplage MS/MS permet de fragmenter l’ion parent en ions fils et facilite l’identification du composé (à condition que les fragments soient répertoriés dans les bases de données) 263.

Bien que très sensible, la spectrométrie de masse présente de nombreux inconvénients. D’une part, cette technique est moins performante que la RMN pour la quantification des métabolites puisque le signal n’est pas nécessairement linéaire avec la concentration. La quantification d’un analyte présent dans un mélange peut être biaisée par une ionisation variable et par des effets suppresseurs d’ions 265,270. D’autre part, des effets matrices importants peuvent apparaître, notamment en

chromatographie liquide.

Si la RMN est bien adaptée à la caractérisation globale des métabolites, la MS est davantage destinée à la caractérisation de classes spécifiques de métabolites (métabolomique ciblée) 266,270. Dans ces

conditions, l’association des deux techniques séparément présente l’avantage de pallier aux déficits de chaque méthode 264. Il existe également des techniques « hyphènes » HPLC-RMN-MS associant

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directement les deux méthodes en parallèle 270. Pour analyser des grandes bases de données, il est

aussi envisageable de sélectionner des sous-groupes d’intérêt à partir d’une première analyse en RMN et de compléter dans un second temps les informations obtenues par une approche ciblée en spectrométrie de masse 263,264.