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Origine des Chinois : théories chinoises

Dans le document HISTOIRE GÉNÉRALE DE LA CHINE I (Page 54-59)

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« Il est de l’origine des peuples comme des généalogies des particuliers : on ne peut souffrir des commencemens bas et obscurs.

Ceux-ci vont à la Chimère ; ceux-là donnent dans les Fables (81) ». Les Chinois n’ont pas échappé à la règle commune.

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Il ne faut aborder le récit, entouré de légendes, des débuts de la nation chinoise qu’avec beaucoup de scepticisme et le considérer comme relevant du folklore et non de l’histoire.

D’après les légendes taoïstes, du premier homme P’an Kou ou Hou Touen (Chaos) jusqu’à 479 av. J.-C., on compte une période de 276 000 années, que certains ont porté à 2 276 000, 27 598 600, 3 276 000 et même 96 961 740 années (82). Au Tao, qui sur la fin des Tcheou, et au commencement des Han, était le principe créateur du Ciel et de la Terre, sous les Han orientaux, on substitua P’an Kou. Selon le livre Yi-Ki, c’est celui-ci qui est le Père de l’Univers. « Il sortit du chaos comme il put : après sa mort, sa tête se changea en montagne, ses yeux devinrent le soleil et la lune, ses veines des fleuves et des rivières, ses cheveux des arbres, les poils de son corps des plantes, etc.

Le grand embarras des écrivains est de dire de quelle veine où de quelle artère en particulier sortit le Fleuve Jaune, le Kiang.

p.053 Selon le Li Ki, ou Histoire des Calendriers, P’an Kou fut longtemps enfermé dans le chaos, qui avait la forme d’un œuf : le chaos se développa en 18 000 ans : le Ciel s’élevait chaque jour de dix pieds ; la Terre s’épaississait d’autant, et P’an Kou grandissait avec la même proportion, pour être « l’Esprit du Ciel et le Saint de la Terre (83) ». P’an Kou est représenté armé d’une hache et d’un ciseau, sculptant le monde au-dessus de lui. La légende de P’an Kou n’est pas chinoise ; elle fut introduite par des ambassadeurs venus du Siam ou de la Malaisie au VIe siècle après J.-C. (84).

Au premier homme ont succédé les San Houang (Trois Souverains) : les Souverains du Ciel, Tien Houang comptèrent treize (85) représentants, qui régnèrent chacun 18 000 années par la vertu de l’élément bois : Gaubil, Chronologie, p. 1, en fait treize frères qui eurent le titre d’Esprit du Ciel. Les Souverains de la Terre, Ti Houang, eurent onze représentants, onze frères, dit Gaubil, qui furent les Esprits de la Terre, qui régnèrent chacun 18 000 années par la vertu de l’élément feu. Les Souverains Hommes, Jen Houang, comprennent neuf frères qui régnèrent pendant 150 générations, soit 45 600 années.

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« L'empire fut divisé en neuf parties, et chacun gouvernait dans une des neuf parties. L’abondance régnait partout ; et il n’y avait nul désordre (86) ». L’abrégé de l’histoire utilisé par le père Gaubil dit que depuis le commencement des Tien Houang jusqu’à la première année de Houng Wou, le fondateur de la dynastie des Ming (1368 ap. J.-C.), on compte 86 496 ans (87).

Se-ma Tcheng dans ses Annales des Trois Souverains, d’après un appendice du Tch’ouen Ts’ieou, divise la période p.054 depuis la séparation du Ciel et de la Terre, commence ment du monde, jusqu’à la capture de l’animal fantastique Lin, à l’époque de Confucius, qui comprend 3 276 000 années — on a vu que le T’oung Kien Kang, gnou en compte 2 276 000 seulement en dix périodes ou Ki, refermant les années de 70 600 générations.

Le premier Ki est celui des Neuf Têtes (Kiou t’eou), ou des Neuf Souverains (Kiou ouang) ; par conséquent des Jen Houang déjà mentionnés. La seconde période est celle des Cinq Dragons (Wou Loung) ; après les Cinq Dragons, Se-ma Tcheng cite Souei Jen, Ta T’ing, Po Houang, Tchoung Yang, Kiouen Siu, Li Lou, Li Lien, Ho Siu, Ts’ouen Lou, Houen Touen, Hao Ying, Yeou Tch’ao, Tchou Siang, Ko T’ien, Yin K’ang, Wou Houai, que dans un autre système nous verrons placés entre Fou Hi et Chen Noung. L’abrégé d’histoire utilisé par le père Gaubil ne cite après les Jen Houang que Yeou Tch’ao et Souei Jen dont on ne dit pas la durée des règnes. Yeou Tch’ao « apprit aux Chinois la manière de construire des cabanes pour se mettre à couvert des bêtes féroces. Avant le temps de ce prince, on habitait dans des cavernes. Du temps de Yeou Tch’ao, on buvait le Sang des animaux ; la chair crue, les herbes, feuilles et fruits sauvages, étaient la nourriture ordinaire. Après Yeou Tch’ao les peuples furent gouvernés par Souei Jen. Il apprit aux hommes l’usage du feu, et la manière de cuire les viandes pour se nourrir. Il apprit aussi à faire le commerce ; il établit des écoles pour enseigner les principes de la religion. Il aimait à contempler les astres et à examiner les propriétés du bois, des métaux, de la terre, du feu, de l’eau. Il enseigna l’usage des nœuds de cordelettes, pour marquer et se ressouvenir des choses

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nécessaires (88). Le troisième Ki est la période Che t’i, avec 59 générations ; le quatrième, la période Ho-Ngo, avec trois générations ; le cinquième, la période Lien T’oung, avec six générations ; le sixième, la période Siu Ming, quatre générations ; le septième, la période Sieou Fei, avec vingt-deux souverains ; le huitième, la période Houei T’i, avec p.055 treize souverains ; le neuvième, la période Chan T’oung. Le dixième et dernier Ki la période Lieou Ki qui correspondrait à Houang Ti (89).

Dans le T'oung Kien Kang mou, les San Houang sont indiqués dans l’ordre suivant : Fou Hi, Chen Noung, et Houang Ti. Se-ma Tcheng les range ainsi : Pa’o Hi ou Fou Hi, Niu Koua et Chen Noung : Je reviendrai plus loin sur Fou Hi et Chen Noung ; je dirai d’abord quelques mots sur Niu Koua qui avait un corps de serpent et une tête d’homme ; il appartenait au clan Foung et ne changea, ni n’inventa rien. Il est signalé pour la première fois par Li Tseu, le philosophe taoïste au IVe siècle av.

J.-C., qui raconte qu’il répara le Ciel avec des pierres et qu’il coupa les pieds de la Tortue pour établir les quatre extrémités du monde : Au second siècle av. J.-C., Houai nan Tseu en parle également (90). D’autres fables taoïstes font une femme de Niu Koua : « Niu Koua, sœur, fille et femme de Fou Hi, avait aussi un corps de serpent, avec une tête humaine.

Le Li Ki dit qu’elle changeait 70 fois de figure par jour : Kou Koung, mauvais esprit, outré d’avoir été vaincu dans une guerre qu’il avait suscitée, donna un coup de tête contre une des colonnes du Ciel et la brisa. La voûte céleste vint toucher la terre de ce coté ; mais, dit le Wai Ki, Niu Koua, ayant pétri et purifié une pierre de cinq couleurs, elle ressouda la voûte céleste et la releva avec les pattes d’une tortue qu’elle coupa : puis elle tua le dragon noir et boucha avec des cendres d’écorce de citrouille, les trous par où les eaux du ciel inondaient la terre. Sa voix était si agréable, que ses chants faisaient danser tous les astres (91).

« Il peut se faire, dit le père Gaubil, dans sa Chronologie, p.

7, que Nu oua désigne la tradition ancienne sur Eve. Nu, femme ; oua serait Eva ou Ghe-oua ; mais je ne veux pas m’arrêter à ces sortes de conjectures.

Il a raison de ne pas s’y arrêter.

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Après les San Houang, le T'oung Kien Kang mou p.056 indique les Cinq Empereurs, Wou Ti ; en réalité il en marque six : Chao hao, Tchouen Hiu, Ti Ko, Ti Tche, Yao et Chouen. Se-ma Ts’ien qui écarte Chao Hao, commence ses Mémoires Historiques avec Houang Ti, le premier des Cinq Empereurs, suivi de Tchouen Hiu, K’ou, Tche, Yao et Chouen qui régnaient en vertu des éléments terre, bois, métal, feu et eau. Enfin dans d’autres systèmes chronologiques, les Cinq Empereurs sont Fou Hi, Chen Noung, Houang Ti, Chao Hao et Tchouen Hiu.

« Malgré le caractère légendaire de ces personnages les lettrés chinois n’ont jamais regardé comme fabuleux les règnes de Fou Hi, de Houang Ti et de ses successeurs jusqu’à Yao. Aucun d’eux, je dis aucun, c’est-à-dire pas un seul, n’a jamais douté que Fou Hi ne soit le Fondateur et Houang Ti le Législateur, de la Monarchie chinoise (92).

Ceci est du père Amiot, en revanche son confrère, le père Cibot nous dit :

« A en juger par ce qu’on sait d’authentique sur Yao, Chouen et Yu, l’origine de la Nation chinoise ne peut remonter que d’une ou deux générations au delà d’Yao (93).

Nous sommes loin de l’opinion de Voltaire (94) :

« Les Chinois ne remontent point jusqu’aux temps sauvages où les hommes eurent besoin qu’on les trompât pour les conduire. D’autres peuples commencèrent leur histoire par l’origine du monde. Les Chinois n’ont point eu cette folie ; leur histoire n’est que celle des temps historiques !

L’historien n’a rien à glaner dans ces récits merveilleux qui entourent le berceau de la vieille Chine ; il n’en est pas de même du folkloriste auquel appartient la tâche de retrouver les mythes d’origine étrangère auxquels ils se rattachent.

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CHAPITRE III

Dans le document HISTOIRE GÉNÉRALE DE LA CHINE I (Page 54-59)