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CHAPITRE 2 REVUE DE LITTÉRATURE

2.2 Les bétons renforcés de fibres

2.2.4 Orientation des fibres

Actuellement, l’utilisation des BRF dans l’industrie de la construction est limitée notamment en raison de la difficulté à prédire leur comportement mécanique en traction. Celui-ci est intimement lié à la distribution et l’orientation des fibres à l’intérieur de la matrice. Selon l’orientation préférentielle des fibres par rapport au plan d’une fissure, on obtiendra une contribution des fibres qui peut varier de très efficace (fibres perpendiculaires aux fissures) à peu efficace (fibres parallèles aux fissures). En comparaison à des fibres totalement alignées, l’efficacité de fibres orientées aléatoirement peut même être réduite de 70%, selon Martinie & Roussel (2011).

2.2.4.1 Facteurs d’influence

Dans le cas d’un béton autoplaçant, l’orientation des fibres est conditionnée principalement par les effets liés à l’écoulement du béton frais et la géométrie de l’élément à couler. On sait en effet que les fibres s’orientent dans la direction de l’écoulement du béton frais (Stähli et al., 2007). Ainsi, Ferrara et al. (2010) proposent que la méthode de coulée soit conçue de façon à ce que la

direction de l’écoulement du béton frais coïncide avec la direction des contraintes principales de traction de la structure en service. Les auteurs suggèrent même l’utilisation d’un logiciel de dynamique des fluides par éléments finis pour prédire l’orientation des fibres selon la méthode de mise en place.

On observe toujours un alignement des fibres près des parois des coffrages. Ce phénomène, l’effet de paroi, est une conséquence de l’orientation des fibres parallèlement aux lignes de courant au sein du BRF qui s’écoule. En effet, lorsqu’un BRF s’écoule le long d’une paroi, les lignes de courant sont parallèles à la surface de la paroi, donc les fibres s’orientent également parallèlement à cette surface (Rossi, 1998). Cet effet est d’autant plus marqué lorsque l’élément à couler est mince.

2.2.4.2 Influence sur les propriétés mécaniques

Delsol & Charron (2012) ont caractérisé le comportement en traction directe d’un BFUP pour diverses orientations de fibres. La Figure 2-4 présente les résultats pour un mélange contenant 312 kg/m³ de fibres courtes (lf = 10 mm; df = 0,2 mm).

Figure 2-4: Loi de comportement en traction directe en fonction de l’orientation moyenne des fibres : a) Comportement pré-pic; b) Comportement post-pic. (Delsol & Charron, 2012)

Dans le cadre de leurs travaux, une fibre orientée à 0 degré est considérée parallèle aux contraintes principales de traction, inversement une fibre orientée à 90 degrés est perpendiculaire aux contraintes principales. On constate qu’avec l’augmentation du coefficient d’orientation des

fibres, la longueur de la phase écrouissante et la résistance maximale sont significativement réduites. Dans le cas de l’orientation la plus défavorable des fibres (54 degrés), on observe des réductions de 95% et 60% de ces paramètres, respectivement. De plus, il est intéressant de noter que malgré les différentes orientations de fibres étudiées, l’allure de la phase adoucissante est demeurée similaire. Autrement dit, la réduction de résistance pour une même ouverture de fissure est à peu près proportionnelle à la résistance ultime obtenue dans chacun des cas.

Ces résultats concordent avec ceux de Ferrara et al. (2011). Ces derniers ont testé indirectement la résistance en traction de dallettes carrées en BRF avec un dispositif de fendage. Pour un béton à haute performance contenant 100 kg/m³ de fibres courtes en acier (lf = 13 mm; df = 0.16 mm),

leurs résultats montrent que les spécimens ayant une orientation favorable des fibres démontrent un comportement écrouissant avant l’atteinte du pic de la résistance, contrairement aux spécimens ayant une orientation défavorable des fibres, qui eux ne montrent qu’un comportement adoucissant post-fissuration. Une phase adoucissante est donc présente même lorsque l’orientation des fibres n’est pas favorable. Par contre, la résistance résiduelle (post-pic) est supérieure pour une même ouverture de fissure lorsque les fibres sont bien orientées.

Étant donné que les méthodes de caractérisation et les mélanges de béton étaient très différents dans les deux études exposées précédemment, il faut surtout retenir que le comportement écrouissant et adoucissant des BRF est extrêmement dépendant de l’orientation des fibres et que cette dernière doit être prise en compte à l’étape de conception.

Enfin, Delsol & Charron (2012) soulignent que souvent, la petite taille des spécimens de caractérisation favorise l’obtention d’une orientation idéale des fibres pour la reprise des efforts de traction. Ceci est causé par les effets de parois et la technique de mise en place du béton dans ces spécimens. Il est donc important de tenir compte du fait que l’orientation des fibres dans les éléments structuraux en bétons fibrés est souvent plus aléatoire que dans le spécimen de caractérisation. En utilisant directement les résultats extraits de la Figure 2-4 pour la modélisation de poutres, les auteurs ont démontré une surestimation importante du comportement en traction à l’échelle structurale.

Plusieurs essais existent pour caractériser le comportement du BRF en traction, c’est-à-dire obtenir la courbe σ−w. L’essai de traction directe, l’essai de flexion sur prisme entaillé et l’essai

sur dalles circulaires (Figure 2-5) font partie de la gamme disponible. Chaque essai possède ses avantages et ses inconvénients.

Figure 2-5: Essais de caractérisation pour la traction du BRF : a) traction directe; b) prisme entaillé; c) dallette circulaire. de Montaignac et al. (2011a)

L’essai de traction directe permet d’obtenir directement la courbe σ−w, mais il s’agit d’un essai difficile à réaliser correctement en laboratoire. À l’opposé, on doit procéder par analyse inverse pour obtenir les résultats sigma-w des essais de flexion sur prisme ou des essais de dalles, mais ces tests sont plus faciles à réaliser en laboratoire. Après avoir comparé les résultats de chaque méthode, de Montaignac et al. (2011) concluent que plus la surface de rupture du spécimen de caractérisation est grande, moins les résultats sont dispersés statistiquement, et donc pour obtenir un même niveau de variation des résultats, moins de spécimens sont requis avec des spécimens de grande taille. Autrement dit, l’essai sur dalle circulaire représente mieux l’anisotropie de l’orientation de fibres que l’on retrouve dans les éléments de grand volume que l’essai de traction directe, par exemple, car la surface de rupture du spécimen est plus grande.

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