• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE 2 REVUE DE LITTÉRATURE

2.3 Les dalles préfabriquées

L’utilisation de dalles préfabriquées pour les ponts a débuté aux États-Unis au milieu des années 1960 (Badie & Tadros, 2008). Ce système de construction avait pour but de réduire la durée des travaux de réhabilitation dans les zones urbaines où le trafic généré par la fermeture d’une route occasionne de nombreux désagréments aux usagers. Depuis ce temps, les ingénieurs ont pris conscience des avantages de la préfabrication pour les travaux de réhabilitation et les nouvelles constructions non seulement en raison de la rapidité d’exécution des travaux, mais aussi pour la meilleure qualité des éléments préfabriqués. Au Québec, la courte saison favorable à la mise en place du béton rend d’autant plus attrayant l’usage d’éléments préfabriqués.

Dans les projets de construction de ponts, beaucoup de temps est alloué au coffrage de la dalle, à la pose et à l’attache de l’armature, ainsi qu’à la mise en place et la cure du béton (Badie & Tadros, 2008). La préfabrication en usine permet donc de réduire la durée des travaux. De plus, elle fournit une qualité et une uniformité de produit supérieures aux éléments coulés en chantier par le contrôle des procédés de fabrication et de l’environnement. Cette dernière caractéristique est particulièrement pertinente pour les BRF. On sait en effet que les techniques de mise en œuvre du BRF influencent l’orientation des fibres, et par conséquent les propriétés mécaniques de ce matériau (voir section 2.2.4). Or la fabrication en usine permet un meilleur contrôle de l’écoulement du béton sur de petits éléments. Aussi, une cure dans un environnement contrôlé à humidité élevée et constante est obtenue. Les facteurs de risque associés à la fissuration du béton au jeune âge en chantier (Cusson & Repette, 2000) tels que les gradients thermiques élevés, le retrait restreint et les vibrations induites par le trafic sont donc éliminés. Finalement, les sections

préfabriquées minimisent les travaux à proximité du trafic et les travaux en hauteur. La sécurité des travailleurs est donc accrue.

Les BFUP peuvent être produits en usine de préfabrication ou sur chantier. Les moyens usuels de fabrication des bétons suffisent à les produire, car aucun équipement particulier n’est nécessaire au niveau du malaxage ou autres (Denarié, 2004). Par ailleurs, l’utilisation des BRF et des BFUP permet de réduire le poids et la dimension des éléments structuraux (Massicotte, 2013), ce qui augmente leur potentiel de préfabrication en facilitant la manutention (Braike, 2007). Cependant, les BFUP sont des matériaux chers à produire en raison du coût élevé des fibres et de la grande quantité de ciment qu’ils contiennent. Néanmoins, une analyse globale tenant compte de la quantité des matériaux, mais aussi le temps de main d’œuvre et la durée de vie des ouvrages, peut permettre de prédire une diminution des coûts. Le concept de dalles préfabriquées en BRF se situe donc parmi les approches les plus prometteuses afin de prolonger la durée de vie des structures à coût raisonnable.

2.3.1 Prédalles

Les prédalles sont des dalles préfabriquées de faible épaisseur qui reposent sur les poutres longitudinales ou les entretoises et servent de coffrage à la coulée subséquente de la dalle (Figure 2-10). Lorsque le béton de la dalle du tablier coulé sur place est durci, la prédalle développe une action mixte avec celui-ci pour résister aux charges. Les prédalles permettent un gain de temps en chantier puisqu’elles éliminent la mise en place des coffrages. Des travaux menés à Polytechnique par Lessard (2009) ont mené à la conception de prédalles en BRF pour les ponts. L’utilisation de BRF a permis de réduire l’épaisseur de la prédalle et les quantités d’armature pour un comportement structural équivalent au design en béton normal. De plus, un béton plus durable comme le BRF s’avère utile pour la conception des prédalles lorsque le pont est situé au- dessus d’une voie routière ou d’un cours d’eau salin, car la section inférieure de la dalle de tablier est alors soumise aux éclaboussures ou à la bruine contenant des sels.

Figure 2-10: Concept de prédalle (Lessard, 2009)

Néanmoins, les prédalles comportent certains désavantages par rapport aux dalles préfabriquées pleine épaisseur. D'abord, les prédalles doivent comporter une grande quantité d’armature afin de résister aux charges de construction, respecter les limites de flèche et supporter le poids de la dalle avant la prise du béton. De plus, contrairement aux dalles pleines, les prédalles exigent que de l’armature supplémentaire soit mise en place et qu’une grande quantité de béton soit coulée en chantier. Le temps nécessaire à ces travaux ainsi qu’à la cure de la dalle n’est donc pas éliminé. De plus, la construction de la section en porte-à-faux du tablier peut être problématique avec les systèmes de prédalle (Gordon & May, 2007).

2.3.2 Joints de chantier

Dans un système de dalles préfabriquées, une attention particulière doit être portée aux détails de construction tels que la jonction entre les panneaux adjacents, la mise au niveau des dalles sur les poutres et la connexion sur la superstructure. L’action composite entre la dalle et les poutres est généralement développée grâce à des goujons de cisaillement soudés sur les poutres maîtresses (Figure 2-11). On doit alors prévoir des réservations dans la dalle (Figure 1-1) lors de la fabrication à l’usine pour accueillir les goujons. Les réservations sont par la suite remplies avec un coulis de ciment, d’époxy ou un béton.

Figure 2-11: Réservation pour les goujons. Adapté de Issa et al. (2000)

Typiquement, il existe deux types de joints transversaux pour assurer la continuité entre les panneaux adjacents. La jonction peut se faire soit par clé de cisaillement et post-tension longitudinale, ou soit par l’usage d’un système avec joints coulés sur place (Figure 2-12). Cette dernière option est à privilégier selon Gordon & May (2007), en particulier pour les ponts à portée simple. Badie & Tadros (2008) recommandent également l’utilisation d’un système avec joints coulés en place pour la connexion entre les panneaux, car la post-tension augmente le temps de mise en place et le prix de la dalle. De plus, le remplacement partiel éventuel du tablier est complexifié par la précontrainte. Le joint constituant potentiellement une zone de faiblesse, le lien entre celui-ci et la dalle peut être amélioré par surfaçage au jet de sable ou en utilisant un agent retardateur de prise appliqué sur les coffrages. Un jet d’eau sous pression permet ensuite d’exposer les granulats et d’obtenir une surface rugueuse.

a) b)

Figure 2-12: Exemples de joints coulés sur place : a) joint avec barres d’armature en U; b) joint avec barres d’armatures droites (Hansen & Jensen, 1999)

Faggio (2014) a testé en laboratoire la performance en flexion de joints droits en BFUP sur des dalles en BRF de 150 mm et 200 mm d’épaisseur. Les joints faisaient 200 mm de large et étaient constitués d’un seul rang de barres droites qui se chevauchaient sur une longueur de 150 mm. Ses travaux ont démontré que le BFUP était adéquat pour assurer une continuité des dalles sans perte d’ancrage de l’armature, malgré la courte zone de chevauchement. Sous chargements statiques et cycliques, les joints respectaient les critères de résistance et de fissuration du Code canadien sur le calcul des ponts routiers (CSA, 2006). Par ailleurs, des travaux de recherche sont en cours dans le cadre de la maîtrise de Verger Leboeuf (2015) afin de proposer un système de connexion pour les dalles préfabriquées (joints transversaux et longitudinaux) conçues dans le cadre du présent projet de recherche.

Documents relatifs