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Traité de paix entre Descartes et Newton

La 28 ème question traite de la résistance des milieux Le chevalier précise que

3- Divers opuscules de Newton

Le chevalier commente le vingtième opuscule de Newton où est abordé le mode d’action des acides sur les corps. Newton définit les acides de la sorte: «Des corpuscules plus massives que les particules aqueuses, & plus déliés que les particules terrestres. Il leur donne à chacun une attraction active & passive des plus fortes, active vis-à-vis des corps qui sont moindres en masse, & passive vis-à-vis [de] ceux qui sont plus gros en masse qu’eux» 20. Grâce à l’attraction, les acides sont capables, pense Newton: «[De] s’assembler avec impétuosité autour des pierres, des métaux, des corps les plus durs, [de]

19 Ces différents opuscules proviennent du Recueil des opuscules de Newton publié en latin par Jean

Castillon en 1744.

20 A.-H. Paulian, Traité de paix entre Descartes et Newton, tome 2, 1763, p. 287-333, pour cette citation et

s’insinuer dans leur sein, les agiter, les diviser, les mettre en un million de piéces». Cependant, le chevalier fait remarquer que ce n’est pas parce-qu’«il n’est pas possible de rapporter tous ces effets à des causes immédiates & méchaniques», qu’il faut forcement recourir à l’attraction car, dit-il: «[Elle] ne seroit pas si forte, si elle ne se faisoit qu’en raison inverse des quarrés des distances, &…seroit insoutenable, si elle se faisoit suivant quelqu’autre loi». De plus, le chevalier se range derrière une grande majorité de chimistes qui considèrent les acides comme: «Des corps roides, longs, pointus, tanchans & tout-à- fait propres à s’insinuer par une infinité d’endroits dans des espèces de guaines, ou de corps poreux & spongieux». Cependant, le chevalier signale que cette dernière explication ne donne pas «la cause qui pousse avec une vitesse presque’infinie les uns dans les autres».

Commentant l’article XXXI du dix-neuvième opuscule 21 sur les tables des réfractions astronomiques, le chevalier rappelle qu’«un rayon de lumière qui passe obliquement d’un milieu plus rare dans un milieu plus dense, se réfracte en s’approchant de la perpendiculaire». Avant d’aborder la table des réfractions astronomiques dressée par Newton, le chevalier revient sur l’explication du phénomène de réfraction et donne alors son sentiment à ce sujet: «La réfraction de la lumière dépendoit évidemment des loix générales de l’attraction. C’est un corps infiniment petit sur lequel nos corps terrestres ont une action très sensible. Un milieu plus dense l’attire donc plus qu’un milieu plus rare ; elle doit donc se réfracter vers la perpendiculaire, lorsqu’elle passe obliquement d’un milieu plus rare dans un milieu plus dense…Lorsqu’on n’aura recours à l’attraction, que dans ces sortes d’occasions, il n’est pas à craindre que le commun des Physiciens le trouve mauvais». Toutefois, il faut admettre, remarque le chevalier, que, jusqu’à présent, personne n’a été capable de dire «à quelles causes secondes on pourroit rapporter ces phénomènes 22». Il donne la table des réfractions astronomiques de Newton et précise qu’elle «n’est bonne que pour l’Angleterre» puisque la réfraction dépend du lieu d’observation sur Terre. Il commente aussi la table des réfractions astronomiques de l’abbé de la Caille déterminée à Paris, plus complète, dit-il, que celle de Newton

21 Castillon Jean, Isaaci Newtoni…Opuscula mathematica, philosophica et philologica, 1744, t. 2, p. 409. 22 Cette affirmation est inexacte puisque, par exemple, Descartes avait attribué la cause (seconde) des

«puisqu’elle donne la Réfraction d’un Astre, à l’élévation de 89 degrés» (celle de Newton allait seulement jusqu’à 75°). Afin de tenir compte de la température et de la pression atmosphérique, l’abbé de la Caille qui avait «observé qu’un pouce d’augmentation dans la hauteur du Baromètre produit une 27e partie de la réfraction marquée dans sa Table» et que «dix degrés d’abaissement dans le thermomètre produisent le même effet», dresse quatre tables des réfractions astronomiques. Enfin, le chevalier donne une remarque de M. de la Lande prise dans l’ouvrage intitulé Dans la connoissance des mouvements célestes: la correction qu’apporte l’abbé de la Caille avec sa table ne peut «guère s’appliquer à des hauteurs plus petites que 6 degrés…Les vents, les vapeurs, les nuages, les fumées y jettent probablement une trop grande complication».

Dans le vingt et unième opuscule, le chevalier commente la table réalisée par Newton donnant les «degrés de chaleur» de différents corps. Mais avant cela, le chevalier donne quelques remarques qui, dit-il, «ne seront pas inutiles à ceux qui voudront sçavoir comment cette Table a été dressée». Ainsi, il explique: «Le feu agité d’un mouvement très rapide en tout sens, est la cause de la chaleur». De plus, «le froid absolu est physiquement impossible» car, dit-il: «Un corps absolument froid devroit ne contenir aucune particule ignée : ou du moins faudroit-il supposer que les particules ignées qu’il contient, sont dans un parfait repos». La chaleur est une notion toute relative et les corps froids sont donc, précise le chevalier, des corps moins chauds «que tels & tels autres avec lesquels nous les comparons». Enfin, il explique que les valeurs contenus dans la table de Newton «qui marquent les différents degrés de chaleur sont des nombres que l’on peut comparer, ou avec 0, ou les uns avec les autres», la valeur nulle indiquant: «La chaleur qui règne dans l’air, pendant l’hyver, lorsque l’eau commence à se convertir en glace». Il donne aussi le procédé utilisé Newton pour construire son thermomètre: «Il mit dans un tas de neige qui commençoit à se fondre, un thermomètre fait avec de l’huile de lin ; c’est-là précisément la chaleur qui règne pendant l’Hyver, lorsque l’eau commence à se changer en glace. Il divisa en 10000 parties égales l’espace qu’occupa alors la liqueur». En utilisant ce thermomètre sur plusieurs substances, Newton voit alors que l’huile occupe des espaces plus grands qu’avec l’eau glacée et il obtient les résultats suivants: 10256 pour le corps humain, 10705 pour l’eau qui commence à bouillir, 10725 pour l’eau bouillante et 11516 pour l’étain fondu «qui commence à prendre la consistance de

l’amalgame». Le physicien conclut alors que «la raréfaction de l’huile de lin dans le Thermomètre» est indiquée par «les nombres qui sont au-dessus de 10000». Pour établir sa table, Newton exprime, de manière arbitraire, «par 12 la chaleur naturelle du corps humain» et peut ensuite calculer les chaleurs des autres substances (33 pour l’eau qui commence à bouillir, 34 pour l’eau bouillante et 71 pour l’étain fondu…). Enfin, le chevalier signale que Newton remarque: «La même chaleur fait dilater dix fois plus l’air, que l’huile de lin, & 15 fois plus l’huile de lin que l’esprit de vin 23».

Le chevalier relève que, dans le dix-neuvième opuscule, Newton répond à plusieurs objections faites contre son optique bien avant la parution de son Traité d’optique en 1704. Reprenant un point de l’opuscule qui lui semble important d’évoquer, le chevalier explique: «Il m’a toujours été démontré, comme 2 & 2 font 4, que la lumière est un corps. En effet tout ce qui est composé ; tout ce qui a une masse ; tout ce qui frappe & blesse ma rétine, est un corps. Or la lumière a toutes ses qualités. Donc la lumière est un corps. Le diriez-vous cependant, Monsieur ? Newton n’a jamais osé l’affirmer ; il se plaint même de ceux qui lui font tenir un pareil langage ; & il leur fait remarquer que toutes les fois qu’il a parlé de la lumière comme corps, il a toujours eu soin d’ajouter le mot peut-être». Cependant, le chevalier revient sur ce qui avait été dit précédemment en examinant le Traité d’optique: «La lumière est un corps hétérogène, composé de sept rayons différens, dont chacun a un tel degré de réfrangibilité & de réflexibilité ; & tel rayon n’a tel degré de réfrangibilité, que parce les parties dont il est formé ont telle masse et telle figure». Toutefois, pour excuser Newton sur ce point litigieux de sa pensée, le chevalier fait remarquer: «Cet Opuscule a paru dans les Transactions philosophiques long-tems avant que son Optique vit le jour. En effet l’Optique ne fut donnée au public, qu’en 1704, & cet Opuscule fut inséré dans les Transactions philosophiques le 18 du mois de Mars 1672».

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Chapitre 4 : La physique «Newto-Cartésienne» de

Paulian

Comme pour les deux précédents volumes de l’ouvrage, certaines parties trop éloignées de notre étude ne seront pas examinées comme celles traitant de logique, de métaphysique et de morale. En outre, la partie concernant la physique céleste ne sera pas vue dans la mesure où Paulian adopte celle de Newton sans faire le moindre changement d’importance. Au contraire, nous étudierons très attentivement les parties sur les physiques générale et terrestre qui présentent le plus intérêt à nos yeux puisqu’elles constituent la physique «Newto-Cartésienne» de Paulian.

Paulian débute le troisième tome du Traité de paix entre Descartes et Newton en annonçant qu’il renferme: «Un système général de Philosophie que la Raison adopte, que la Méchanique étaye, que l’expérience confirme, & dans lequel il entre à peu près autant de Cartésianisme que de Newtonianisme» 1. A propos de la démarche employée, il précise: «Tout ce qui a été regardé comme faux dans les Vies littéraires de Descartes & de Newton, quelque amusant qu’il soit, n’aura aucune part à mon système mixte…Tout ce qui a été démontré vrai, en sera le fondement & la base…Pour ce qui a été décidé probable, je l’adopterai, ou je le rejetterai indifféremment, de quelque part qu’il me vienne, suivant les circonstances où je me trouverai».

1 A.-H. Paulian, Traité de paix entre Descartes et Newton, tome 3, 1763, pp. 2-3, pour cette citation et la