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VI.2 OPTIMISATION DU PROCEDE DIGESTAERO

VI.2.1 Optimisation du traitement biologique de l’azote

Comme cela a été décrit dans la partie II.3.4 de ce mémoire, l’une des voies d’optimisation du traitement aérobie de l’azote est la mise en place d’un shunt des nitrates lors des étapes de nitrification et de dénitrification. Pour la conduite du procédé DIGESTAERO, la mise en place du shunt doit permettre :

-une diminution de l’énergie consommée par l’aération,

-une augmentation de la quantité de DCO pouvant être méthanisée via une diminution du taux de bypass,

-une augmentation de la charge en azote et/ou une diminution de la taille de l’ouvrage pour le traitement aérobie.

Afin de mettre en place le shunt, les différentes stratégies existantes relevées par Bernet et

al. (2001) ont pour finalité l’inactivation de la biomasse nitratante. Pour ce faire, trois

stratégies éprouvées en conditions opératoires ont été identifiées :

-le contrôle de l’oxygène dissous aux alentours de 0,5 mgO2.L-1 (Hanaki et al., 1990, Jianlong & Ning, 2004),

-le contrôle de la température aux alentours de 30-35°C (Hellinga et al., 1988, Van Kempen et al., 2001),

-un contrôle des inhibitions.

Concernant les inhibitions, celles-ci portent principalement sur le contrôle du pH et de la teneur en ammoniac libre ou en acide nitreux (Anthonisen et al., 1976, Abelling & Seyfried, 1992). Cependant, les conditions expérimentales et le fort pouvoir tampon du lisier permettent difficilement la mise en place d’une inhibition par une diminution ou une augmentation significative du pH. Cette stratégie ne sera donc pas évaluée.

Concernant la température, le réacteur aérobie a fonctionné à 30°C durant les 300 jours d’expérimentations sans affecter les cinétiques de nitritation et de nitratation présentées dans le tableau V.4. Un contrôle seul de la température pour la mise en place du shunt n’est donc pas satisfaisant pour son établissement.

Finalement, seul le contrôle de l’oxygène dissous présente une potentialité expérimentale, d’une part par la facilité de sa mesure, et d’autre part par la possibilité de régulation. L’évaluation de cette stratégie a été réalisée par l’utilisation de la partie ASM/PiWat du modèle pour une configuration du procédé similaire aux phases 1 et 2 sur le pilote du procédé. Le lisier d’alimentation utilisé est le lisier fractionné selon les paramètres ADM1 présenté précédemment.

VI.2.1.2 Régulation de la concentration en oxygène dissous

La modélisation d’une régulation de l’oxygène dissous autour d’une concentration cible de 1, 0,5 et 0,3 mgO2.L-1 a permis d’estimer dans ces conditions d’aération le pourcentage d’azote biodégradable nitrité et nitraté. Les résultats sont présentés dans le tableau VI.7.

Tableau VI.7 : Pourcentage d’azote biodégradable nitrifié en fonction de la régulation en oxygène dissous

Nitritation Nitratation

O2 non régulé 96% 96%

O2 régulé à 1,0 mgO2.L-1 96% 94%

O2 régulé à 0,5 mgO2.L-1 96% 86%

O2 régulé à 0,3 mgO2.L-1 96% 14%

Quantité d'azote dégradé Configuration

Bien que la littérature indique un seuil de 0,5 mgO2.L-1 pour obtenir un shunt durable (Hanaki et al., 1990, Jianlong & Ning, 2004), le modèle indique une concentration plus basse et de l’ordre de 0,3 mgO2.L-1. Lors des essais en phase 2 sur le pilote, une régulation « tout ou rien » de l’oxygène dissous aux alentours de 1 mgO2.L-1 a été mise en place. Les résultats des vitesses de nitrification présentés préalablement dans le tableau V.4, montrent que, malgré cette régulation, les vitesses de nitratation et de nitritation sont similaires à celles obtenues lors de la phase 1. La régulation à 1 mgO2.L-1 n’a donc pas permis de limiter significativement l’étape de nitratation et les expériences confirment donc les données issues de la modélisation.

Ainsi, pour obtenir un shunt significatif, il serait nécessaire de réguler la concentration en oxygène dissous aux alentours de 0,3 mgO2.L-1. Cependant cette régulation ne suffit pas à assurer un lessivage complet de la biomasse nitratante. Ainsi, bien que le shunt soit effectif, il n’en est pas moins instable dans la durée. De plus, d’un point de vue pratique, la régulation de l’oxygène dissous à une valeur de l’ordre de 0,3 mgO2.L-1 rend impossible l’utilisation d’un signal « tout ou rien » et nécessite l’utilisation d’algorithme de contrôle plus compliqué. De plus, il est impossible d’assurer de manière fiable et durable une telle précision de mesure sur le terrain.

Ainsi, l’obtention d’un shunt sur la simple régulation de l’oxygène dissous autour d’une valeur seuil est difficilement réalisable et applicable sur le terrain.

VI.2.1.3 Régulation de la durée d’aération

Contrairement au traitement des eaux usées, la phase de nitritation n’est pas systématiquement limitante et une accumulation de nitrite peut être observée à faible concentration en O2. Lorsque l’ensemble de l’azote biodégradable a été nitrité, cela se traduit par un saut de concentration en oxygène dissous lié à la baisse de sa consommation, comme l’illustre la zone encadrée sur la figure VI.6.

Le principe de la régulation de la durée d’aération consiste alors à arrêter l’aération à la fin de l’étape de nitritation, permettant ainsi de limiter le temps de croissance des nitratantes et de favoriser ainsi leur lessivage.

0 1 2 3 4 5 6 7 8 4 5 6 7 8 9 10 11 12 Temps (j) O2 d is so u s (m g O2 .L -1) 0 10 20 30 40 50 60 70 A z o te m in ér a le ( k g N .m -3)

Ox. dissous simulé N ammoniacal N nitrite N nitrate

La modélisation d’un arrêt de l’oxygénation autour d’une concentration cible de 5, 4, 3 et 2 mgO2.L-1 a permis d’estimer dans ces conditions d’aération le pourcentage d’azote biodégradable nitrité et nitraté. Les résultats sont présentés dans le tableau VI.8.

Tableau VI.8 : Pourcentage d’azote biodégradable nitrifié en fonction du seuil d’arrêt de l’oxygénation

Nitritation Nitratation O2 non arrêté 96% 96% 58% O2 arrêté à 5 mgO2.L-1 96% 88% 45% O2 arrêté à 4 mgO2.L-1 96% 8% 43% O2 arrêté à 3 mgO2.L-1 96% 6% 42% O2 arrêté à 2 mgO2.L-1 96% 1% 37% Durée d'aération dans le cycle

Configuration Quantité d'azote dégradé

Dans notre configuration, un shunt significatif est obtenu pour un arrêt de l’oxygénation à partir d’une valeur seuil de 2 mgO2.L-1 et jusqu’à 4 mgO2.L-1. Cependant, afin de garantir un lessivage efficace de la biomasse et permettre ainsi un shunt durable, un arrêt de l’oxygénation à une concentration de 2 mgO2.L-1 est préférable.

Comme indiqué dans la partie V.2.2.2 de ce mémoire, ces données ont été confirmées expérimentalement. En effet, le shunt a été durablement obtenu avec un arrêt de l’aération à 2 mgO2.L-1.