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Zone ombrée Premier degré : prise de contact sensible 2 Ensemble du schéma Deuxième degré : création de sens sym-

Dans 24 des comportements, les objets perçus sont interprétés de façon symbolique Leurs qualités évoquent soit d'autres objets, d'autres lieu

1. Zone ombrée Premier degré : prise de contact sensible 2 Ensemble du schéma Deuxième degré : création de sens sym-

bol ique.

Si les comportements esthétiques passent progressivement de la sen- sation et de l'exploration à la création de sens symbolique par le jeu et par l'évocation, les comportements du premier niveau ne sont pas abandonnés au profit du deuxième. Au contraire, la perception des qualités des objets est nécessaire à la création de sens. Le premier niveau est nécessaire au deuxième et le deuxième intègre le premier. Le plaisir simple de la per- ception sensible continue d'être goûté tout au long de l'existence. Il peut devenir très raffiné. Des personnes peuvent discriminer jusqu'à une quarantaine de tons de gris d'intensité différente. (itten, 1966, p. 19). La plupart de nos étudiants sont épatés de pouvoir réaliser une gamme de douze tons de gris.

Si l'on considère le sens esthétique comme la capacité de sentir et de réagir aux qualités apparentes de l'environnement et aux qualités expres- sives des oeuvres d'art, on peut supposer que les sensations et les explo- rations du jeune enfant soient les premières relations esthétiques avec le monde. L'enfant recherche le contact avec les objets. I1 va à leur rencon-

tre et s'accorde avec leurs qualités ou les rejette. Les objets ont une signification pour lui s'ils répondent à ses besoins d'action et d'investi- gation. L'action et les jeux d'exercice avec les objets affinent la per- ception des qualités singulières des objets en même temps qu'ils servent de base à la conceptualisation. Les aspects perceptifs et cognitif de l'activi té permettent d'entrer en contact avec les objets et de les saisir. C'est un mouvement d'ouverture vers les objets. Si l'enfant assimile les objets à ses schemes d'action, îl est aussi avide d'en éprouver la texture, le poids, la dimension, la brillance. L'expérience esthétique de l'enfant est un accord entre ses capacités d'action et les qualités de l'objet.

L'expérience esthétique de l'enfant est aussi un accord entre ses be- soins affectifs et les qualités de l'objet perçu. L'enfant trouve manifes- tement du plaisir à se familiariser avec des objets qu'il rencontre régu- lièrement. Il se crée des liens d'amitié avec des objets de son environne- ment qui deviennent des points de repère. De même l'adulte se crée des

points de repère dans la culture à partir d'oeuvres familières. Les goûts se modèlent selon les besoins affectifs.

Avec la formation de la pensée symbolique, l'enfant investit les ob- jets de significations nouvelles. Il éprouve toujours du plaisir à sentir

les textures, les espaces et le mouvement et il sait faire durer les sensa- tions. La sensation s'additionne de représentation symbolique. Des ob- jets peuvent se substituer à d'autres et tenir leur place. Les substitu- tions se font souvent à partir d'analogies formelles. L'enfant perçoit et rapproche des structures. Ainsi des objets concaves seront transformés en baignoires, en berceaux, ou en bateaux. Des analogies formelles seront aussi évoquées pour décrire et comparer des objets. La capacité de rempla- cer un objet par un autre qui en devient le symbole est à l'origine du

sur la capacité de représentation subjective. Pour réagir esthétiquement à une oeuvre d'art, il faut en percevoir et en comprendre la forme objecti- ve et sentir cette forme comme significative en se référant à un vécu per- sonnel. Les jeux symboliques de l'enfant qui assimile les objets à d'au- tres en se basant sur la perception de leurs qualités formelles sont à l'o- rigine de la création de sens esthétique. Ensuite l'enfant devient capable de sentir la dimension émotive évoquée par certaines formes. Les images, la musique, la danse deviennent expressifs. L'enfant en plus de percevoir les

ressemblances formelles entre des objets peut sentir des correspondances en- tre des formes objectives et des sentiments intimes. Cette relation empa- thique avec les objets est caractéristique de l'expérience esthétique et elle repose sur l'assimilation des formes perçues à des réalités de la sensibi1i té propre.

La réceptivité esthétique se compose de la rencontre des qualités uni- ques des objets ou des oeuvres d'art et de l'attention à l'impact intérieur produit par ces objets. Cette sensibilité aux qualités des objets se déve-

loppe à la faveur des rencontres avec les objets. Elle provient aussi d'une présence attentive aux sensations et aux sentiments. La création de sens esthétique est 1'organisation des perceptions et des évocations en une ex- périence unique où l'individu se sent en accord avec son environnement. Cet accord peut être de nature sensori-motrice quand les gestes et la posi- tion sont en accord avec l'objet de l'expérience ou de nature symbolique quand la sensibilité se reconnaît dans des formes extérieures et plus parti- culièrement dans des oeuvres d'art. La naissance et le développement du sens esthétique sont liés à l'action sensori-motrice et à l'imagination sym- bol ique.

1. Conclusion

C'était l'objet de cette étude de décrire les débuts du sens esthé- tique. Pour ce faire, j'ai dû reviser mes notions d'esthétique qui étaient liées à des conceptions restrictives de la beauté pour m'orienter vers une approche de l'esthétique ayant pour objet tout le domaine du sensible. En cours de ., route, j'ai cessé de me demander ce que les enfants trouvent beau et j'ai commencé à me demander comment les enfants vont à la rencontre des qualités sensibles, comment ils éprouvent le monde dans lequel ils se trouvent et comment ces expériences structurent le sens esthétique.

Cette nouvelle façon de poser la question m'a permis de chercher d'au- tres types de réactions esthétiques que les réactions verbales. Au lieu de noter seulement les circonstances où les enfants diraient "c'est beau", je

les ai regardés agir au contact des qualités de l'environnement. Ces ob- servations m'ont amenée à découvrir et à partager avec mes enfants un monde insoupçonné de sensations et de plaisirs esthétiques. C'est un de mes sou- haits que cette étude incite d'autres éducateurs à être attentifs à l'éclo- sion esthétique de leurs jeunes. Un oeil ouvert sur cette dimension trans- forme des gestes apparemment ordinaires en événements uniques.

Si d'autres personnes intéressées pouvaient noter, au jour le jour, les comportements esthétiques d'autres enfants, nous pourrions accumuler une

documentation qui permettrait de vérifier et d'approfondir les résultats de la présente recherche. De plus nous pourrions aborder les questions, mises de côté ici, des interventions de l'éducateur et de l'influence du mi 1ieu.

Cette étude m'aura permis de poser des jalons dans ma compréhension du développement esthétique en définissant plus précisément la nature de la dimension esthétique et en observant des formes variées d'expériences esthé- tiques chez deux jeunes enfants. L'idée du développement du sens esthéti- que à partir des qualités formelles perçues et de l'expérience sensible du sujet s'est révélée une piste de recherche possible à approfondir et à vérifier. Les premières observations rassemblées ici semblent démontrer que les jeunes enfants se portent activement à la rencontre et à la re- cherche des qualités formelles des objets et qu'ils attribuent à ces objets des significations en rapport avec leur expériences sensori-motrices et avec leurs activités symboliques. En rapprochant ces constatations de celles de l'étude de Parsons, Johnston et Durham (Parsons, Johnston et Dur- ham, 1978, p.83-104), (cf. chap. II, p. 14-16), on peut supposer :

1) que la perception esthétique se développe en étendue et en profondeur et