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D OMAINE D ’ EXISTENCE DE L ’ ANOMALIE DE COMPORTEMENT PLASTIQUE

Chapitre II : SYNTHESE ET INTERPRETATION

II.2. D OMAINE D ’ EXISTENCE DE L ’ ANOMALIE DE COMPORTEMENT PLASTIQUE

Pour le titane pur, ainsi que pour certains alliages, le domaine d’existence des instabilités observées sur les courbes de traction, ou domaine d’existence du phénomène Portevin - Le Châtelier (PLC) a été tracé dans un diagramme

!

log ˙ " p en fonction de 1/T. Cette

représentation permet ainsi de faire apparaître deux domaines de comportement des dislocations radicalement différents possédant une partie commune : c’est précisément celle du domaine d’existence du phénomène PLC.

Figure II-3 : Schématisation du domaine d’existence du phénomène PLC dans le diagramme

!

log ˙ " pen fonction de 1/T

Le domaine des hautes températures ou des faibles vitesses de déformation correspond en principe au mouvement des dislocations coins traînant des atmosphères de solutés (solute drag region : dislocations gliding accompanied by their cloud of atoms) ou mode traînage. Il s’étend depuis les hautes températures (600°C - 800°C) jusqu’à la limite de droite du domaine qui est bornée par une droite inclinée dont la pente correspond à une énergie d’activation d’environ 190 kJ/mole. Au-delà de cette limite, vers les basses températures, les dislocations ne sont plus en mesure d’entraîner dans leur déplacement une

quelconque surconcentration en atomes de soluté qui puisse « les ralentir » ou exercer une quelconque force de freinage.

Le second domaine, celui des basses températures ou des vitesses élevées de déformation, est celui où les dislocations se déplacent rapidement, les atomes de soluté restant quasi immobiles et ne jouant qu’un rôle de durcissement de solution solide (friction region :

slip by dislocation glide and solid solution hardening) ou mode friction. Ce domaine s’étend

depuis les basses températures où le glissement reste toujours possible mais nécessite des contraintes constamment croissantes (en dessous de la température ambiante pour Ti et Zr) jusqu’à la droite d’énergie d’activation environ 250 kJ/mole. Au-delà de cette limite, vers les hautes températures, la vitesse de diffusion des atomes de soluté vers les lignes de dislocations mobiles est suffisamment grande pour que des atmosphères se forment même autour des dislocations les plus rapides, de sorte que le mode friction ne soit plus possible, ou bien ne concerne que des populations de dislocations négligeables.

On comprend ainsi que, dans la zone centrale de ce diagramme, c’est-à-dire celle du domaine de recouvrement des deux modes plastiques, les dislocations ont la possibilité de se déplacer en divers lieux et à divers moments au cours de la sollicitation, soit dans le mode traînage, soit dans le mode friction. Ainsi, de brusques changements de comportement peuvent apparaître tant à l’échelle microscopique par l’effet de « désancrage » de dislocations isolées en des lieux de concentration de contrainte, qu’à l’échelle macroscopique, du fait des phénomènes d’avalanche dans lesquels les dislocations rapides rattrapent et « désancrent » de nombreuses dislocations lentes formant ainsi des bandes de glissement très intenses. Ces dernières se regroupent sous forme de bandes de cisaillement inclinées sur l’axe de sollicitation d’environ 56° et traversant plusieurs grains, provoquent des serrations sur les courbes de traction, comme il a été abondamment rapporté dans les alliages d’aluminium (Mc Cormick, 1971, Fujita, 1977) ou les aciers (Mc Cormick, 1973). Par contre, dans les matériaux de moindre symétrie cristalline que la symétrie cubique, comme le titane ou le zirconium de symétrie hexagonale, la localisation unitaire sous forme de bandes bien définies en faible nombre (unique ou quelques unités) ne semble pas s’appliquer. Elle serait remplacée par une localisation plus répartie dans le corps de l’éprouvette et dont l’intensité dépendrait de l’orientation cristallographique locale des grains (Héripré, 2007).

L’origine de l’anomalie d’écoulement viscoplastique réside dans le fait que ce sont des mécanismes dits « de blocage des dislocations » qui se trouvent activés thermiquement dans la partie basse du domaine de température où la contrainte d’écoulement remonte, alors que généralement l’élévation de la température favorise la plasticité, en autorisant de nouveaux mécanismes de déformation plastique à être activés. Schématiquement, aux frontières « basses températures » du domaine, la mobilité des atomes de soluté devient suffisante pour qu’ils puissent rejoindre le voisinage du cœur de la dislocation qui les attire et créer ainsi un puits de potentiel pour la dislocation. Au-delà du maximum de la contrainte de traînage, la température devient suffisamment importante pour que la surconcentration d’impuretés située au voisinage des dislocations migre de plus en plus facilement, jusqu’à ne plus exercer de force significative de ralentissement lorsqu’on s’approche de la frontière « hautes températures » du domaine. Ces phénomènes, qui réduisent la mobilité des

localisation de la plasticité. Ils sont souvent décrits à l’aide de termes excessifs : mécanismes

de blocage ou mécanismes de désancrage alors que les variations de mobilité subies par les

dislocations au cours de chacun des 2 modes sont fonction de la température et/ou de la contrainte ; ils seront décrits avec plus de détails au paragraphe II.5.

Les calculs de Yoshinaga et Morozumi (Yoshinaga, 1971) effectués dans le cas de la

diffusion du carbone vers des dislocations coin en mouvement à la vitesse de 200 nm.s-1

dans le vanadium (figure II-4), illustrent clairement a) l’adaptation dynamique des profils de surconcentration et b) la cinétique de formation de ces atmosphères. Sur la figure a) sont représentés en gras, d’une part le profil symétrique de surconcentration en équilibre stationnaire pour une dislocation immobile, d’autre part le profil autour d’une dislocation en

mouvement à 200 nm.s-1

après 35 ms. Il s’agit du temps après lequel elle a parcouru 7 nanomètres ; le profil a alors quasiment atteint sa valeur d’équilibre. Les courbes 1, 2, 3 et 4 correspondent à l’évolution du profil pour des temps intermédiaires. De façon semblable, la figure b) représente la construction progressive du profil de surconcentration autour d’une dislocation en mouvement qui ne présenterait aucune surconcentration initiale. La distance entre sites atomiques a pour valeur s.

Figure II-4 : Variations de la distribution de concentration en carbone autour d’une dislocation mobile (Yoshinaga et Morozumi, 1971)

II.3. E

VOLUTION DES CONTRAINTES D

ECOULEMENT EN FONCTION DE LA