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Obtention de l’indice optique complexe

4.3.1 Méthode

Nous avons donc des mesures couvrant une large gamme de longueurs d’onde (de 0,6 à 800 µm). A partir de ces deux séries de mesures de couples de paramètres (R et T via le FTIR ettet ϕvia la TDS), nous nous proposons d’extraire l’indice de réfraction complexe des films de nanotubes de carbone. Pour ce faire, nous allons fitter les couples (R,T), et (t, ϕ) expérimentaux à l’aide de ceux obtenus à partir d’une permittivité diélectrique décrite par une somme de fonctions de Drude-Lorentz que l’on cherche à déterminer.

Le film suspendu de CNT est considéré comme une couche homogène d’épaisseur det de permittivité complexe ˜= ˜n2= (n+i.κ)2. Sa rugosité rms étant de 165 nm, la diffusion optique peut être négligée dans le domaine IR-THz. Les expressions des amplitudes de transmission et de réflexion d’un film de CNT d’épaisseurdsont alors données par :

˜t(λ,˜n(λ), d, θ) = t12t21ejkd

1−r122 ej2˜kd et r(λ,˜ ˜n(λ), d, θ) = r12(1−e2jkd)

1−r122 ej2˜kd (4.1) où ˜k= 2π˜n/λ est la norme du vecteur d’onde,d=d.cos(arcsin(sin(θ)/˜n)) est la longueur du chemin optique dans le film de CNT, et θ est l’angle d’incidence. Le paramètre tij

(respectivement rij) est le coefficient de transmission de Fresnel (resp. de réflexion) d’un milieuivers un milieuj (dans notre cas 1 est le vide et 2 est le film de CNT). Ils dépendent de l’angle d’incidenceθet de l’indice ˜n(λ).

Les équations 4.1, permettent de retrouver l’expression des grandeurs mesurées :T =|˜t|2 et R = |˜r|2 pour les mesures FTIR, et t =|t|˜ et ϕ = arg(˜t) pour les mesures TDS. Pour la phaseϕ, une correction est appliquée aux mesures pour prendre en compte une couche d’air de la même épaisseur d que le film CNT (d = d à incidence normale). Les quatre variables mesuréesR,T,t, etϕdépendent deλ, ˜n(λ),det θ. L’angle d’incidence est de 13 pour les mesures FTIR et 0 pour la TDS, l’épaisseurddu film est 920 nm (valeur moyenne mesurée). Le seul paramètre inconnu est donc ˜n(λ), (ou ˜(λ)) qui est obtenu en fittant les courbes expérimentales.

Plutôt que de chercher pour chacune des longueurs d’ondes, une valeur de la fonction diélectrique qui soit capable de décrire les variables mesurées, nous avons préféré modélisé cette dernière, par un modèle d’oscillateurs de Drude-Lorentz et effectué le fit en faisant varier les paramètres de ce dernier. La fonction diélectrique ˜est modélisée comme suit :

˜

(ω) =ω2p

ω(ω+jΓ) +X

i

ωpi2

ω0i2ω2iω (4.2) où ω est la fréquence angulaire, la constante diélectrique à haute fréquence, ωp et

4.3 Obtention de l’indice optique complexe 55

ωp sont respectivement la fréquence plasma et la constante d’amortissement de l’oscillateur de Drude. Le paramètreωpi est la force de l’oscillateur, ω0i est la fréquence centrale et Γi

l’amortissement de chaque oscillateur de Lorentz.

4.3.2 Résultats et Discussion

Afin d’opérer le fit, les valeurs initiales de ces paramètres d’ajustement sont prises à partir de la référence17 et les résultats obtenus sont répertoriés dans le tableau suivant :

Table 4.1– Paramètre de Drude Lorentz obtenu par fit en cm−1. La constante diélec-trique à hautre fréquence est is 1.37.

Oscillator ωp Γ ω0

Drude 2292 287

-Lorentz 1 3126 3088 3 Lorentz 2 1611 45 64 Lorentz 3 3650 2693 7429 Lorentz 4 6109 6830 10810 Lorentz 5 4244 3484 14715

Les valeurs de R, T, t, et ϕ calculées à partir des paramètres du tableau 4.1 sont re-présentées par les lignes continues sur les figures 4.2 et 4.3. On peut voir qu’elles sont en bon accord avec les mesures FTIR et TDS. Un léger écart est toutefois observé dans la phase de la transmission pour des longueurs d’onde supérieures à 600µm. Notons que nous ne disposons pas de mesure dans la gamme 120 µm -200µm. La validité du modèle dans cette gamme n’est donc pas certifiée. Si le fit n’est pas parfait sur toute la gamme spectrale, il donne néanmoins des résultats utiles sur le comportement des films CNT dans un large domaine spectral.

Aux hautes fréquences, les transitions entre les singularités de Van Hove sont décrites par trois lorentziennes. Aux basses fréquences, la fonction diélectrique est décrite par un modèle de Drude des porteurs libres (associés aux tubes métalliques), et par deux lorentziennes. En effet, des bandes d’absorption autour de 100 µm sont couramment observés dans les films de CNT181920. Slepyan et al.21 ont attribué ce pic à la combinaison de deux effets : (i) la modification de la structures de bande induite par la courbure des la surface des SWCNT, et (ii) un effet de dépolarisation axiale due à la longueur finie des SWCNTs métalliques.

L’indice optique complexe ˜n(λ) est représentée sur la figure 4.4. En dessous de 10 µm

17Borondicset al., « Charge dynamics in transparent single-walled carbon nanotube films from optical transmission measurements ».

18Ruzickaet al., « Optical and dc conductivity study of potassium-doped single-walled carbon nanotube films ».

19Ugawaet al., « Far-infrared to visible optical conductivity of single-wall carbon nanotubes ».

20Borondicset al., « Charge dynamics in transparent single-walled carbon nanotube films from optical transmission measurements ».

21Slepyan et al., « Terahertz conductivity peak in composite materials containing carbon nanotubes:

Theory and interpretation of experiment ».

56 Propriétés Optiques des Films de nanotubes de Carbone

Figure 4.4 – Spectres de la partie réelle (ligne verte) et imaginaire (ligne bleue) de l’indice optique d’un film de SWCNT ainsi que du coeffcient d’absorption (4πk/λ) d’un film de SWCNT (ligne rouge pointillée)

(voir encart de la figure 4.4) la partie réelle de l’indice optique n est proche de 1, tandis que la partie imaginaireκaugmente avec la longueur d’onde. Dans le moyen et le lointain infrarouge, entre 4 et 150 µm, le film de CNT présente plutôt un comportement de type métallique : la partie réelle n étant inférieure à la partie imaginaire κ. Au delà, dans le domaine THz, n et κ augmentent jusqu’à des valeurs comprises entre 25 et 35. De telles valeurs ont déjà été rapportées dans des films de nanotubes de carbone à double paroi22.

La Figure 4.4 présente également le coefficient d’absorptionα= 4πκ/λdu film de CNT.

Dans le proche et le lointain infrarouge, l’absorption est importante. Mais le spectre d’ab-sorption montre une fenêtre de transparence dans le moyen infrarouge (entre 1,5 et 5µm).

Par exemple àλ=2 µm, un film de 200 nm d’épaisseur présente une transmission de 80%.

Les films de CNTs sont en effet étudiés pour la conception d’électrodes transparentes dans le visible, mais d’après nos résultats, il pourrait être également prometteur de les utiliser dans la gamme de l’infrarouge thermique.

22Kumaret al., « Terahertz Time Domain Spectroscopy to Detect Low-Frequency Vibrations of Double-Walled Carbon Nanotubes ».