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Chapitre 1. Introduction

1.5 Objectifs de la thèse

L’objectif général de la thèse est de comprendre l’origine moléculaire des résistances non- génétiques aux ligands des récepteurs de mort : la résistance intrinsèque d’une population de cellules isogéniques et la résistance induite dans les cellules survivantes.

Quels sont les facteurs moléculaires à l’origine de la réponse hétérogène au traitement TRAIL ?

Nous savons que la sensibilité à l’apoptose induite par TRAIL peut être modulée à plusieurs niveaux dans le cancer (récepteurs, expression des facteurs pro et anti-apoptotiques, les voies de dégradation, du métabolisme etc…). Nous avons aussi pu voir que l’hétérogénéité retrouvée dans la population tumorale est un mécanisme de résistance à part entière. L’hétérogénéité qui existe au sein d’une population clonale entraine l’émergence d’états cellulaires transitoires et régulés de pré-résistance dans la population. Ces états cellulaires entrainent des modulations de l’expression de nombreuses molécules causant une réponse partielle de la population traitée et limitant l’efficacité des thérapies anticancéreuses.

Depuis l’émergence des nouvelles technologies « single cell », il est maintenant possible d’étudier l’hétérogénéité en étudiant chaque cellule de la population tumorale. Les techniques transcriptomiques permettent d’étudier le transcriptome de chaque cellule et d’observer l’hétérogénéité préexistante ainsi que les schémas transcriptomiques qui ont permis d’en déduire l’existence d’états cellulaires dans la population. Il est même possible actuellement en employant des techniques comme le CyTOF, d’analyser en résolution « single cell » le niveau protéique et les modifications post-traductionnelles d’acteurs moléculaires impliqués dans l’activation de voie de signalisation. De plus, l’analyse en « single cell » des cellules traitées par un agent chimique a permis d’observer la réponse génique induite par le composé et de comprendre les mécanismes moléculaires de la résistance mise en place. Cependant toutes ces techniques ne permettent pas d’étude dynamique car elles requièrent la destruction de la cellule afin de procéder à la mesure finale.

L’imagerie dynamique permet quant à elle de suivre une activité enzymatique, ou encore une relocalisation cellulaire pour chaque cellule dans le temps. C’est par cette méthode qu’il a été montré qu’il existait une forte hétérogénéité d’activation de la caspase 8 dans les cellules d’une

population traitées par TRAIL et qu’il existait un seuil propre à la lignée d’activité à atteindre afin de déclencher l’apoptose.

L’hétérogénéité de réponse à TRAIL de la population est donc due à une hétérogénéité d’activation de la caspase-8 entre les cellules, elle-même due à l’hétérogénéité d’expression génique retrouvée dans la population clonale. Cette hétérogénéité est difficile à analyser car il est impossible de déterminer quels sont les cellules se trouvant dans un état de pré- résistances/sensibilités jusqu’à leurs réponses cellulaires. Les cellules mourantes ne peuvent alors plus être analysées dû à la dégradation de leurs contenus cytoplasmiques, et les cellules survivantes sont reprogrammées masquant l’origine moléculaire de la pré-résistance dû à l’induction génique de la résistance adaptative.

Les acteurs moléculaires responsables des états cellulaires de pré-résistances à un traitement ne peuvent donc pas être criblés. Les études « single cell » actuelles qui étudient les états cellulaires sont des études corrélatives, où un acteur moléculaire déjà connu pour inhiber la voie (ou accorder la résistance) est recherché dans la population afin de déterminer si son expression est hétérogène, corrélé à la résistance ou encore si d’autres gènes sont coexprimés en fonction du gène cible.

Un moyen qui permettrait d’étudier les états cellulaires ainsi que les gènes différentiellement exprimés qui participent à l’hétérogénéité de réponse à un traitement serait de pouvoir prédire la sensibilité des cellules au traitement. Cela permettrait de les analyser et de connaitre les profils de pré-résistances avant la reprogrammation génique induite par le traitement et aussi de déterminer les profils de pré-sensibilités avant la mort cellulaire.

Etudier ces états cellulaires et les gènes impliqués dans la pré-résistance permettrait de prédire la sensibilité au traitement de la population en fonction des profils transcriptomiques retrouvés dans les cellules. Afin de trouver une méthode permettant l’analyse de l’origine moléculaire de la pre-sensibilité et résistance au traitement TRAIL, nous avons émis hypothèse que l’activité caspase-8 pouvait permettre de prédire la sensibilité de la cellule pour le traitement en cours. Les travaux de J. ROUX et al ont montré que l’activité de la caspase-8 initiatrice était déterminante de la réponse cellulaire lors d’un traitement TRAIL. L’initiation de l’apoptose par la caspase-8 est un processus qui se pourrait être suffisamment précoce afin de permettre de discriminer pour une partie de la population leurs destins cellulaires avant une induction génique. Par des techniques de séquençages en single-cell sur les cellules prédites sensibles ou

résistantes, nous pourrions alors étudier l’origine moléculaire de la pré-résistance aux traitements TRAIL :

Quels sont les facteurs moléculaires responsables de la résistance transitoire à l’apoptose induite par TRAIL dans les cellules survivantes ? Ce contexte cellulaire induit ne pourrait-il pas sensibiliser ces cellules à la nécroptose ?

L’hétérogénéité de réponse des cellules au TRAIL entraine donc des états accordant la résistance à des cellules provenant d’une population normalement sensible : les cellules survivantes au traitement TRAIL sont reprogrammées et développent une résistance transitoire pour les traitements TRAIL suivants en plus de devenir plus agressives et invasives. Cette résistance transitoire est caractérisée par une surexpression de gènes anti-apoptotiques tels que FLIP et étonnamment semble indépendante de la voie NF-κB. La voie NF-κB est bien transduite lors de traitement TRAIL et a déjà été montré comme participant à la résistance cellulaire au TRAIL, notamment en induisant l’expression de FLIP. Cependant il a aussi été montré que la surexpression de FLIP et l’inhibition de la voie apoptotique permettait aussi de favoriser la nécroptose. La nécroptose est aujourd’hui étudiée afin de contourner les résistances à l’apoptose de cellules cancéreuses, en plus de permettre une mort plus immunogène. Il a été montré que des cellules tumorales résistantes à la cisplatine ou au TRAIL étaient sensibles à la nécroptose. Cependant il n’a encore jamais été observé s’il était possible de contourner la résistance transitoire au traitement TRAIL en employant des traitements. De même qu’il n’a pas encore été déterminé si des traitements nécroptotiques pouvaient aussi induire une résistance transitoire tout comme les traitements apoptotiques par TRAIL.

Au vu de ces éléments, l’objectif de ce projet a été de déterminer quels sont les facteurs moléculaires responsables de la mise en place de la résistance transitoire au traitement TRAIL. TRAIL pouvant aussi induire les voies non-canoniques de NF-kB et des MAP Kinases, toutes deux sous le contrôle de TAK1, nous allons observer lors de co-traitements par TRAIL avec des inhibiteurs pharmacologiques des différents facteurs de la voie non canonique de survie s’il est possible de réprimer la mise en place de la résistance. Nous avons émis l’hypothèse que la résistance à l’apoptose induite par le traitement TRAIL pourrait sensibiliser les cellules à la nécroptose induite par TRAIL, normalement inhibée durant l’induction apoptotique.