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Objectifs de la stratégie d’inclusion

CHAPITRE I : DE LA MIXITÉ SOCIALE À LA COHABITATION INTERETHNIQUE

CHAPITRE 4 : LA CITÉ DE L’ACADIE, UN PROJET DE MIXITÉ SOCIALE PROGRAMMÉE

4.1.1 Objectifs de la stratégie d’inclusion

De prime à bord, la Stratégie constitue, comme nous l’avons mentionné plus haut, l’une des plus importantes initiatives de la Ville pour répondre à l’un des objectifs du Plan d’urbanisme de Montréal (2004-2014) favorisant la production de 60 000 à 75 000 nouveaux logements dont 30 % abordables, d’ici 2014. Il était ainsi question de répondre et de reconnaître la nécessité de produire des logements dédiés à des ménages possédant des revenus plutôt modestes ou très faibles.

La Stratégie poursuit trois objectifs principaux (Stratégie d’inclusion, 2005; 15) :

1) Rendre accessible une gamme diversifiée de logements dans les nouveaux projets résidentiels de plus de 200 unités d’habitations

2) Faciliter la construction de logements sociaux et communautaires 3) Encourager l’accès à la propriété abordable

Il importe de définir ce que l’on entend lorsqu’il est question de logement abordable. « Lorsque son loyer ou son hypothèque mensuels (incluant la taxe foncière et les frais de chauffage) ne dépasse pas la capacité de payer d’un ménage donné, soit de 30 % de son revenu mensuel brut ». (Stratégie d’inclusion, 2005). En 2011, selon l’enquête nationale auprès des ménages, plus d’un ménage sur trois (ou 259 960 ménages) consacrait 30 % ou plus de leur revenu pour se loger, correspondant à 34 % des ménages montréalais. La construction de logements abordables est donc considérée comme une mesure sociale s’adressant aux ménages et aux individus vivant des difficultés financières pour diverses raisons et ainsi leur permettre un accès au logement ou à la propriété abordables dans un contexte où les conditions de vie sont de meilleure qualité. Bien que le logement abordable soit souvent identifié au terme du logement social, nous voyons de plus en plus de logements privés « abordables » grâce aux programmes d’accès à la propriété de la ville.

La Stratégie se base et encourage notamment l’idée de la mixité sociale comme étant un « critère de développement durable […] Une façon d’éviter la ségrégation sociale et le cercle vicieux de l’appauvrissement [et] un moyen pour assurer le maintien des gens dans leur milieu de vie » (Stratégie d’inclusion, 2005, p.6). La mixité comme l’entend la Stratégie est souvent assurée par l’inclusion de logements sociaux et communautaires dans un projet privé, l’idée étant d’améliorer les conditions de vie dans le logement en diminuant la marginalisation de certaines couches de la population. Ainsi, ces projets de mixité sont le fruit de négociation entre instances municipales et promoteurs privés afin que ces derniers intègrent à leurs nouveaux projets résidentiels, 15 % de logements « sociaux et communautaires » ainsi que 15 % de logements privés à prix abordables. Ici, la mixité dans les nouveaux projets résidentiels représenterait pour la Ville de Montréal un moyen efficace de briser l’isolement social et la stigmatisation de la pauvreté à l’échelle de la ville, des quartiers et des îlots résidentiels montréalais. Par ailleurs, la Stratégie visait d’une part les ménages modestes à faibles ou très faibles revenus et d’une autre part, les ménages éprouvant des difficultés à se loger dans le

marché privé du logement (Stratégie d’inclusion, 2005, p.2). Il s’agissait de répondre à une demande de diversité résidentielle en offrant une gamme diversifiée de logements sur un même site.

Ainsi, les promoteurs immobiliers se sont joints aux organisateurs municipaux afin de réaliser des projets où l’offre résidentielle serait de forme plus variée afin de répondre aux besoins, tout aussi variés, des citoyens de la ville de Montréal. Depuis plus de 10 ans, cette stratégie va de bon train et signifie une réussite en matière de logement abordable et de mixité sociale aux yeux des organismes communautaires et de la ville de Montréal. En effet, un premier bilan des avancements de la Stratégie a été publié en 2007 (Stratégie d’inclusion, 2007). Dans ce bilan, on affirme que les objectifs avaient été dépassés en un peu plus d’un an. En 2006, on comptait déjà que 39,4 % de nouveaux logements abordables auraient vu le jour dans les nouveaux projets résidentiels de la Ville de Montréal. Depuis l’adoption de la Stratégie en 2005, la Ville de Montréal aurait maintenant une pratique d’inclusion et de mixité propre à elle où un nombre significatif de promoteurs privés et communautaires travaillent ensemble dès les débuts de la conception d’un projet afin d’y insérer des logements abordables. On compte d’ailleurs l’émergence de plus d’une dizaine de projets d’inclusion dont notamment la rénovation des places l’Acadie et Henri-Bourassa.

Somme toute, la Stratégie agit directement sur l’équilibre social de la Ville, mais ne correspond qu’à un des éléments mis en place agissant sur l’habitat à Montréal (Bélanger et Morin, 2014). Bien qu’elle agisse comme outil de mixité sociale programmée, la Stratégie ne peut que difficilement être associée aux politiques françaises et états-uniennes dont nous avons parlé plus tôt. En effet, bien que participant à la déconcentration de la pauvreté, la Stratégie montréalaise diffère au niveau des moyens déployés (Bélanger et Morin, 2014). En effet, contrairement aux cas français, la Ville n’est pas le promoteur des projets et n’a pas de pouvoir coercitif afin d’imposer une typologie de clientèle, il faut aussi savoir que la Stratégie est d’application volontaire et agit sur un nombre limité de nouveaux projets résidentiels (Bélanger et Morin, 2014). Afin d’orienter les projets issus de la Stratégie, la Ville s’est notamment appuyée sur l’étude de Dansereau et son équipe publiée en 2002.

4.2 La Cité de l’Acadie: post-revitalisation

Figure 4.1 : Disposition des bâtiments de la Cité de l’Acadie

Source : Plan d’utilisation du sol de Ville de Montréal, 2004. Réalisation : Christine Préfontaine-Meunier, INRS, 2015

Après des années de poursuites intentées par la Ville de Montréal contre le propriétaire des anciennes PAHB et de lutte de la part des résidents fortement appuyés par des organismes communautaires, le site des PAHB sera racheté par la SHDM ainsi qu’un promoteur privé, le Groupe Tyron. Le site sera complètement revitalisé et tous les bâtiments, sauf un, seront détruits. Le projet résidentiel revitalisé prendra le nom de Cité de l’Acadie. À cet égard, c’est en avril 2008 que la société d’habitation et de développement de la ville de Montréal (SHDM) fera un prêt de 14,8 millions de dollars au promoteur privé Groupe Tyron afin que ce dernier puisse faire l’acquisition des PAHB. En poste à cette époque, le maire Tremblay et son administration criaient victoire alors que la famille Sagman réalisait un généreux profit sur la vente de ses anciennes propriétés insalubres. Bien que la vente semble avoir été un geste bénéfique à plusieurs niveaux, l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ) trouve que la SHDM a dépassé son mandat en jouant au banquier