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I.

Objectifs

La réalisation de ce travail provient d’un questionnement du chercheur intervenant quelques années auparavant : comment un médecin peut-il aborder sereinement la prise en charge d’un malade en fin de vie ? En effet, le monde de la fin de vie n’est pas propre à la science médicale et à sa technique. Il se développe aux confluents de nombreuses disciplines qui dépassent les connaissances enseignées à un médecin. C’est un monde rempli d’émotions, d’ambiguïtés et de paradoxes qui permet d’entrevoir certaines considérations sociales et politiques touchant l’ensemble du champ médical.

L’objectif ici sera alors d’entrevoir la complexité du monde de la fin de vie afin de déterminer les éléments pouvant contraindre le médecin dans sa pratique.

Les données utilisées ici sont issues de deux travaux distincts.

Le premier est un mémoire de Master 2 de Sciences humaines et sociales réalisé en 2016-2017 par l’apprenti-chercheur (Master 2 mention Santé – Parcours Soin Humanité Société, au sein du département de Sciences humaines et sociales de la faculté de médecine de Montpellier, dirigé par le Pr Laurent Visier). Son objectif était de déterminer la trame de la réflexion médicale conduisant à la décision finale en fin de vie et les arguments participant à la délibération.

Le deuxième est le mémoire de DES de Médecine générale de l’apprenti-chercheur réalisé en 2019-2020. L’objectif était d’étudier l’évolution du jeune médecin généraliste au sein de ce monde.

Ce travail de thèse ne consiste pas en une simple compilation de deux travaux. Elle résulte d’une prise de recul et d’un retour aux problématiques initiales après maturation de la réflexion et des résultats initiaux. Il s’agit ainsi d’une synthèse permettant un croisement de réflexions. Nous tenons à rappeler ici qu’il ne s’agit pas de cartographier les pratiques ni de se prononcer pour ou contre l’euthanasie.

Par ailleurs, pour clarifier notre propos, rappelons la définition de la « fin de vie » du Ministère des Solidarités et de la Santé : la « fin de vie » désigne les derniers moments de vie d’une personne arrivant en phase avancée ou terminale d’une affection/maladie grave et incurable.

II. Méthode

1. L’approche qualitative

Selon l’objectif de ce mémoire, une méthode qualitative a été employée. La souplesse de son approche en fait sa force, permettant d’adapter la procédure de recherche au cours de l’étude. (20) Le protocole de recherche n’est pas construit a priori laissant sa place au raisonnement inductif fondateur de cette méthode. Il s’agit d’une « découverte de la théorie à partir des données ». (21) Nous avons employé la technique de l’entretien semi-directif avec une trame d’entretien flexible et plastique, utilisée davantage comme un guide, un mémento, permettant à l’entretien de suivre sa « dynamique propre ». (22)

2. Les interlocuteurs et les entretiens

Pour la première vague d’entretiens, notre pool d’interlocuteurs était constitué de douze médecins. Six d’entre eux pratiquaient l’anesthésie-réanimation en service de réanimation adulte du CHU (dans deux établissements différents). Les six autres exerçaient les soins palliatifs ; quatre travaillaient dans une USP (Unité de soins palliatifs) de clinique, une dans une USP de CH et une au sein d’une UMSP (Unité mobile de soins palliatifs) de CHU. Tous les entretiens ont eu lieu sur la commune de Marseille. Ces entretiens se sont déroulés entre les mois de février et de juin 2017. Ils ont toujours été réalisés sur le lieu d’exercice du médecin interrogé. Les entretiens ont duré entre 39 minutes et une heure 31 minutes, soit une heure en moyenne.

Date Agea Sexe Durée (min) Spécialité / Lieu d’exercice 1 02-02-17 53 H 52 USP en clinique 2 06-02-17 30 F 46 Anesthésie-réanimation au CHU 3 14-02-17 42 H 57 Anesthésie-réanimation au CHU 4 01-03-17 55 F 91 USP en CH 5 17-03-17 30 F 48 Anesthésie-réanimation au CHU 6 20-03-17 48 H 39 Anesthésie-réanimation au CHU 7 20-03-17 49 H 56 Anesthésie-réanimation au CHU 8 27-03-17 X F 59 USP en clinique 9 02-06-17 43 H 61 USP en clinique 10 12-06-17 28 F 70 USP en clinique 11 15-06-17 45 F 88 EMSP au CHU 12 27-06-17 40 F 57 Anesthésie-réanimation au CHU

Par ailleurs, le 4 mai 2017, nous avons réalisé un entretien téléphonique avec M. Alain Claeys, alors député socialiste de la première circonscription de la Vienne. Il a été corédacteur de la loi du 2 février 2016 ouvrant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie, avec M. Jean Léonetti. Il nous a accordé un entretien de 19 minutes. En raison de problèmes techniques lors de l’enregistrement, cet entretien n’a pas été retranscrit en totalité. Des notes ont été prises pendant et directement après l’enregistrement.

Pour la deuxième vague d’entretiens, la population cible était constituée de médecins généralistes exerçant une pratique libérale depuis moins de 5 ans. Nous avons réalisé 9 entretiens entre novembre et décembre 2019. Leur durée moyenne était de 31 minutes. Nos interlocuteurs exerçaient tous dans un milieu urbain.

Date Agea Sexe Durée (min) Type d’activité

13 26-11-19 31 H 36 Remplaçant / Cabinet seul 14 29-11-19 30 H 33 Collaborateur / Cabinet de groupe et

permanence

15 02-12-19 32 H 32 Remplaçant / Permanence, antérieurement cabinet seul 16 03-12-19 32 H 23 Installé / Cabinet de groupe, SOS

médecin

17 03-12-19 31 F 35 Installée / Cabinet seule 18 10-12-19 31 H 23 Installé / Cabinet de groupe 19 10-12-19 32 H 33 Installé / Cabinet de groupe 20 11-12-19 30 H 35 Remplaçant / Cabinet de groupe 21 23-12-19 31 H 31 Remplaçant / Cabinet seul

Pour tous les entretiens, nous avons utilisé une trame d’entretien flexible. Les entretiens ont été enregistrés sur un magnétophone puis retranscris mot à mot à l’aide du logiciel de reconnaissance vocale Dragon NaturallySpeacking.

Dans les retranscriptions, l’intervention du chercheur sera précédée de la mention « C. », et celle du médecin interrogé de la mention « M. ». L’anonymat a été respecté.

Au total, nous disposons de 21 entretiens représentant 16h45min d’enregistrement. L’ensemble des retranscriptions est disponible en annexe.

3. Limites et biais

Les biais présents dans ce travail sont ceux inhérents à la méthodologie qualitative.

Tout d’abord, l’apprenti-chercheur lui-même peut constituer un biais, à travers son expérience et ses idées propres concernant le sujet du travail. Dans notre cas, l’apprenti-chercheur est médecin et peut ainsi accéder au dialogue médecin-médecin. Son imprégnation du milieu étudié peut conduire à une restriction de l’angle d’analyse. Cependant, en essayant d’adopter une

posture anthropologique et un point de vue profane, l’immersion objective au cœur d’un terrain de recherche auquel on appartient est possible.

La méthodologie qualitative permet au chercheur de bénéficier d’une certaine liberté d’approche. Il n’est pas question de reproductibilité ou de significativité. Et c’est cette liberté qui constitue à la fois la limite et la force de ce type d’étude.

4. La rédaction de la thèse

Ce travail ne sera pas présenté sous la forme classique IMRED. Pour plus de clarté, nous le diviserons en quatre parties distinctes. La première est issue de données tirées des entretiens du mémoire de master 2, et la deuxième de celles tirées des entretiens du mémoire de DES. Nous utiliserons l’ensemble des entretiens pour les deux dernières parties.

Il n’y aura pas de partie consacrée à l’état de l’art. Chaque partie comportera des références bibliographiques en lien avec les interventions de nos interlocuteurs.

Dans le corps de ce travail, nous userons largement des extraits d’entretiens qui constituent nos données.

Si l’extrait cité est suffisamment long, nous le présenterons en italique sous forme de paragraphe, suivi du numéro de l’entretien (E1, E2…E21) et de la spécialité du médecin interrogé (« SP » pour soins palliatifs ; « AR » pour anesthésie-réanimation ; « MG » pour médecine générale). Si l’extrait est court, il pourra être intégré directement au corps du texte, en italique, suivi du numéro de l’entretien et de la spécialité du médecin interrogé.

Première partie - La multiplicité des éléments intégrés