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Cycle de fusion partielle d’une source mantellique hétérogène : étude géochimique d’un profil transverse à l’axe de la dorsale

1. La dorsale Centrale Indienne à 19°S : contributions scientifiques des

2.2. Objectifs de cette étude

L’étude présentée dans ce mémoire sur les basaltes prélevés le long du profil nord est complémentaire des études menées par Nauret et al. (2006) et Le Faouder (2006) puisqu’elle se focalise sur les variations chimiques des laves transversalement à l’axe de la CIR et non plus longitudinalement. Les laves prélevées le long du profil nord montrent une plus grande variabilité géochimique que les laves axiales de la même région (Murton et al., 2005 ; Nauret et al., 2006), reflétant la présence de termes significativement plus enrichis en éléments

incompatibles (MORB-E et basaltes alcalins) et en 87Sr/86Sr. L’étude présentée dans ce

mémoire se fonde principalement sur les traceurs du degré d’enrichissement chimique des laves, i.e. leurs rapports en éléments incompatibles (majeurs : K/Ti, ou en trace : La/SmN) et leurs rapports isotopiques. Ces rapports, qui ne sont pas modifiés lors de la cristallisation fractionnée de liquides basaltiques, permettent en effet de caractériser l’hétérogénéité de source et/ou les variations des modalités de fusion partielle.

Afin de contraindre l’évolution temporelle de ces processus pétrogénétiques à l’axe de la CIR vers 19°12’S, la répartition géographique, le long du profil, du degré d’enrichissement des laves a été caractérisée. En effet, si les laves échantillonnées sur les deux flancs de la dorsale ont été générées par le même système magmatique axial avant d’évoluer sur des plaques indépendantes, les variations chimiques observées doivent se répartir symétriquement de part et d’autre de l’axe. Cette hypothèse ne pouvait être vérifiée qu’après que la navigation du Nautile n’ait été corrigée et que les échantillons n’aient été exactement positionnés le long

Chapitre D : La dorsale Centrale Indienne I- Introduction

du profil. Les résultats de ce positionnement, réalisé par Mitsuko Kitazawa, n’ont été disponibles que tardivement (février 2006), retardant l’interprétation des variations chimiques observées le long du profil nord. Ces résultats suggèrent à première vue une symétrie des variations chimiques de part et d’autre de l’axe (Fig. D1-3), celle-ci entérinant la connexion entre la distance d’affleurement vis-à-vis de l’axe et l’âge relatif de mise en place des laves, ce qui est compatible avec les observations géologiques réalisées lors des plongées et avec la répartition des micro-anomalies magnétiques (Kitazawa, 2006). Cette répartition régulière des compositions le long du profil nord (Fig. D1-3) suggère en outre une fluctuation à première vue périodique des processus pétrogénétiques impliqués dans la genèse des laves.

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Deux modèles peuvent être envisagés afin d’expliquer la fluctuation temporelle de l’enrichissement en éléments incompatibles des laves. Ces modèles diffèrent en fonction du rôle respectif accordé à l’hétérogénéité de source et à une variation du taux de fusion. Le premier modèle considère que les différences d’enrichissement en éléments incompatibles des laves reflètent la fusion à taux constant de deux sources mantelliques distinctes (chimiquement et/ou minéralogiquement) mais intrinsèquement homogènes. Dans ce cas, la variation des compositions chimiques le long du profil nord reflèterait l’échantillonnage successif au cours du temps de l’une ou l’autre de ces sources et impliquerait la présence sous la dorsale d’un manteau rubané avec des hétérogénéités de taille supérieure à la zone de fusion.

Le second modèle s’appuie sur l’hypothèse d’une covariation de la nature de la source mantellique et du taux de fusion, le processus de fusion partielle étant à l’origine même du mélange des composants mantelliques (modèle de mélange induit par la fusion ; Niu et al., 1996 et 2002). Le composant enrichi est dispersé aléatoirement au sein des péridotites appauvries et la taille de ces hétérogénéités chimiques est alors inférieure à celle de la colonne de fusion. Le composant enrichi, de part ses caractéristiques chimiques et/ou minéralogiques, a une température de solidus plus faible que les péridotites appauvries environnantes et sa fusion partielle s’initie dans un domaine de pression-température n’autorisant pas la fusion des péridotites appauvries. La composition chimique et la minéralogie du composant enrichi contrôlent donc la composition des premiers incréments de liquide. Puis, une fois que la fusion des péridotites appauvries débute, la productivité magmatique du composant enrichi diminue (où même s’annule ; Smith et al., 2003) et sa signature chimique est progressivement diluée par celle des liquides plus appauvris issus de la fusion des péridotites environnantes.

La forte variabilité des compositions isotopiques et la répartition spatiale de ces compositions le long du profil nord montrent que la nature de la source mantellique participant à la fusion partielle varie significativement dans le temps. Afin de trancher entre les deux modèles précédents, le problème est donc de déterminer si une variation du taux de fusion est associée à cette hétérogénéité de source. En effet, la plupart des indices chimiques traditionnellement utilisés pour contraindre le taux de fusion (e.g. rapports d’éléments en trace

d’incompatibilité différente, Na8 ; Langmuir et al., 1992 ; Zou et Zindler, 1996) sont

également affectés par une variation de la nature de la source mantellique. L’article qui suit (Chapitre D-II) s’appuie donc sur une méthode originale afin de tenter de caractériser le rôle respectif de ces deux mécanismes dans la pétrogénèse des laves du profil nord. L’approche présentée nécessite dans un premier temps de contraindre les rapports isotopiques 143Nd/144Nd

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ainsi que les teneurs en Sm et Nd des composants mantelliques impliqués lors de la fusion. La réflexion ainsi menée sur la nature du manteau sous la dorsale CIR à 19°S vient en outre alimenter le débat quant à l’éventuelle interaction point chaud-dorsale à ces latitudes.

Chapitre D : La dorsale Centrale Indienne II- Cordier et al. (soumis à EPSL)

Soumis à EPSL le 26 septembre 2006

II- Cycle de fusion partielle d’une source mantellique hétérogène : un profil