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CHAPITRE 5 : DISCUSSION

5.2 OBJECTIF 2: EFFETS DES CARACTÉRISTIQUES FAMILIALES SUR

COMPORTEMENTS ALIMENTAIRES ENFANTINS

Le lien entre la participation parentale et les comportements alimentaires des enfants est modéré par la langue du répondant, le nombre d’enfants à la maison, l’âge et l’opinion du parent sur la nécessité que l’enfant sache faire à manger. En effet, les caractéristiques familiales constituent une entité du microsystème décrit dans le modèle écologique de Bronfenbrenner (1979). Tel que démontré dans le cadre conceptuel de notre thèse, les composantes du microsystème peuvent influencer directement les comportements des enfants (selon l’interaction entre l’ontosystème et le microsystème), ou de façon indirecte en agissant sur la participation parentale (le mésosystème) qui influe, à son tour, les comportements alimentaires des élèves.

Du point de vue empirique, des auteurs ont montré que les conduites des parents ainsi que les caractéristiques psychosociales de ces derniers peuvent agir en tant que variables modératrices sur la résilience scolaire des enfants (Reynolds et al., 1996 In Larose et al., 2004). Nos résultats divergent toutefois de l’étude menée par d’autres chercheurs en sciences de l’éducation, qui n’a révélé aucun effet modérateur des caractéristiques familiales en lien avec les pratiques parentales et les résultats scolaires (Deslandes, Potvin et Leclerc, 1999). Contrairement à notre recherche, celle menée par Deslandes et al. (1999) est effectuée auprès d’adolescents, et les variables familiales examinées sont la taille de la famille, la structure familiale et le niveau socioéconomique. Les différences observées entre

les groupes de population visés, les caractéristiques familiales et les variables d’intérêt évaluées dans chacune des études, seraient les principales raisons qui expliquent la divergence entre nos résultats et ceux de Deslandes et al. (Ibid.). En effet, les facteurs familiaux auraient davantage tendance à influencer le lien entre l’implication parentale et les comportements des enfants dans les écoles primaires que dans les établissements secondaires fréquentés par des adolescents. Car en matière d’alimentation, à mesure que les enfants avancent en âge, l’influence familiale diminue en faveur d’autres relations sociales formées à l’extérieur du milieu familial (Rozin et Vollmecke, 1986). Notons par exemple l’influence des pairs sur la perception des normes alimentaires qui peuvent affecter à leur tour les comportements alimentaires chez les jeunes. Concernant la raison associée à la différence dans les variables d’intérêt traitées, Deslandes et ses collaborateurs (1999) se sont intéressés aux résultats académiques des enfants à l’école, alors que notre recherche évaluait les comportements alimentaires suite à l’exposition des élèves à un projet d’éducation à la nutrition. Les résultats scolaires et les comportements alimentaires sont chacun influencé par l’école et la famille, mais se fait à des degrés différents. En matière de nutrition, le milieu familial a davantage d’influence, car celui-ci est le premier et le principal environnement dans lequel les enfants développent et mettent en pratique les habitudes alimentaires (Birch et Davison, 2001; Davison et Birch, 2001), alors que quand il s’agit de résultats scolaires, le rôle de la famille est complémentaire à celui de l’école (Basaran, 2000). Donc, ces différentes raisons pourraient expliquer l’effet modérateur des facteurs familiaux dans notre étude.

Dans ce qui suit, nous examinerons l’effet modérateur de chacun des items qui composent les caractéristiques familiales dans notre étude.

Au regard de la langue de réponse au questionnaire, les résultats ont montré que l’association entre l’investissement du parent à la maison et le fait que l’enfant parle de ce qu’il a fait à son retour des ateliers, est davantage marquée chez les francophones. Les difficultés associées aux formes d’expression langagières, notamment le manque de

maîtrise de la langue, du vocabulaire et des normes de communication, constituent un obstacle important à la participation parentale (Basaran, 2000; Périer, 2005). Ces difficultés linguistiques des parents peuvent les empêcher de se positionner en tant que partenaires éducatifs, faisant ainsi obstacle à leur participation aux activités scolaires, qui, par la suite, limiteraient le développement de certains comportements souhaités chez l’enfant. Dans les activités de communication entre l’école et la famille, des enseignants soulignent des difficultés de communication associées à la maîtrise de la langue (Larivée, 2010). Du côté des États-Unis, Lahaie (2008) a démontré que les enfants de parents immigrants qui s’expriment en langue anglaise à la maison réussissent davantage en anglais et en mathématique, que leurs pairs qui ont des parents immigrants qui ne parlent pas cette langue à domicile. Tandis que Wong et Hughes (2006) soutiennent que les barrières associées à la langue, chez les parents immigrants, contribuent à réduire chez ces derniers la perception d’efficacité à aider leurs enfants à réussir à l’école.

Le nombre d’enfants à la maison a également un effet modérateur sur la relation entre la communication intermilieu et l’aide apportée par l’enfant dans la réalisation des repas. Cette association est davantage marquée chez les répondants qui ont un ou deux enfants. Dans la discussion des résultats du premier objectif, nous avons largement présenté le lien entre le nombre d’enfants à la maison et la participation parentale, de même que le développement de comportements.

La relation entre la participation à la maison et les connaissances et aptitudes culinaires des enfants, varie selon l’âge des parents. L’analyse du discours des répondants indique que l’association entre ces deux variables est davantage accentuée chez les participants âgés de 41 à 50 ans. Plusieurs travaux réalisés dans le domaine de la nutrition ont montré des différences dans les habitudes alimentaires en fonction de l’âge des individus (Delisle et al., 2009; Désilets et al., 2007; Kouris-Blazos, 2002). Par exemple, Delisle et ses collaborateurs (2009) ont observé que les personnes âgées de plus de 30 ans consomment plus de fruits et légumes, de produits laitiers, de poissons et de pain, alors que

les plus jeunes choisissent les viandes et les sucreries. De même, Kouris-Bazos (2002) a indiqué que les gens ont tendance à adopter des modes d’alimentation traditionnels au fur à mesure qu’ils vieillissent.

L’association entre l’implication à la maison et les connaissances et aptitudes culinaires des enfants, est plus marquée chez les participants qui estiment qu’il est nécessaire que leurs enfants sachent faire à manger. Ce résultat n’est guère étonnant, dans la mesure où les représentations que se font des individus d’un comportement constituent le principal facteur du développement et de l’adoption de ce dernier (Moscovici, 1961; Garabuau-Moussaoui, 2001). À titre d’illustration, le parent qui pense qu’il est utile que son enfant sache faire à manger, participera davantage à la maison afin de permettre à ce dernier de développer ses connaissances et aptitudes culinaires, comparativement à un autre qui soutient le contraire. Ceci se reflète dans notre étude par le fait que parmi les répondants qui ont déclaré avoir une participation à la maison, 86 % considèrent qu’il est nécessaire pour l’enfant de savoir faire à manger, contre 14 % qui soutiennent le contraire.

5.3 OBJECTIF 3: LIEN ENTRE LES MOTIFS DE PARTICIPATION DES PARENTS