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Il était une fois une orpheline de mère et sa marâtre qui la détestait à l’aversion. Cette fille qui s’appelait Nyankobwa ya Muhinya avait un grand troupeau de vaches admirables qui ne cessait de mettre bas de belles génisses. Par contre, le troupeau de son père menaçait de disparaître parce que tous ses veaux n’étaient que des taurillons. La marâtre en devenait quasiment enragée et finit par demander à son mari de substituer chaque fois leurs taurillons

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aux génisses appartenant à la fille. Et le mari ne tarda pas à recourir à ce stratagème.

Nyankobwa ya Muhinya s’en rendit aussitôt compte et en fut fort offusquée. Elle avisa donc sa marâtre : « Attends-toi à ma vengeance ; je te prendrai ce qui t’est cher ». Dans cette atmosphère tendue, les deux passèrent des jours à s’épier, bien que la marâtre ne voie pas directement ce qui pourrait lui être pris de plus cher. Elle se mit cependant à ses gardes.

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Un jour, Nyankobwa ya Muhinya était restée à faire la propreté de l’étable tandis que la marâtre avait laissé son petit enfant à la maison pour aller défricher une jachère où elle comptait ensemencer d’éleusines. Au moment où la fille offensée estima que son antagoniste allait venir apaiser sa faim après avoir tant travaillé, elle s’empara de l’enfant, le mit au dos et partit avec vers une destination inconnue.

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La mère qui arriva sur ces entrefaites remarqua que l’enfant n’était pas là et elle présuma qu’il s’agit d’un kidnapping orchestré par celle qui lui avait déclaré vengeance. Aussi se lança-t-elle à ses trousses. Et lorsque la marâtre voyait que la fille de son époux rencontrait des passants, elle se mettait à crier pour faire arrêter cette fille qui lui avait volé un enfant. Mais l’orpheline répliquait en chantant ainsi :

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Ne l’écoutez pas braves hommes, Nyankobwa ya Muhinya, Vous voyez là ma marâtre, Nyankobwa ya Muhinya, Qui dit à son mari, Nyankobwa ya Muhinya,

Son mari qui est mon père, Nyankobwa ya Muhinya Le troupeau de cette fille, Nyankobwa ya Muhinya,

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Ne met bas que des génisses, Nyankobwa ya Muhinya, À ses génisses substituons nos taurillons,

Nyankobwa ya Muhinya, Et à nous seuls les génisses, Nyankobwa ya Muhinya.

Annexe II : Contes constituant le corpus

Et moi de jurer, Nyankobwa ya Muhinya,

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Que je lui prendrai ce qui lui tient le plus à cœur, Nyankobwa ya Muhinya Pour l’emporter à la montagne de Kaganza,

Nyankobwa ya Muhinya, Qu’une femme escalade, Nyankobwa ya Muhinya

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Mais jamais n’en descend saine et sauve, Nyankobwa ya Muhinya.

Et les gens de lui témoigner leur compassion : « Va! continue ton chemin chère fille, elle t’a causé trop de peines.

Et la poursuite reprenait de plus belle, la fille devant, la femme sur ses talons, avec une

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grossesse avancée, sans oublier la faim qui la tenaillait.

De nouveau, cette marâtre voyait que la fille de son époux rencontrait d’autres passants et elle se mettait à crier avec tous ses efforts pour la faire arrêter. On l’arrêta.

En réaction, la fille qui se vengeait leur entonnait encore une fois sa chanson : Ne l’écoutez pas braves hommes, Nyankobwa ya Muhinya,

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Vous voyez là ma marâtre, Nyankobwa ya Muhinya,

Qui dit à son mari, Nyankobwa ya Muhinya, Son mari qui est mon père, Nyankobwa ya Muhinya Le troupeau de cette fille, Nyankobwa ya Muhinya, Ne met bas que des génisses, Nyankobwa ya Muhinya,

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À ses génisses substituons nos taurillons, Nyankobwa ya Muhinya, Et à nous seuls les génisses, Nyankobwa ya Muhinya. Et moi de jurer, Nyankobwa ya Muhinya,

Que je lui prendrai, Nyankobwa ya Muhinya

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Pour l’emporter à la montagne Kaganza, Nyankobwa ya Muhinya, Qu’une femme escalade, Nyankobwa ya Muhinya Mais jamais n’en descend saine et sauve,

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Nyankobwa ya Muhinya.

Et les gens de lui témoigner leur compassion : « Va! Continue ton chemin chère fille, Tu as trop souffert. Et la poursuite reprenait de plus belle, la fille devant, la femme sur ses talons, avec une grossesse avancée, sans oublier la faim qui la tenaillait.

Après des minutes de marche, Elles rencontraient d’autres gens et la même scène se

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reproduisait : la mère appelait à l’aide, une fois arrêtée par des passants, la fille en fuite entonnait son habituelle chanson pour leur confier ses malheurs, et les gens, compatissant à sa souffrance, la laissaient poursuivre son chemin. Il en fut ainsi à maintes reprises.

Finalement, éreintée, la fugitive arriva au pied de la montagne et en commença l’escalade sans souffler, la marâtre toujours sur ses traces. Arrivée presque au faîte de la montagne,

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exténuée, n’ayant pas non plus eu le temps de prendre le repas avant d’entamer son périple, de même que l’enfant qu’elle avait pris, la fille s’étendit et rendit l’âme d’inanition en même temps que l’enfant porté sur son dos. La marâtre, au milieu de la montagne, un enfant dans son sein et le ventre vide, la fatigue dans son corps et la rage dans son cœur, s’étendit et passa de vie à trépas.

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C’est ainsi que Nyankobwa ya Muhinya obtint sa vengeance.

Que je n’y périsse pas, qu’y périssent plutôt la marâtre de Nyankobwa ya Muhinya. Chantefable tirée des Ibitito collectées-anonyme, p. 13-14.

ANNEXE III : Fiche pédagogique utilisée pour didactiser les contes