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2. Les cellules souches pluripotentes d’origine embryonnaire

2.2. Le noyau de pluripotence

Avant de présenter les différentes cellules pluripotentes, il semble important d’introduire la notion de noyau de pluripotence. Ce noyau de pluripotence est commun à toutes les PSCs et permet de maintenir ces dernières en autorenouvellement et d’assurer leur pluripotence. Les premiers gènes à avoir été identifiés comme appartenant au noyau de pluripotence sont Oct4,

Sox2 et Nanog. Ils représentent le cœur de régulation du réseau de pluripotence et sont

exprimés par toutes les cellules pluripotentes observées à l’heure actuelle.

Oct4 pour Octamer-binging transcription factor 4 est également appelé Oct3 ou POU5F1 pour POU domain class 5 transcription factor 1. Oct3/4 est le gène codant un facteur de transcription à homéodomaine de la famille POU (Pict, Oct et Unc) et représente le facteur central du noyau de pluripotence. Son expression est strictement limitée aux cellules de l’embryon précoce comme les blastomères, les cellules de l’ICM et de l’Epi (Rosner et al., 1990), aux cellules germinales PGC et EG (Rosner et al., 1990; Schöler et al., 1990) ainsi qu’aux cellules ES (Okamoto et al., 1990). Dans ces différents types cellulaires, l’activation de Oct4 est contrôlée par différentes régions de son promoteur. La région distale de l’enhancer (DE) est active dans les cellules de l’ICM, les mESCs et les PGC alors que la partie proximale de l’enhancer (PE) est active dans les cellules de l’épiblaste post-implantatoire (Yeom et al., 1996).

Comme cela a été expliqué dans le chapitre précédent, dans l’embryon précoce Oct4 est nécessaire pour la mise en place de la pluripotence et la formation de l’ICM (Nichols et al., 1998). Dans les mESCs, Niwa et al. ont montré qu’un niveau d’expression précis de Oct4 était nécessaire pour assurer l’autorenouvellement (Niwa et al., 2000). En utilisant un système d’expression conditionnel, les auteurs ont montré qu’une réduction de moitié du niveau d’expression du gène Oct4 induisait une perte de la pluripotence et une différenciation des mESCs en trophectoderme. A l’inverse, une augmentation de seulement deux fois du niveau d’expression de Oct4 induit une différenciation en endoderme primitif et mésoderme.

Oct4 peut former des homodimères dont l’activité et les cibles peuvent être modulées par phosphorylation sur la Serine 229 et la Tyrosine 327 (Plath et al., 2009). Dans les cellules ES, Oct4 peut également former des hétérodimères avec les facteurs de transcriptions EA1-like

(Schöler et al., 1991) and Sox2 (Ambrosetti et al., 1997).

Sox2 pour SRY-related HMG-box (High Mobility Group) gene 2. Le facteur de transcription Sox2 a également été identifié comme étant nécessaire à la mise en place des

cellules de l’ICM (Avilion et al., 2003). Le KO de Sox2 n’est létal pour l’embryon qu’après le stade post-implantatoire car les ARNm maternels compensent provisoirement l’absence d’expression zygotique (Avilion et al., 2003). Lors de la dérivation de l’ICM d’embryon Sox2-/-, les cellules obtenues se différencient spontanément en cellules géantes du trophectoderme

(Avilion et al., 2003). Cette observation a été confirmée en utilisant des mESCs Sox2-/-(Masui

et al., 2007). L’hypothèse des auteurs pour expliquer ce phénomène est que Sox2 serait

responsable de l’activation de facteurs de transcription comme Nr2b2 (RXRβ), Nr5a2 et Nr5a1 (SF1), qui soutiennent et activent Oct4. L’absence de Sox2 entraînerait une baisse de l’expression de ces facteurs qui diminuerait en retour l’expression de Oct4 et induirait la différenciation en trophectoderme (Masui et al., 2007). Cette hypothèse est cohérente avec les observations faites par Niwa et al , où une diminution de moitié du niveau d’expression de Oct4 entraîne une différenciation des mESCs en cellules du TE (Niwa et al., 2000). A l’inverse, une augmentation de Sox2 d’un facteur 2 diminue l’expression de Oct4 et Nanog et induit la différenciation des mESCs en neurectoderme (Kopp et al., 2008).

En plus de soutenir l’activation de Oct4, Sox2 forme des hétérodimères avec Oct4 pour activer le réseau de pluripotence. Ainsi, la majorité des gènes cibles possèdent dans leur enhancer un double motif juxtaposé cis-régulateur HMG-POU (Oct4-Sox2). On retrouve ce double motif conservé chez tous les euthériens depuis 250 millions d’années (Rodda et al., 2005). Un simple espacement de ces deux sites d’accroche par insertion de paires de bases réduit fortement l’activation des gènes cibles par le complexe Oct4/Sox2 (Ambrosetti et al.,

1997). Ainsi, pour le promoteur de FGF4, l’ajout de 2 et 3 paires de bases réduit

respectivement l’expression du gène de 50% et 95%.

En plus de s’activer mutuellement, Oct4 et Sox2 activent Nanog, le troisième acteur composant le noyau de pluripotence (Rodda et al., 2005).

Comme Oct4, Nanog est un facteur de transcription à homéodomaine dont l’expression est également limitée aux cellules souches pluripotentes. Dans l’embryon, l’expression de Nanog est limitée aux cellules de l’ICM et permet la spécification des cellules de l’Epi (Chambers et al., 2003; Mitsui et al., 2003). En effet, dans l’embryon de souris Nanog-/-, toutes les cellules de l’ICM forment du PrE exprimant Gata4/6, au détriment de l’Epi (Mitsui et al., 2003). Dans les mESCs, Nanog est exprimé à un niveau élevé alors que son expression diminue lors de la différenciation. La surexpression de Nanog dans les mESCs permet le maintien des cellules à l’état indifférencié, et ce, même en absence de l’activation de la voie LIF (Chambers et al., 2003; Mitsui et al., 2003). A l’inverse, des mESCs Nanog-/- peuvent être maintenues en culture

(Chambers et al., 2007). Nanog n’est pas une cible directement activée par Stat3, et au vu de ces résultats semble agir en parallèle de la voie LIF. Cette idée est renforcée par le fait que Nanog partage de nombreuses cibles communes avec Stat3, l’effecteur principal de la voie LIF

(Bourillot et al., 2009).

Ces trois facteurs clefs s’auto-activent et s’activent mutuellement créant une boucle de contrôle positive. Ils composent le noyau de pluripotence et sont au cœur de la régulation de l’autorenouvellement et du maintien de la pluripotence dans l’embryon, ainsi que dans les ESCs. L’analyse bio-informatique ou par immuno-précipitation de chromatine, a montré que la majorité de leurs cibles sont redondantes (Boyer et al., 2005; Loh et al., 2006; Zhan et al., 2005). Ils activent de nombreux modulateurs qui permettent de maintenir les cellules à l’état indifférencié (Figure 10). Parmi eux, on retrouve d’autres facteurs de transcriptions soutenant la pluripotence (Stat3, Zic3, Rest et Hesx1) ainsi que des modificateurs épigénétiques (Smarcad1, Myst3 et Set) (Boyer et al., 2005; Loh et al., 2006). Le noyau de pluripotence intervient également dans l’inhibition de gènes impliqués dans la différenciation en endoderme (Isl1 et ATBF1), mésoderme (Myf5, Hand1) et ectoderme (Hoxb1, Pax6, Otx1) (Boyer et al., 2005).

En résumé, le noyau de pluripotence régule le réseau de pluripotence qui soutient l’autorenouvellement et réprime les inducteurs de différenciation.

Figure 10 : Le noyau de pluripotence.

Le noyau de pluripotence est composé de trois facteurs de transcription Oct4, Sox2 et Nanog qui s’activent mutuellement. Le noyau de pluripotence soutient l’autorenouvellement des PSCs en activant d’autres facteurs de transcription formant le réseau de pluripotence d’une part et en réprimant les gènes responsables de la différenciation dans les différents lignages d’autre part.

Facteurs de Transcription