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4. L’analyse des métaphores dans les textes journalistiques

4.1. Les journaux d’orientation gauche 1. Le Monde

4.1.2. Le Nouvel Observateur (L’Obs) 1. En 2015

a. « La prise d'otages au Bataclan vire au bain de sang. » (L’Obs, « Attentats à Paris », 2015) - La métaphore structurelle LA VIOLENCE/LE MEURTRE EST LE SANG par laquelle on visualise l’événement comme un bain de sang pour créer l’esthétisation d’un massacre.

b. « Ils étaient armés avec de gros fusils, j'imagine que c'est des kalachnikovs, ça faisait un boucan d'enfer. » (Ibid.)

- La métaphore structurelle par laquelle on projette le concept de l’enfer sur le concept du bruit que les fusils faisaient. Le concept d’Enfer biblique fait partie intégrante de notre culture et porte toujours la signification de quelque chose de diabolique, d’apocalyptique, de douloureux, etc.

c. «Paris a été frappé […]» (ibid.).

- La métaphore ontologique, notamment la personnification, par laquelle on conceptualise la ville de Paris comme une personne qui a été frappée, bien que Paris soit seulement l’endroit où l’événement s’est passé.

4.1.2.2. Après 2015

a. « C’est une personne vulnérable, il n’est pas prêt à affronter la réalité de ce qu’il a fait, ni la prison, qui l’attend. […] Il y a une fragilité psychologiqueen lui. […] Il faut utiliser cette vulnérabilité, c’est la faille dans laquelle il va falloir s’engouffrer. » (Deffontaines, 2016)

- Les métaphores dans la première phrase sont des exemples de la métaphore ontologique, notamment de la personnification, par laquelle on perçoit le concept de la réalité comme une personne à affronter. On peut aussi dire que cette « personne » aurait l’autorité sur celui qui doit l’affronter. Aussi le concept de la prison est-il présenté comme une personne qui attend l’assaillant.

- La deuxième phrase présente la métaphore ontologique L’ESPRIT EST UN OBJET, par laquelle on conceptualise notre psyché comme une chose qui peut être forte, faible, cassée, fragile, etc.

- Dans la troisième phrase, on trouve la métaphore ontologique par laquelle on peut utiliser la vulnérabilité de quelqu’un comme si elle était un objet. La deuxième expression métaphorique appartient à la métaphore structurelle UN PROCESSUS EST UNE FAILLE, par laquelle on projette le concept d’une faille dans laquelle on peut s’engouffrer sur le concept abstrait de processus.

b. « Beaucoup de points sontencore obscurs. » (Ibid.)

- La métaphore structurelle L’IGNORANCE EST OBSCURE/LA CONNAISSANCE EST CLAIRE, par laquelle on perçoit ce qu’on ne connait pas comme étant dans l’obscurité.

c. « Après, savoir dans quel état d’esprit ils étaient juste avant de commettre les attentats…

[…] Pour moi, ils ont tellement perdu toute forme d’humanité! » (Ibid.)

- La première phrase comporte une métaphore ontologique, on peut dire la personnification, par laquelle on conceptualise les pensées, la motivation, les idées et d’autres parties de l’esprit comme ayant différents états.

- La deuxième expression métaphorique est aussi une instance de la métaphore ontologique, car on conceptualise l’humanité de quelqu’un comme une entité qui peut avoir une forme et qu’on peut perdre. Cette métaphore sert à présenter les assaillants comme inhumains.

d. « […] des tatouages pour panser les plaies» (L’Obs avec AFP, 2017)

- La métaphore structurelle L’ESPRIT EST UN CORPS par laquelle on conceptualise des événements négatifs et marquants en termes des plaies physiques qu’on peut panser. Par cette métaphore, on souligne l’effet douloureux et violent des événements en question.

e. « Des dizaines de rescapés du 13-Novembre 2015 se sont fait tatouer pour se souvenir, porter le deuil, réapprendre à vivre. » (Ibid.)

- Les deux expressions appartiennent à la métaphore ontologique dans laquelle le deuil est un objet qu’on peut porter, et la vie est un processus qu’on apprend ou réapprend à faire.

f. « Après avoir été ‘ensevelie’ dans la fossedu Bataclan, Laura Levêque avait ‘l’impression de se balader avec des corps sur les épaules en permanence : autant l’inscrire’ sur la peau. A 32 ans, elle a ‘récupéré [son] corpset transformé l’horreur en beau’. » (Ibid.)

- Dans son témoignage, Laura Levêque, présente au Bataclan cette nuit-là, parle d’être ensevelie dans la fosse pour souligner le sentiment de la mort qu’elle avait comme une des survivants. Ensuite, elle décrit le sentiment comme une balade avec des corps. Cette métaphore, on peut l’appeler LES MORTS SONT VIVANTS, est assez appropriée pour le but d’esthétisation de l’événement, ainsi que pour la description d’une expérience très subjective.

- Dans la deuxième phrase, on trouve deux métaphores ontologiques. La première parle du corps qu’on peut récupérer bien qu’il soit toujours là, et la deuxième conceptualise les concepts opposés, l’horreur et le beau, comme deux entités qui peuvent se transformer l’un en l’autre.

g. « Quand on a été blessé ‘que’ psychologiquement, on a l’impression de ne pas être une victime parce qu’on ne porte pas sur nous les traces de notre présencece soir-là. » (Ibid.)

- La métaphore ontologique par laquelle on perçoit le concept abstrait de présence comme une entité qui laisse des traces sur nous. Ici, cette expression souligne le fait que les gens présents le 13 novembre sur les lieux des attentats diffèrent des autres gens qui n’étaient pas là.

h. « […] ‘malgré l’horreur de ce soir-là, il y a encore des belles choses à vivre’. » (Ibid.) - La première expression est un autre exemple de la liaison du concept d’horreur au 13 novembre 2015. La deuxième est une métaphore ontologique qui dit qu’on peut vivre les choses, notamment des choses belles.

i. « Comme s'il n'y avait, derrière le geste ignoble des terroristes djihadistes, aucun agenda politique, aucune motivation. Comme si ces attentats avaient été l'expression d'une forme de fatalité, tout simplement. » (Croissandeau, 2017)

- La première expression comporte une métaphore ontologique qui exprime notre conceptualisation des choses abstraites comme étant en relation physique avec nous ; ainsi, les motivations et les pensées des djihadistes en question peuvent être derrière le geste.

- La deuxième est aussi une métaphore ontologique, car on perçoit le concept de fatalité comme ayant une forme.

j. «Ecrire l'histoire d'un pays sur ses monumentssuppose pourtant qu'on accepte de regarder la réalité en face. » (Ibid.)

- La première expression appartient à la métaphore structurelle L’HISTOIRE EST UN LIVRE, et les pages du livre, dans ce cas, sont des monuments en France. On peut l’analyser en termes de son structure en disant que les fentes de PAGES dans le schéma de LIVRE sont remplies par MONUMENTS.

- La deuxième expression est une métaphore ontologique de la personnification. On perçoit la réalité comme une personne qu’on doit confronter, regarder en face.

k. « […] [S]ont là de réelles et salutaires préoccupations, en particulier dans un pays où le corps social a tenu le chocaprès les attaques […] » (ibid.).

- Cela est une double métaphore : la première est une métaphore ontologique LA SOCIÉTÉ EST UNE ENTITÉ PHYSIQUE, par laquelle on conceptualise la notion abstraite de société comme ayant une forme physique, qui dans ce cas est le corps. Puis, la deuxième métaphore est une métaphore ontologique par laquelle une société comme entité tient le choc, qui est en réalité une notion liée à l’esprit.

4.1.3. FranceInfo 4.1.3.1. En 2015

a. «Ce vendredi 13 novembre est frappé du sceau de l'horreur. » (« Attaque au Bataclan : une

‘situation’ », 2015).

- Double métaphore : la métaphore structurelle UN ÉVÉNEMENT EST UN SCEAU, par laquelle on conceptualise un événement comme un sceau qui marque une période donné.

On y trouve aussi la métaphore ontologique dans l’expression ce vendredi est frappé, car on conceptualise une période temporelle comme une entité physique qui peut être frappée.

b. « La froideur avec laquelle leurs crimes ont été commis » (La rédaction d’Allodocteurs.fr ; 2015)

- La métaphore ontologique LES ACTES CRIMINELS SONT FROIDS, par laquelle on conceptualise les actes criminels comme le meurtre, le vol, le viol, etc. comme étant froids, c’est-à-dire sans émotion, ce qui vient de la métaphore LES ÉMOTIONS SONT CHAUDES.

c. «Au-delà des morts et de la destruction, l'objectif des djihadistes est de semer la terreur, attiser les tensions, exploiter les peurs et semer le doutesur les réponses politiques pour faire vaciller un pays» ( « Envoyé spécial », 2015)

- La première expression est une métaphore ontologique par laquelle on conceptualise la mort et la destruction comme des entités physiques par rapport auxquelles une autre chose abstraite peut être en relation (au-delà, derrière, etc.).

- Les expressions qui expriment les objectifs des djihadistes appartiennent aux métaphores structurelles, notamment L’ESPRIT EST LE SOL, par laquelle on conceptualise l’esprit humain comme un morceau de sol dans lequel on peut semer quelque chose ou exploiter les « fruits ». Dans ce cas, le fruit, c’est la peur après les attentats.

- La dernière expression, vaciller un pays, est la métaphore ontologique par laquelle conceptualise un pays comme une entité qui peut être vacillée.

d. «Trois heures d'enfer au Bataclan» (Lutaud, 15/11/15).

-, Encore un exemple de la métaphore structurelle UNE EXPÉRIENCE NÉGATIVE EST UN ENFER, que l’on projette sur la notion temporelle des événements.

e. « […] [C]'est un enfer[…] (« Attaques de Paris », 2015).

- Un autre exemple de la métaphore structurelle UNE EXPÉRIENCE NÉGATIVE EST UN ENFER.

f. « […] [C]'est un cauchemar[…] » (ibid.).

- Comparable à la métaphore UNE EXPÉRIENCE NÉGATIVE EST UN ENFER, cette expression appartient à la métaphore qui lie une expérience négative au concept de cauchemar, d’enfer. Elle est basée sur l’expérience négative d’avoir un cauchemar.

g. « Interrogé par francetv info, Xavier Sarraute, responsable d'un bar à proximité, raconte avoir baissé les grilles de son établissement à l'intérieur duquel une vingtaine de ses clients attendaient avec angoisse la fin de ce cauchemar. » (Ibid.).

- Encore un exemple de la métaphore structurelle UNE EXPÉRIENCE NÉGATIVE EST UN CAUCHEMAR. Ici on souligne le fait que chaque cauchemar a sa fin.

4.1.3.2. Après 2015

a. «L'angoisse envahit Benjamin sans prévenir dans la rue, les transports ou au café. » (« Attentats du 13 novembre : la vie après », 2017)

- La métaphore ontologique, notamment la personnification, où un état d’esprit prend une forme humaine et envahit sans prévenir une personne réelle.

b. « Jamais le terrorisme en France n'aura brisé autant de destins. » (« 13-Novembre », 2017) - La métaphore ontologique par laquelle on conceptualise le concept de destin, c’est-à-dire le concept de la vie, comme une entité qu’on peut briser.

c. « Caroline Langlade, rescapée du Bataclan, veut ‘réparer les vivants’ ». (« Attentats du 13-Novembre : Caroline », 2017)

- La métaphore ontologique L’ESPRIT EST UN OBJET FRAGILE, par laquelle le concept d’un objet fragile est projeté sur le concept d’une personne, c’està-à-dire de son esprit, la psyché, les émotions, etc. Ici, cette métaphore souligner encore plus le fait que les rescapés sont traumatisés.

d. « J'avais peur qu'ils viennent pour terminer le travail[…] » (ibid.).

- La métaphore structurelle UNE ACTION EST UN TRAVAIL, et dans cet exemple on projette la partie finale d’un travail sur le concept de meurtre et de « mettre fin » aux vies des gens au Bataclan.

e. « Elle passera à travers l'aspect pénal, par le procès, elle passera à travers l'indemnisation, pour assurer un aveniraux victimes […] » (ibid.).

- Toutes les expressions appartiennent aux métaphores ontologiques où les concepts abstraits – l’aspect pénal, l’indemnisation, l’avenir – sont perçus comme des entités qui sont en relation physique avec nous.

f. « Mathieu Madenian au Bataclan : "Rire dans cette salle, c'est la meilleure des réponses"

aux terroristes » (Birenbaum, 2017).

- Cette expression appartient à la métaphore structurelle LES ACTIONS SONT DES QUESTIONS ET DES RÉPONSES. Alors, on perçoit l’acte des djihadistes comme une question posée au peuple, à laquelle le peuple réponde en riant. La métaphore employée ici souligne le fait que les actes des djihadistes étaient plutôt inexplicables aux gens qui ne savaient pas exactement comment en réagir. On peut dire que c’est une raison pour laquelle ils les ont donc interprétés comme des questions à répondre.

g. « Je ne vais pas m'adapter au calendrier de Daesh[…] » (ibid.).

- Ici, une simple métaphore structurelle, LES ACTIVITÉS SONT UN CALENDRIER, est employée pour montrer le refus d’accepter les plans et les idées des membres de Daesh.

Cette métaphore est utilisée pour envoyer le message au peuple que la vie publique et les spectacles de divertissement ne doivent pas cesser d’être organisés malgré les événements tragiques.

h. « Cela nous a rappelé que les années de paix étaient derrière nous » (« Mémoire d'Info », 2017)

- La métaphore ontologique dans laquelle le concept de période où il n’y avait pas de guerre est perçue comme une entité qui est derrière nous physiquement.

i. « Nous avons échappé aux guerres[…] » (ibid.).

- La métaphore ontologique, où le concept des guerres est conceptualisé comme une entité qui essaie de nous attraper et à laquelle on peut échapper.

j. « François Hollande au Bataclan : ‘face au terrorisme, l'humour est aussi une arme’ » (« VIDEO », 2017)

- Double métaphore : la première partie, face au terrorisme, est une métaphore ontologique où le concept de terrorisme est perçu comme une entité, ou une personne (dans ce cas on parlerait d’une personnification), qu’on peut confronter. La seconde partie utilise la métaphore structurelle LE TERRORISME EST LA GUERRE, qui est très souvent utilisée à cause de la relation réelle que le terrorisme a avec la guerre (par exemple, les témoignages disent que les assaillants eux-mêmes ont déclaré que les attaques étaient la réponse à la politique guerrière de la France en Syrie). Dans les articles journalistiques, le concept de GUERRE est souvent projeté sur le concept de RÉACTION. Ainsi, l’humour peut être une arme, la continuation libre des spectacles peut être perçue comme la défense où l’attaque.

k. « Après les attaques du 13 novembre 2015 qui ont fait 129 morts, l’onde de choc s’est propagée dans toute l’Ile-de-France. » (Ibid.)

- Encore un exemple de la métaphore structurelle UN ÉTAT EST UN MOUVEMENT ÉLÉCTRIQUE, liant le choc psychologique au concept d’énergie qui voyage en ondes.

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