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Introduction

Nous venons de décrire la dimension locale du centre commercial, nous en présenterons désormais la dimension anomale. Rappelons que sa position géographique est plutôt excentrée dans Vaulx-en-Velin. Le centre commercial se situe à l’extrémité nord-ouest de la ville et en fin de ligne de bus (C3). Néanmoins, en changeant d’échelle d’observation l’on constate que le pôle commercial se situe à mi-chemin entre le centre métropolitain lyonnais et la périphérie. Ainsi sa proximité avec, d’une part le boulevard périphérique, et d’autre part le contournement autoroutier est, le rend aisément accessible en voiture depuis les communes de seconde et troisième couronnes (voir annexe 5.0 : Situation de Vaulx-en-Velin au regard des principaux réseaux de transport). Cette première considération spatiale permet de confirmer un des effets du système urbain métropolitain qui bouscule les limites communales et permet de grandes mobilités (Bourdin 2005). Géographes (Berry, 1971), sociologues (Bordreuil, 1987), ou urbanistes (Devisme, 2001), expliquent qu’une centralité commerciale existe par sa structuration territoriale. Contenu de la situation géographique du centre commercial, il n’est donc pas étonnant de constater une consommation significative provenant d’autres villes puisque les réseaux de la mobilité métropolitaine le permettent.

L’accessibilité est une condition nécessaire, mais ne suffit pas pour qu’un pôle commercial se constitue en centralité. Le centre commercial doit également exister par son contenu (Mérenne- Schoumaker, 2003). Selon Nicolas Lebrun, les bases d’approche de la centralité résident dans l’accessibilité et dans l’attractivité (Lebrun 2003).

Plus qu’une polarité commerciale de quartier à la bonne santé économique, nous révèlerons les conditions qui érigent ce centre commercial en une offre métropolitaine centrale pour l’est de la métropole lyonnaise. Nous commencerons par rendre compte du niveau de fréquentation du centre et de l’étendue géographique de son attractivité. Nous verrons que cet ensemble commercial fonctionne sur des bases bien connues du merchandising (Moati, Lourdel et Jauneau 2010), par exemple vendre beaucoup pour compenser les faibles marges. En effet, cette offre propose des prix bas et un large choix de produits du quotidien. Elle nécessite alors d’être

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très diversifiée. On finira par présenter les faces sombres de ce modèle et les limites qui annoncent quelques fragilités.

5.1. Ancrage local et rayonnement

métropolitain

5.1.1. La participation du centre commercial

à la mixité fonctionnelle

Une première analyse spatiale à l’échelle du quartier montre les connexions entre les équipements locaux, l’offre sédentaire et le marché. La bibliothèque ouvre ses portes en période de marché de 9h00 à 12h30 le mercredi et le

samedi. Elle va ainsi générer jusqu’au marché un flux piéton continu sur le passage duquel se trouve le bâtiment-nord. Ce flux se compose de parents qui déposent leurs enfants à la bibliothèque le temps des courses. S’ajoute un public de baby-sitters qui fréquente l’établissement avec les enfants dont elles ont la charge, la bibliothèque endosse à ce moment le rôle de garderie. Par ailleurs, essentiellement à l’ouverture, quelques personnes âgées utilisent la bibliothèque le temps d’une pause pour lire un journal. L’école est un autre équipement qui génère des flux piétons et impacte considérablement la fréquentation du

marché. En effet, le mercredi, le passage le plus fréquenté n’est pas l’allée centrale du marché (celle des boucheries), mais plutôt celle qui donne accès au groupe scolaire Angelina Courcelles. Le mercredi, les forains qui se trouvent sur le trajet de l’école constatent unanimement l’effet du passage de cette clientèle sur leur chiffre d’affaires. Cet emplacement est d’ailleurs très recherché par les forains. L’analyse globale des flux montre également l’impact des locaux associatifs et de La Poste qui favorisent la traversée de l’espace central, et

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notamment l’accès du marché via un square pour enfants. Côté sud, un autre flux piéton se forme en reliant le marché et l’espace associatif Frachon. Là aussi avec deux possibilités : en passant par le chemin du Grand Bois et donc par le bâtiment commercial sud, ou bien en longeant la voie circulée. Les observations et le témoignage suivant confirment l’influence des structures locales environnantes sur la fréquentation du centre commercial.

Mercredi, on voit les vieux qui ne travaillent pas, les nounous. Les mercredis c’est difficile d’aller aux toilettes, le chemin de l’école est plein. Et le samedi ça cartonne.

[Forain]

Ainsi, les équipements et les lieux d’habitation alentour semblent accompagner la dynamique marchande pour créer un lieu composé, d’une part de points d’ancrage et donc d’échanges, et d’autre part, de circuit de circulation (Gourdon 2001). De manière plutôt inattendue pour une forme urbaine de grand ensemble, nous constatons que, loin d’une simple juxtaposition d’éléments, les commerces sédentaires, le marché et les équipements publics à proximité permettent ainsi d’entrevoir un assemblage dont chaque entité paraît alimenter l’autre. La forme urbaine traditionnelle ne serait pas la seule à rendre possible des interactions entre les fonctions de l’habitat, du commerce et des équipements de service. Or, rappelons qu’une large littérature a bien souvent considéré le grand ensemble comme structurellement incapable de générer cette mixité fonctionnelle positive (Jacobs 1961). L’introduction du commerce au cœur d’un grand ensemble paraît ici favorable à l’émergence de dynamiques sociales, urbaines et commerciales émanant des différentes fonctions urbaines.

5.1.2. Un marché générateur de

fréquentations

Les plus grandes fréquentations du centre commercial s’opèrent le mercredi et le week-end : les mercredis et les samedis matin par la présence du marché et le dimanche puisque le centre reste l’un des rares à proposer une offre complète en alimentaire ce jour-là107. Nous allons

désormais donner une mesure de la fréquentation en présence du marché, c’est-à-dire là où le centre accueille le plus de clients. Le marché du Mas du Taureau constitue à lui seul une offre commerciale majeure avec près de 200 étals108. Un forain qui arpente les marchés de l’Est

107 En France, 88% des personnes ayant un emploi dans le commerce de détail (artisanat compris) travaillent le

samedi ou le dimanche (Bodier, Vidalenc et Bourieau, 2011).

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lyonnais depuis 1998 explique : « Avec les Minguettes [quartier de la commune de Vénissieux] et celui du Mas du Taureau ce sont les deux plus forts en matière de chiffre d’affaires, hors marché aux puces [à l’entrée de Vaulx-en-Velin] qui est un marché privé, géré par une société privée alors que les autres ont un placier public ». D’autres commerçants partagent ce constat en comparant avec les marchés des États-Unis (Lyon 8e) et de Charpennes à Villeurbanne. (Voir

annexe 5.1 : Les principaux marchés de l’est lyonnais et leur localisation). Il est toutefois à noter que, durant quelques périodes de l’année, la fréquentation du marché faiblit. C’est notamment le cas pendant les vacances scolaires (été compris).

Lorsque le marché est présent, l’offre commerciale du Mas du Taureau compte 226 points de vente et une surface commerciale totale qui avoisine les quelque 10 000 m2. En nous appuyant

sur les structures d’accessibilité et de desserte, nous allons désormais mesurer l’intensité de la fréquentation durant ce moment fort de l’activité commerçante. Alors que le quartier est bien doté en parking (avec 14 plateformes de stationnement en libre accès et gratuites), il devient, les jours de marché, très difficile de stationner. À proximité immédiate du centre commercial, nous avons comptabilisé 300 places de parkings (voir les photographies de stationnement en période de marché ci-après). Rappelons que 36 % des ménages des quartiers QPV ne possèdent pas de voiture personnelle (enquête PPV, 2014) contre 17 % des ménages en moyenne pour la France entière (INSEE, 2014). Selon le CGET109, les habitants, et donc à fortiori les

consommateurs locaux, peuvent ainsi être considérés comme une clientèle captive (CGET, 2016). Ce taux de motorisation plus faible dans les grands ensembles populaires ne semble pas, au Mas du Taureau, préfigurer d’un fonctionnement autarcique de la consommation tellement les mobilités y sont importantes. Les travaux de Pauline Sylvestre (2017) vont dans ce sens, puisqu’elle a, dans ses travaux de doctorat, rompu avec la figure du consommateur populaire et captif.

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Par ailleurs, le centre est desservi par la principale ligne de bus de l’agglomération, le C3 avec ses bus articulés de 18m. Elle traverse l’agglomération d’est en ouest et transporte de 55 000 à 58 000 voyageurs par jour en semaine (TCL 2016). Sur la base d’un relevé de terrain réalisé au cours de trois samedis110, il en ressort que la ligne C3 dépose, en moyenne, 72111 personnes

toutes les huit112 minutes. Entre 08h et 12h30113, environ 33 passages alimentent un flux moyen

de 2 376 personnes. S’ajoutent trois autres lignes moins fréquentées, les bus 7, 37 et 52 qui relient respectivement Villeurbanne, le nord-ouest et le sud de la ville au centre commercial. Dans l’ensemble, les réseaux de transport métropolitain instaurent une complémentarité spatio- temporelle et tarifaire favorable aux déplacements des chalands (Soumagne 2014).

Enfin, les chemins piétons, très fréquentés toute la matinée donnent une mesure de l’attractivité du centre commercial. Les habitants du Mas du Taureau, de Vaulx-Village et du centre-ville se dirigent alors massivement en direction des commerces.

E. : Le samedi, qui fréquente le centre commercial ? C’est les gens qui travaillent.

E. : On m’a dit que le samedi est plus fort en général ?

Pour nous c’est le mercredi le plus fort. On vend de l’alimentation. Boisson, lait. etc. Sinon oui, c’est le samedi.

E : Pourquoi, le samedi marche autant ? Il y a pourtant une forte concurrence, avec des grands marchés et les grandes surfaces ? Et le mercredi beaucoup moins de concurrence, à part les États-Unis.

Le samedi le Mas est un des moins chers. Le mercredi à 11h30, c’est une vague, c’est fort. Il y a l’école en face.

[Forain alimentaire]

110 Les relevés entrepris, en début, milieu et fin de mois dont un samedi en période de vacances scolaires. 111 Une moyenne avec une valeur haute atteinte à 9h53 avec 93 voyageurs.

112 Toutes les 6 minutes les jours ouvrés.

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Une des expressions de cette centralité commerciale réside dans ces moments où l’offre sédentaire et temporaire cohabite et propose près de 10 000 m2 de surface de vente attirant un

public important constaté au travers des parkings complets, des bus continument bondés et aux chemins piétons très fréquentés.

5.1.3. Une chalandise d’ampleur

métropolitaine

Le centre commercial semble en capacité d’attirer un nombre important de clients provenant de sa zone de chalandise secondaire et au-delà. Notons que cette zone de chalandise secondaire est estimée à près de 3 000 ménages et que cette dernière empiète largement sur celles des autres polarités (notamment celles de Vaulx-Village et ses 45 commerces114 et du centre-ville et ses

42 commerces115).

114 Polarité située à 1,2 km à pied et à 1,5 km en voiture du centre commercial. 115 Polarité située à 1 km à pied et en voiture du centre commercial du Mas du Taureau

Photographies 18 à 21. Fréquentation du centre commercial du Mas du Taureau en période de marché

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L’exemple des auto-écoles et plus largement de l’offre destinée, essentiellement, à un public jeune paraît révélateur du pouvoir d’attraction du centre. Alors que les deux principaux lycées de la ville et que les écoles d’ingénieurs et d’architecture sont positionnés autour du centre- ville, ces lycéens et étudiants semblent privilégier le Mas du Taureau plutôt que l’offre toute proche du centre-ville. Une des auto-écoles du Mas du Taureau attire massivement ces étudiants du nord de la ville et a construit son expertise autour de ce public. Aujourd’hui, le gérant parvient également à attirer les étudiants du campus de la Doua (sur la commune de Villeurbanne) basé à près de 5 km de son local commercial116.

J’ai énormément d’étudiants, des étudiants TPE, de la fac, de la Doua et des IUT.

E : En proportion combien ?

80 % d’étudiants, ils se passent le mot. Les futurs ingénieurs se sentent en confiance avec moi ça se passe très très bien, ils me ramènent leurs copains de génération en génération et ils m’ont proposé un partenariat que j’ai accepté.

[Auto-école 2]

Nous dressons le même constat pour la restauration rapide. Les sandwicheries du Mas du Taureau attirent ce public jeune et mobile qui semble plutôt délaisser le centre-ville. Lycéens et collégiens117 du nord de la ville n’hésitent pas à se déplacer à pied pour se restaurer durant la

pause médiane :

E. : D’où viennent les clients ? J’ai des gens en dehors du Mas.

E. : Pourtant des snacks, il y en a de partout ?

Le bouche-à-oreille. De passage, ils ont vu que c’est bon, pas cher, et ils sont revenus.

[Snack 1]

Les membres des centres de loisirs et des clubs sportifs situés à 2,5 km (30 minutes à pied) se déplacent également pour consommer en groupe :

E. : D’où viennent les clients ?

Le personnel de la mairie et celui de Charlie Chaplin. Ils paient en chèque mairie, ils viennent ici. Les organisateurs sont financés par la mairie, ils

116 Ce type de client étudiant pourrait choisir une auto-école au plus près de son campus notamment pour les heures

de code.

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viennent ici. Pendant les vacances, il y a les centres sociaux qui viennent manger ici. Les clubs de foot qui viennent avec les gamins, avant ou après un match de foot.

[Snack 1] Nous l’avons constaté, la centralité commerciale du Mas du Taureau affiche une forte fréquentation. Elle attire notamment un public lointain et son aire géographique d’influence s’étend sur plusieurs dizaines de kilomètres. Nous on est délocalisé, on a beaucoup de clients de l’extérieur, regardez, j’ai des gens du centre, Chassieu, Vénissieux. Juste sur la lettre A, j’en ai dix qui ne sont pas du quartier.

[Salon de coiffure 1] C’est un secteur très prisé. Vaulx-en-Velin et géographiquement très bien placé, on est dans la première couronne. L’été, j’ai une clientèle qui vient de Miribel118, on est ouvert le dimanche et les jours fériés. On attire des

personnes de Villeurbanne, Rillieux, du département de l’Ain (de la commune de Beynost), voire même plus loin vers l’est. J’estime à 60 % la clientèle locale et 40 % la clientèle extérieure qui vient même de Vernaison [à 24 km du Mas du Taureau].

[Boucherie 1]

Le centre commercial constitue une offre particulièrement appréciée le temps d’une halte. Nous y avons rencontré quelques grands voyageurs qui ont la possibilité, au niveau du contournement de Lyon, de quitter l’autoroute pour une pause. Il est aussi fréquent d’y voir des randonneurs de passage qui se rendent au grand parc et à la réserve naturelle de Miribel Jonage119 ou des

artisans itinérants qui choisissent pour leur halte ce centre commercial.

On a des gens qui sont de passage vers Miribel surtout l’été. Ils prennent le café à 80 centimes.

[Supérette-boucherie]

Nous avons également constaté que les personnes qui ont quitté ce quartier reviennent pour consommer, notamment pendant le marché. En effet, certaines personnes relogées dans le cadre de la rénovation urbaine ou simplement qui quittent le foyer familial continuent de fréquenter le centre commercial.

E : Qui sont ces gens qui n’habitent pas le Mas et qui viennent consommer ici ?

118 Un parc et site protégé de 2 200 hectares et un lac de 350 hectares. 119 Tares.

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On a beaucoup de membres d’une même famille qui ont quitté le cocon familial ou encore ceux qui profitent des fêtes pour revenir dans la famille.

[Boulangerie 2]

Les commerçants constatent des mobilités lointaines que ce soit pour des produits de consommation quotidienne (comme le pain) ou moins fréquente (comme les lunettes) :

On estime que la clientèle que l’on touche sans pub est plus fidèle, moins volatile. Je sais faire une chalandise, estimer des parts de marché, ma zone de chalandise, c’est 20 km. Des gens viennent de très très loin. Et si je te montre mon panel client de ma zone de chalandise tertiaire, j’ai des gens qui font 50 km et ça va même jusqu’à 300 km pour un produit particulier, c’est extraordinaire. J’ai vu les élus et je leur ai dit le Mas du Taureau a un potentiel extraordinaire.

[Opticien] Ce sont des clients de l’extérieur qui viennent, pas trop de clients du quartier. La baguette ramène le client et le bus est très important, car il permet ça. J’ai un papi de 75 ans qui a déménagé à Vénissieux [à 13 km du centre commercial], jusqu’à maintenant il consomme son pain chez moi. J’ai des

clients qui ont déménagé à Villefranche [à 50 km], chaque samedi, il m’achète 15 baguettes pour la semaine, elle va les congeler. Ils ont gardé les habitudes, ils ont gardé leur attachement.

[Boulangerie 3] J’ai un Monsieur qui m’a ramené ses deux enfants, ils viennent de Givors. Ils viennent de Vénissieux, de Decines.

[Auto-école 1]

Le marché attire une clientèle anomale importante. Le pôle commercial devient une centralité pour les quartiers Est de Lyon et de Villeurbanne, mais aussi pour le grand-est de la métropole lyonnaise (Meyzieu, Décines, Bron, Chassieu, Genas, etc.). L’occupation des parkings et la forte fréquentation des lignes de bus montrent que la clientèle non résidente devient majoritaire. En revanche, quantifier précisément la part de la clientèle anomale des commerces sédentaires reste difficile. Les commerçants sédentaires rendent compte à travers quelques exemples d’un rayonnement de l’offre qui s’étend jusqu’à plusieurs dizaines de kilomètres sans pouvoir systématiquement le quantifier. Nous avons toutefois rassemblé les données recueillies lors des entretiens qui rendent compte d’une part significative de clients ne résidant pas dans le quartier du Mas du Taureau :

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Provenance de la clientèle hors marché Mas du Taureau Vaulx-en- Velin Métropole Pharmacie 90% 10 Boulangerie traditionnelle 90% 10% Auto-école bât. Sud 70% 30% Boucherie nord 60% 40% Coiffure Sud 60% 40% Épicerie exotique 50% 35% 15% Snack nord 40% 60% Snack Sud 35% 65%

Opticien (Chiffre d'affaires) 30% 70%

Auto-école Grand Bois 20% 80%

restaurateur 2% 98

Données issues des entretiens semi-directifs

5.2. Le flux, le prix et le choix : les

leviers de la vente en grand

volume

5.2.1. Grands volumes, faibles charges et

petits prix

Pour un même débit de vente, plus la surface de vente est réduite et plus les produits vendus doivent présenter une forte valeur ajoutée. De plus, si le produit demande une préparation particulière, le prix proposé en sera d’autant plus impacté et élevé. Le manuel de la distribution de Dayan (1992) rappelle ce fonctionnement du commerce traditionnel en opposition au commerce moderne proposé notamment par les grandes surfaces. En effet, au contraire du commerce moderne, le commerce traditionnel occupe le plus souvent des surfaces commerciales réduites (Thil 1966). Pour le commerce traditionnel, la stratégie consiste à vendre des petits volumes à forte marge, contrairement au commerce moderne qui va proposer de grands volumes à faibles marges. Les commerces traditionnels du Mas du Taureau ne s’inscrivent pas dans cette logique du « petit volume, forte marge », mais dans une offre « grand

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volume, faibles marges. ». Rappelons malgré tout que quelques produits échappent à cette logique, notamment certains produits d’importations, plus chers, et qui servent à attirer le client (ce sont les produits d’appel).

En effet, le centre commercial n’attire pas massivement le chaland extérieur pour ses produits à très haute valeur ajoutée ou rare. Le commerçant suivant explicite la catégorie des commerces qui captent des consommateurs attirés par les produits à faibles marges :

Le jeune actif ne consomme pas à Vaulx-en-Velin même s’il y habite.

E. : J’ai constaté un peu le contraire, je vois les générations suivantes, elles sont restées pas très loin.

En habitation, mais pas en consommation. Je parle du jeune actif classe moyenne ou pas.

E. : Qui consomme alors ?

C’est leurs parents. Des mamans et généralement qui élèvent leurs enfants